[Thème] - Mademoiselle Kostovak (et un de ses larbins)

Charisma trouvait déjà bien qu’elle appelle Damon par son prénom, il ne fallait pas non plus exagéré ! Dans la tête de la petite jeune fille, il y avait une limite bien définie entre ce qu’elle pouvait se permettre de faire, et ce qu’elle ne pouvait pas se permettre. Tutoyer c’était le début de la fin des bonnes manières. Même si cela devait lui donner un air encore plus hautain que sa froideur ne lui donnait déjà, Carry se refusait à tutoyer quiconque, même ses plus proches amis. Elle ne tutoyait que ses voix parce qu’elle avait s’en sentait très proche… étrange n’est-il pas ?

« Toujours pas Damon, vous savez que c’est contre mes principes. » Et puis ce n’était pas comme si c’était un handicap pour papoter en plus. La preuve puisqu’elle embraya direct sur le sujet de l’option de Taliesin. Elle ne cacha pas (à sa façon du moins) sa déception que son ami ne soit pas de l’option. Pour ce qu’elle en savait, Gaël non plus n’avait pas été sélectionné. Avec qui donc allait-elle se retrouver ? « A ce qu’on m’a dit j’aurais le don de prémonition. » Elle tapota sa tempe d’un air songeur, comme à chaque fois qu’elle réfléchissait intensément à quelque chose. « Les voix me disent le futur proche. » Revenant à la réalité, elle tripota sa cape soudainement très agacé que les membres de sa cour personnelle ne soient pas assez exceptionnelle pour la suivre à Taliesin. C’était insupportable pour une princesse aussi capricieuse de devoir se passer de ses serviteurs ! « Gaël n’y sera pas non plus, je vais être seule. » Dans cette simple phrase, en apparence anodine, Charisma rappelait qu’elle était la princesse et qu’ils étaient les larbins… hors là, ils faillissaient vraiment à tous leurs devoirs ! Il faudrait qu’elle trouve quelqu’un pour porter ses affaires parmi ceux de l’option, ou alors quelqu’un de Taliesin.

« Mon tuteur ne me laisserait pas le quitter. » Répondit-elle ensuite à l’aimable invitation de Damon. Ce n’était pas que l’idée n’avait pas un certain charme mais il fallait aussi se montrer réaliste « Ou plus simplement défaitiste » « Toi on ne t’a pas sonné. » Siffla entre ses dents Charisma d’un ton méchant. Elle n’était jamais aussi expressive que lorsqu’elle parlait à ses voix, mais il arrivait aussi très souvent que ce soit parce qu’elle se prenait le bec avec elle-même. Cela pouvait paraître bizarre puisque finalement les voix étaient seulement la manifestation de son subconscient mais cela ne faisait que prouver que Carry était rarement en accord avec elle-même. Un exemple : elle détestait l’espèce humaine mais à l’inverse, le silence et la solitude l’oppressait. Les voix lui disaient sans cesse de ne pas parler aux autres, surtout aux dangers potentiels mais la plupart du temps Charisma ne s’écoutait pas, tout en répugnant à le faire, elle côtoyait tout de même d’autres êtres humains. C’était mieux qu’être seule avec ses voix… qu’elle aimait bien ceci dit, mais qui parfois s’absentaient ou manquaient de répartis.

Tandis que le train démarrait, Carry leva les yeux un instant, encore une fois plongée dans ses pensées. « Je me demande… savez-vous à quelle vitesse nous roulons ? » Première question de l’année pour ce cher Damon. Il s’en sortait bien (si l’on peut dire), elle n’était pas trop farfelue celle-ci !

Charisma soupira mais garda ses répliques cinglantes pour elle. Elle essayait toujours d’être à peu près gentille avec sa Cour, histoire qu’ils restent fidèles et dociles. Oui, oui, tout était calculé. Il faut dire que Carry ne croyait pas spécialement en l’amitié, elle ne croyait même pas du tout en l’être humain. Comment le pourrait-elle ? Son père, son unique famille proche, l’avait vendu… Elle ne se souvenait que trop bien du jour où cela s’était passé, lui faisant perdre définitivement l’esprit. « Tu ne dois pas y penser. » Elle était bien d’accord, y penser ne servirait à rien. Elle savait très bien pourquoi elle repensait à son père, et ce n’était pas que parce qu’elle s’efforçait d’être gentille avec Damon.

« Je ne changerais pas d’avis Damon, ma façon de parler, c’est la seule chose qui me reste de mon père. » Son tuteur s’était arrangé pour qu’elle n’ait plus rien qui la raccroche à son passé. Elle se disait qu’il faisait sûrement ça pour son bien… toutefois, elle sentait imperceptiblement que ce n’était pas la raison principale. Bien sûr, elle détestait son père, mais elle ne voulait pas oublier leur filiation non plus, rien que parce que lui le voulait. Du moins c’est ce qu’elle croyait mais c’est un autre sujet… En tout cas, c’est son père qui parlait comme ça et Charisma l’imitait avec soin. Les bonnes manières… il y avait toujours tenu et à l’époque bénie où sa mère était encore en vie, il avait poussé sa fille à être comme lui. Elle s’y tenait. En plus, ça l’arrangeait puisque ça gardait cette précieuse distance avec les autres qui lui était vitale. Que des avantages autrement dit.

