Irma, ce jour, était mélancolique et ressentait le besoin de s'épancher. Or, qui donc pouvait l'écouter d'une oreille attentive et l'approuver en tout, si ce n'était son vieil et fidèle ami Argus, cet être bon, compréhensif quoique peu lettré? Elle se rendit donc sur les lieux de travail du susdit concierge, frappa poliment; puis entra, et prit place sans façon sur une chaise face à lui, qui était déjà assis. Ils travaillaient tant, tous les deux, qu'ils pouvaient exceptionnellement s'accorder une petite pause.
Puis, elle commença de lui raconter. D'abord, ses démêlés de rentrée avec les élèves; c'était un sujet maintes fois revisité entre eux, ils partageaient le même sentiment d'être escroqués par la bêtise crasse et l'insolence de ces êtres vicieux. Mais aussi elle s'exprima sur un sujet moins courant entre eux; elle lui parla de ce grand être, lumière de sa vie, qu'était son Fifi d'amour, son galant, son bien-aimé. Elle expliqua à Argus comme, même parfois pendant son travail qu'elle aimait tant, il lui arrivait soudain d'être saisie; de manquer d'air; et de réaliser que c'était simplement le nombre d'heures qui la séparait de sa promenade amoureuse auprès du professeur de sortilèges qui la faisait ainsi suffoquer.
Elle savait qu'Argus la comprendrait et ne manquerait pas de la soutenir, c'est pourquoi elle alla plus loin, lui racontant ses doutes les plus secrets: que parfois elle se réveillait la nuit rongée d'inquiétude et hantée de jalousie. Son Filius n'en aimait-il pas une autre en secret; peut-être, en cette minute, était-il en train de rêver d'une autre pendant qu'à juste titre elle se tourmentait? Même, n'allait-il pas la négliger au profit de son travail auquel il accordait trop de temps et d'importance au goût d'Irma? Il est vrai qu'elle même avait souvent du mal à quitter ses livres, alors...
Songeuse, Irma attendit de savoir quel était le sentiment d'Argus sur tous ces sujets.
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