Demeure Montgomery [ Pv Roze ]

Roze tournait et virait dans la maison comme à son habitude pour nourrir les animaux et soigner les plantes. Joli-Cœur – le singe – trônait sur son épaule et jouait avec les boucles blondes de sa maîtresse d’un air ravi. Edward était sorti il y a seulement cinq minutes, il s’occuperait du dîner de ce soir, il était donc parti faire quelques courses. Roze ne fut pas seule longtemps cependant car la sonnette retentit. Elle sautilla joyeusement vers la porte et l’ouvrit sans hésitation. Les colombes lui avaient rapportés qu’un visiteur arrivait.

« Bonjour Nathanael ! » Dit-elle en souriant au jeune garçon. Malgré leur différence d’âge, Roze était minuscule par rapport à lui. Elle était de toute façon un peu naine (1m43) et pour jouer dans le groupe, elle utilisait un marche pieds au clavier car Keira en avait été la première utilisatrice et elle était bien, bien plus grande que Roze. Car il faut savoir que chez elle, Roze n’avait pas de clavier (bien qu’elle pourrait s’en acheter un si elle le voulait vraiment mais ça l’ennuyait de le faire), elle avait un piano qu’elle avait gagné lors d’un concours avec Edward.

« Non, bien sûr que non tu ne me déranges pas. Entre je t’en prie. » Elle le laissa entrer à l’intérieur du cottage et elle le guida jusque la salle de musique insonorisée. Joli-Cœur – peu adepte des étrangers – quitta l’épaule de sa maîtresse pour regarder le garçon. Il l’avait déjà vu lors de certaines répétitions, il resta donc immobile, sachant que Roze avait invité cette personne à pénétrer sur leur territoire. Kapri fut moins docile et aboya fort après Nath’, sans pour autant lui sauter dessus. Roze le fit taire du geste et de la voix « Chut Kapri, tais toi maintenant. » Le labrador noir obéit aussitôt, le pouvoir de Roze agissant sur lui. Pénétrant dans la salle, Roze délogea Caprice le chat blanc du piano, celui-ci ouvrit un œil paresseux et se laissa tomber sur la chaise à côté de Roze et de Nath’ que la blondinette venait d’inviter à s’asseoir avec elle devant le piano.

« Je t’ai demandé de venir parce que je voulais te faire écouter ma dernière composition. J’aurais besoin d’aide pour les arrangements, en plus je n’ai écrit que la partition piano. » Faut dire que Roze n’était pas très copine avec les partitions même si elle s’y était mise pour les besoins de la cause. « Tu préfrères voir les feuilles d’abord ou écouter le morceau ? » demanda-t-elle de sa voix flûtée, le menton levé vers le grand jeune homme bien qu’il sembla que le regard azur de Roze ne le vit pas vraiment.

Roze hocha la tête d’un air pensif. Elle voyait Nath’ auréolé de rouge sang mais si elle ne parvenait pas à faire en sorte de ne pas halluciner, elle se disait tout de même que ce n’était que ça. Elle n’entrait plus dans des crises de terreurs plus qu’intense comme lorsqu’elle était jeune… Non, elle n’avait plus vraiment peur, mais elle le voyait quand même. Pourquoi sur Nath’ ? Elle se posa sérieusement la question jusqu’à ce qu’elle réalise qu’il lui avait adressé la parole depuis deux bonnes minutes. « Hein, quoi ? Ah oui, la musique. Pardon, je rêvassais. » cela rendait dingue Raph’ que Roze fasse ce genre de chose mais en général Raphaël Gibson VS la schizophrénie donnait un résultat de 0 à 1 en faveur de la maladie.

Reposant les yeux sur ses partitions, elle se concentra sur la musique et sans plus regarder les feuilles, elle posa les mains sur le piano et ses doigts coururent avec hardiesse et rapidité sur le clavier dans une mélodie romantique à souhait. Elle chantait en même temps un premier jet de parole – rien n’était définitif puisqu’il manquait les arrangements avec les autres instruments – ce qui fit accourir presque tous les animaux de la maison.

