[Thème - PV] Fleur de Prunier.

« Je t’aiderais si tu veux. » Camille était du genre plutôt gentil une fois qu’il avait accordé son amitié à quelqu’un, et il pouvait ensuite se plier en quatre pour ses amis, en fait, le plus dur avec lui c’était d’arriver à lui faire passer le cap assez difficile de la méfiance naturel qu’il éprouvait envers les autres. Avec Alix, il y était parvenu depuis plusieurs semaines maintenant… le contraire aurait été étonnant puisqu’ils étaient vraiment pareil par certains côtés, surtout dans leur relation avec leur frère et leur sœur, et aussi parce qu’ils étaient orphelins tous les deux, maintenant, il n’en restait pas moins qu’ils étaient aussi relativement différents puisqu’ils avaient chacun leur propre caractère et que Camille était clairement le plus taciturne des deux. Comme le remarquait souvent Nina, il ne parlait pas beaucoup mais il réfléchissait énormément avant de le faire, pour les amitiés, c’était pareil, il lui fallait le temps de la réflexion, peut-être tout simplement qu’il n’aimait pas se tromper, encore moins lorsqu’il s’agissait de mettre en jeu son affection.

« C’est dommage, en effet, mais nous n’y pouvons pas grand-chose à part continuer à nous battre… » Il posa l’arrière de son crâne contre le tronc du prunier et regarda ses fleurs un moment en rêvassant à l’époque bénie où Nina n’avait que lui (et optionnellement Hugh). Il la revoyait encore courant vers lui parce qu’elle avait fait une bêtise, il la voyait aussi se mettre entre lui et ceux avec qui il se battait parce qu’on s’était moqué de son statut d’adopté… C’était le bon temps, maintenant ils étaient grands et l’univers de Nina s’était élargi alors que le sien semblait encore tout étriqué…

« Tant mieux alors, peut-être que nous on deviendra directement des adultes. » Ou pas, mais l’espoir fait vivre comme on dit.

« Ne t’inquiète pas, tu ne seras jamais pathétique. » Il lui accorda alors un de ses rares sourires. Il disait ça, certes pour la rassurer, mais il le pensait aussi vraiment. Bien entendu, leur comportement à tous les deux étaient pathétiques aux yeux de certains, mais ça n’avait rien à voir avec les petits papillons qui les entouraient, eux, ils aimaient avec force, ils aimaient avec sincérité, alors peut-être qu’ils faisaient fausse route, mais au moins ils y mettaient tout ce qu’ils avaient et n’abandonnaient pas au premier obstacle venu… Pour Camille, c’était ça la véritable affection, et ce n’était à ses yeux aucunement pathétique (bien qu’un peu inquiétant tout de même par moment).

« Oh bah il peut aller courir après Ziegler, mais ça lui laisse quand même beaucoup de temps pour nous ennuyer. Il est sûrement jaloux de notre bonne entente, mais c’est un peu sa faute, c’est lui qui a brisé notre trio le premier en se faisant des nouveaux amis. » Il ne fallait pas qu’il s’étonne ensuite que son frère et sa sœur ne lui fasse pas partager la moindre de leurs expériences communes ! Surtout que Nina et Camille avaient réellement l’impression qu’en dehors des moments où il essayait de les monter l’un contre l’autre, il n’était pas là pour eux.

Camille regardait toujours les fleurs d’un air absent, toutefois, il semblait plus détendu qu’à l’ordinaire. Le jeune Moreau était habituellement de ces enfants qui réfléchissent trop ce qui leur donne un air sérieux et trop en avance sur leur âge, mais là, alors qu’il parlait avec Alix, il se laissait juste bercer par l’ambiance d’une journée de printemps et les douces résolutions d’un avenir étincelant… parce qu’il était évident qu’à eux deux, ils étaient plus forts, à eux deux, ils finiraient par réussir à faire comprendre à leur fratrie respective que c’était ce lien là le plus fort. Plutôt pessimiste par nature, il se sentait pourtant étrangement confiant… cela ne brisait pas le sourd sentiment de sa propre chute, bien ancrée quelque part dans son être, mais cela l’assourdissait suffisamment pour qu’il n’y prenne pour l’heure pas vraiment garde. Il écoutait simplement le vent frais dans les fleurs et la voix de son amie qui résonnait dans ses oreilles avec chaleur.

