Le parc de Poudlard avait toujours, pour ceux qui avaient l'honneur et la chance d'y résider, ce goût d'une nature profonde et enivrante, celle qui surpasse les mots et la poésie. L'eau du lac, miroir du ciel bleu, était aussi profonde qu'inquiétante. L'homme, face à elle, se savait fragile et n'osait guère s'amuser des éléments naturels. On venait s'y ressourcer, comme pour y vivre encore un peu, rien qu'un instant. C'était, de manière certes très classique voire banale, le lieu entre le ciel et la terre, la terre des exilés du paradis, l'endroit même qui permettait un moment de répit pour celles et ceux entraînés dans la course absurde de la survie et de l'existence. Quiconque s'y promenant de longues heures ou le temps d'un regard se retrouvait en lien avec une force inconnue mais familière, qui avait ce pouvoir de relier les éléments entre eux. Un maillon de nature, qui forçait l'être à se remettre en cause face à l'immensité et la puissance de la nature. D'aucuns trouvent des forces dans les arbres, l'herbe et les fleurs qu'on pourrait penser impossibles ou insoupçonnées. C'était probablement cette capacité à surprendre qui faisait de ce lieu un mélange d'étrangeté et de coutumier, d'attendu et de surprenant. Nombreux étaient celles et ceux qui venaient s'y isoler, disparaître du monde tout en s'y reliant de manière intense. La plupart même des adolescents ne comprenaient pas véritablement, par ailleurs, ce qu'ils ressentaient en s'y rendant dès que possible. Il s'agissait encore là de quelques chose de sensiblement mystérieuse. Suffisamment pour que, dans le tumulte qu'était leur vie à ce moment-là, ils se taisent et écoutent. C'était ici qu'on comprenait que la Sorcellerie existait et circulait, jusqu'aux racines du ciel. Une force qui reliait la Communauté à son histoire antique et ancestrale. Poudlard demeurait l'une des célèbres écoles de Sorcellerie pour cette raison ; elle était la fondation même de la Sorcellerie. Et son vieux mais ressourçant parc en était probablement sa meilleure incarnation.
Les dernières gouttes de rosée matinale s'évaporaient à peine. Le soleil se faisait discret dans le ciel d'Ecosse où quelques nuages d'un blanc sombre imposaient de la fraîcheur à une journée qui s'annonçait toutefois belle, et douce. Le château, unique, dominait ce vaste espace encore endormi. De ci, de là, on voyait des fenêtres s'ouvrir, des cheminées relâcher de la fumée, et rideaux se tirer. Le château se réveillait à peine. C'étaient donc les dernières minutes de silence avant que la vie ne reprenne ses droits pour une journée, où chacun donnait un sens à son existence en donnant cours, en recevant cours, en communiquant avec d'autres humains dans l'espoir que la journée apporte un petit quelque chose avant que la nuit et la mort ne viennent. Sans doute que les habitants du château ne se rendaient plus compte de leur chance unique face à un tel spectacle. Poudlard était l'incarnation même d'une Sorcellerie puissante et complexe où la Magie existe bien au-delà de ceux qui la pratiquent. C'était un antre, un couvent, un refuge pour des êtres persécutés et incompris ; une communauté y était abritée, et cette dernière répondait à des codes et des obligations assurant la sécurité et le confort de chacun. Cette immense fourmilière pédagogique recueillait l'avenir de la Magie, lui dispensant les fondations et socles d'une Sorcellerie ayant un grand besoin de protection et de sécurité. Ces fonctions et cette histoire rendaient Poudlard unique, et c'était un véritable privilège que de marcher en ces lieux, tôt le matin, sans que personne ne voie réellement. Un moment de grâce comme on n'en connaissait que peu.
Les deux jeunes et charismatiques Aurors qui s'avançaient dans le parc faisaient probablement partie de celles et ceux qui ignoraient tout de cette chance. Propulsés à la sécurité de Poudlard, ils pensaient davantage au succès qu'ils auraient auprès des copains et des filles qu'au sens réel de leur mission. Cantonnés à des enquêtes criminelles sans aboutissement, ils s'étaient soudainement retrouvés à protéger une école menacée par une secte de quelques fous. Les méchants, en somme. Ils ne se posaient aucune quesiton, Jeff et John ; ils exécutaient les ordres parce que les ordres étaient ce qu'ils étaient, qu'importait, puisqu'ils rapportaient un salaire à la fin du mois. C'était l'heure de la relève. Il fallait remplacer les copains de nuit, qui avaient une meilleure réputation parce que sensiblement plus aptes à affronter le sommeil et la peur de la nuit. Tout le monde a peur de la nuit, quoi qu'on veuille en dire. Il y en a juste quelques uns qui s'inventent une bougie et une flamme pour survivre et oublier, un temps. Mais la nuit rattrape tout le monde, plongeant dans le passé et le souvenir ceux qui, peu de temps avant, ont encore la force de la vie dans leur regard. Ils parlaient des derniers résultats de la coupe du monde de Quidditch. Qu'ils sont cons ! lançait l'un, tandis que l'autre s'étranglait à rire. C'était ici la première force de vie de la journée ; ces deux jeunes hommes séduisants, musclés, qui s'avançaient dans le parc encore endormi. Leurs pieds foulaient l'herbe encore humide. Ils ne s'en rendaient même pas compte. Ah, c'est vous, disaient les autres, puis repartaient. Ils étaient en porte, devant les impressionnantes grilles du portail de Poudlard. Un petit instant de nostalgie les prenait. Tu te souviens, quand on est arrivé la première fois? Qu'on était que des gosses? Ouais, je m'en souviens. Ils s'en souvenaient, de leurs premiers pas dans cet étrange parc. Qu'importait ce qu'on en disait, ils avaient soudainement pensé à eux, et s'étaient rendus compte que le temps passait et qu'ils avaient vieilli. La vache, on a vieilli, quand même ! Ouais, quand même. Triste fatalité.
Il fallait l'avouer ; souvent, ils s'ennuyaient. Et ce matin-là ne faisait pas exception dans leur semaine. Ils s'ennuyaient, discutant de tout et de rien, et se rendant compte que s'ils ne travaillaient pas ensemble, ils n'auraient rien à se dire et ne se fréquenteraient même pas. Ce fut alors surprenant quand plusieurs craquements sonores se firent entendre, un peu plus loin dans le chemin. Quatre hommes, entièrement habillés en noir, une broche d'argent sur le buste, les cheveux coupés de près, le visage imberbe au poil près. Enfin une occupation ! Les deux Aurors observèrent ces quatre étranges individus, s'apprêtant à dégainer leur baguette magique. On serait fier d'eux, au Ministère ! Dis donc ! Ils n'eurent guère le temps, puisqu'un cinquième craquement vint fendre le silence. Une cinquième personne apparut. Elle ne ressemblait pas aux autres, étant bien plus petite, bien plus ronde, et bien mieux habillée. Jeff plissa des yeux, et sa bonne vue lui permit de voir un vieil homme bien mis, les cheveux frisés et la barbe impeccable, habillé d'un magnifique costume trois pièces noir et violet. John se dit qu'il avait déjà vu ce bougre-là, dans la Gazette, ce qui le rassura. Ce n'était pas un allumé de la secte. Il lâcha sa baguette. Le groupe s'avança, encerclant très bien le gras bonhomme qui devait probablement être un grand de ce monde. En se questionnant sur l'identité de ces cinq-là, Jeff et John oublièrent d'ouvrir les grilles de bronze du parc. Le groupe des cinq se stoppa net, à quelques mètres des deux Aurors. Le cinquième et dernier arrivé s'avança à son tour. Sa démarche, fluide, donnait l'impression d'un vieil acteur de théâtre s'avançant sur scène. Il portait une belle cravate de soie et sa veste de costume était taillée dans un velours qui semblait précieux. Le vieil et gras homme les dévisagea tous deux.
« Quel plaisir de vous voir ici, mes garçons. A en juger votre mine aussi inexpressive que défaite sur vos jolis minois, il est fort probable que vous ayez complètement omis de vous rappeler qu'une visite séant s'organisait ce jour. »
Les deux se regardèrent. Minois? Séant? Qu'était-ce encore là que ce vieux dandy parlant comme dans un vieux bouquin de poésie?
« A en juger votre mine d'anchois déconfit, je ne me trompe pas. Le vieil homme semblait jouer avec les syllabes qui coulaient entre ses lèvres comme du miel sortant d'une ruche. Les deux Aurors se taisaient. Me feriez-vous l'honneur de décliner votre identité en précisant pour quelle saugrenue raison vous me refusez l'entrée, très chers? — Euh... Bah... C'est que... Moi c'est Jeff Inderlon, et lui John Tribult, on est Aurors... On était pas avertis de votre venue m'sieur...? — ... Wieder. — Wieder, Wieder, ça me dit un truc, Jeff. C'pas... Attendez voir... C'pas... Le type de Confédération? Ah mais ça y est, bon dieu, ça me revient. Vous êtes le Commissaire à la Sécurité, c'ça? — Dans le mille, jeune homme. Votre intuition n'a d'égale que votre charme ! »
Ils laissèrent passer le groupe et se dirent qu'il fallait qu'ils racontent ça à leurs femmes en rentrant, dans quelques jours. Ils avaient rencontré le numéro deux de la Confédération Internationale de la Sorcellerie ; ce n'était pas rien. Surtout quand on ne savait absolument rien de ce monsieur quelques minutes auparavant. Il est des rencontres, tout de même, qu'on n'oublie pas !
Ferdinand Wieder pénétra dans le parc encore sommeillant de Poudlard. Scolarisé en France, il n'y avait mis que peu de fois les pieds. Il avait rencontré Dumbledore, dans les années soixante-dix, alors qu'il faisait partie de la délégation allemande. Il avait pu revoir le vieil homme dans les années quatre-vingt, alors régulièrement invité par le professeur Slughorn, un ami de longue date. Wieder avait toujours été subjugué par ce vieux château et regrettait parfois de ne pas s'y être rendu pour ses études. Réputé bourbiste, Dumbledore demeurait un grand ennemi de l'Allemagne conservatrice depuis sa lutte contre Grindelwald. C'était peu dire que les Sangs Purs allemands ne le portaient guère en estime ; et puisque les Wieder faisaient tout comme les autres Sangs Purs, Dumbledore était devenu un homme à éviter qui dirigeait une école dans laquelle jamais un Wieder viendrait y étudier quoi que ce soit. Depuis, le Commissaire à la Sécurité avait nuancé son discours, bien que Poudlard avait derrière elle une vieille histoire d'ouverture vers les moldus. Dépositaire d'un discours officiel international, Wieder laissait derrière lui les aigreurs familiales et s'avançait confiant vers les massives portes en bois du château. Les états d'âme lui étaient depuis très longtemps étrangers. Il parcourut ainsi les couloirs de pierre, croisa quelques élèves nullement surpris par sa présence tant les plus récents événements les avaient accoutumés à des présences étrangères régulières. Lui ne s'occupait pas d'eux non plus, trop habitué à être entouré d'une élite qui l'éloignait considérablement du commun. C'est ainsi qu'il atteignit la bibliothèque, lieu topique de la sécurité et de l'isolement qu'il recherchait partout. C'était presque une sorte de bureau personnel vacant qu'il promenait avec lui à chacun de ses déplacements.
