Touffes de poils [2]

Le foyer de la cheminée diffusait une chaleur… hum… cuisante. A l’intérieur de celle-ci d’immenses broches sur lesquelles étaient enfilées une douzaine de volailles tournaient lentement. L’odeur était étourdissante.
Skiìrt sentit son ventre se creuser. Lui aussi avait faim !
Mais les volailles étaient hors d’atteinte et il ne voulait pas mettre en colère les maîtres des lieux en dérobant de la nourriture destinée au repas du soir. Direction la réserve !
Faisant un signe à ratatouille pour que celui-ci le suive discrètement, ils longèrent le mur jusqu’à une petite porte entrebâillée d’où descendait un escalier. Une odeur acide de fromage remontait d’en bas.
Il ne savait pas trop quel genre de nourriture préférait son compagnon mais il était certain que tous les rats adoraient cette substance moelleuse et grasse.
« Allons-y » couina-t-il.

Lorsque Skiìrt et Ratatouille arrivèrent enfin aux cuisines par une petite corniche, Ratatouille fut émerveillé de voir autant de nourriture à la fois. Son nez s’emplit d’odeurs de cuisine toutes plus délicieuses les une que les autres, et il ne se souciait même pas de la chaleur étouffante diffusée par la cheminée dans laquelle cuisaient d’énormes volailles.
Les elfes dont avait parlé Skiìrt n’étaient pas présents, ou du moins par visible, et à la grande déception de Ratatouille, les deux rats ne s’attardèrent pas dans la cuisine. Il se dirigèrent vers un escalier descendant, semblait-il dans les ténèbres. Heureusement, il remontait des ténèbres une odeur alléchante et persistante de fromage. Aussitôt, il se surprit à demander aussi bas qu’il le pouvait à Skiìrt :
« Les humains d’ici laissent du fromage à notre intention ?! »

Cette attitude le surprenait car elle était totalement contraire à celle des humains d’ailleurs et à celle contre laquelle Skiìrt l’avait mis en garde quelques minutes plus tôt. Mais Ratatouille, toujours dans la confiance aveugle qu’il portait à Skiìrt suivit ce dernier dans l’escalier et il n’y eut bientôt plus une seule petite lueur : c’était l’obscurité totale. Cependant, les yeux de Ratatouille s’habituèrent bien vite à cette obscurité et il n’eut aucun mal à discerner les centaines de petits morceaux de fromages qui répendaient cette odeur sentie depuis le haut de l’escalier…

Les humains laissent du fromage à notre intention… Quelle drôle d’idée !

« Non pas vraiment. Ils préfèrent le garder pour eux d’une façon générale. Mais ici, les elfes en font apparaître autant qu’il est nécessaire. Je ne sais pas exactement comment ils s’y prennent mais j’imagine qu’ils sont aussi un peu sorciers. Pas du genre à vouloir nous exterminer mais capables de faire des choses impossibles. J’ai vu deux ou trois choses qui ne peuvent pas se passer. Des piles d’assiettes cassées qui remontaient sur la table pour se recoller par exemple…
Ici tu vois, ils laissent le fromage attendre quelques jours avant de l’utiliser. Ils font apparaître tous les jours la quantité qui s’est mangée lors des repas et ils les mettent là bas. Le stock de fromage reste donc toujours le même. Et ici c’est le fromage le plus ancien, celui qui va être utilisé ce soir. Sens moi cette odeur ! mmmh ! Il est parfait ! Prends en un morceau et allons dans un coin tranquille.
Quand tu n’auras plus faim, je t’emmènerais voir le roi. Mais peut être veux-tu autre chose que du fromage ? Il y a toutes sortes de nourriture dans les réserves »

Skiìrt venait de réaliser qu’il aurait du formuler sa question avant mais il était trop tard pour cela. De toute façon, à voir comment Ratatouille observait les montagnes de fromage, il pouvait douter qu’il l’écoute encore…