Erance éternelle.

Arf. Il ne comprenait pas. Pourquoi? Peut être le faisait il exprès, ou simplement qu'il n'était pas assez malin pour comprendre le fond de sa pensée. Claire redescendit sur terre. Bien que jeune en temps que fantôme, elle avait quatre vingt dix ans d'expérience, et ce n'était certainement pas le cas du garçon en face de lui. Elle souffla. Bien qu'elle s'en fut toujours intérieurement vantée, sa sciences infuse ne lui servirait pas énormément maintenant, et encore moins sa capacité à discuter et expliquer les choses. Ne voulait pas laisser de blanc, elle ajouta simplement en haussa les épaules.

-Te sauver.

Certains fantômes prenaient de la maturité, d'autres restaient à leur age mental initiale. Claire n'était pas totalement restée cette fille de dix sept ans, déjà pourtant si réfléchis, non, elle était Claire J'ai-tout-vécu désormais. Et ce qu'il lui demandait clairement de lui expliquer, ça, elle l'avait vécu. Et ah, par Serpentard, ce fut vraiment la meilleure chose de sa vie. Bien sûr, partager ses connaissances, tout en profitant de l'occasion de montrer qu'On le Sait contrairement à la personne en face, était toujours plaisant pour l'ex Serpentarde, mais ici c'était différent. On parlait de ses souvenirs, à elle. Elle tenta d'en parler, de lui expliquer, tout en restant hors de sa vie privée face au garçon dont elle ignorait le nom. Sûrement parce que son air demeurait à être un air qui ne comprenait pas.

-Eh bien...

Arg. Elle reprit de ses couleurs. Elle avait à la fois envie de rougir que de s'énerver que ne pas comprendre pourquoi c'était si compliqué à évoquer. Enfin, pas si difficile. C'était juste qu'elle avait des flashs de ses souvenirs, et ce n'était pas très agréable. Ben quoi, un fantôme c'est mort, il devrait pas pouvoir se remémorer ><.

-Euh... Mince, je suis sûr qu'au fond ta vie ne te plaît pas tant que ça.

Elle commençait enfin à s'exprimer. Elle se sentit alors tout d'un coup inspiré au fond d'elle, comme si elle regorgeait de critiques envers elle même. Son ton montant légèrement; elle avait l'impression de s'engueler elle même.

-C'est vrai!! Rester des heures à étudier, ne pas fréquenter du monde parce qu'au fond on sait qu'on vaut mieux qu'eux, ne penser qu'a la réussite, CA, c'est stupide!! Et en plus tu le sais très bien!! Tu passes à côté de tout!!!

Claire n'avait qu'une pensée en tête, autant pour elle que toute la personne de la même nature "Stupide, stupide, stupide"...

-Tu crois que ça te convient hein!? Mais qu'est ce que tu crois! A continuer ainsi, tu vas finir comme...Comme moi!!!

La fantôme prit son souffle. Et oui, même eux avaient un système respiratoire. C'était si incroyable,si rare, c'est instant. Claire avait perdu son sang froid, contre elle à l'aide d'un Serpentard tout aussi solitaire. Au moins, cette journée sortait de l'ordinaire...

Ok, la prochaine fois que Théodore serait dans l’incertitude, il garderait ses doutes pour lui. Quoique, le plus dur lorsqu’on avait des conversations qui n’étaient pas purement basées sur le savoir, c’était qu’on ne pouvait justement pas aller chercher des réponses dans un livre. Théodore aurait-il haussé les épaules, au lieu de demander ce qu’elle voulait dire par là, il aurait évité ce sermon, certes, mais aurait été hanté toute la journée par la signification possible de ce qu’elle avait bien voulu dire. Quoique là… Il l’était aussi. Ou du moins allait l’être.

Le fantôme répondit au début par une simple répétition du mot « sauver », ce qui valu à Théodore de cligner des yeux, comme si il essayait de comprendre ce qui se cachait derrière.
Sauver… Sauver… Sauver…

D’après sa base de données personnelles, car, Théodore, un soir d’été, avait déniché dans la bibliothèque de son père un antique dictionnaire, et avait entreprit de le lire, ce qui revenait pour lui à l’apprendre par cœur, sauver avait plusieurs significations :