Quand il pénétra dans la bibliothèque, la bibliothécaire s'était affairée à accueillir ce haut responsable de la Confédération Internationale. Il n'y avait aucun élève, et aucun ne serait admis avant le départ de Wieder. Le vieil homme salua comme il se devait la propriétaire des lieux et s'installa derrière une table de travail, dans l'aile ouest de la bibliothèque. En un rien de temps, un de ses gardes du corps sortit un matériel d'écriture personnel, avec encrier en argent, plume somptueuse et feuilles de parchemins. Une pile de dossier apparut, tandis qu'une étrange pierre violette se retrouva posée dessus. Un autre apporta une tasse de café en porcelaine, qu'il déposa face à Wieder qui s'était déjà affairé à lire de nombreux rapports. Le numéro deux de la Confédération Internationale n'eut que quelques minutes à patienter avant qu'on annonce son invitée. Une jeune femme se présenta, et Wieder entra en scène.
Il se leva de sa chaise avec toute la délicatesse qu'il se devait d'avoir, arborant son plus mielleux sourire. Il semblait l'être le plus chaleureux du monde ; aussi fallait-il se méfier des apparences. Ses yeux gris percèrent le jeune scientifique, tandis que sa voix suave et maniérée sortit de sa bouche rosée.
« Quel plaisir de vous rencontrer, Madame Pentagast ! C'est que je n'ai entendu que du bien de votre personne ! Ce qui signifiait, entre les lèvres de Ferdinand Wieder, qu'un de ses petits oiseaux avait dû lui faire parvenir tout un dossier secret sur Pentagast. Le vieil homme lui tendit sa main grasse et potelée. Excusez ce lieu quelque peu rugueux pour notre conversation, mais que voulez-vous ! Je ne peux me passer de la présence des livres ! Un petit rire mielleux et excentrique vint ponctuer sa phrase, tandis qu'il se réinstallait derrière la table de bois. Installez-vous, très chère, installez-vous ! Désirez-vous quelque chose à boire? »
Ferdinand Wieder savait tout, ou beaucoup de choses, de la scientifique nommée par le Ministère anglais. Il fallait qu'elle découvre un certain nombre d'éléments, tandis que d'autres avaient besoin d'un peu de protection, pour le moment. Wieder s'en assurait, tout du moins.
« Sachez que j'ai été touché de plein fouet par votre histoire familiale, mon enfant... Wieder ressemblait à une vieille grand-mère bourgeoisie soudainement remuée par un triste roman. Que de romanesque, toutefois, n'est-il pas? Un père Mangemort... Une mère quasiment absente... Vous voir ici est un honneur pour la Sorcellerie, soyez-en assurée, très chère ! Votre oeuvre en ces lieux est remarquable. »
Il prit un air affligé, tandis qu'un des gardes du corps donnait à Pentagast ce qu'elle avait commandé à boire. Les livres imposaient le respect et le silence. Ils étaient seuls, dans cette immense bibliothèque. Seuls. L'Araignée, et sa possible proie. Le vieil homme s'approcha, comme s'il voulait délivrer un secret de plus haute importance à la scientifique. Sa voix se fit chuchotante et mystérieuse.
« Je viens, comme on vous l'a annoncé, à votre rencontre pour un rapport et un état des lieux. Les événements qui ont touché cette douce Poudlard ont ébranlé les tréfonds de la Sorcellerie... »
La partie commençait.
Invité
Ξ Sujet: Re: Les Dieux ont soif — PV E. Pentagast Dim 21 Juil - 17:33
Ferdinand Wieder
&
Erel Pentagast
Les dieux ont soif
La veille, Erel reçut un message urgent de la part d'un département du ministère qu'elle n'avait pas l'habitude de côtoyer. Le comité de sécurité du ministère ? A dire vrai, la jeune femme commença aussitôt à se demander ce que lui voulait le commissaire en personne, Ferdinand Wieder. Elle ne l'avait jamais rencontré en personne mais toutes personnes travaillant au ministère en avait entendu parler. Il avait la réputation d'être excentrique mais surtout un excellent comédien, il était intelligent et suffisamment manipulateur pour toujours obtenir les informations qu'il recherchait. Seulement la question se posait une fois de plus...que lui voulait cet homme ? Erel avait effectivement bouclé l'affaire sur les horcruxes et avait rendu un rapport détaillé au ministère, maintenant elle s'occupait des sorts spéciaux lancés par MS. Rien qui ne vaille une enquête à son sujet, du moins pensait-elle. Elle trouvait d'autant plus étrange que le commissaire se déplace en personne, n'importe qui aurait pu demander ce rapport, le ministère devenait-il paranoïaque à ce point ou lui avait-on caché quelque chose ? Le message envoyé était d'ailleurs plus une obligation qu'une invitation, et la rencontre allait avoir lieu dans l'enceinte de Poudlard – chose que MacGonagall n'appréciera certainement pas – mais qu'importe, elle n'avait pas le choix ni l'influence nécessaire pour changer le lieu de rendez-vous. Elle due se soumettre à la volonté du commissaire et elle devrait sans doute répondre à toutes ses questions si elle ne voulais pas être retiré de l'affaire. Car oui, c'est ce qui importait le plus à la jeune femme, elle voulait continuer son enquête et son avancée pour percer les secrets de la magie noire ! Elle se devait de le faire, d'une part pour éradiquer ceux qui l'utilisent à des fins obscurs et une autre pour simplement comprendre, L'interdiction est souvent prônée contre le désordre mais plus cette interdiction est menaçante et plus l'envie de l'enfreindre est grande. Pour Erel, banaliser la magie noire serait un bon moyen de stopper tous les mages qui l'utilisent de le faire pour leurs projets machiavéliques. Elle avait certes, une vision idéaliste de la situation actuelle, et elle savait pertinemment que la magie noire était souvent associée à la magie du sang ou à la nécromancie, cependant elle espérait la voir un jour purifiée de cette image et renaître sous une forme plus noble. Peut-être était-ce ce genre de propos qui faisait dire aux gens que la jeune femme elle-même pratiquait la magie noire ou bien qu'elle le ferait un jour si ce n'était pas le cas. Or ne vous méprenez pas, Erel est consciente qu'elle devait marcher sur des œufs et ne jamais toucher à cette pratique sous peine d'être associée directement à son père, le mangemort, alors elle se contente de l'étudier. Il est vrai que l'attrait de cette magie est puissante, mais jusqu'ici Erel y avait toujours fait face, elle ne doutait pas d'elle-même et bien qu'elle n'était ni la meilleure et encore moins la plus puissante, elle savait se défendre et ne cherchait rien de plus. C'est ça le problème avec la magie en générale, plus on en a et plus on en veut, la puissance est la principale motivation de tous les sorciers qui ont mal tourné, un principe aveugle et dont la fin justifie toujours les moyens ! Peut-être était-ce la raison pour laquelle son père était devenu un mangemort ?
Le lendemain. L'heure du rendez-vous était fixée tôt le matin à la bibliothèque de l'école de magie. Erel s'était levée bien en avance, elle avait prit son temps pour savourer un premier café ainsi qu'un petit déjeuner à base de fruit et de yaourt dans ses appartements que la directrice lui avait montré lors de son arrivée à Poudlard pour son enquête. Elle s'était ensuite douchée et habillée, des vêtements pas trop voyants pour ne pas attirer l'attention sur elle auprès des jeunes étudiants, la directrice avait été très clair avec la jeune femme et elle désirait que rien ne perturbe les études de ses élèves. Chose normale quand on connaît un temps soit peu le professeur MacGonagall et l'histoire qui l'accompagnait. Elle avait donc enfilé une robe noire assez simple ajustée à la taille avec une collerette en dentelle noire également, les manches étaient longues et la jupe de la robe également. Ceci était assez discret pour l'école des sorciers. Elle remonta ses cheveux qu'elle attacha en chignon dont quelques mèches retombaient sur son visage et sur sa nuque, elle appliqua du khôl noire autour de ses yeux et du rouge à lèvre rouge framboise sur ses lèvres. Un peu de poudre sur les joues et le tour était joué ! Pas trop ni pas assez, un mélange subtil qu'elle réalisait sur elle-même tous les matins depuis plus de 10 ans maintenant. Avant de quitter la pièce, elle enfila ses bottines noires à talons, un petit sac à main noire qui contenait notamment ses cigarettes et un manteau noire long à bouton officier. Elle sortit de ses appartements pour se diriger dans un coin reculé du château où le professeur MacGonagall lui avait conseillé de partir fumer, loin du regard des élèves. Le soleil se levait doucement, le ciel arborait un dégradé de couleur du rose au bleu, le jour pointait son nez tout comme le ministère pointait le sien dans les affaires de la jeune chercheuse. Elle alluma sa cigarette d'un geste délicat et repensa à son enquête, elle n'avait pas grand chose à dire à Ferdinand car elle n'avançait pas énormément. Bien qu'elle ai pu interroger MacGonagall, elle n'avait pas encore pu approfondir son enquête et elle n'avait pas l'ombre d'une piste. En plus de cela, si le ministère la dérangeait souvent pour rien, elle ne risquait pas de progresser ! Peut-être alors n'était-il pas là pour l'enquête car en effet, si le ministère s'introduisait partout, dans toutes les histoires, même celles qui ne les regardaient pas, ils n'étaient pas stupide. Ils devaient savoir que la jeune femme n'avait pas dû tant avancer que cela, alors pourquoi l’interroger aujourd’hui ? Elle expira une épaisse fumée de sa bouche en fixant l'horizon d'un air très sérieux. Elle savait que cette rencontre ne serait pas des plus agréables et elle devait rester sur ses gardes tout en protégeant ses recherches et bien sûr l'école. L'homme qui venait avait le pouvoir de la faire fermer, ou de renvoyer Erel à ses affaires ! L'heure du rendez-vous été proche, Erel s'avança vers la bibliothèque. Les élèves commençaient à apparaître le long des corridors du château, celui-ci s'éveillait peu à peu et les premiers cours n'allaient pas tarder à commencer. Elle repensa alors à McGonagall et à Nicolas, qu'elle ne connaissait pas vraiment mais qui était à Poudlard la même année et dont elle avait vaguement des souvenirs. La nostalgie de ses propres études, elle aimait tellement l'odeur des livres et apprendre. Aujourd'hui elle en avait fais son métier et elle espérait qu'un jour ses recherches permettront à ces jeunes de comprendre davantage la magie mais surtout de la manipuler avec soin. Elle avait toujours aussi soif d'apprendre, c'était vraiment comme une drogue pire que l'addiction à la cigarette (qu'elle se traîne depuis Poudlard d'ailleurs!), et le domaine qu'elle avait choisis la rassasiait pleinement ! Arrivée devant la porte de la bibliothèque, un parchemin indiquant la fermeture ponctuelle de celle-ci indiqua à la jeune femme que le commissaire avait du arriver. Personne ne pouvait passer, aucun élève ne pouvait réviser durant les quelques heures où le commissaire et elle-même seraient en entretien. Quelle théâtralité ! Pensa Erel qui n'appréciait pas ce genre de mise en scène. Un élève arriva en trombe, il portait un livre semblant imposant et vociféra devant la porte close de la bibliothèque :
- Oh non ! Je devais le rendre aujourd'hui ! Râla l'élève - Je pense qu'aujourd'hui c'est de ma faute. Donne-moi ton livre, je le donnerais au bibliothécaire. - Votre faute ? On m'a dis qu'un drôle de bonhomme tout rond est passé ce matin, apparemment il est du ministère ! Vous passez un entretien pour devenir auror ? Ou c'est une mission secrète ? - Ni l'un ni l'autre. C'est juste une façon du ministère de dire qu'il garde le contrôle sur une situation qui lui échappe complètement. Tu devrais te dépêcher d'aller en cours. - Je ne suis pas sûre de comprendre, mais merci Madame !