« Bien sûr, vous pensez bien que je me ferais une joie de tout vous raconter. En tout cas, je suis contente de pouvoir prouver à tout Poudlard que les voix sont réelles. » Pas qu’elle se sente offusquée de l’opinion qu’on avait d’elle mais elle ne cracherait pas sur un peu de reconnaissance. Surtout qu’elle était plutôt fière par nature même si moins hautaine que son comportement glacial aurait pût le laisser penser.

Par ailleurs, la voix principale, celle avec qui Carry discutait régulièrement comme avec un ami imaginaire qu’elle ne voudrait pas quitter, elle, elle était bien le fruit de son imagination justement. Mais Charisma ne s’encombrait pas des détails de ce genre. Elle avait décidé que ses voix étaient son pouvoir et elle comptait bien devenir excellente à l’option Taliesin pour tous le leur prouver ! Même si elle devait supporter d’être seule sans sa Cour là-bas.

« J’en doute. J’ai même entendu dire que cet idiot de Griffins y serait. J’espère que je ne serais pas en binôme avec lui ! » Mwahaha, c’est beau d’espérer ! Même si le visage de Charisma était toujours impassible, il suffisait de la connaître pour comprendre à quel point Axel la hérissait. Il était si… si… Elle ne trouvait même pas de mots pour définir ce qu’elle ressentait tellement il l’agaçait.

Elle se concentra sur autre chose, la vitesse du train, et sourit à Damon en guise de remerciement. « C’est rapide. Vous savez que j’ai pris le métro pour la première fois cet été ? C’était fort amusant mais les moldus sont des rustres. Ils ont déchirés ma robe. Heureusement, je n’étais pas seule. » Elle était avec Wade qui avait fait un très bon chevalier servant d’un jour, un peu trop crasseux soit, mais comme elle s’était perdue, elle n’avait pas fait la difficile sur la tenue de son sauveur. D’ailleurs, après une bonne douche, il était plutôt pas mal, moins que Damon cela dit. Elle avait une affection particulière pour son larbin préféré, elle lui prêtait donc tout un tas de qualité… peut-être dans l’espoir de redorer la piètre opinion qu’il avait de lui-même. Elle est si gentille… vous ne trouvez pas ?

Pour Charisma, le sujet du tutoiement/vouvoiement était maintenant réglé et, bien qu’elle connaisse parfaitement son ami, elle ne se doutait absolument pas qu’il était en train de se prendre la tête à ce sujet. Enfin… Elle n’avait pas dit ça dans cette optique, elle avait seulement souhaitée couper court à toute tentative de sa part de la persuader qu’elle devrait changer sa manière de faire. Elle avait pensé que c’était un argument de poids (visiblement c’était le cas) et que ce serait mieux pour tout le monde ainsi. Cela ne l’avait pas fait particulièrement souffrir de faire référence à son père, il y avait longtemps qu’elle s’était blindée. Si elle avait créé la Voix de toute pièce, c’était justement pour ne plus souffrir. Elle ne serait jamais seule puisqu’il y avait cette présence dans son esprit pour la soutenir et l’encourager à la place de ce père… qu’elle n’avait plus vu depuis des années.

Bien loin des préoccupations de Damon, elle se concentra donc de nouveau sur Taliesin comme si de rien n’était. « Je ne dessine pas très bien, mais je ferais des photos, cela me sera sûrement permis. » Après tout, si l’école était ouverte à des élèves venus d’ailleurs, c’était bien qu’il n’y avait pas de secrets à cacher. Encore qu’elle pensât que le meilleur moyen d’avoir un secret était de donner l’impression de n’avoir rien à cacher, stratégiquement, c’était ce qui se tenait le mieux. Elle était d’ailleurs partisane de ce genre de tactique pour elle-même bien qu’elle n’eût pas vraiment de secrets, plutôt des non-dits. Elle n’avait jamais raconté à personne le détail de son adoption, en revanche elle n’en cachait pas les causes. Cela choquait tellement qu’on lui demandait rarement comment ça c’était passé, les causes intéressaient nettement plus, hors les causes n’étaient pas un secret. Sa mère était morte, elle ressemblait à sa mère, son père s’était débarrassé d’elle pour cette raison et aussi parce qu’il avait sombré dans l’alcool et était en train de faire faillite. En Russie, toute la bonne société était au courant, et Carry s’en fichait. Par contre, elle ne répèterait jamais ce qui s’était dit ce jour là.