Si Roze était malade, elle avait aussi ce pouvoir étrange – et partiellement du à son isolement au sortir de l’enfance – qui faisait que tous les animaux accouraient au son de sa voix pour peu qu’elle soit un minimum concentré sur cette dites voix, donc quand elle chantait en général. Des papillons – les animaux préférés de Roze – voletaient autour d’elle lui chatouillant les oreilles mais elle était tellement concentrée qu’elle le sentait à peine. Finalement, elle posa la dernière note et se tourna vers Nath’ après avoir jeté un œil à ses amis les animaux et donné une caresse à Kapri et Caprice, les plus proches.

« Excuse les animaux, tu sais comment c’est avec moi. Une chanson et on est envahi. » Surtout chez elle disons le franchement. « Alors, cette chanson sinon ? Bien entendu, les paroles ne sont pas définitives mais je pense garder le thème dominant quoi qu’il arrive. » La chanson parlait d’un couple qui vit loin du monde dans un coin d’Irlande et qui un jour s’ouvre aux autres, ils se rendent alors compte que finalement, on ne vit pas que d’amour et d’eau fraîche (pour résumer) et que c’est au contact des autres que l’amour est plus fort. Bref, une ballade quoi… dans toute sa splendeur !

Roze posa le coude sur le rebord du piano (oui, pas sur les touches logique) tandis que son autre bras faisait courir ses doigts sur le marbre noir et blanc sans pour autant appuyer sur les touches. Roze avait de trop petites mains pour être pianiste, finalement un clavier lui correspondait mieux, mais ce piano avait une histoire importante à ses yeux et un clavier peut imiter le son d’un piano, il n’en produit pas la pureté. Hors pour une jolie ballade – même teintée de son de rock pur – il fallait un peu de piano, pour la touche romantique.

« Ce n’était pas de l’impro complète non, j’ai déjà écrit un jet de parole quelque part… » Mais où ? Hum… cette question était difficile. Roze se souvenait avoir montré la feuille à son mari pour qu’il l’aide sur quelques rimes (après tout, Roze était Allemande d’origine) mais où l’avait-elle mise ensuite ? Elle haussa les épaules, laissant cette question pour plus tard, de toute façon, il faudrait forcément les modifier un peu alors ce n’était pas très grave si elle la réécrivait. La tendance papillon de Roze lui faisait souvent perdre ses affaires mais elle n’y prenait pas garde, se disant que les choses finiraient bien par revenir à leur place toutes seules. Si ce n’est pas de la positive attitude ça !

« Oui, oui, je vais la chanter. Keira et moi nous sommes mises d’accord sur le fait que je chanterais les chansons douces et elle tout ce qui bouge. Ma voix se prête mal aux excès d’hurlement. Pas que je ne sois pas capable de forcer ma voix mais ça donne plutôt l’impression que je piaille. Les chœurs seront très bien pour moi sur l’autre type de chanson… Il y aura peut-être des exceptions dans le futur mais pas sur notre album actuel. C’est plus sage. » Elle fit signe que oui à la question suivante mais comprenant aussi sa portée (ne pas oublier que même si elle est folle dingue, elle est aussi très intelligente), elle poursuivit « Viens avec moi, j’ai dû poser la guitare de Edward dans le patio. J’ai essayé d’en jouer mais cet instrument est plus large que moi ! » Et elle ne savait pas en jouer mais, à la base, elle ne savait pas jouer de piano non plus donc bon…