Le gamin lui tendit son livre : « Sorts et enchantements anciens et oubliés », Il partit aussi vite qu'il n'était apparut et la jeune femme entra enfin. Le bibliothécaire l'accueillit, elle ne le connaissait pas, ce n'était pas le même que du temps où elle était à Poudlard, elle lui tendit le livre et lui parla rapidement de l'élève qu'elle avait vu. Il lui indiqua alors l'emplacement qu'elle devait rejoindre et donc l'endroit où le commissaire l'attendait. Erel avança dans les allers de la bibliothèque jusqu'à une table entourée par 4 personnes et une cinquième assise devant une pile de dossier. L'attendait-il depuis longtemps ? Elle remarqua alors son costume trois pièces, ses cheveux impeccables bien qu'étrange et son air de dandy d'un passé qu'elle n'avait jamais connu. L'homme potelé se redressa et la salua d'un ton qui se voulait accueillant et agréable, mais ses yeux semblèrent percer la jeune femme, comme s'ils cherchaient un secret inavouable...Erel lui serra la main par politesse et arbora sur ses lèvres peintes le plus beau des sourires. Elle avait appris à faire semblant également durant la période où elle apprit à garder son vilain secret des autres étudiants de Poudlard. Elle répondit donc à Monsieur Wieder d'une voix des plus douce et délicate :
- Ravie de faire votre connaissance également Monsieurs Wieder. Je n'imaginais pas votre présence ailleurs que dans un endroit aussi empreint de connaissance, Monsieur. Elle plongea ses grands yeux bleu dans ceux de l'homme tentant de la percer, de la mettre à nue. Merci pour votre élégante invitation Monsieur Wieder, un thé je vous prie.
Erel s'assit en face de Ferdinand et elle posa délicatement les mains croisées sur ses genoux, elle regardait toujours son interlocuteur dans les yeux (c'est plus correct ainsi) et elle arborait toujours un sourire amicale sur son visage. Elle voulait donc cacher ses pensées et elle attendait avec impatience que l'homme entre dans le vif du sujet. Wieder ne manqua pas d'étaler son savoir sur le passé de la jeune femme en évoquant son père et sa mère ainsi que ses recherches, il savait tout. Pas étonnant vu son rang et bien qu'Erel avait caché à ses camarades et collègues son père mangemort, elle n'avait en revanche pas les moyens de défaire les dossiers d'anciens prisonniers d'Azkaban et donc le lien entre leur nom de famille. Erel ne perdit donc pas son sang froid, elle ne devait pas perdre pied à la simple évocation d'une personne qu'elle portait en horreur. Il fallait qu'elle entre dans le jeu du politicien, elle savait qu'il fallait qu'elle fasse attention, cet homme n'était pas n'importe qui et il était puissant.
- Je vois que vous êtes bien renseigné, mais je n'en attendais pas moins d'un homme de votre rang, après tout, nous avons tous des secrets, n'est-ce pas Monsieur Wieder ?
Erel bu une gorgée avec élégance et sourit en suivant de toute ses dents, ses yeux fixaient le commissaire de manière plus intense cette fois. Un regard emprunt de mystère et d'interrogation car elle ne comprenait toujours pas ce qu'elle faisait ici. Ferdinand s'avança alors vers elle, intriguée la jeune femme en fit de même en ayant au préalable posé sa tasse sur la table.
- Je viens, comme on vous l'a annoncé, à votre rencontre pour un rapport et un état des lieux. Les événements qui ont touché cette douce Poudlard ont ébranlé les tréfonds de la Sorcellerie...
Oui, ceci avait effectivement était annoncé sur le message qu'elle avait reçut quelques jours avant, mais elle doutait que ce soit la vraie raison du déplacement de cet homme. D'une part parce que déplacer un homme politique très important pour un simple rapport ça paraissait louche mais également en territoire dit neutre ou fermer aux suggestions du ministère. N'était-ce pas une simple manœuvre pour mettre la main sur Poudlard ? Erel se posait la question et elle commença à sentir le danger. Un état des lieux ? Cela voulait plutôt dire : pensez-vous la directrice capable de gérer cet endroit dignement ? A-t-elle tout fait pour endiguer MS quand ils étaient dans les murs de l'école ? Ne vaudrait-il mieux pas y mettre quelqu'un de confiance ? Ces questions flottaient dans l'esprit d'Erel, elle n'était pas objective sur la question car elle admirait le professeur MacGonagall et elle pensait sincèrement que personne ne pourrait être autant apte à diriger l'école mais qu'en était-il du ministère ? Heureusement pour l'école et pour Erel, son enquête n'avait que peu avancée et il était trop tôt pour accuser ou pointait du doigt qui que ce soit !
- Vous avez raison, ces événements ont marqué tout un chacun.En lançant ces mots Erel le regarda droit dans les yeux, un signe de défiance. Je pense que la situation dans l'école est parfaitement sous contrôle, je mène mon enquête sur les objets ensorcelés qu'utilisent MS pour manipuler les gens. Je n'ai hélas pas percé leurs mystères mais j'ai bon espoir. L'espoir est après tout un moteur suffisant pour poursuivre les recherches ne trouvez-vous pas, Monsieur Wieder ?
Invité
Ξ Sujet: Re: Les Dieux ont soif — PV E. Pentagast Mar 23 Juil - 20:41
« Des secrets? »
Le mot traversa l'esprit encombré de Ferdinand Wieder. Son nom n'était fait que de secrets ; sa famille en était un. Le secret de la réussite d'un Wieder qui transforma un simple nom en une immense entreprise mondiale ; celui d'une autre femme, plus tard, violée à la fin d'un dîner mondain et forcée d'épouser son violeur, un Wieder, le père de Ferdinand. Un large et pompeux sourire apparut sur les lèvres du vieil homme ; il ne laissait rien apparaître de cette histoire familiale bien éloignée des réalités de la femme qui se trouvait devant ses yeux. Ses yeux, froids, gris, ne cillèrent pas ; il était bien trop habitué à tout ce cirque où des pantins s'activaient à se donner une raison d'exister. La vie de Ferdinand Wieder n'était que secret. Et en réalité, tout le monde l'admettait facilement, puisque personne ne le connaissait réellement. Il était un mystère, surtout ici, en Angleterre. Son nom sonnait allemand, sa réputation était celle d'un diplomate de salons dorés internationaux qui ne s'intéressait guère aux destins individuels de quelques uns. Une fois terminées les luxuriantes et mondaines réceptions chez Wieder, le Commissaire à la Sécurité et aux Renseignements Secrets disparaissait dans sa solitude. On l'oubliait même, volontairement. On se doutait qu'à un tel poste, et avec un tel réseau d'espions à sa solde, il en savait assez sur chaque famille pour les faire rougir de honte. C'est ainsi, bien souvent, qu'on a de petits secrets à cacher et que l'on sait qu'au moins une personne est en mesure de les connaître. On croit alors que tout est su, que tout est dévoilé, et on perd tout sens rationnel. Et c'est sur de telles peurs que des êtres tels que Ferdinand Wieder jouent. Ils s'infiltrent jusque dans les craintes, ne taisent qu'à peine leurs noms et attendent que les faiblesses humaines se révèlent et se livrent. Le travail est alors bien mené, puisque l'Homme a toujours cette fascinante tendance à être sa propre raison et arme de destruction totale.
Wieder avait toujours fait en sorte d'entretenir le mystère. Dès qu'il s'était rendu compte qu'on en savait trop sur lui, ou qu'on le percevait comme trop accessible, il disparaissait. Il avait enchaîné les Ambassades ; Washington, Paris, Londres. Il s'était arrêté dans des bureaux de Ministères ou de Chancellerie, comme à Berlin. Il était même devenu Universitaire, un temps. Et désormais, tandis que ses bureaux se trouvaient officiellement à New York, le vieux dandy diplomate allait de villes en ville, vérifier que la Sécurité de la Sorcellerie Internationale était bien assurée ; toujours là où on ne l'attendait pas. C'était pour lui le moyen de ne pas être un être totalement existant aux yeux des autres. Il était principalement un nom et l'ensemble des personnes qui le rencontraient projetaient sur lui des représentations qu'ils s'étaient construites auparavant. Car, après tout, c'est sûrement la meilleure manière de définir le rapport humain avec autrui: projeter sur l'autre ce qu'on attend de lui, ce qu'on veut qu'il soit, ce qu'on croit qu'il est. Wieder s'en contentait et jouait terriblement de cette loi ancestrale des rapports humains. C'était pour lui le moyen de tirer les ficelles, de déjouer les pronostics et d'amener ses proies là où bon lui semblait. Il n'avait qu'à les laisser faire, bien souvent; elles se prenaient alors rapidement les pattes dans les fils de soie discrètement tendus par le vieux politicien. Certains le percevaient comme un ambitieux, d'autres comme le maître incontesté d'un international et influent réseau d'espions, d'autres comme un politicien travailleurs, d'autres encore comme un supérieur hiérarchique. Et c'était, visiblement, la manière avec laquelle Erel Pentagast percevait, du moins principalement, Ferdinand Wieder. Et tandis que la très jeune femme répondait, s'efforçant d'être polie puisque c'était la règle qu'avait imposé Wieder, le vieil homme analysait les traits de son visage exprimer cette fidélité pour la vieille McGonagall, ce besoin de répondre aux ordres et de rester fidèle aux valeurs.
« Des secrets... Ou bien, davantage, des informations. »
Le monde de Wieder n'était que secrets. Enfant, il avait été exclu de la famille ; isolé, dans l'ancestrale demeure des Wieder, celle située en Norvège, profondément enfouie entre les arbres de la forêt noire. Le reste de sa famille, Frantz, son frère, et Hilda, sa soeur, demeurés à Berlin, étaient devenus des secrets. Il ignorait tout de leur vie. Il ne connaissait pas leurs peurs, leurs joies, leurs disputes, leurs jeux et leurs peines. Il ne savait pas pour quelle raison l'un et l'autre se levaient le matin, ce qu'ils espéraient y accomplir et dans quel état d'esprit ils se couchaient seuls. Elevé par sa grand-mère, il ne connaissait rien de ses parents, de son frère et de sa soeur. Ils étaient le secret. A leurs yeux, c'était lui, le secret. Le troisième des Wieder, celui qu'on avait confié à une grand-mère intellectuelle et solitaire comme s'il était trop précieux et digne pour qu'on le laisse à la nouvelle génération. Le monde des adultes qui se réunissait souvent et que le petit Ferdinand découvrait avec curiosité quand lui et sa grand-mère venaient à Berlin pour les grandes réceptions était lui aussi un secret. Il ne comprenait pas l'hypocrisie ; ou du moins, elle lui était sensiblement étrangère. Il voyait les bouches s'arquer, les sourcils se lever, les mains se touchent et les voix se voiler de mensonge et d'intérêts. Il avait appris à contrôler les codes du secret et s'en était servi tout le reste de sa vie. Secret, son désir grandissant pour le corps élancé et musclé des jeunes hommes de son dortoir ; secret, son besoin d'être seul et de lire à n'en plus dormir de la nuit ; secrets tous ces savoirs cachés dans les livres des bibliothèques ; secrète, cette mère qui ne l'aimait pas ; violée, bafouée, massacrée. Le secret avait pétri Ferdinand Wieder. C'était désormais là sa plus grande arme, ce qu'il contrôlait pour contrôler le monde qui l'entourait. Il n'y pouvait rien, il ne fallait pas lui en vouloir. C'était tout ce qu'il savait faire, en réalité. Être et vivre en secret.