Il y avait d’abord empêcher la perte ou la disparition de quelque chose. Mais non, elle ne voulait pas dire ça, puisque justement, elle voulait qu’il quitte ce fameux mode de vie dans lequel il baignait depuis déjà un moment. Bon, ok, depuis sa naissance.
Ensuite, sauver signifiait mettre à l'abri. Ce qui était déjà plus probable. Mais comment se mettait-on à l’abri de son mode de vie? Ça n’était pas comme si il en connaissait d’autre. Il avait toujours vécu comme ça.
Mais la « Jeune » fantôme poursuivit. Si ça vie ne lui plaisait pas tant que ça? Hum, c’était surtout qu’il ne voyait pas une autre façon de vivre. Il ne se voyait pas entouré par une bande d’élèves, et rire avec eux, ça serait beaucoup trop… Bizarre?
Cette remarque fut accueillie par un nouveau clignement d’œil. Peut-être aurait-il du continuer à réviser, au lieu de discuter avec les fantômes. De toutes manières, elle ne le connaissait même pas, comment pouvait-elle savoir qu’il était vraiment comme elle le disait? C’était le cas, bien sur, mais ça n’était pas écrit sur son front tout de même, et ça n’était pas parce qu’on était bon élève qu’on était asocial. Enfin peut-être pas. Enfin il n’en savait rien…
Il fut à nouveau tiré de ses pensées par la voix de sa vis-à-vis qui avait augmenté de volume.
Théodore baissa les yeux, ne sachant que répondre à cette exclamation tintée d’amertume. Peut-être que la fantôme pensait à sa propre histoire? Le jeune homme n’avait de toutes manières aucune envie de devenir un fantôme. Enfin de toutes manières, qu’il en soit un ou non, qu’est ce que ça changerait?
Il était persuadé que son père ne s’en rendrait pas compte. Ni personne d’autre d’ailleurs. Alors…

Alors il releva les yeux, et les posa sur le visage du fantôme de la jeune fille qui, il aurait presque pu en mettre sa main au feu, avait pris une très légère teinte rosée. Les fantômes pouvaient-ils rougir? Apparemment, oui. Enfin, il faudrait tout de même qu’il vérifie, et qu’il…
Enfin qu’il réponde.
L’air grave, il répliqua donc:

« Et alors? »

C’était vrai quoi? Il n’avait aucune raison d’être ou ne pas être ce qu’il était. Et ne voyait pas comment devenir quelqu’un d’autre. Sa vie était comme elle devrait être non? A quoi bon se fatiguer à être social puisque de toutes manières, tous ces gens ne se préoccupaient de rien d’autre que d’eux-mêmes? Pourquoi essayer, alors que de toutes manières, dès qu’il rentrerait chez lui, il ferait face à toute cette morosité? C’était sans doute pourquoi il n’essayait pas de changer. Dans son état quotidien, il se préparait mentalement à son retour chez lui. Et les regrets ne servaient à rien, au moins, seul, il pouvait l’être partout.

Et alors? Alors? Comment ça "et alors?"!!!?? L'ex jeune fille inspira puis expira doucement tout en décontractant sa mâchoire. Pas besoin de s'indigner pour ça, il suffisait d'acquiescer et de redescendre de son nuage de colère. Elle avait l'impression, par cette réponse, que le jeune élève lui manquait de respect. Elle s'était énervée, ouverte, avait un quasi monologue, et comme lui rendait i? Par un et alors. Et très calme en plus. Comme si ce qu'elle avait dit n'avait eu aucun impact sur lui. Ce qui était sûrement le cas. Aucun impact visible, aussi, peut être? Et dire qu'elle avait essayé de lui ouvrir les yeux.

Il restait donc à Claire deux solutions; essayer de lui ouvrir de force les yeux, et seulement et malheureusement au sens figuré, ou, hausser les épaules et partir. Il refusait de s'ouvrir à son tour ne montrant ainsi pas le creux de sa vie, c'était son problème; Claire, elle, estimait avoir remplit la tache dont elle s'était sentit porteuse aujourd'hui. En même temps, elle ne pouvait pas disparaître, comme ça, après une question composée de deux mots. Quoique... Serpentard un jour, Serpentard toujours, non? Le spectre, vexée d'être aussi mal traitée alors que quoi, elle était là depuis bientôt cent ans, tourna sa masse invisible, le visage droit, accompagné d'un "Pfff".

Oui, mais non. Elle fit à peine deux mètre, ce fut tout ce qui lui fallut pour se rendre compte que désormais, elle n'avait plus rien à faire, deux mètres pour retomber dans l'ennuie. Elle soupira, levant les yeux au ciel et fit demi tour face au Serpentard apparemment prêt à partir.

