On boit pour oublier... [PV]

Megan n'était pas (loin s'en fallait) la plus fêtarde des jeunes femmes du Royaume-Uni. Que faisait-elle donc alors dans une boite de nuit ? Bonne question... En réalité, elle avait tout simplement été entraînée là par sa grande soeur, Jennifer Jones. Cette dernière avait fait une brève réapparition dans leur vie et avait tenu à fêter l'évènement avec sa sœur cadette. Seul problème, elle venait de disparaître au bras d'un charmant jeune homme et Meg' était seule, un peu déprimée. Elle regrettait de ne pas être chez elle avec un bon bouquin, ou alors à l'atelier... elle n'avait pas terminé de coudre la dernière création de Myrielle et sa patronne était plus qu'exigeante sur la vitesse d’exécution de ses employées. Elle soupira et termina son verre. Il était vide. Elle en était à combien déjà ? Elle avait perdu le compte lorsque Jenny en était arrivé à lui parler de son safari dans la brousse africaine avec des sorciers autochtones. C'était il y avait déjà plus d'une heure...

« Vide... » Nota-t-elle à voix haute alors qu'elle était seule. Elle se leva pour aller en chercher un autre. Certains regards masculins se tournèrent vers elle sur son passage ; Si Megan n'avait aucun succès avec les hommes c'était parce qu'elle était timide et renfermée : quand on ne sort pas, on ne fait aucune rencontre. Pourtant, elle était véritablement canon, une superbe femme séduisante et bien roulée qui, en tant que styliste, savait aussi se mettre en valeur. Elle portait ce soir là une robe blanche, courte et moulante de coupe classique. Le décolleté était relativement sage mais le tissu collait trop sa poitrine pour en cacher l'opulence. Pour compenser sa petite taille (Megan ne mesurait même pas un mètre cinquante-cinq alors que sa sœur faisait dix centimètres de plus), elle était perchée sur des talons aiguilles hauts qui lui avaient semblés plus stable quelques heures auparavant.

Elle se faufila dans la foule, attrapa un autre verre qu'elle mit sur sa note (son argent était au vestiaire) puis reprit la direction de sa table. Elle n'aurait jamais dû venir, cela finissait toujours comme ça lorsqu'elle se laissait entraîner par sa sœur ! Elle avait presque atteint son but lorsqu'elle se fit renverser par un jeune homme. Sa robe blanche ! Elle fronça les sourcils mais était finalement déjà trop soûle pour s'en soucier plus, d'autant qu'elle pourrait tout régler d'un coup de baguette magique (au sens propre) lorsqu'elle se souviendrait de la formule.

« Heu oui... un verre... merci. » Elle se demanda si elle devait se diriger d'elle-même vers le bar ou s'il allait l'y conduire, aussi – pour gagner du temps – répondit-elle au reste. Elle n'était pas douée pour faire la conversation, allez savoir pourquoi alors qu'elle aimait tant écrire ! « C'est que j'ai une table là-bas, alors je préfère y boire que d'être au bar. » Elle se sentait moins exposée dans un coin de la salle que seule devant son verre dans un endroit passagé, aussi, mais ça, elle ne jugea pas utile de le dire au bel inconnu.

Elle obtempéra à la demande du jeune homme sans lui répondre, juste avec un sourire un peu timide. Elle ne voyait pas quoi lui dire. Megan n'était pas douée avec la conversation, elle perdait ses mots avant d'avoir commencé sa phrase : problème de timidité aigu. Et puis, là, avec sa robe tâchée et sa sœur aînée en train de draguer tout ce qui bougeait en l'oubliant... elle n'était pas à son aise.

Comme si une robe tâchée n'était pas suffisant comme crasse pour une soirée, elle se fit draguer par un gros lourd dès qu'elle fut de retour à sa table. Et merde... elle n'avait même pas son verre pour essayer de mettre le nez dedans, genre, elle ne l'avait pas vu. Là, non, elle ne pouvait que prendre son regard de biche effarouchée (ce qu'elle était en quelque sorte malgré ses 25 ans) et observer l'homme qui lui parlait comme la même biche regarde les phrases de la voiture qui s'apprête à l'écraser.

Son sauveur arriva alors, pas sur son cheval blanc et avec un verre d'alcool à la main... mais elle avait vraiment besoin d'un verre et elle avait un peu de mal avec les chevaux, donc c'était peut-être pas si mauvais. Le lourdingue s'en alla car il pensait qu'elle était déjà prise (Megan se demandait encore comment on pouvait croire ça, n'avait-elle pas la mention « vieille fille » collé au front ? C'était pourtant son impression). Elle respira de nouveau normalement.

« Non... Non. Merci. Je ne suis pas à l'aise ici... et je ne suis pas habituée à me faire draguer. Je ne sais jamais comment réagir quand ça arrive. » Elle attrapa le verre et en but une gorgée. Elle haussa les épaules et fit une grimace qui était aussi ridicule qu'elle pouvait être mignonne « Et je suis soûle » En même temps, puisqu'elle le savait, elle devrait peut-être arrêter de boire... Elle sourit au jeune homme et fit un signe de dénégation par rapport à sa robe. Ce n'était pas la peine de faire appel à un pressing, elle n'en avait pas besoin. Un coup de baguette suffirait amplement.