« Vous me flattez, mon enfant. Wieder eut l'air véritablement gêné. Je me dois de tout savoir, très chère. C'est bien à cela que tient parfois notre sécurité, soyez-en assurée. Wieder eut un sourire qui s'approchait de la condescendance sympathique ; celui que prennent parfois certains professeurs qui dispensent une leçon en douceur à quelqu'un qui savent tout de même ignorants. J'ai des oisillons un peu partout, même ici. Et ils m'ont gazouillé de bien étranges histoires. »
Wieder marqua un temps. Il sortit en un clin d’œil un étui en argent duquel il prit une fine cigarette qu'il fixa en un temps tout aussi fugace sur un porte cigarette. Il ne lui fallut que quelques secondes pour qu'une fine fumée s'en échappe et qu'il ne lâche un discret « Cela ne vous incommode pas, j'espère? » qui laissait entendre que peu importait la réponse de la jeune femme puisqu'il comptait faire comme bon lui semblait.
Le Commissaire à la Sécurité et aux Renseignements secrets avait enquêté, depuis sa nomination. Il fallait dire qu'il la devait justement aux exactions de la Magicis Sacra, secte portée à la célébrité par quelques actes et actions extrémistes ; rien qui ne soit, à l'heure actuelle, véritablement inquiétant dans un monde qui se devait d'équilibrer les poids et les mesures. Le pouvoir n'étant qu'une affaire de perception, et de foule, Wieder estimait largement plus devoir faire en sorte qu'on accorde la confiance à la Confédération plutôt qu'à la secte extrémiste. Cela ne l'avait pas empêché d'entrer par la petite porte dans les affaires de ces quelques fous. Deux espions postés à Ilvermorny tentaient de lui faire quelques rapports encore trop fragiles pour être exploités. En enquêtait aussi en Egypte, et en Russie, où l'on poussait pouvoir trouver des informations utiles à une bonne manipulation. Quant à Poudlard, Wieder avait décidé d'entrer par la grande porte. Tout n'était, finalement, qu'une affaire de faux-semblants et d'illusions. Il projetait la lumière sur un point, forçant ses ennemis à oublier tous les autres. Comme tout un chacun sait, les araignées aiment se tapir dans l'ombre et attendre la nuit pour que leurs proies fatiguées s'accrochent dans leurs toiles. « Mon enfant, ne me laissez pas croire que j'en sais plus que vous qui enquêtez ici au nom du Ministère de la Magie Anglais... Le vieux dandy tira délicatement une bouffée d'air sur sa cigarette, laissant son regard froid fixé sur Erel. J'ai cru comprendre que le professeur McGonagall vous avait informée de la création d'une faction d'élèves en mesure de contrer les manipulations de la Magicis Sacra. La Brigade anti-Menace, n'est-ce pas? »
A nouveau, Wieder fit une pause. Le politicien modulait le temps comme bon lui semblait, révélant quelques informations, en gardant pour l'instant d'autres bien cachées. Il n'avait que faire des objets ensorcelés. D'autres, bien plus puissants que lui, comme McGonagall, ou Granger, s'en occupaient très bien. Il voyait ailleurs, comme d'habitude. Ce qui l'intéressait, c'étaient les êtres qui constituaient l'immense toile.
« Ces enfants ne se rendent guère compte des enjeux qui sous-tendent à ces quelques exactions. Ne pensez toutefois pas que je les méprise, bien au contraire ! Wieder prit une mine affectée, comme une vieille grand-mère protégeant ses petits-enfants. Nous pouvons être entièrement fiers d'eux, c'est tout à fait certain. Mais comprenez que nous ne pouvons leur laisser sur les épaules une telle charge ! Ce ne sont que des enfants. Songeons aux parents. Que penseraient-ils? »
Le vieil homme fit un geste rapide de sa main grasse et potelée. Un des quatre gardes du corps disparut quelques secondes, le temps pour Wieder de finir le contenu de sa tasse de porcelaine. Le café coula quelques instants dans sa gorge rebondie. La sensation de chaud vint se heurter à tout ce qu'il mettait cérébralement en place. Il lui arrivait, quelques fois, d'être soudainement forcé de plonger dans ce qui semblait être un restant d'état d'âme. Ces moments étaient rares et vertigineux. Si son visage n'affectait rien, il sentait le sol se dérober sous ses pieds et avait envie d'hurler son besoin de s'accrocher à quelque chose dans sa chute ; une table, un homme, des livres, des murs, même. Mais cela faisait bien longtemps qu'il était tombé. Déchu.
L'homme revint. Une masse le suivait. Cela ressemblait à un adolescent ; ballonné, traîné par un sortilège magique, les yeux flambants d'une colère sourde. Wieder ne s'offusqua guère d'une telle entrée, et il tira à nouveau sur sa cigarette. Il se leva. Son petit corps bien habillé et bien gras fit le tour de la table. Il laissait toujours derrière une flagrance qui semblait mélanger du caramel très sucré à de la lavande très douce. Une odeur apaisante qui, trop longtemps sentie, pouvait donner envie de vomir. Il alla près du jeune homme attaché et forcé de garder le silence.
« Nous l'avons arrêté cette nuit. Il est un peu fatigué, le pauvre enfant, puisqu'il a fait le voyage de Russie ! Wieder caressa le visage en sueur et encore imberbe de l'adolescent, qui tenta de se dérober. Mes petits oiseaux m'ont raconté tout ce qu'il fait depuis maintenant cinq semaines, d'après les derniers rapports. Ce garçon assurait vraisemblablement un lien entre une des branches de la mafia puriste et la secte que les habitants de ce château a récemment rencontrée. Voyez ce chétif regard de petit chérubin qui nous forcerait à croire qu'il n'y a que de l'innocence qui parcourt ses veines chaque matin, à son réveil. Le vieil homme parlait d'une voix doucereuse et caressante. Pourtant, il a réussi à tuer l'un de mes hommes, le bougre ! Une vie prise ne peut être à crédit trop longtemps, hélas. »
Les yeux de l'enfant s'éveillèrent soudainement. Il y eut un moment de communion. Il avait compris ce qui l'attendait. Il avait joué, puis avait perdu. Wieder se tourna vers la jeune scientifique.
« Notre ennemi est tout à fait en mesure de nous asservir et il le fait depuis très longtemps, sournoisement. Les enfants qui, dans ce château, pensent lutter peuvent nous freiner. J'aimerais que vous me fassiez, donc, un rapport complet sur leur activité. Il en va de votre responsabilité politique, mais aussi et surtout éthique, ma chère. »
Wieder fit un nouveau geste de la main. L'adolescent et le garde disparurent. Il se réinstalla.
« Je vous écoute. »
Invité
Ξ Sujet: Re: Les Dieux ont soif — PV E. Pentagast Mer 24 Juil - 16:35
Ferdinand Wieder
&
Erel Pentagast
Les dieux ont soif
Wieder fumait et se délectait de l'ignorance de la jeune femme, Erel en était consciente mais elle ne put rien faire. L'homme boudiné dans son costume trois pièces possédaient des cartes, des secrets alors que la jeune femme n'avait rien. Elle n'était pas coutumière de ce genre de jeu, de demi-vérité et de niaiserie. Erel garda son calme et son air impassible alors que Ferdinand tentait de la désarçonner, sans doute cherchait-il à la ployer à sa guise mais elle ne se laisserait pas si facilement avoir. Alors que le représentant international tira sur sa cigarette, Erel le regardait sans rien dire, elle ne voulait pas répondre à ce genre de question qui n'en était pas une en réalité et qui donc serait une perte de temps. Elle attendait la « chute », la carte maîtresse que l'homme allait lui servir. Elle avait cru comprendre qu'il en savait davantage mais visiblement ce n'était pas le cas, de ce fait, Erel se demanda ce qui l'emmenait ici. Elle ne comprenait pas le pourquoi du comment de cette intervention et pour la scientifique qu'elle était cela était inacceptable ! Elle devait comprendre ! Alors qu'elle s'était perdue un instant dans ses pensées, Ferdinand commença à parler des jeunes et du club anti-menace, comment pouvait-il être au courant ? De ça Erel en était sûre, cet homme possédait un nombre de personnes considérable à sa botte, peut-être même des élèves de Poudlard qui sait ? Sinon il n'aurait jamais su pour le club à moins qu'il ne fasse partie de Magicis Sacra. Chose qui semblait cependant farfelue, d'une part parce qu'un membre de MS avec un poste aussi important n'aurait jamais pris le risque de se faire démasqué juste pour interroger une scientifique, et encore moins en ce lieu, déjà témoin de la débâcle de MS. Wieder s'arrêta un instant comme pour voir la réaction de la jeune femme, elle eut l'air surprise quelques instants en effet mais elle se ressaisit parfaitement la seconde d'après. Face à un tel personnage elle se devait de garder la tête froide, il avait donc bien une idée en tête, mais elle ignorait encore laquelle. Erel bu une nouvelle gorgée de son thé et écouta l'homme avec attention, il essayait de jouer avec les sentiments de la jeune femme, malheureusement pour lui ceux-ci sont bien enfouis et elle ne comptait pas se dévoiler face à lui alors elle adopta une nouvelle attitude, plus distante et observatrice que jamais. Elle plongea ses prunelles clair dans les yeux de Ferdinand et elle posa délicatement la tasse terminée de thé, elle se redressa sur son siège et ajouta :
- Vous avez raison, ces jeunes ont pris un risque immense, mais s'ils ne l'avaient pas fais où en serait Poudlard ? Pourrions-nous discuter aussi tranquillement dans ce lieu de savoir ? Erel sourit, un sourire en coin n'exprimant aucune émotion mais juste présent pour que son visage transmette une brève émotion. Qui serait venu aider Poudlard si ceux ne sont ces enfants ? Je pense que face à la magie noire, la force d'esprit, la combativité de ces jeunes furent un atout.
Wieder ne semblait pas vraiment faire acte de ce que lui racontait la jeune femme, il savait sans doute déjà ce qu'il souhaitait faire d'elle et donc ne prenait que peu en compte les remarques de celle-ci. Il fit alors venir un jeune garçon, il semblait affolé et pourtant d'après les dires du maître des espions (c'est ce qu'il était aux yeux d'Erel), ce garçon, aussi juvénile soit-il, aurait transmis des informations à MS et aurait également tué un garde. A dire vrai, Erel eut du mal à croire l'émissaire. Celui-ci se leva et fit le tour de la table, il menait son spectacle pensa la jeune femme, elle s'inquiétait franchement de ce que l'homme allait encore lui sortir car c'est lui qui menait la conversation et visiblement la situation n'allait pas s'inverser. Il laissa derrière son passage une douce odeur très sucrée, une odeur qui piqua le nez de la jeune femme, quel bonhomme étrange... C'est alors que Wieder abattit enfin son jeu, ce qu'il voulait c'était des espions, il voulait faire de la chercheuse l'un d'eux pour surveiller l'activité des jeunes de Poudlard, à quelle fin ? Encore impossible de le dire mais Erel en était persuadée maintenant, il ne la prenait que pour un pion dans son échiquier. Au départ elle pensait jouer contre lui mais maintenant elle comprit qu'elle n'avait que peu d'importance pour lui. Elle avait du mal à concevoir les relations avec ses pairs sous cette forme : utile, inutile mais elle comprenait cependant que le statut de Ferdinand ne lui permettait pas non plus d'être un grand sentimental. La jeune femme bénéficiait cependant de ce luxe et elle s'empressa de demander d'un ton froid et mystérieux :
- Qu'allez-vous faire du gamin ?