-Hey attends.

Le ton neutre, elle se rapprocha, et tel un professeur, mis les mains derrière le dos avant de s'élancer dans un discours. Avant même de le prononcer elle n'avait pas la moindre idée de ce qu'elle allait dire, mais finalement, les mots vinrent rapidement. Le ton toujours sur la même note, n ton perçant la vérité et surtout expérimenté, elle dit;

-Et alors, je ne suis pas sûre que tu es envie de finir comme moi, et je parle de mon moi avant, une personne creuse et sans presque plus aucune once de vie, bien évidemment totalement asociale que la société rejettera officieusement de son comportement envers ses collègues. Car je te rappel, que réussir ses études et avoir un bon job est une chose, mais réussir sa vie une autre. Tu veux continuer ainsi, ne rien ressentir, envier secrètement les autres, va y. Mais un jour tu couleras quand tu te rendras compte qu'en fait tu n’as absolument rien.

Claire se douta qu'il allait répondre à nouveau avec insolence. C'était presque évident, elle venait d'insulter elle même son mode de vie; mais en même temps, il ne le devait qu' lui même. Avant que l'élève puisse prononcer un mot, elle garda une main derrière son dos et mis son autre main au niveau d son visage, la paume vers le garçon comme pour dire "Stop" avant tout commencement. Elle reprit avec un peu plus de mépris. Sûrement par "peur" que le garçons attaque le premier, ce qu'elle fit ainsi donc.

-C'est tout ce que j'ai à dire. Et pas besoin de nier avec les sarcasmes habituels des Serpentards.

Il n’avait pas répondu par provocation. Enfin, il n’avait pas voulu être méchant, volontairement. Ou peut-être bien que si. Après tout, il n’était pas Serpentard pour rien. Mais… ça n’était pas dans sa nature d’être méchant, si? A moins que son envie de solitude ne soit en fait la cause de ses réactions rébarbatives envers les autres. Mais il n’allait pas se mettre à se questionner sur son comportement, uniquement parce qu’on lui faisait la morale… ça n’était pas son genre d’être aussi influençable, et surtout pas par quelqu’un qui pensait pouvoir le sauver. Le sauver… Quelle idiotie, il n’en revenait toujours pas. On ne sauvait pas quelqu’un comme ça, et d’ailleurs, personne ne pouvait être sauvé quand il n’en avait aucun besoin.
Le fantôme semblait agacé. Normal, dans un sens. Mais il avait le droit d’avoir un avis, et ne pouvait pas partager le sien, c’était purement stupide, et purement inutile. Il ne voulait pas être « sauvé ».

Elle tourna les talons. Génial, elle boudait. Enfin, elle en avait fini avec lui. Théodore ne savait pas si il devait s’en sentir désolé ou alors soulagé. En même temps, il ne se sentait que très rarement concerné pas les choses qui l’entouraient, il suffisait de voir son manque de réactions lorsqu’il se passait un évènement important. Comme par exemple lorsque tous les serpentards s’étaient amusés à harceler les Griffondors. Mais en y réfléchissant bien, ça arrivait tout le temps, donc ça n’était pas si important.
Malgré le fait qu’il s’agissait d’une de ses premières conversations ne parlant pas de cours, depuis un long moment, Théodore s’apprêta à partir. Il n’avait pas de temps à perdre, ses examens étaient en jeu…

Lorsque la voix du fantôme se fit entendre, l’appelant. Il releva les yeux vers elle,toujours aussi impassible, s’attendant à recevoir à nouveau une quelconque leçon de conduite; il espérait bien que si il devenait fantôme, il ne serait pas aussi moralisateur.
Il ouvrit la bouche pour se défendre : effectivement, c’était un sermon et effectivement c’était contre son mode de vie actuel.
Légèrement plus courroucé, ses paroles dépassèrent sa pensée, et il se retrouva à dire d’un ton un peu plus agressif.

« Ha? Et peut-être que vous pourrez me dire comment faire, pour changer de vie? »

Parce que même en y pensant très fort, ça ne semblait pas vraiment de toute évidence. Il ne se voyait pas, et ne se verrait sans doute jamais mêlé à une foule, faisant partie du groupe, se sentant concerné par les choses des autres, et riant à leur blagues. Parlons en, de rire, la dernière fois qu’il avait rit, c ‘était… Hum, il était incapable de s’en souvenir. Alors changer de vie, c’était tout simplement improbable.

» - Jeunesse éternelle - PV