« Il ne faut pas vous en faire pour la robe, je suis styliste, des robes j'en ai... pleiiiiiiin ! » Elle fit un grand geste, c'était vrai, elle avait beaucoup de robes même si elle n'arrivait pas (mais c'était peu probable) à sauver sa robe. Elle pouvait même s'en faire avec les chutes de la boutique. « Et vous, vous faites quoi dans la vie ? » Hop, une nouvelle gorgée, juste parce ça lui permettait d'être un peu plus bavarde que d'ordinaire. Mais promis, après ce verre là, elle arrêtait (ou pas).

Désinhibée par la boisson, les mots vinrent naturellement à Megan lorsqu'elle dût répondre au jeune homme. « En fait, j'ai un problème avec la communication tout court. Je bafouille, je ne sais pas où me mettre lorsqu'on m'adresse la parole, j'ai toujours été comme ça. » Elle appuya ses paroles d'un signe de la tête virulent qui exprimait sa propre approbation à ses propres paroles. Ne pas oublier qu'elle n'était, ma foi, pas très claire. Du coup, elle avait moins de mal à parler mais ce qu'elle disait était soit peu clair, soit cela enfonçait des portes ouvertes.

« Je ne bois pas d'habitude, mais ce soir c'est la fête ! Ma sœur est rentrée de voyage. C'est la blonde là-bas, avec la mèche de cheveux blanc ! » Megan désigna sa sœur avec son verre et se cala plus encore dans son fauteuil. Il y avait des jours comme celui-ci où elle ne supportait pas sa sœur, voire elle la détestait. Jennifer était tellement différente de tout ce que Megan était. Elle était brillante, belle, communiquait facilement et surtout ne manquait pas d'aplomb. Parfois, le rayonnement de sa sœur aînée faisait mal aux yeux de Megan qui n'avait jamais réussi à devenir comme elle. Certes, elle aussi avait un bon métier, et on pouvait même dire qu'elle l'aimait. En effet, il rassemblait à la fois son goût pour le dessin et son goût pour la mode, mais parfois, elle se prenait à rêvait d'être autre chose que Megan la vieille fille qui passe tout son temps à travailler et qui se retrouve seule lorsqu'elle est en boite. Enfin, presque seule puisque maintenant elle avait de la compagnie. « On ne se ressemble pas, n'est-ce pas ? » Ajouta-t-elle tristement en haussant les épaules. Ce n'était pas tout à fait vrai d'ailleurs car physiquement, elles se ressemblaient assez. Blondes toutes les deux, aux yeux clairs (mais Megan les avait vairons alors que ceux de Jenny étaient bleus), Jennifer était plus grande et plus élancée, mais son visage se rapprochait de celui de sa sœur. Cependant, cette ressemblance physique qu'elles tenaient de leur mère ne faisait qu'accentuer leur comportement si différent l'une de l'autre.

« Oh des papiers... je déteste les papiers... j'ai toujours été nulle à l'école... je suis plus douée pour dessiner et pour coudre. Et on ne manque pas de boulot, ma patronne est plutôt connue. » Tout reposait sur le nom de Myrielle qui, dès Poudlard, confectionnait des robes pour ses camarades. Au début leur clientèle était donc composée des élèves de Poudlard et des anciennes filles de leur promo', puis petit à petit, ça avait évolué, surtout qu'elles habillaient fréquemment les filles de CS Roze et Keira. La mode et le show buis' allaient bien ensemble. Fixant son regard asymétrique sur celui du jeune homme, elle pencha légèrement la tête sur le côté, pensive.

« On n'était pas à l'école ensemble au fait ? Vous me dites vaguement quelque chose. Tiens, ça me fait penser, je m'appelle Megan, Megan Jones. » Si le visage de Tyler disait quelque chose à Megan c'était parce que lors de sa dernière année à l'école, elle avait écrit un papier sur les serdaigles. Et puis il y avait les potins, Tyler était après tout sorti avec Bérénice, celle qui l'avait remplacée à son départ de l'école au journal (aujourd'hui mort faute de journalistes).

« C'est l'alcool. » Dit-elle en levant son verre avec un petit sourire satisfait. D'habitude, elle ne parlait pas autant à un étranger, ou alors c'était l'étranger qui arrêtait de lui parler, las de la voir chercher ses mots. Megan était d'une timidité et d'une réserve maladive depuis l'enfance qu'elle compensait à grand renfort de superficialité. Il n'y avait que dans son métier où elle n'éprouvait pas de difficulté, parce qu'elle savait exactement quoi dire, elle maîtrisait tout ce qui touchait aux robes, aux tissus, à la boutique ou à son personnelle... elle pouvait donc se faire aborder par les clients sans se mettre à rougir ou à baisser les yeux, mais passé ce cap, si par exemple on essayait de la conduire vers des sujets plus personnels (car, loin d'être laide, il arrivait qu'un client la drague), on se heurtait à un mur. Elle était incapable de parler d'elle à quelqu'un qui ne la connaissait pas... admettez que ça ne favorisait pas les rencontres ! Après il y avait bien ceux qui s'obstinent et qui continuent à lui parler ce qui finit par aboutir comme les gens de poufsouffle quand elle était à l'école, mais voilà, dans le monde des adultes, tout était plus compliqué.