Le genre de question que l'on pose en connaissant toutefois la réponse, étant donné le regard que le garçon avait lancé un coup à Ferdinand et un autre à Erel, elle comprit qu'il n'allait pas dormir tranquillement pendant quelques temps encore. C'est vrai qu'elle avait du mal à regarder ce jeune dans cette position, si fragile et pourtant responsable de meurtre d'après Wieder, elle se demandait si un jour un des élèves de Poudlard se retrouvait dans une situation similaire. Ms pouvait contrôler les esprits et donc faire faire aux autres ce qu'ils ne veulent pas faire, mais cela changeait-il réellement les gens lorsqu'ils reprenaient conscience ? Y avait-il des séquelles après possession ? Erel y songea alors plus intensément, cette conversation lui paraissait déplaisante jusque maintenant, Ferdinand avait mis au jour quelque chose auquel la jeune femme n'avait même pas pensé alors que cela pourrait paraître élémentaire ! Il faut donc qu'elle trouve quelqu'un qui fut possédé ! Elle détourna son attention de la scène quelques instants et lorsqu'elle l'orienta de nouveau vers le commissaire international elle se rendit compte que le gorille de Wieder et le Gamin avaient disparus...L'homme devant elle exigeait alors rapport et compte-rendu sur les activités des jeunes de Poudlard en évoquant l'éthique et le devoir. Deux choses à laquelle Erel se conformait farouchement mais étrangement sortie de la bouche de cet homme ces mots ne semblaient pas avoir la même importance, ni la même saveur. Elle se voyait devenir l'esclave de ce dernier et pourtant pendant un temps elle vit également les avantages qu'une telle collaboration pouvait lui apporter. Certes faire un rapport sur les étudiants contrarierait McGonagall et le Ministère mais Wieder pourrait certainement lui trouver d'anciens membres de MS ou des élèves possédés aujourd'hui mis sous haute surveillance ! Peut-être même qu'il pourrait trouver la raison de la mort de son père...ceci n'avait rien à voir certes mais était cependant important aux yeux de la jeune femme. Elle savait d'après les registres de la prison d'Azkaban que son père est mort entre ces murs mais elle ne savait pas comment cela était arrivé et parfois elle se surprenait à espérer le revoir un jour, qu'il n'était pas mort mais juste en fuite...qu'il essayait de racheter ses péchés. Une belle lubie qui n'avait pas lieu d'être, du moins pas à cet instant !
Elle rassembla ses pensées et regarda Wieder une nouvelle fois d'un air mystérieux pour cacher ses pensées, elle ne pouvait pas être sûre que l'homme face à elle joue franc-jeu, peut-être ne cherchait-il qu'à l’appâter sans rien lui donner en retour car c'est ce à qui il ressemblait, un homme de peu de parole qui bien qu'ayant un jeu d'acteur tout à fait impressionnant, il ne semblait pas fiable.
- Vous dites que ce garçon a tué l'un de vos gardes, comment est-ce possible ? Comment se fait-il qu'un adolescent se soit retrouver à combattre un adulte visiblement qualifié et qui en plus réussi à le battre ? Comment s'est-il retrouvé à échanger des informations ? Y était-il forcé ?
Erel se stoppa un instant, elle prit le temps de s'appuyer contre le dossier de sa chaise et de poser les coudes sur les accoudoirs avant de reprendre.
- Voyez-vous Monsieur Wieder, je ne met pas en doute votre parole, je pense cependant que vous avez éludé certains détails qui me permettrait de comprendre un peu mieux l'urgence de votre demande.
Erel tenta le coup, quitte à devoir trahir McGonagall et Poudlard par la même, elle se devait de savoir exactement pourquoi ! Elle fera tout ce qui est en son pouvoir pour comprendre et annihiler les sorts de MS, ce qui sauverait bien des vies, même si pour cela elle doit donc trahir une promesse et agir contre l'avis de son ancien professeur. La jeune femme ne se voilait pas la face et savait que ce n'était pas en usant d'éthique et de gentillesse que cette histoire serait terminé, elle devait se montrer déterminée et inflexible. Donc si Ferdinand Wieder lui proposait une histoire tangible et des preuves que sa demande pouvait changer les choses alors oui, Erel accepterait certainement. Pas sans peine évidemment, elle culpabiliserait mais elle demanderait pardon lorsque l'histoire sera achevée et qu'elle aura percé les secrets de l'organisation qui fait aujourd'hui tant de tord !
- Vous savez, mon ancienne professeure, Madame McGonagall m'a demandé explicitement d'épargner les étudiants, de faire mon enquête sans causer de tord à qui que ce soit. J'ai bien peur que ce que vous me demandez compromette cette promesse.
Elle voulait mettre en avant la loyauté qu'elle avait pour son école et ainsi prouver qu'elle était fiable lorsqu'elle pouvait mais surtout que Ferdinand allait devoir être plus précis et lui offrir autre chose que des miettes s'il voulait faire d'elle l'un de ses petits oiseaux.
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Ξ Sujet: Re: Les Dieux ont soif — PV E. Pentagast Ven 26 Juil - 18:30
Enfant, lorsque la matriarche Wieder acceptait l'invitation des parents de Ferdinand, et que la vieille dame y amenait son petit-fils, le duo étrangement formé revenait à Berlin pour y faire son office. L'ensemble des Wieder ne s'était jamais pleinement entendu, et beaucoup s'étaient, au fil des décennies, étendus dans d'autres demeures. Ferdinand et sa grand-mère n'y avaient pas échappé puisque chargée de l'éducation du dernier des Wieder, la vieille s'en était repartie avec l'enfant au coeur de la forêt noire, dans un château à l'allure médiévale qui, bien que confortable, avait tout d'un exil social. Mais quand il le fallait, les Wieder se réunissaient ; c'était souvent pour la bonne cause. Un contrat financier pouvait être signé, ou un prêt pour une filiale de l'entreprise familiale. Il fallait alors faire bonne figure ; celle d'une famille de Sang-Pur unie qu'on ne pouvait ni rouler ni tromper. L'union imposant la force aux yeux des autres, et tout n'étant qu'un jeu de dupes et d'illusions, les Wieder avaient pour coutume de se réunir lors de grands dîners mondains ou des soirées chiques. C'est ainsi que Ferdinand se retrouvait régulièrement à Berlin sans y vivre réellement ; et d'ailleurs, il n'y était jamais totalement retourné. Le manoir principal des Wieder n'était pas le sien, mais celui de son frère. Cela ne l'empêchait cependant pas à le considérer comme un vaste terrain d'apprentissage. Enfant, et adolescent, il passait ses soirées à écouter silencieusement les discussions des adultes, à en noter les moindres inflexions, les minuscules particules de vie et d'hésitation. La plupart des invités le prenaient pour un enfant taciturne, observateur et solitaire et ne se souciaient guère de sa présence. En réalité, il s'instruisait et s'informait sans cesse, retenant tout, captant tout et, par la suite, imitant tout. Les salons officiels du manoir Wieder avaient été pour lui un excellent terrain de jeu duquel il en avait retiré les plus fines et plus perdurables leçons. Et, aujourd'hui encore, le monde était à l'image de l'une de ces célèbres chambres mondaines, où les rapports humains se définissent par les luttes sociales et les influences politiques. Aujourd'hui, encore, il notait les désirs dans les modulations des voix, les peurs dans les regards dérobés, les espoirs dans les sourires esquissés. C'était, encore aujourd'hui, un veste terrain de jeu que le monde qui, en vérité, ne se différenciait guère des salons mondains.
Erel Pentagast n'avait pas évolué dans le même monde que Ferdinand Wieder. Cela se sentait. Ils étaient des êtres aux codes extrêmement éloignés, des héritiers de traditions fondamentalement opposées. Ils ne se comprenaient pas, et ne pourraient jamais s'entendre. De plus, le Commissaire à la Sécurité avait bien trop été torturé par une famille devenue monstrueuse et raciste pour qu'il puisse ressentir la moindre once d'humanité à l'égard de son interlocutrice. A l'évidence, ils n'avaient pas les mêmes cartes en main et leur plateau de jeu était bien différent. Voir un être ainsi dévoué à ses recherches, à sa quête d'une vérité qu'elle s'était fait sienne, à l'observer aussi honnête avec elle-même rappelait à Wieder combien lui était différent et à l'écart du monde. Elle rappelait à lui, le damné, ce qu'aurait pu être une vie honnête et vraie, avec toutes les incertitudes, les victoires et les aspirations qu'elle aurait pu apporter. Et ainsi, pendant qu'elle parlait, le vieux diplomate ne lâchait pas ses yeux gris et froids du visage de la jeune femme. Sa fonction, et son rôle dans le triste monde, l'obligeaient alors à côtoyer des personnes éloignées de la politique et des grandes machinations. Ainsi au contact de quelque chose de plus commun, il arrivait à Wieder de ressentir la monstruosité qui s'était nichée dans sa blessure d'antan au point d'y prendre la place et de ne faire du vieil homme qu'une blessure à lui tout seul. Il la ressentait à un tel point que boire de l'alcool était pour lui l'unique délivrance, l'unique solution pour fuir l'humanité, fuir les sentiments et fuir la vie. Sa main trembla très discrètement, cela ne se vit pas car cela ne pouvait se voir. Mais l'Araignée le sentit ; il savait que la jeune femme commençait à creuser trop profondément, qu'elle tentait de comprendre l'incompréhensible, à saisir l'insaisissable en pensant que Ferdinand Wieder était ou avait l'explication à toutes les inconnues de cette vaste équation. Il tira une nouvelle bouffée de cigarette. Sans doute allait-elle trop loin et devrait-il la tenir bien fermement en laisse pour qu'elle ne sorte pas des limites que le vieil homme lui avait, préalablement, imposées.