Elle conduit Nael dans le patio et lui tendit les partitions et la guitare d’Edward. Elle n’avait pas de basse par contre… Quand elle se tourna pour prendre le plateau de biscuits, elle vit une ombre s’approcher d’eux, une ombre vêtue de noire et comme les hallucinations n’avaient pas cessés, elle hurla, lâcha le plateau et courut se cacher derrière Nael « Le croque-mitaine ! Le croque-mitaine !!! Kapri, attaque ! » Le gros chien noir sauta sur l’étranger en grondant tandis que Roze tremblait derrière Nael (qui était bien plus grand qu’elle, encore heureux). Elle passa prudemment la tête sur le côté et détailla l’homme. « Ah non, c’est pas le croque-mitaine. C’est juste le facteur. Lâche-le Kapri. » Le chien se calma aussitôt et s’assit à côté du facteur qui était un peu sonné (mais pas blessé, Kapri ne mordait que sur ordre, attaquer signifiait pour lui mettre à terre). Roze quitta sa cachette et tendit la main au facteur avec son plus beau sourire de poupée de porcelaine, ce geste fit gronder Kapri qui n’acceptait pas que quelqu’un d’autre que son maître Edward touche sa maîtresse. Enfin, c’était surtout que Roze supportait mal le contact et que les animaux – en contact magique avec elle – le savaient. Le facteur se leva néanmoins en grommelant jusqu’à ce qu’il voit le beau sourire de la petite Roze, si petite et si fragile qu’il oublia complètement qu’elle venait d’ordonner à son chien de lui sauter dessus. Ils échangèrent quelques politesses, Roze prit son courrier et retourna sous le patio après avoir ordonné à son chien de la suivre en prononçant simplement son nom. Kapri marcha donc sur ses talons avec toute la fidélité qu’un animal pouvait porter à sa maîtresse. Ramassant d’un air tranquille le plateau, elle laissa les gâteaux aux animaux. « Il va falloir que j’aille chercher d’autres gâteaux… » Dit-elle d’un air contrarié avant de reposer ses prunelles rêveuses sur son ami. « Et si nous prenions le thé ? » Comme si rien ne s’était passé.

Roze servit le thé et alla chercher de nouveaux petits gâteaux. Elle installa le tout sur sa petite table dans le patio comme s’il s’agissait d’une dînette. Il faut dire que toute la maison ressemblait à sa propriétaire. Si elle était une jolie poupée de porcelaine, le cottage ressemblait lui à une maison de poupée avec sa verdure et ses rideaux de dentelles. Elle servit son ami d’un air redevenu tranquille, Kapri toujours dans les pattes au cas où. Elle prenait sa première gorgée quand il lui posa sa question. Elle immobilisa son regard clair sur lui et ne lui répondit pas immédiatement.

« Non, je ne crois pas au croque-mitaine. » finit-elle par dire simplement avant de poser sa tasse avec la grâce qu’on lui connaissait. « Celui que j’appelle le croque-mitaine n’est pas le monstre que les parents nomment pour faire peur aux petits enfants, c’est un meurtrier qui a tué ma nurse en lui coupant la tête devant moi alors que j’avais huit ans et qui m’a torturé pendant six ans. » Elle but une nouvelle gorgée, sa voix n’était ni hésitante, ni gênée, elle exposait simplement des faits. « C’était une torture psychologique, c’est à cause de lui que je suis folle aujourd’hui. Le Croque-Mitaine c’est le nom qu’il se donnait. » Elle haussa les épaules et regarda derrière elle un instant, comme si elle vu quelque chose avant de se concentrer à nouveau sur le jeune garçon. Tout ça était de l’histoire ancienne, un fait divers sordide parmi tant d’autres qui se produisaient chaque jour… mais ce n’était pas pareil lorsqu’on le vivait, oh non, c’était même totalement différent… Roze avait été marqué à vie par ce qui s’était passé ce jour là et plus encore par ce qui en avait découlé. Les menaces de visu tout d’abord puis, quand elle était entrée à Poudlard, les lettres lui disant que c’est à elle qu’on arracherait la gorge si elle parlait trop… Il lui avait fallu six ans pour dire aux adultes ce qui en était, six ans de cauchemar qui la hanteraient pour toujours.

« Enfin, folle, c’est sûrement ce que toi tu mets comme terme sur la chose mais en réalité c’est une maladie comme une autre, qui se soigne, je me soigne. D’ailleurs, je suis presque normal la plupart du temps. Mais aujourd’hui j’ai des hallucinations, d’ailleurs, depuis ton arrivée je te vois entouré d’un halo de sang, c’est assez déplaisant. » Une gorgée de thé, en apparence Roze était absolument imperturbable. En réalité, elle était surtout très concentré pour ne pas piquer une nouvelle crise pour rien. Après tout, ça n’aidait personne et ils avaient une chanson à faire avancer après le thé !