[Thème] En rythme !

Ehawee n'était ni très ponctuelle, ni très en retard, elle allait et venait dans ses activités selon son idée du moment, son heure d'arrivée était donc très aléatoire, et elle pouvait tout aussi bien être au avance que le contraire. Autrement dit, elle n'était jamais pile à l'heure, mais toujours l'un ou l'autre, peut-être sa tendance à ne rien faire à moitié ? En tout cas, elle était clairement très motivée et elle avait de l'énergie à dépenser et à revendre, personne ne pouvait en douter, rien que dans la façon dont elle bougeait, avec rapidité et fluidité, dans la salle, semblant ne pas savoir quoi faire de son corps pour le moment, vu que le top départ n'avait pas été donné.

« Je suis toujours échauffée ! J'ai couru tout à l'heure ! Mais je peux faire des abdos si tu veux, ou alors des étirements, c'est comme tu veux ! » Grand sourire, Ehawee n'avait pas peur de faire du sport la chanceuse et le fait était qu'elle en faisait presque tous les jours pour canaliser son hyperactivité. Sur ce dernier mot – que l'on colle trop souvent à tord -, il faut préciser que la demoiselle était loin de l'être au sens médical du terme, chez elle, c'était simplement un trait de caractère. Elle n'avait aucun mal à se poser et à réfléchir quand c'était nécessaire, le problème étant le suivant : elle en voyait très rarement la nécessité. Mais ses parents avaient bon espoir qu'avec la maturité, elle serait moins énergique à tout va.

« C'est bizarre, les tamtams, ce ne sont pourtant pas des instruments très anglais. » Elle savait bien qu'avec la mondialisation rien ne restait dans sa culture d'origine, mais tout de même, cela lui semblait étrange que la méthode d'entraînement de son grand-père soit la même que celle de Elyna. Ou peut-être que cela la vexait qu'une non amérindienne face appel à des choses de sa culture... Ehawee peut être très tatillonne sur la question de temps en temps.

« Je dois faire comme toi c'est ça ? » demanda-t-elle en guise de précision avant de suivre le mouvement et d'imiter sa camarade et co-présidente du club. Le tamtam, Ehawee maîtrisait à peu près, elle l'avait dit, elle dansait dessus lors des rites d'été dans sa tribu (enfin « sa », on se comprend, celle de son grand-père quoi!), mais ce qui lui posait problème c'était surtout les rythmes des musiques inconnus, où la basse et la batterie n'étaient pas toujours assez présentes pour lui donner une base solide.Du coup, elle avait des temps de retard ou d'avance sur ses camarades de Sterne parce qu'elle n'arrivait pas toujours à se fixer. Elle comptait, mais elle ne devait pas le faire bien, parce que cela ne fonctionnait pas. Le pire étant quand elle dansait avec quelqu'un d'autre (souvent ce pauvre Evan, victime désignée volontaire – si, si, c'est possible -), parce qu'elle arrivait vers la personne avant qu'elle ait terminé son enchaînement. Une ou deux fois, elle était tombée sur son camarade ! Heureusement qu'il était 1) plus âgé, 2) plus grand, 3) plus fort... sinon, elle lui aurait fait mal. Bref, Ehawee n'était pas toujours très douée, vous l'aurez compris !

« Oh, moi, je ne suis jamais fatiguée ! » Ce n'était pas tout à fait vrai, parce qu'elle dormait très bien la nuit, donc cela devait bien dire qu'elle était fatiguée à un moment ou à un autre, mais à une heure comme celle de cet entraînement, loin de l'heure de dormir, Ehawee ne ressentait absolument aucune fatigue. Et quand cela était, elle savait attendre d'être dans son lit ou, au pire, dans un cours ennuyeux avant de se laisser aller. Cela dit, elle n'était réellement que rarement fatiguée en journée, ennuyée, parfois, mais pas fatiguée, et ce quelque soit le nombre d'entraînement qu'elle ait fait. Il y avait des jours où elle cumulait le quidditch, la danse et le tir à l'arc, pour autant, elle ne se sentait pas du tout fatiguée, bien au contraire. La poussée d'adrénaline provoquée par l'exercice la rendait encore plus énergique.

« Si tu le dis. » Elle se mit en place sans rechigner mais elle était toujours vexée que ses tamtams ne restent pas là où ils devaient, donc dans les tribus des peuples qui savaient vraiment en jouer. Elle n'était plus assez puérile pour faire la tête pour ça, mais cela la contrariait tout de même, d'où l'absence de réponse très développée contrairement à d'habitude. Elle ne voulait pas se montrer plus bête qu'elle n'était, mais parfois, quand on a rien de gentil à dire, il vaut mieux se taire.