Wieder ne répondit rien sur le discours idéaliste de la jeunesse. Pour lui, la jeunesse remontait à un âge trop lointain, à une réalité qui lui avait entièrement échappée. On lui avait volé sa jeunesse par les livres, par le rejet, par la solitude, par la monstruosité. Il avait grandi trop vite, ou était encore un enfant qui refusait de vivre avec les règles de bonne conduite sociale du monde adulte. C'est pourquoi il avait toujours l'air de voir la jeunesse qui l'entourait parfois comme un composite d'étrangetés et de curiosités ; qu'il semblait si distant en les regardant avec une certaine forme de naïveté et d'ébahissement. Distant, il donnait l'impression d'être un personnage mélancolique devant la fougue de la jeunesse. Il avait vu trop de choses, entendu trop d'horreurs et compris trop d'erreurs pour que la jeunesse lui semble un moment crédible et durable. Tout n'y était qu'éphémère, et dès qu'il voyait une jeune personne, elle lui rappelait terriblement que lui vieillissait. Et vieillir lui était insupportable, parce que cela l'enfonçait encore plus dans son abyme et sa blessure, que cela l'éloignait encore plus de rédemption possible, de la guérison souhaitable. Plus les années passaient, plus il savait sa damnation s'étendre et s'imposer. Plus la mort s'approchait, plus il sentait le poids terrible qui l'enserrait à chaque réveil et que seule une cigarette parvenait à alléger le temps de quelques minutes. Il aurait pu être jeune et aimer; être aimé et aimer la jeunesse, surtout la sienne. Il aurait pu apprendre à se faire confiance, à se trouver beau, intelligent. Il aurait pu vivre ses désirs, et vieillir comme tout le monde, loin des conflits et proche des siens. Mais il avait vieilli dès la naissance ; fruit de la monstruosité d'un père violeur et d'une mère violée, il avait appris à se méfier du monde plutôt qu'à l'aimer, à créer le conflit pour s'y sentir victorieux et en sécurité, à fuir ses désirs pour imposer aux autres ses idées. Mais le bonheur finit toujours par se faire voir, se faire sentir ; comme une brise au bord d'un océan, une délicate odeur de rose dans un charnier qui rappellent qu'il aurait été possible, ne serait-ce que quelques secondes, d'être heureux. Il tira une nouvelle bouffée de cigarette.
Wieder voulut faire croire à Pentagast qu'elle avait raison. Elle devait se sentir en confiance, penser que ses idées avaient raison d'exister et qu'elles valaient la peine d'être écoutées. Que même, à l'évidence, elles dépassaient les manigances politiques et secrètes que pouvait incarner Ferdinand Wieder. Il pensait bien des choses sur les enfants qui se mettaient à se révolter. Bien des choses que la jeune scientifique n'avait aucunement besoin d'entendre parce qu'il fallait qu'elle croit ces jeunes légitimes, il fallait qu'elle pense juste et éthique leur cause absolue. Cela devait se passer ainsi. Il se contenta d'un sourire donc, et posa pleinement ses yeux dans ceux de la jeunesse femme. A distance, on aurait presque pu y voir un vieux professeur écouter les bonnes et sages paroles de son élève devenue maîtresse. Cela aussi, il avait besoin qu'on le croit. Parce que l'être monstrueux, difforme et blessé qu'était Ferdinand Wieder se devait de jouer un rôle. Sans quoi il risquait d'être percé à jour et sa damnation risquait d'être découverte. Personne ne devait savoir.
« Qu'allez-vous faire du gamin? »
La question de la jeune femme confirma qu'elle ressentait ce qu'il voulait qu'elle ressente, après qu'elle ait vu ce qu'il voulait qu'elle voie. L'expression faciale que prit le Commissaire à la Sécurité et aux Renseignements secrets ressembla à celle d'une vieille dame contrariée. Les yeux s'écarquillèrent, et ses lèvres dodues formèrent un cercle outré. Puis il laissa échapper un petit rire, comme un enfant content d'avoir fait sa grimace. Tout se passait comme il le souhaitait.
Wieder avait orchestré cette rencontre, de même que l'entrée de cet adolescent arrêté pendant la nuit. La Confédération Internationale se devait de protéger tous les pays et l'ensemble de la communauté Sorcière à travers le monde. Pour cela, elle avait des moyens considérables, mais devait rendre des comptes à tout moment. Ferdinand était le couteau-suisse de cette vaste organisation internationale. D'une certaine manière, il travaillait dans les souterrains des rêves et des peurs, dans les catacombes des désirs et des plus noirs crimes. Il s'assurait à ce que le monde dans lequel les autres vivaient demeure blanc, marbré et pur. Il faisait le sale travail et tout le monde le savait. Aussi, quand on avait l'honneur d'être reçu chez lui, c'était comme éprouver pitié et terreur à l'égard de cet homme qui s'assurait des basses oeuvres. On y vivait une véritable catharsis ; Wieder agissait souvent en faisant fi de la morale et de l'humanité, mais on ne s'y opposait que très rarement. Il permettait que le monde soit lisse, et présentable. Ainsi, un certain nombre de règles et de lois ne s'appliquaient pas, au Commissariat à la Sécurité et aux Renseignements secrets. Installé à New York, on l'avait installé dans une vieille usine moldue abandonnée dans le vieux Bronx. Les moldus ne s'y rendaient jamais, après que quelques uns plus téméraires aient à chaque fois terminé empalé par de vieilles barres métalliques rouillées. Mais pour les Sorciers et Sorcières, c'était un véritable complexe protégé ; une citadelle aux mille couloirs et mille cellules où enquêteurs, espions et bureaucrates travaillaient à débusquer le crime international, à organiser le contre-espionnage et à éviter les attentats terroristes. Et, dans les plus sombres séances d'interrogatoire, où la torture était souvent admise, surtout quand il s'agissait de défendre les intérêts de quelques puissances étrangères plus flexibles avec les droits de l'Homme.
« Ma chère mademoiselle Pentagast, cela n'est pas de votre ressort, n'est-il pas? Cette fois-ci encore, Wieder put surprendre par le spectre de son jeu théâtral. Il ressemblait à un vieux professeur sermonnant une petite enfant un peu curieuse. Vous allez à la pioche aux informations comme d'aucuns iraient voler des poires à un arbre trop haut pour eux, pouffa-t-il. »
Et ce fut la seule et unique réponse qu'il formula à la jeune femme. L'adolescent mourrait, probablement, à la suite d'un long interrogatoire qui le ferait souffrir. C'étaient les règles du monde souterrain auquel Ferdinand Wieder appartenait et qui devait rester secret pour la sécurité du monde officiel, du monde terrestre.
A l'évidence, la scientifique du Ministère anglais de la Magie se posait des questions qui échappaient entièrement à Wieder. Cela devenait donc intéressant pour lui d'analyser et d'essayer de comprendre ce qui pouvait bien se passer dans l'esprit de la jeune femme, de manière à ce que la conversation lui apprenne encore plus sur la nature humaine. La question qu'elle posa ensuite confirma les soupçons du vieil homme. A l'évidence, elle reliait cela à son enquête. Cela prouvait sa bonne foi et son intégrité professionnelle. L'adolescent russe arrêté par les services secrets de Wieder avait peut-être été manipulé par la secte extrémiste, au moyen d'objets sur lesquels elle enquêtait elle-même. Le Département des Mystères rendrait à ce propos ses conclusions dans le rapport commandé par le Commissariat de Wieder, cela n'était maintenant qu'une question de semaines. Qu'elle aille soudainement sur ce terrain-là intéressait Wieder, puisque que la jeune femme exprimait une interprétation qui ne devait probablement pas être unique et qui, aux moyens d'un certain nombre d'événements contingents, pouvait pousser la foule à imaginer ce type de choses. A l'évidence, la Magicis Sacra s'assurait, par ses objets mystérieux, à inquiéter la population et à la pousser à croire à de possibles manipulations, notamment sur des enfants. Ici encore, une des principales leçons politiques retenues par Wieder, depuis très longtemps déjà, s'exécutait dans cette intéressante affaire. Le pouvoir se situe ni plus ni moins à l'endroit même où la majorité influente des personnes croit qu'il se situe.
« Il est évident que je dispose d'un certain nombre d'informations qui, divulguées ici, mettraient en péril la sécurité mondiale et les fragiles accords diplomatiques qui lient les nations magiques entre elles. Le fait même que je ne puisse vous les communiquer ici tombe sous le sens. Il en va de la sécurité des Etats et du sens de ma fonction de Commissaire auprès de la Confédération Internationale de la Sorcellerie. Le vieil homme s'approcha de la jeune femme, et chuchota à nouveau. L'un de mes prédécesseurs, Monsieur Spielman, qui a lutté contre le mage Grindelwald, fait partie de ceux qui ont échoué dans cette démarche. L'évasion spectaculaire de ce dernier tient de l'incapacité de la Confédération, à l'époque, de tenir sa langue... Comprenez donc qu'on ne reproduise les mêmes erreurs. Wieder tira une dernière fois sur sa fine cigarette qui venait de se consumer entièrement. Que vous ne sachiez pas tout tient de votre sécurité personnelle, ma chère. »
Le Commissaire à la Sécurité et aux Renseignements secrets se réinstalla dans sa chaise. Il eut l'air un temps dérangé par le manque de confort que provoquait le bois rude de Poudlard. L'éducation, à l'anglaise, différait ici de celle qu'il avait reçue en France, à Beauxbâtons.
« La Magicis Sacra dispose d'une arme tout aussi dangereuse que celle que vous cherchez à comprendre actuellement ; la parole. Comme tous les extrémistes, ses sbires parviennent à endoctriner les plus faibles esprits qui deviennent foule et légion, comme ce pauvre jeune garçon russe dont vous venez de faire la brève connaissance. Aucun objet, aucun ensorcellement, si ce n'est celui du carmen envoûtant de quelques agents de la secte. Wieder eut un sourire, comme s'il sous-estimait volontairement ce pouvoir dont il parlait depuis quelques minutes maintenant. C'est peut-être celui qui m'inquiète le plus. Celui contre lequel vous vous battez au nom de votre pays tient de vos compétences que je suis bien loin de posséder, au grand dam de ma pauvre mère qui pensait que je serai un grand scientifique ! Mensonge éhonté, puisque jamais Katrina Wieder ne s'inquiéta réellement de l'avenir professionnel de son fils. Si certains jeunes esprits ont eu, comme vous l'avez si bien formulé, le courage de se battre contre la Magicis Sacra, c'est qu'ils ont été sensibles à leurs discours. C'est-à-dire qu'ils les ont écoutés, avant même qu'ils deviennent pour eux un danger. S'ils l'ont écouté, eux, alors ils ne sont pas seuls. Et si nous avons eu la chance d'être aidés par de brillants chevaliers, il y a fort à parier qu'une autre légion, plus sombre et ténébreuse, se prépare également. C'est pour cette raison que mes services et moi-même avons besoin de plus d'informations sur les jeunes êtres de cette école. »
La mention de McGonagall ne surprit guère le vieil homme. La vieille sorcière, proche du bourbiste Dumbledore, protégeait hardiment ses jeunes élèves, probablement encore plus que son mentor qui par quête personnelle du pouvoir les avait souvent mis en danger. Contrer le pouvoir de Voldemort avait contraint Dumbledore à créer un contre-pouvoir. Et quand des pouvoirs luttent, les victimes collatérales s'entassent. Le nombre de cadavres à la suite de la bataille de Poudlard en était la preuve.
« Pardonnez mon analyse quelque peu téméraire, mais je crains que le professeur McGonagall ne se rende guère compte que se cloîtrer dans son château en retenant des informations capitales dessert la sécurité mondiale que je défends personnellement. Et il est de mon devoir de rappeler à votre bon souvenir que votre actions ici dépendent du Ministère de la Magie anglais, et non de Poudlard et de Minerva McGonagall. Wieder parlait mielleusement et avec beaucoup de douceur. La Confédération Internationale de la Sorcellerie est, quant à elle, au-dessus des Ministères. Je suis bien obligé de vous faire savoir que si vous refusez de répondre à mes questions, mon enfant, vous risquez une arrestation caractérisée par une trahison à la communauté internationale. »
Echec.
