Et toi, tu es là pour quoi ? [PV]

- At… Atch… Atchoum ! Pandore ? Tu n’aurais pas un mouchoir ? Demanda Louise qui venait de contaminer toute la pièce, le nez complètement bouché, en se tournant vers son amie.
Pour fuir le brouhaha ambiant d’une salle commune bien remplie en ce début de vacances, les deux fillettes s’étaient réfugiées dans leur dortoir pour entamer la longue liste des devoirs à rendre à la rentrée. Ou, plutôt, Louise s’était réfugiée dans le dortoir pour commencer ses devoirs tandis que Pandore, allongée sur son lit, était plongée dans la lecture d’un énorme ouvrage qui semblait essentiellement constitué de photographies de paysages irlandais. La petite brune daigna toutefois relever la tête pour lancer un regard perçant à sa camarde de chambrée, l’air tout à la fois anxieux et un brin excédé.
- Franchement, Louise, c’est ridicule… Tu devrais vraiment aller à l’infirmerie ! Affirma-t-elle d’un ton péremptoire, en tendant un paquet de mouchoirs à la Poufsouffle.
- Ne dis pas de bêtise, Rétorqua Louise d’une voix que l’angine rendait rauque, ça va probablement passer tout seul. Assura-t-elle, d’un ton cependant moins convaincu qu’elle ne l’eût souhaité, car une nouvelle quinte de toux vint l’interrompre. Pandore, qui commençait certainement à en avoir assez d’entendre la blondinette éternuer comme une malheureuse à longueur de journée et – surtout – de nuit, leva les yeux au ciel de manière caractéristique.
- Bon, maintenant, ça suffit ! S’exclama-t-elle, alors que Louise se remettait à tousser. La mine décidée, elle sauta au bas de son lit et se dirigea d’un pas vif vers son amie. Je sais parfaitement pourquoi tu ne veux pas aller voir l’infirmière, et c’est franchement pathétique ! Lève-toi, je t’emmène. Ordonna-t-elle avec une détermination farouche.
- Mais non… Mais enfin… Mais pas du tout… Baragouina Louise, qui rougit de gêne. La vérité était que Pandore l’avait percée à jour sans peine : la seule et unique raison pour laquelle elle ne s’était pas encore rendue à l’infirmerie pour faire soigner son angine était qu’elle avait peur de Madame Pomfresh. Ses airs revêches et sa voix cassante terrifiaient la timide Poufsouffle qui s’était toujours fait un point d’honneur à ne jamais avoir affaire à elle. Malheureusement, c’était compter sans l’obstination d’une Pandore entêtée de nature, et visiblement déterminée à traîner son amie à l’infirmerie. De fait, les sourcils froncés et la mâchoire légèrement avancée de la fillette ne laissaient guère place au doute sur son opiniâtreté.
- Louise Waugh ! Coupa-t-elle d’un ton sec, sans laisser à la Poufsouffle l’occasion de se justifier plus avant, Si tu ne me suis pas de ton plein gré, je te jure que je t’assomme pour t’y emmener ! Décréta la jeune sorcière en gratifiant sa camarade d’un regard fulminant face auquel Louise ne put que céder : elle avait déjà un gros rhume, elle n’avait pas envie d’écoper d’une énorme bosse en prime !

C’est ainsi que la fillette s’était retrouvée allongée d’autorité sur un lit de l’infirmerie par une Madame Pomfresh grommelant à qui voulait l’entendre que, si Louise était venue la voir plus tôt, elle aurait pu tuer l’angine dans l’œuf et éviter bien des éternuements à sa jeune patiente.
- Je lui avais bien dit ! Appuya Pandore, d’un ton que la pauvre Louise estima affreusement triomphal, en accordant à son amie un coup d’œil suffisant. Et encore, Renchérit-elle d’une voix malicieuse, elle ne serait jamais venue si je ne l’avait pas amenée ! Louise esquissa une grimace horrifiée en entendant cela mais demeura muette : c’était de bonne guerre. N’avait-elle pas, après tout, empêché Pandore de dormir correctement, au cours des nuits passées, à force de se moucher et de tousser sans arrêt ?
- Hé bien la prochaine fois, Répondit l’infirmière, en fourrant sans ménagement un vieux pyjama blanc et bleu dans les mains de Louise, Je compte sur vous pour me l’amener directement. Elle posa une main sur le front de la fillette, pinça les lèvres d’un air franchement mécontent (une chance, songea Louise, qu’elle n’ait pas le droit d’enlever dans points aux élèves ! Sans cela, Poufsouffle viendrait sans doute de plonger dans les abysses) et bougonna d’une voix abrupte :
- Enfilez-moi ce pyjama, je vais vous chercher quelque chose.
Tirant les rideaux qui entouraient le lit, elle partit en direction de son bureau. Dès que l’infirmière eut disparu, Louise se tourna vers Pandore, l’air à la fois furieuse et résignée :
- Merci Pandore. Merci beaucoup. Dit-elle sombrement. Mais son sarcasme fut gâché par un éternuement magistral. Pandore contint difficilement un sourire railleur.
- Je vais te laisser te changer. Je repasserai plus tard, si tu veux. Annonça-t-elle, feignant de ne pas avoir remarqué la mauvaise humeur de son amie. Avant que cette dernière n’ait eu le temps de protester ( « Non ! Pandore ! Ne m’abandonne pas ! Madame Pomfresh va me manger ! »), Pandore avait filé, sans doute heureuse de pouvoir retourner à ses paysages irlandais sans être perturbée par les reniflements de Louise.

La petite blonde fronça le nez et poussa un soupir découragé : très bien, puisque tout le monde semblait avoir décidé qu’elle devait rester à l’infirmerie… Elle passa le pyjama et s’assit sur le bord du lit pour attendre docilement le retour de Madame Pomfresh, qu’elle entendait farfouiller dans son bureau. Malheureusement, son rhume de la laissa pas tranquille longtemps :
- Atchoum ! Eternua-t-elle avec force (aïe la gorge), avant de réaliser avec horreur qu’elle avait laissé ses mouchoirs dans le dortoir. Rhâ ! Mais quelle gourde ! marmonna-t-elle en reniflant d’un air misérable.
- Excuse-moi… Dit-elle d’un ton contrit, en écartant le rideau pour s’adresser à l’élève qui se trouvait dans le lit à côté du sien, Tu… Tu n’aurais pas un mouchoir par hasard ? Demanda-t-elle, l’air d’attendre le Sauveur.