« Merci. » Elle était bien contente qu’il y ait quand même des gens pour réaliser qu’elle n’était pas folle. Même si l’avis de Damon n’avait jamais eut beaucoup de poids dans Poudlard, mais peu importait, elle ne cherchait pas non plus la popularité, uniquement le respect.

« Si seulement vous disiez vrai… Mais aucune fille digne de ce nom ne regarderait un goujat pareil, ni même ne se laisserait toucher par lui. » En tout cas, c’était son cas à elle. Elle était bien contente qu’Axel ne l’aime pas, au moins, elle était tranquille de ce côté-là, sa perversion ne l’atteindrait pas. D’ailleurs, un seul garçon avait le droit de poser les mains sur elle, et elle préférait taire son nom car tout ceci ne tenait de toute façon que de l’expérience scientifique.

« Oh… je m’étais perdue dans Londres et j’ai rencontré un de nos camarades. Nous avons pris le métro pour retourner chez moi mais il y avait beaucoup de monde et ils ont marchés sur ma dentelle, puis tiré… du coup ma robe était fichue. Heureusement, Dorémi est une vraie fée, elle l’a parfaitement réparée. Néanmoins, il est sûrement plus sage que j’évite de prendre le métro seule à l’avenir. » Elle avait voulu essayé pour voir ce que ça donnait, maintenant que c’était fait, elle ne voyait pas l’intérêt de recommencer, donc il y avait peu de risque qu’elle réitère.

Charisma réfléchit à si elle avait son appareil photo l’an passé et en déduit que oui puisqu’elle avait mené une étude comparative à propos des grenouilles et des crapauds, photos à l’appui, lors d’une de ses escapades scientifiques au lac. Elle aurait bien aimé choper ce bon vieux calmar géant mais il avait toujours refusé de montrer le bout de ses tentacules lorsque notre jeune Serdaigle était dans les parages.

« Je l’avais ce me semble, mais je ne photographie que des natures mortes ou des animaux. » Elle ajouta ensuite d’une voix neutre, presque froide « Les êtres humains n’ont aucun intérêt. » ce qui dans sa bouche n’était pas nouveau, Damon savait sûrement ce que Carry pensait du genre humain en général à défaut de sa famille en particulier. « Je ne développe pas mes photos moi-même, je les envoie à un laboratoire sorcier pour ça. » petite fille de bourge jusqu’au bout… Elle avait déjà fait des recherches sur le sujet mais finalement les photos elle-même l’avait plus intéressée que le processus en lui-même dès qu’elle avait percé le mystère (fort simple au final) d’un développement photo.

« Toujours est-il que j’essaierais d’en faire pour vous les montrer. » Et là, l’auteur a failli écrire « te » mais chut, on a rien vu. L’avantage avec Damon, c’est qu’ils étaient tous les deux curieux de tout par nature, c’était peut-être ce qui les liait puisqu’au niveau du caractère ils n’avaient pas grand-chose en commun. Damon était timide et, dans l’ensemble, plutôt chaleureux, tandis que Carry était froide comme la glace et très fière, elle n’hésitait jamais à s’imposer. Peut-être qu’elle se la jouait pour deux ? Ce n’était pas totalement impossible si on y réfléchissait. Les membres de sa Cour étaient tous des gens effacés, peu sûr d’eux, Charisma - qui ne doutait de rien malgré sa folie douce - se frayait un chemin dans la vie et cherchait à les entraîner dans son sillage.

« L’attrait du danger peut-être… les mauvais garçons peuvent avoir un certain charme… Mais je n’y suis pas sensible il faut croire. En plus, même pour un bad boy, Axel Griffins n’est pas terrible physiquement. Vous êtes bien plus mignon. » Même s’il ne la croirait sûrement pas mais peu importait. Carry trouvait aussi Gaël plutôt beau d’ailleurs, ses amis avaient tous un certain charme et le fait qu’ils ne l’exploitent pas forcément les rendait encore plus intéressant. Charisma aimait les contradictions, cela venait peut-être de là, même si après elle reconnaissait aussi qu’on trouvait rarement ses proches laids et ses ennemis beaux. C’était, encore une fois, humain…

« Hum… ne vous inquiétez pas, je n’ai eu aucun mal. Et je connais mon sauveur, il s’appelle Wade Jarvinen, il est dans ma maison mais il est nettement plus vieux. Je crains cependant que sa visite dans mon monde ne lui ait pas vraiment fait du bien… ou plaisir… peu de gens comprennent ma situation. » Elle observa le paysage et remarqua qu’ils avaient déjà bien avancé dans leur trajet pendant qu’ils parlaient. Il serait bientôt temps de changer de cape et de passer celle de son uniforme de serdaigle, ainsi que son chapeau de sorcière (qu’heureusement elle n’aurait à porter que pendant la cérémonie de répartition ! Elle ne l’aimait pas trop). La nouvelle année n’avait jamais été aussi proche de commencer et ce n’était pas encore fini…