« Ok, mais fais attention, j'ai tendance à faire de grands gestes. J'ai déjà fichu plein de baffes à mon frère comme ça au réveil ! » Ezhno avait la tâche parfois difficile pendant les vacances d'aller réveiller sa sœur, il y avait des moments où il s'en mordait carrément les doigts parce qu'il se prenait de sacrés tartes. Ehawee bougeait de manière assez extravagantes même quand elle dormait et quand elle avait les yeux fermés. La modération et la pondération étaient deux choses qu'elle ne possédait pas, qu'elle ne posséderait même peut-être jamais. Tout dépendrait de comment elle évoluerait avec les années, et ça, seul l'avenir le dirait.

Elle ferma donc les yeux et commença à bouger tranquillement puis plus amplement vu que c'était plus fort qu'elle. Elle les rouvrit ensuite, elle avait compris la consigne semblait-il. Elle croisa les pieds et fléchit les jambes avant de répondre en se relevant avec un grand sourire « Non, je pense que ça devrait aller. » Elles commencèrent donc l'exercice, Ehawee referma les yeux et tenta d'aller sur le rythme que prenait les instruments de ses ancêtres. Elle fredonna même un chant tout en tournant sur elle-même, à voix basse, incapable de s'en empêcher. « Au coeur de la terre qui reverdit /Au milieu de la fumée sacrée /Je vois les empreintes de mes ancêtres, /Dans mon errance/ De lieu en lieu, /Au coeur du monde visible /Je vois la fumée qui s'élève /Et les collines en rang, /Dans mon errance /De lieu en lieu, /Je vois les frondaisons se dresser et la lumière du jour /Au coeur de mon invisible. » Elle ne connaissait cette chanson qu'en anglais parce qu'elle n'avait pas appris les paroles en Sioux, il faut dire que ce n'était pas un chant propre à sa tribu, il lui semblait qu'il appartenait à une autre, c'était sûrement pour ça qu'on ne lui avait pas appris les paroles dans sa langue alors qu'elle parlait sioux presque comme un natif de la réserve. Tous les indiens parlaient aussi bien anglais que la langue de la tribu de toute manière puisqu'ils avaient été colonisés, certains parlaient espagnols aussi, si ils étaient proches de la frontière avec le Mexique.

A la fin de la musique, elle s'arrêta et rouvrit doucement les yeux. « Alors, c'était comment ? »

L'exercice commença et Ehawee, l'air de rien, fit exactement ce qui lui avait été demandé. Elle y ajouta seulement sa petite touche personnelle, soit un chant de la tribu. A noter que, comme nous l'avons dit précédemment, ce n'était pas du tout un chant propre à sa tribu à elle, c'était un chant que l'on faisait parfois lors des fêtes, mais elle savait qu'il l'était aussi dans d'autres tribus que la sienne. Tous les peuples des américains d'origines n'étaient pas sectaires, beaucoup se transmettaient, entre eux, leur savoir... du moment que chacun savait rester chez lui, tout allait toujours très bien. Même si Ehawee aimait les traditions guerrières et qu'elle tirait à l'arc d'une manière honnête pour quelqu'un de son âge, elle n'avait jamais été pour les guerres de territoires. Il n'y en avait plus désormais puisque c'était l'état qui faisait les limitations des réserves, mais elle savait qu'avant la grande colonisation des terres sauvages, il y en avait, régulièrement. Beaucoup de guerriers étaient morts au combat, certains, même, n'avaient pas pu rejoindre les terres sauvages. Ehawee le regrettait sincèrement. Prendre le scalp était barbare, elle était bien contente que cela ne se fasse plus de nos jours.

Lorsqu'elle se stoppa, Elyna lui demanda ce qu'elle chantait. Quel manque cruel de culture ! Oui, vraiment, c'est ce qu'elle pensait. Ehawee avait l'intolérance de la jeunesse, tout ce qu'elle connaissait devait, théoriquement, être connu par tous. Cependant, elle répondit de bonne grâce.

« C'est un chant des peuples amérindiens. On le psalmodie lors de certains rituels, au rythme des tambours. » Depuis qu'elle était à Poudlard, elle pouvait moins le faire. Avant, elle allait à la réserve avec son père pour les grandes fêtes, presque à chaque petite vacances autrement dit, sauf noël, car c'était une fête purement chrétienne, donc là, c'était son grand père qui venait en Irlande. Elle avait donc vécu pas mal de festivités amérindiennes, elle était au point à ce niveau.

Elyna annonça le nouvel exercice, Ehawee se mit en place. « Je suis prête ! » Elle commença à le faire, et lorsque la musique se termina, elle s'étira, elle commençait à avoir des fourmis dans les muscles dis donc !

« Dis, on peut s'arrêter là ? J'ai plutôt envie d'aller courir là ! En plus, c'est bientôt l'heure de mon entraînement de quidditch ! » Elle n'attendit pas la réponse (c'était l'un de ses défauts), et elle se dirigea vers ses affaires. « On se voit à la même heure la semaine prochaine ? » Et elle partit, sans demander son reste, en sautillant aussi joyeusement qu'elle était venue. Même si elles n'avaient fait que deux morceaux, Ehawee avait vraiment l'impression d'avoir progressé.