Serpentard dans le collimateur

Alecto fulminait. Elle marchait dans les couloirs de Poudlard à toute vitesse, du moins aussi vite que le lui permettaient ces courtes jambes. Dans l’état où elle était, mieux valait ne pas énerver un peu plus la professeur d’étude des moldus. Certes, ce n’était pas très compliqué, mais la prochaine personne qu’elle allait rencontrer ferait mieux de faire des efforts si elle ne souhaitait pas subir la colère d’une Mangemort excédée. Ce château était un vrai labyrinthe en même temps. Les fondateurs de l’école n’avaient-ils pas pu faire plus simples que des escaliers mouvants ? Etaient-ils obligés de mettre de la magie partout ?

Ce qu’Alecto cherchait, c’était le bureau de son collègue, le gros et gras professeur Slughorn, qui enseignait les potions et était le directeur de la maison de Serpentard. Elle devait l’avertir que l’une de ses élèves, Ann Iverson causait déjà de gros problèmes, ce qui n’était pas acceptable d’un membre de la maison du Seigneur des Ténèbres. S’il y en avait une qui se devait d’entrer dans le rang, c’était bien celle-ci. Les Serdaigle et les Gryffondor leur poseraient bien assez de problèmes comme ça sans que les verts et argents y rajoutent une couche, sans compter que certains Poufsouffle s’agitaient eux aussi.

Finalement, Alecto trouva quand même la porte tant recherchée. Elle espérait à présent que Slughorn était dans son bureau, car elle ne supporterait pas de le chercher plus longtemps. Elle avait perdu assez de temps ainsi et souhaitait se reposer avant son prochain cours. Elle serait d’ailleurs déjà dans son bureau si cette lamentable affaire ne l’avait pas retenue ici, ce qui l’énervait d’autant plus. Le gros professeur de potions n’avait donc pas intérêt à être ailleurs. D’ailleurs pourquoi ne serait-il pas là ? La petite Mangemort avait vérifié et il n’avait pas cours à cette heure.

Alecto appuya sur la poignée. Victoire, elle était ouverte. Sans s’embarrasser de politesse, elle entra. En bonne disciple du Seigneur des Ténèbres qu’elle était, la petite femme ne s’embarrassait pas de politesses inutiles. Pourquoi frapper alors que Slughorn n’avait de toute façon pas le choix de la laisser entrer ? Il valait d’ailleurs mieux pour la petite Iverson que ce fut lui qui s’occupât de son cas, et non Amycus ou elle-même. D’ailleurs la sœur Carrow aurait bien décidé d’une punition pour les deux fois, mais le directeur lui avait dit qu’il valait mieux qu’elle en parle d’abord avec le professeur responsable. Soit. Elle s’était inclinée, mais restait responsable de la punition infligée par Mme Pince et ne se priverait donc pas de ce plaisir.

- Bonjour, Horace.

La voix de la Mangemort était restée froide. Pourquoi faire semblant d’être amicale alors que Slughorn était un ami de longue date de Dumbledore ? Il avait beau avoir été le professeur préféré du Seigneur des Ténèbres, il n’en restait pas moins à surveiller. De toute façon, vu la façon dont elle venait d’entrer et la raison de sa visite, il y avait peu de chance pour que le gros bonhomme soit heureux de sa venue.

- Je viens vous parler de la petite Iverson, qui cause déjà des problèmes.

Alecto eut un sourire mauvais. Si l’élève en question était à Serpentard, elle n’en était pas moins de sang-mêlé. La Mangemort n’aurait donc aucun scrupule à appliquer les punitions règlementaires.

Horace se reposait sur un énorme pouf auprès de la cheminée. Il était vêtue d'une magnifique robe de chambre d'intérieure brodée d'or et portait de confortables petites pantoufles. Sur une petite table à quelques centimètres de lui se trouvait une boîte de fruits confits, déjà bien entamés.

Slughorn lisait le journal qu'il n'avait pas eu le temps de lire plus tôt dans la journée. Il fallait dire que le vieil homme ne s'arrêtait quasiment plus dans la salle des professeurs, devenue pour lui beaucoup trop... infréquentables, surtout ces temps-ci.

Il prenait donc un peu de plaisir à être chez lui, tout seul le soir dans le plus grand confort possible.