« Si nous n’arrivons pas à vaincre, alors personne ne le pourrait. » En effet, ils étaient décidés, solidaires et plutôt intelligents (surtout lui, comment ça Alix c’est pas Nina ? Ranapéter d’abord !), alors si la mission s’avérait être un échec c’est que personne d’autre ne pourrait la réussir ne pourrait la réussir, qu’ils s’étaient fourvoyés dès le départ. Ce n’était pas impossible car au fond ils étaient encore des enfants et ils ne savaient pas exactement ce qui était réalisable et ce qui ne l’était pas. Peut-être qu’enfermer un cœur était chose impossible à faire, peut-être, mais tant qu’ils n’auraient pas essayés, ils ne le sauraient pas. C’était aussi ça, grandir, pas vrai ?

« Je pense aussi que c’est une forme de jalousie, mais qui remonte à bien plus loin que Poudlard. Nina et moi nous avons le même âge, alors nous avons toujours été plus proches entre nous qu’avec Hugh… Je me demande seulement s’il en a conscience. » Tout en parlant, il avait posé son regard azur sur la jeune fille à ses côtés et lui adressa un petit sourire plein de sympathie. S’il était clair que le sujet de son frère l’ennuyait, ce n’était pas bien grave non plus, ce n’était pas comme les filles qui tournaient autour de Martin, c’était son frère quoi, pas un étranger. Et puis, avec un peu de chance (parfois Camille est un grand utopiste, il ignorait lui-même ce trait de caractère chez lui) Hugh se rendrait compte de sa propre bêtise un de ces quatre.

« Oui, j’aime beaucoup aussi, surtout que c’est le retour des oiseaux migrateurs, je vais pouvoir dessiner autre chose que des hiboux ou des moineaux ! » Parce qu’on ne le dira jamais assez mais la plus grande passion de Camille après Nina c’était les oiseaux, mais l’hiver était un peu la morte saison pour l’étude de ces petites bêtes, du coup il se réjouissait du retour prochain des hirondelles à Poudlard, il escomptait même qu’elles fassent un nid près de sa fenêtre, il avait tout agencé pour les y encourager en tout cas. Ne restait plus qu’à espérer que les bestioles d’Hagrid ne feraient pas fuir ces doux animaux… ce qui était, en soi, une autre paire de manche !

Il est vrai que Camille n’aurait pas aimé non plus être séparé de Nina, mais il n’avait pas plus apprécié que ça que ce soit Hugh qui parte non plus. Quand ils étaient plus jeunes, dans leur village, ils étaient dans la même classe car les niveaux étaient mélangés, et les rares fois où ils avaient été séparés, ils étaient dans la même école donc ils passaient les récrés ensemble. Maintenant que tout ça n’existait plus, c’était devenu très difficile pour Camille mais il réagissait clairement de manière plus posée qu’Hugh vis-à-vis de ça, sûrement parce que leur caractère était diamétralement opposé. Et encore, le dire ainsi était un euphémisme, Hugh ayant toujours eu un caractère beaucoup plus proche de celui de Nina que de celui de son frère de sang (parfois, mieux vaut ne pas chercher d’explication logique hein ?).

« Il a treize ans, un an de plus que Nina et moi. » Puis ajouta « Mais c’est lui qui s’est créer son propre cercle en nous excluant, je ne comprends pas de quoi il se plaint au final. » Parce que quand ils étaient arrivés à Poudlard, Nina et lui avaient espéré recréer le trio d’antan, mais autant pour leurs rêves éveillés… c’était lettre morte, Hugh les avait dès le premier jour laissé à l’abandon, livré à eux-mêmes, resserrant ainsi (si cela était possible) les liens du frère et de la sœur benjamins des Moreau.