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Ξ Sujet: Re: Les Dieux ont soif — PV E. Pentagast Sam 3 Aoû - 18:55
Ferdinand Wieder
&
Erel Pentagast
Les dieux ont soif
A la suite de sa question sur ce que deviendrait le garçon, Wieder resta vague et se moqua gracieusement de la scientifique...il enrobait ses paroles de sucre pour qu'elles paraissent moins corrosives mais le sens de celles-ci étaient clair, le commissaire lui lançait un avertissement. Erel laissa le commissaire parler et attendait, elle ne devait pas se précipiter et encore moins se laisser aller à dire des choses qu'elle pourrait regretter. Elle comprit assez rapidement que Wieder ne lui donnerait aucune information mais qu'en plus de cela il ne lui portait aucun intérêt, un pion, elle ne devait être que cela à ses yeux. Pour finir il la menaça ouvertement de l'arrêter si elle ne répondait pas aux questions qu'il allait lui poser. Malin...pensa-t-elle, d'un côté son comportement la mettait vraiment en colère mais d'un autre elle ne pouvait que saluer l'habileté avec laquelle l'aristocrate allemand faisait tourner les mots. Les phrases qui sortaient de sa bouche semblaient douces et pourtant vénéneuses, Erel n'avait pas le choix. Elle ne disposait ni des connaissances ni du don de manipulation qui lui auraient été nécessaire pour contourner efficacement les menaces du commissaire. Tout ce qu'elle pouvait faire, c'était limiter les dégâts.
Toujours droite sur sa chaise, elle sortit son paquet de cigarette de son sac et s'en alluma une imitant ainsi l'aristocrate mais aussi pour se détendre un peu...l'ambiance était devenue lourde entre les deux protagonistes, malgré les sourires et les paroles narquoises de Ferdinand, il ne cachait qu'à demi-mot ses moqueries et il semblait déterminé à faire sortir Erel de ses gongs. Un luxe qu'elle ne pouvait se payer. En effet, garder un air froid et détaché était sans doute le meilleur comportement qu'elle pouvait adopter sinon le commissaire aurait de quoi se servir contre elle. Elle tira une grande bouffé sur sa cigarette, elle croisa les jambes, observa les deux gorilles derrières le commissaire et reprit la parole.
- Vous ne croyez pas en la bonté humaine n'est-ce pas ? Vous ne pensez pas que certaines personnes lutteront toujours pour repousser les ténèbres ? Je serais curieuse de savoir ce qui vous est arrivé pour que vous perdiez foi en la nature humaine, Monsieur ?
Question purement rhétorique, elle se doutait que Wieder se moquerait allègrement d'elle mais il fallait qu'elle gagne du temps pour réfléchir un peu plus, elle devait trouver une solution qui conviendrait à tous les partis. Elle ne voulait pas perdre ses recherches mais en même temps elle ne voulait pas trahir la foi qu'avait placé en elle son ancien professeur. Erel n'était pas du genre à être dévouée envers qui que ce soit ou envers quoi que ce soit, si ce n'est Poudlard. L'école lui avait appris que malgré ses origines, elle pouvait très bien être différente, nature contre culture. Les humains ont le choix, un luxe que peu d'espèces sur la planète ont le luxe d'avoir mais il y en a une qui peut s'adapter à tout, changer et muter vers quelque chose d'autre. C'est ainsi qu'Erel se voyait, un être humain changeant, elle avait renié la voie qu'avait pris son paternel et aujourd'hui tentait de comprendre les mystères de la magie qui l'avait corrompu. Elle espérait, certes naïvement peut-être, changer les choses. Lutter contre les ténèbres par les ténèbres. La lumière ne l'avait cependant jamais gracié non plus, elle se sentait très souvent seul et avait toujours du mal à se lier aux autres, tellement bien, que même au sein de son travail elle n'est pas particulièrement acceptée, personne ne veut se joindre à ses recherches donc elle travaille seule. Mais elle ne s'en plaignait pas non plus, elle comprenait que son caractère n'était pas appréciait et elle avouait ne pas être des plus aimables parfois. La lueur dans les ténèbres, une étincelle brève et porteuse d'espoir. Voilà ce qu'étaient les élèves ayant luttaient aux yeux de la jeune femme. Wieder avait raison, ils avaient entendu les avertissements et les propos de MS mais malgré ça ils ceux sont battus, pour l'école mais aussi pour leurs idéaux. C'est vrai que tout ceci peut paraître nié pour une personne non ressortissante de Poudlard mais pourtant c'est ce que MacGonagall tentait de protéger. Dans cette école on y étudie la magie mais aussi on y acquiert des valeurs uniques ! Ces valeurs, Erel avait mis du temps à les comprendre et à les intégrer mais elle y parvint et depuis refuse de les lâcher. Ces valeurs lui ont permis de combattre un passé et de visionner le futur, elle pensait que tout finirait par s'arranger tant que des gens croiraient en ce genre d'idéal ! Erel ne se voilait pas la face pour autant, elle savait que certains élèves rejoindront de leur plein grès MS, qu'ils lutteront pour la pureté du sang et qui causeront des dégâts, mais cela valait-il de trahir ses valeurs à elle ? Ferdinand avait fais appel au bon sens de la jeune femme, il n'avait pas tout à fait tord mais elle ne pouvait pas non plus trahir ce en quoi elle croit. D'après le commissaire quelque chose de plus sombre encore été en préparation, Erel décida de le croire, même s'il lançait cela en l'air, il y a fort à parier qu'à un moment donné, MS attaquera de nouveau, peut-être pas Poudlard, peut-être pas en Grande-Bretagne, mais tout était possible. L'ennemi ne lésinait pas sur les moyens pour s'en prendre au monde des sorciers, s'ils s'en prenaient à des jeunes alors ils sont capables de tout !
Erel tira une nouvelle bouffée et recracha lentement la fumée. Elle se redressa et s'avança vers le bureau en posant les coudes sur la table. Elle lança un sourire courtois à son interlocuteur, cachant à peine la colère qu'elle avait envers lui.
- Je n'ai pas dis que je ne répondrais pas à vos questions, Monsieur. J'ai seulement refusé votre offre d'être un de vos espions.
Elle lâcha cette phrase avec un aplomb qui lui était caractéristique, elle ne pouvait certes pas faire le poids face à cet homme mais elle n'allait pas se laisser faire pour autant. Tant bien que mal, elle prouvait une nouvelle fois son attachement à son école et le respect qu'elle avait pour le professeur MacGonagall. Elle ne pouvait pas se laisser faire aussi facilement, Wieder avait sans doute du prévoir autre chose mais en attendant elle essayait de se montrer brave. Nouvelle bouffée de fumée et nouvelle phrase.
- Je m'engage à vous faire parvenir tout ce que je découvrirais dans mes recherches, par contre, je n'ai pas accès aux dossiers des élèves donc je n'aurais que peu d'information à vous donner. Comme vous l'avez bien dit, je ne travaille que pour le ministère après tout. Un léger sourire se dessina sur ses lèvres. En revanche, je connais quelqu'un qui a accès à tous les dossiers des élèves. Vous avez cité son nom plusieurs fois déjà, il s'agit bien de Minerva MacGonagall. En tant que Directrice elle pourra sans doute accèder à votre requête.
Petit rictus amusé, la jeune femme plongea son regard dans celui du commissaire. Elle avait réussi à détourner la conversation, et maintenant il fallait qu'elle en revienne au point qui l'intéressait le plus. Elle voulait réorienter la conversation, même si elle gardait en tête la vision du jeune garçon complètement apeuré. Wieder serait bien capable de faire cela à un élève de Poudlard ce qui mettrait certainement Minerva hors d'elle et la mettrait en danger. Erel pensait que Wieder avait bien comprit la faiblesse de son professeur et que s'il manoeuvrait aussi bien qu'il le faisait avec elle-même il parviendrait sans doute à l'écarter. Bon ceci n'était que des suppositions car il fallait admettre qu'elle avait un peu de mal à comprendre pourquoi il ferait une chose pareille mais après tout...que savait-elle de lui ? Peut-être faisait-il partit de MS ?
- Quelque chose m'étonne cependant. Erel essaya d'adopter le même ton condescendant que son interlocuteur, avec moins de succès faut-il l'avouer. Il m'étonne qu'un homme aussi intelligent que vous ne ce soit pas directement adressé à MacGonagall ou même au ministre de la magie pour quoi pas. Alors je vous repose la question, qu'êtes-vous venu faire ici ?
Chaque chose avait un sens, rien n'est du au hasard dans ce monde et encore moins un être comme Ferdinand Wieder. Erel était une chercheuse et donc elle aimait comprendre, si Ferdinand voulait faire d'elle une alliée il allait devoir être honnête et lui exposer une partie de son plan sinon il n'obtiendrait rien que de la méfiance au regard de la jeune femme. Car oui, Erel se posait des questions sur ce petit homme dodu qui semblait en savoir plus qu'il ne laissait paraître et qui en plus lui demandait de jouer les agents doubles sans lui expliquer quoi que ce soit, en espérant que sa parole suffirait. La jeune femme était d'un naturel méfiant et de ce fait, sa seule parole ne suffirait pas. Il lui fallait quelque chose de plus consistant à se mettre sous la dent.
Invité
Ξ Sujet: Re: Les Dieux ont soif — PV E. Pentagast Dim 11 Aoû - 14:30
« Vous ne croyez pas en la bonté humaine n'est-ce pas ? Vous ne pensez pas que certaines personnes lutteront toujours pour repousser les ténèbres ? Je serais curieuse de savoir ce qui vous est arrivé pour que vous perdiez foi en la nature humaine, Monsieur ? »
Il rit. Et pour une fois, de bon cœur. La nature humaine, Ferdinand Wieder ne la connaissait que trop bien. Il en était un des meilleurs observateurs et ce, depuis son enfance. C'était un jeu, pour lui, que de les regarder se débattre dans ce vaste monde qu'ils pensaient pourtant contrôler. Il n'y avait rien de plus spectaculaire et divertissant que d'analyser cette nature humaine. C'était ce mélange habituel de sincérité et d'hypocrisie, notamment dans les salons officiels les soirées de bals où les esprits s'échauffaient et les paroles trahissaient. C'était ici la première dialectique qui intéressait Wieder. La frontière entre l'honnêteté et le mensonge caché, toutes les infirmes nuances qui se terrent entre la cohérence avec soi-même et la trahison humiliante pour le trahi et le traître. La bonté n'avait qu'un rôle mineur, en vérité, dans ce premier couple de volonté et d'émotions. Combien de fois d'honnêtes hommes s'étaient-ils mis à mentir par bonté? Combien de fois des hypocrites notoires avaient-ils, en quête de bonté, quelques heures avant leur dernière heure, décidé d'être honnêtes? La bonté n'était, et n'a toujours été, qu'une mesure d'ajustement, une donnée venant équilibrer le paradoxe. Il y avait ensuite le bien célèbre duo d'amour et de haine. La bonté aimait aussi s'y loger. On détestait par bonté pour l'être aimé, on aimait par quête de bonté pour soi-même. Et ainsi de suite. L'amour pouvait créer la haine d'autrui ; alors ici, aucune bonté. On aimait grimper les échelons de la société, on aimait trahir, on aimait l'alcool et les jolies femmes. Aucune bonté, jamais. Et l'enfant qu'avait été Ferdinand l'avait ressenti jusque dans ses entrailles, lorsqu'il avait vu des mains se faufiler sur des fesses ou des mots se chuchoter dans des oreilles riantes. Il avait senti les coeurs battre dans les danses enivrantes, où le troisième et dernier duo aimait à se mettre en scène: activité et passivité. Et, depuis bien longtemps, Ferdinand Wieder était de ceux qui, bien plus qu'en croyant à la bonté, aimaient en jouer pour manipuler les nuances des trois paradoxes essentiels.
