- Devoir de groupe - PV

M U S I Q U E

Comment aimer le soleil quand tout alentour n’est que ténèbres ? Comment aller de l’avant quand tout semble à jamais perdu. Comment sourire alors que le cœur est brisé et ne pourra jamais plus cicatriser ? Comment survivre avec fierté dans un environnement si… chaleureux quand on recherche la glace pour apaiser ses sens ? C’était là les questions qui fendaient l’esprit douloureux d’Alix Sullivan. Sa vie avait basculé depuis un mois. Un mois de souffrance, de regrets, de pleurs, seule dans son coin. Alix avait perdu son frère, ses parents. Elle avait tout perdu. Qu’était-elle sans eux ? Que deviendrait-elle sans lui ? C’était dur. Trop dur. Habiter avec Jason était une chose, certes, mais jamais elle ne l’aimerait comme elle aimait son frère. Et même si son cousin avait été adorable avec elle, la fillette ne parvenait à être aimable avec lui. Les rares fois où il s’était vu, elle était restée seule, ou s’était cachée derrière un mur de froideur et de mépris. Cela avait sans doute dû blesser le jeune homme, mais la fillette ne pouvait plus sourire. Pas sans Martin.

Si Alix s’était toujours montrée distante et froide avec les personnes potentiellement ‘dangeureuses’ à ses yeux, on pouvait à présent considérer cette manière d’être comme une généralité concernant la petite lionne. Depuis le décès de ses parents, la petite fille n’était plus ce qu’elle avait été. Tristesse, douleur régnaient en maître dans son univers. Comme si le décès de ses parents n’avait su suffire, il avait fallu que son frère se fasse adopter par de parfaits inconnus sexistes et débiles en bonus !

Lorsqu’elle était seule, Alix pleurait, criait, frappait les murs, ressentant à peine la douleur qui venait apaiser doucement ses pleurs. Les poings de la petite avaient plusieurs fois été bien amochés, mais elle s’en moquait. L’infirmière s'était occupée de ses mains, Alix prétendant être tombée de balais en cours de sport. Parfois, elle le faisait même exprès, pour que Madame Bibine l’envoye à l’infirmerie, histoire que le coup du balai fonctionne mieux… A présent, de très fines cicatrices argentées se dessinaient sur ses poings. La magie était bien faîte, on n’y voyait presque rien…

La lionne ne parlait plus à personne, ou se contentait du strict minimum quand cela s’avérait nécessaire. Froide, méprisante, elle haïssait tous ces sourires qui l’entouraient. Pourquoi étaient-ils tous heureux ??? Pourquoi le monde continuait-il à tourner, vivre alors que sa vie à elle s’était achevée… Quand elle y pensait, elle se disait que finalement, ç’aurait dû être elle qui aurait dû mourir. Elle, en tout cas, aurait préféré…

…………………….

Ce matin, comme tous les matins, Alix était la première réveillée. Enfermée dans la salle de bain alors que les dortoirs alentours étaient encore dans les ténèbres qu’apportait le sommeil, elle fixait son reflet. Ses joues s’étaient amincies, ses yeux étaient presque devenus noirs, son visage n’avait rien d’aimable. Et lorsqu’elle tentait de sourire à son reflet, ce n’était qu’une grimace incroyablement fade qui étirait ses lippes dans un rictus de souffrance qui lui donnait de terribles hauts le cœur. Comme tous les matins, elle pensa à martin qui était loin d’elle, et comme tous les matins, elle pleura son frère envolé, ses parents décédés… sa vie anéantie. Glissant à terre, elle resta en position fœtale une bonne dizaine de minutes, puis se releva. Inspirant profondément, elle dédaigna son reflet, dont les yeux avaient rougi et quitta la pièce d’eau pour sortir de sa salle commune au moment où les autres élèves émergeaient de leur longue nuit de sommeil.

Alix déjeuna seule (ou presque) et quitta la Grande salle lorsque la foule commençait à prendre possession des yeux. La solitude était sa seule amie, la seule compagne qu’elle se permettait d’accepter à ses côtés.

Il était huit heures précises quand la fillette entra dans la bibliothèque. Elle devait, à on plus grand regret, travailler avec un de ses camarades pour un devoir de groupe. Chose dont l’enfant se serait volontiers passée. Nous étions samedi matin, et il n’y avait pas cours ce jour là. Aussi la bibliothèque était encore vide… pour l’instant. Dans les premiers étudiants arrivés, la lionne posa son sac à ses côtés, tandis qu’elle se laissait lourdement tomber sur une chaise. Claes arriva peu de temps après elle, alors qu’elle sortait sa plume, des rouleaux de parchemin et de l’encre. La petite ne leva pas les yeux vers son camarade. Elle se contenta de poursuivre son installation, tout en lâchant :

« J’ai pas que ça à faire, alors j’espère que t’es pas trop stupide, histoire qu’on n’y passe pas la matinée. »

Evidemment, il serait forcément un imbécile fini à côté de Martin, puisque personne ne pouvait égaler martin. Forcément, le jumeau d’Alix était la perfection incarnée… Et cette perfection était à présent à des kilomètres de l’enfant aux yeux noirs…