Hochant ensuite la tête pour répondre par l’affirmative à la question d’Alix, il précisa néanmoins « Mais je ne dessine presque que des animaux et surtout des oiseaux. J’adore l’ornithologie et je crois que j’aurais bien aimé être un oiseau. » Parce que les préoccupations sociales de ces animaux étaient nettement plus simples que celles des hommes, par contre, même si voler ne le dérangeait pas outre mesure, il n’était pas un fan absolu du genre, d’ailleurs il ne faisait pas parti de l’équipe de Quidditch… pour lui, un oiseau, c’est plus qu’un animal volant, leurs ailes n’étaient qu’un atout de plus de ces charmantes bestioles.

« J’ai commencé quand j’avais sept ans après une visite au zoo où on devait rendre un devoir avec un dessin sur l’animal qui nous avait le plus marqué, moi c’était un perroquet, et après j’ai approfondi le sujet. » Et sans intention aucune de se vanter, il était plutôt bon ! (Ok, il se vante, mais ça ne lui arrive pas souvent alors on lui pardonne XD)

Vous avez remarqué ? Camille n'avait jamais autant parlé à quelqu'un d'autre que Nina depuis son entrée à Poudlard ! Cela prouve la réelle complicité des deux jeunes gens...

« Je ne sais pas… J’aime bien voler mais je préfère les regarder eux le faire. » Camille était un contemplatif, normal, cela convenait à son caractère renfermé, un brin trop casanier sûrement. Il ne loupait jamais rien lorsqu’il observait les choses, il observait tout ce qu’il pouvait, tant qu’il pouvait, au fond il parlait peu (encore qu’il eût battu tous ses records ce jour là) mais il en profitait pour mieux apprendre tout le reste sur les personnes qui l’entouraient. Après tout, ils étaient tous si bavards qu’il suffisait de les regarder un peu pour se rendre compte de tout ce qu’ils cachaient… Mais si ça donnait un air de maturité à Camille que d’être ainsi toujours à observer sans rien dire, il était surtout trop paresseux (à ce niveau là) pour faire l’effort de faire autre chose, lui ce qu’il aimait c’était lever le nez vers les oiseaux sous un beau ciel clair et juste ne rien faire…

« Je crois… que cela m’a fait plaisir aussi. » Et il en était le premier surpris ! Mais ça, il ne le dis pas non plus, préférant se taire plutôt que dire des bêtises. C’est qu’il pouvait être très gauche quand il s’y mettait et il n’y avait pas grand-chose qu’il aimât moins qu’être pris au dépourvu, de fait il n’ajouta rien de plus, de toute façon Alix s’apprêtait à partir. Lui allait probablement rester encore un peu.

« Bonne soirée. » Conclut-il sans bouger de sa place. Il la regarda un moment partir et s’adossa à nouveau à l’arbre, levant les yeux vers les fleurs de pruniers. L’une d’elle lui tomba sur le nez et il la prit, la tournant entre ses doigts en pensant vaguement à Alix, une de ses rares amies, mais avec l’esprit étrangement silencieux aussi. Il ferma les yeux, la fleur de prunier dans sa paume et il resta encore un bon moment ainsi à attendre d’avoir trop froid pour rester dans cet état de béatitude. En effet, il décida de rentrer uniquement lorsqu’il sentit l’humidité de la soirée tomber sur lui, l’arrachant à ses rêveries inconscientes. Cela lui fit de la peine de devoir replier son goûter et de reprendre la direction du château, toutefois, ce n’était que le début du printemps et il savait que s’il restait plus longtemps il prendrait froid… Il retourna donc dans sa salle commune, impatient que le printemps s’installe définitivement…