*Encore un coup porté à Harry ! Et c'est signé en plus ! Il n'a vraiment pas honte...*

Il plongea une nouvelle fois sa main dans la boîte de fruits confits au moment où la porte s'ouvrit à la volée et que Alecto Carrow entra dans la pièce en sifflant un léger bonjour.

Par Merlin que Horace détestait cette femme ! Il avait faillit avoir une crise cardiaque à cause d'elle ! Le professeur de potions magiques se leva alors et se dirigea vers la jeune femme en lui lançant un regard noir.

- Mademoiselle vous n'êtes pas au cirque ici mais dans la demeure de Horace Slughorn je vous pris donc de frapper avant d'entrer... Vous n'êtes pas chez vous !

Visiblement furieux d'une telle intrusion il ne répondit même pas au bonjour lancé par l'odieuse enseignante. Il se contenta de ranger quelques papiers sur son bureau avec de petits gestes nerveux, et alla prendre place derrière son bureau où reposait de grosses piles de lettres et de parchemins venus des quatre coins du globe.

- Et bien cette jeune fille s'est sans doute rendue compte que l'honneur de Serpentard n'est plus ce qu'il était et qu'il vaut mieux se rallier aux autres maisons plutôt que d'approuver vos manières de barbare !

La réaction de Slughorn fut à la hauteur de ce qu’Alecto pouvait espérer. Comme il fallait s’y attendre, le professeur de potions n’avait pu passer outre le manque de politesse évident dont la Mangemort avait fait preuve. En même temps, quand on connaissait l’influence que le vieil homme avait pu avoir auparavant, ça se comprenait aisément. Par contre, il lui fallait prendre conscience que les choses avaient changé et que Dumbledore était mort, depuis plus de deux mois déjà.

- Etes-vous bien sûr que je ne sois pas chez moi, Horace ? demanda-t-elle avec un sourire ironique en passant sa main sur un meuble impeccablement propre qui était juste à côté d’elle. Il faudrait sans doute quelques mois pour que tout le monde, professeurs y compris, rentre dans le rang. La Mangemort avait confiance en ses capacités pour réussir sa mission, mais elle savait que mater la rébellion ne serait pas toujours chose facile.

- Vous n’avez pas compris, je crois, que les choses changent, Horace. Désormais le pouvoir est aux sorciers, aux vrais. Il n’y a aucun honneur à se battre quand tout est finit. Votre ami Dumbledore est mort, et même lui ne peut revenir.

Ah ! Alecto s’en rappelait, de cette magnifique nuit sur la tour d’astronomie. Ces quelques instants lors desquels le plus grand mage blanc de tous les temps après Merlin s’était retrouvé prisonnier et sans baguette des Mangemorts. Et pourtant, tout impertinent qu’il était le vieil homme s’était contenté de faire de l’humour. Tout le monde pouvait voir où ça l’avait mené. Aujourd’hui, les disciples du Seigneur des Ténèbres dominaient le monde de la magie, et bientôt le monde entier.

- Nos méthodes barbares, comme vous dîtes, son approuvées par le Ministère de la Magie, dois-je vous le rappeler ?

Remarquant la pile de lettres posée le bureau du professeur de potion, Alecto dit d’une voix doucereuse :

- Et faîtes attention, on dit que la volière a des oreilles.

L’avertissement était clair et non voilé. Si Slughorn voulait renverser le pouvoir, il serait repéré, arrêté, puis après qui se demanderait ce qu’il lui était arrivé ? La Gazette du Sorcier aurait tôt fait de le faire passer pour un traître qui se serait enfuit à l’étranger, ou bien une autre histoire comme ces journalistes savaient si bien en trouver. Alecto ne se faisait aucun soucis sur la communication du Ministère. Il lui fallait cependant en revenir à la petite Iverson, car elle n’avait pas que ça à faire.

- Pour en revenir à votre élève, sachez que ni moi, ni Mme Pince ou le professeur Rogue n’accepterons aucune entrave au règlement de cette école, ni à ses principes. Il vaudrait mieux pour sa santé qu’elle évite de se faire remarquer. Je compte sur vous pour la prévenir.

Bien entendu, Alecto espérait au contraire qu’Ann Iverson continuerait ses bêtises et se ferait attraper. Rien ne ferait en effet plus plaisir à la sœur Carrow que d’apprendre les bonnes manières aux élèves de Poudlard, surtout à ceux qui n’avaient pas le sang pur.