« Ma sœur et moi... on ne s'entend pas très bien. Ce n'est pas qu'on ne s'aime pas, c'est juste qu'on est... pas pareil... et puis, je n'aime pas qu'on me regarde. Elle, si. Je suis venue uniquement parce qu'elle a insisté. » Elle bougea de nouveau la main en direction de sa sœur et ne releva pas la réflexion de Tyler sur leur ressemblance physique, se contentant de sourire à la chute de la phrase. Pour elle, le physique, c'était TRES important. Elle trouvait d'ailleurs Tyler plutôt à son goût maintenant qu'elle y pensait... pour peu qu'elle soit capable de penser car rien n'était très cohérent dans son esprit actuellement.

« Si c'est nous... et merci. Je suis contente qu'on apprécie notre travail. Nous ne sommes que trois mais on bosse vraiment dur. » Quant au fait qu'il était plus intellectuel qu'elle, bah, elle avait envie de lui répondre que de toute façon ce n'était pas un gros challenge, mais elle sentait qu'elle serait à côté de la plaque avec une telle réflexion. Comme quoi, être soûle ne lui avait pas enlevé toute réserve.

« Ah oui, c'est ça. » Ce devait être parce qu'il était préfet et pas parce qu'il sortait avec Bérénice. « Si, si, j'étais à Poufsouffle. Mon frère Roman et ma sœur Jenny ici présente aussi. Tous poufsouffle ! Sauf Nicolas... qui est serdaigle ! » Elle termina son verre. « On va ailleurs ? J'en ai marre du bruit. » Une proposition ? Peut-être... Ou peut-être pas. Elle était tellement ivre que de toute manière, elle ne réfléchissait ni à ce qu'elle faisait, ni à ce qu'elle disait.

Megan haussa les épaules, peu convaincue par l'argumentation de son compagnon de beuverie. Elle savait bien que sa timidité était provoquée par ses complexes et que c'était parce qu'elle était timide qu'elle était complexée et ainsi de suite, cela dit, à l'âge qu'elle avait désormais, si ça avait pu se guérir ça se saurait. Elle se souvenait comment ça se passait lorsqu'elle était encore une fille « normale » qui sortait un minimum et avait un copain (Simon pour ne pas le citer *paf* ), et même si à l'époque elle avait été très amoureuse, elle était toujours restée très discrète et mesurée. Elle se disait qu'au fond c'était aussi une question de caractère. Elle était née comme ça, dans l'ombre des autres, de Daniel plus intelligent et de Jenny plus belle. Qu'y pouvait-elle ?

« Pas sûre. » Répondit-elle au sujet de sa sœur qui l'avait déjà oublié. « J'ai tendance à lui taper sur les nerfs. » Ajouta-t-elle pour la forme décidant ensuite qu'il était grand temps de partir puisqu'elle n'était plus vraiment indispensable à son aînée (qui était capable de se gérer, elle était grande hein).

« Oui. Seulement trois. Mais c'est parce que nous faisons tout à la main quasiment, on utile très peu la magie, alors ça demande pas mal de temps et du coup nous ne sommes pas non plus à la portée de toutes les bourses. Enfin, sauf au moment du bal de Poudlard, on fait des robes moins chères pour les élèves de l'école et aussi quelques costumes pour les garçons. Même si on reste pas donné, on fait quand même des choses plus abordables, histoire de se faire un peu de promotion. » Megan aurait pu parler pendant des heures de son boulot (même ivre) sauf qu'elle n'avait pas oublié son idée de s'en aller. Le bruit commençait à lui filer mal à la tête et elle sentait que si elle buvait encore un verre, elle allait être malade.

« Ok, allons chez toi. » décida-t-elle sans même réfléchir (ce qui ne lui ressemblait pas car elle était plutôt mesurée en temps normal). Elle prit la main de Tyler pour ne pas le perdre et ils se rendirent à l'extérieur pour ensuite transplaner, elle le laissa guider. Elle se sentit un peu nauséeuse à l'arrivée mais ça passa vite. Elle posa sa veste et son sac au premier endroit qui se présenta et elle secoua sa chevelure blonde. Ah ! On respirait mieux loin de la foule quand même ! Elle s'étira et se tourna vers Tyler, avant de baisser les yeux vers sa robe. Et si elle l'enlevait ? Elle n'en avait pas besoin et elle avait chaud !

Aussitôt pensé, aussitôt fait. Elle se débarrassa de sa robe et de ses chaussures avant que Tyler ait le temps de dire quoi que ce soit et elle s'approcha de lui. « Tu me montres la chambre d'ami ? » Elle avait perdu deux ou trois neurones dans la bataille entre l'alcool et la raison... et selon toute vraisemblance, c'était l'alcool qui avait complètement gagné la bataille.