*De la diplomatie... de la diplomatie... Gardes ton calme Horace !*

Le professeur faisait tout ce qu'il pouvait pour se retenir d'insulter la jeune femme en face de lui. Cette mangemort qui avait du sang sur les mains... beurk, Horace en avait des frissons. Cependant c'était un sorcier du monde, du Haut Monde comme il disait et il savait utiliser la fameuse diplomatie.

Il se contenta donc de sourire.

- Et bien pour le moment vous êtes chez moi.

Son ton avait été sec et sans sympathie. Il semblait ennuyé et jetait des coups d'oeil régulier par la fenêtre tout en écoutant la nouvelle enseignante d'étude des moldus.

Alecto expliqua ensuite que le pouvoir était aux vrais sorciers. Non mais que croyait-elle ! Horace bomba son torse proéminent sous l'indignation. Il était un sorcier de sang-pur et avait étudié à Serpentard dans sa jeunesse.

- Comment osez vous Carrow ! Je suis un vrai sorcier, un grand sorcier et j'ai combattu plus de choses en un siècle que vous n'en combattrez jamais dans votre misérable vie !

Alors comme ça les tortures étaient approuvées par le Ministère de la Magie ?

- C'est sur que maintenant qu'il est tombé entre vos mains. Mais nous savons ce qu'il en est Carrow, je n'ai que faire de vos menaces ni de vos conseils. Et je tiens à vous préciser que si vous touchez à un seul cheveu d'un de mes élève je vous réduis en poussière même si c'est la dernière chose que je dois faire dans ma vie !

Furieux et légèrement nerveux il se retourna vers un plateau où étaient disposés deux verres et quelques bouteilles. Il en tira une et se servit un fond de whisky qu'il avala d'un coup.

- Voilà qui est très…courageux de votre part, Horace, que de vouloir protéger vos élèves. Je suis certaine qu’ils vous en seront très reconnaissants.

Il fallait ne pas être très intelligent pour ne pas saisir l’ironie dans les paroles d’Alecto, qui espérait que Slughorn perdrait son calme le plus vite possible. Elle aurait ainsi une bonne raison de le faire emprisonner, si ce n’est pire, et éliminerait ainsi l’un des ennemis de sa cause. En fait, la Mangemort n’imaginait pas que son interlocuteur puisse réellement la réduire en poussière comme il l’affirmait. Que ce gras professeur soit si puissant ne lui venait même pas à l’esprit, parcequ’il ne faut pas pousser mémé dans les orties, même si la petite femme n’avait jamais vu sa grand mère.

- Vous parlez beaucoup, Horace. Pourtant il ne me semble pas vous avoir vu prêt à défendre vos étudiants, l’an passé.

Alecto était passée à la vitesse supérieure. Son but était désormais d’énerver le plus possible son collègue. Elle savait qu’ainsi il ne pourrait supporter de passer toute l’année scolaire près d’elle. Si Slughorn chutait, les autres suivrait et Poudlard serait enfin et complètement sous leur emprise, sans personne pour introduire de mauvaises idée dans la têtes des élèves, et ainsi détruire le précieux enseignement qu’elle et son frère dispensaient.

Horace s’était servit un verre d’alcool dont la bouteille était située derrière lui. Cela fit sourire Alecto. Si le vieil homme avait déjà besoin de boire pour se remettre de ses paroles, il ne tiendrait plus longtemps face à ses attaques, il n’y avait aucun doute à avoir là dessus. Il était enfin de compte bien plus faible qu’il voulait bien le laisser paraître, ce qui n’était pas si étonnant, à force de suivre ce vieux Dumbledore.

- Est-ce ainsi que vous comptez défendre les élèves de Poudlard ? Mais de toute façon n’ayez aucune crainte. Les vrais sorciers n’ont rien à craindre. Je suppose que personne ici n’est hors la loi…si ?

Une fois encore, Alecto lança son sourire mauvais à son collègue. Qu’il comprenne. Il fallait que ce gros balourd comprenne qu’il ne pouvait plus rien faire contre la marche des Mangemorts et du Seigneur des Ténèbres. Ils allaient trouver Potter et anéantir toute résistance. Même l’Ordre du Phénix tomberait lorsque le Survivant serait vaincu.

[Désolée d'avoir mis si longtemps]