Il se souvint soudainement de cette première main, sur le corps d'un homme. Il devait alors n'avoir que treize ans. Déjà boudiné dans un costume qui lui donnait quelques années de plus, petit de taille, la main empoudrée d'une friandise sucrée, il s'était assis sur un des magnifiques sièges du salon officiel des Wieder. Directement hérité après la chute du moldu Napoléon III, une partie du mobilier des Tuileries s'était retrouvé en Allemagne. Quelques fortunes, et notamment les Wieder, en avaient acquis d'authentiques pièces. Et c'était justement sur un des fauteuils que le jeune adolescent s'était retrouvé, déjà prêt à ressembler au futur adulte mondain qu'il s'estimait en bon chemin de devenir. Il avait longtemps regardé les personnes danser ; il avait vu les dents blanches des femmes, les vestes noires des hommes, les épaules blanches dénudées des jeunes femmes frôler les mains poilues de quelques jeunes hommes. Puis son regard s'était tourné à droite. Contre un mur, un canapé de velours, et deux hommes installés. Deux jeunes hommes, qu'on parvenait à peine à distinguer à travers la légère et fragile vision d'une vieille femme à la robe mal dressée qui laissait un trou à la hauteur d'un adolescent assis dans un fauteuil. Ses yeux avaient été happés par ces deux jeunes hommes. Assis tous deux, ils étaient de taille différente. L'un était grand, mince, élancé, ses deux grandes jambes moulées dans un pantalon de costume noir étaient écartées et laissaient entrevoir une entrejambe dont il ne devait pas avoir honte dans les lits de quelques dames. Pendant une fraction de seconde, le jeune Ferdinand ressentit cette bonté dont parlait innocemment Erel Pentagast, simplement en voyant cette bosse dans le pantalon de costume entre les jambes élancées du barbu. Il ressentit une chaleur entre les siennes, et ne put que s'imaginer ce que pouvait devenir cette bosse dans un lit, avec une femme, une fois libérée de ses ligatures vestimentaires. L'homme avait un bras posé sur l'accoudoir. Un bras à la main fine, celle sûrement d'un jeune dandy. Son autre main tenait une coupe de champagne qu'il portait quelques fois à une bouche fine entourée d'une barbe courte qui oscillait entre le brun et le blond. Ses traits étaient fins. Ferdinand avait rapidement oublié la bosse du pantalon pour regarder ce nez un peu tordu mais finement dessiné qui cassait l'horizontalité de deux yeux noirs. L'homme semblait froid, comme certain de son pouvoir. Il parlait à un autre homme, quelque peu plus âgé, et plus petit. Ferdinand l'avait dévisagé aussi. Plus petit, bien plus charpenté, les cheveux très courts et blonds, la mâchoire carrée, l'homme était tourné de trois-quart face au plus jeune. Une de ses jambes bombées reposait sur la seconde. C'est à ce moment précis que Ferdinand Wieder comprit que la nature n'avait pas été bonne avec lui, qu'elle n'avait, à son égard, manifesté aucune bonté. Les deux hommes étaient sûrs d'eux ; beaux dans leur caractère unique. Le grand mince et barbu, le petit musclé et imberbe, ils s'étaient liés par la certitude d'être virils et séduisants. Lui, ne connaîtrait pas cette certitude. Et comme pour s'excuser d'avoir été aussi vilaine avec lui, la fortuna avait été un instant bonne et lui avait laissé voir, en une fraction de minutes, ce que personne d'autre n'avait vu. Ferdinand avait vu la main du plus musclé des deux, cette main plus imposante, cette main finement dotée d'un poil blond, il l'avait vue s'avancer et se poser sur la cuisse du plus jeune, comme pour y sentir la chaleur de ses muscles fins au repos. Ferdinand Wieder ressentit la bonté. Et il comprit que ce geste n'avait rien d'amical, puisque la main s'était délicatement dirigée vers l'intérieur de la fine cuisse et avait un peu remonté vers la bosse du pantalon de costume, comme pour y vérifier sa réelle teneur. A nouveau Ferdinand Wieder fit l'étonnante expérience d'une certitude: jamais la bonté ne lui permettrait de poser sa main sur cette jeune et fine cuisse, jamais la bonté ne lui permettrait d'y ôter le tissu et d'y découvrir les poils virils et fins posés de ci de là sur la cuisse élancée du jeune barbu. Jamais la bonté ne lui permettrait, à lui aussi, de monter délicatement sa main sur ce poil doux pour y découvrir un membre plus chaud, plus dur, plus lisse. Il revient à lui.
Erel Pentagast ignorait tout de l'existence de Ferdinand Wieder, parce que Ferdinand Wieder était de ces hommes qui ne s'incarnent que dans la vie publique et disparaissent le reste du temps. Jamais personne n'était entré dans la chambre de Ferdinand Wieder, parce que Ferdinand Wieder en tenait la porte constamment close. Tous ne voyaient en ce petit homme gras et excentrique que l'incarnation d'un ambitieux diplomate devenu numéro deux de la Confédération Internationale de la Sorcellerie. Tous ne voyaient en lui que cet extravagant et vieux dandy en costume victorien de velours. Jamais personne ne s'imaginait ce qu'il y avait, le soir, une fois la lutte terminée. L'interlocutrice de Wieder en était. Parler de bonté au fils d'une femme violée et d'un homme violeur, c'était comme parler de sécurité à un pauvre homme des rues cherchant un alcool pour se réchauffer. C'était comme secouer une petite poupée à une petite fille immobilisée dans son lit par la maladie. Un vague souvenir, un petit espoir qui demeure, entrecoupé d'événements dramatiques et éprouvants. Ferdinand Wieder croyait en la bonté, parce qu'il l'avait vue chez les autres. Il avait senti la bonté du sexe du jeune homme grand, élancé et barbu sur le point de gonfler quand son interlocuteur avait posé sa main sur sa cuisse. L'interlocuteur imberbe, cheveux courts et muscles bombés avait senti la bonté de savoir que sa main irait ailleurs plus tard, dans la nuit, et avait remercié tous les dieux d'avoir fait en sorte que cette nuit-là, sa femme retourne pour quelques jours dans sa famille, en province. Il avait ressenti la bonté de sa mère inondant le manoir quand elle voyait apparaître son troisième enfant qui lui rappelait le viol et l'éloignement, qui lui rappelait que face à l'humiliation, le destin avait été assez bon pour qu'il ne vive pas sous le même toit qu'elle, lui, l'enfant de la honte, le monstre fruit de la monstruosité. Il avait ressenti toute cette bonté. Il y croyait, parce qu'elle faisait vivre les autres. Mais il n'en voulait plus, depuis cette soirée où la main musclée s'était posée près du sexe moulé dans le pantalon de costume noir du fin élancé. Il n'en voulait pas, parce que la bonté était aussi la perte annoncée aux rêveurs. Et Ferdinand Wieder n'était pas un rêveur.
« Je n'ai pas dis que je ne répondrais pas à vos questions, Monsieur. J'ai seulement refusé votre offre d'être un de vos espions. — Vous vous trompez mon enfant. Je n'engage jamais de mauvais espions. Ferdinand plongea son regard froid dans celui de son interlocutrice. Votre enfantin propos sur la bonté le prouve ; vous ne me cernez pas et je doute que vous y arriverez un jour. Moi qui ne suis, pourtant, qu'un pauvre bougre mal fagoté ! Imaginez-vous face à des personnalités bien plus retorses que la mienne ! »
A nouveau le rire mielleux de Wieder retentit dans la bibliothèque, comme pour signifier à la jeune femme qu'il n'y avait rien de grave à ne pas devenir espionne. Son âme était probablement en suffisamment bon état pour qu'elle y échappe. La toile de l'Araignée était immense, et ses petits oiseaux suffisamment nombreux pour qu'il ne cherche plus, à soixante-dix ans, à en trouver d'autres. Wieder était à l'aube de sa chute définitive. Le temps comptait, donc, et il savait désormais qu'il devait accélérer le mouvement. Le vieil homme se redressa.
« Très chère enfant, ne vous méprenez pas. Mon éducation, et que tous les dieux gardent ma défunte mère - mère qui, du reste, ne s'était jamais occupée de lui, mais mieux valait garder les faux semblants encore un temps, me pousse à ne me diriger que vers des personnes compétentes. J'ai une sainte horreur de la médiocrité et de ceux qui ne font pas leur maximum pour progresser. Voyez-vous, je concède être un tantinet exigeant en la matière. Et lorsque je cherche une information, je réfléchis tout autant à la source. Peut-être infirmerez-vous mon propos, peut-être pas, mais puisque le Ministère vous a demandé, en personne, d'enquêter à Poudlard, il est à mon sens, peu humble je le confesse, plus judicieux et pertinent de vous voir, en personne, pour connaître les résultats de cette enquête. »
Wieder était un perfectionniste, et ceux qui le connaissaient le savaient. Les mots qu'il sortait si onctueusement de sa bouche moelleuse et suave étaient toujours finement choisis pour être mieux chantés et entendus. Il ne prenait rien à la légère, et ce même lorsqu'il n'était qu'un petit conseiller d'ambassade au début de sa carrière. Rien n'avait changé depuis, et il calculait précautionneusement à l'avance la teneur et la forme de ses propos. De fait, ceux-ci découlaient naturellement d'un intense et perfectionniste travail de longue haleine. Les nuits étaient courtes pour cet homme qui dormait moins qu'il ne travaillait. Les dossiers avaient toujours été connus sur le bout des doigts, même les plus insignifiants. Il avait ainsi appris à tout retenir et plus particulièrement chaque détail de toutes les affaires qu'il avait eu à gérer. C'est ainsi qu'il avait une grande connaissance du droit international qu'il citait à l'envie. Naturellement, lorsqu'il se savait incompétent dans un domaine, il se tournait toujours vers ce qu'il jugeait comme étant l'excellence. Il consultait, jusqu'à très tard, des spécialistes de tel ou tel domaine et apprenait à faire la synthèse intellectuelle de tout ce qu'il avait appris. Aucune question n'était laissée au hasard. Et c'était juste ici le dessein d'un tel entretien.
« Quelque chose m'étonne cependant. Il m'étonne qu'un homme aussi intelligent que vous ne ce soit pas directement adressé à McGonagall ou même au ministre de la magie pourquoi pas. Alors je vous repose la question, qu'êtes-vous venu faire ici ? — Oh ! Rires. Fumeuse flatterie. Elle ne savait pas y faire. Heureusement, elle n'était pas payée pour cela. Pour la simple et bonne raison que, comme vous l'avez si justement dit, le professeur McGonagall n'est pas la scientifique dépêchée par le Ministère de la Magie Anglais. Mais qu'importe. »
Le vieil homme referma son étui argenté à cigarettes. Il leva les yeux vers un des gardes du corps qui attendait. J., comme il l'appelait souvent, un des très nombreux petits oiseaux assurant la sécurité de cette vieille meringue à la lavande. Jamais il n'avait eu la folle idée d'être protégé par des agents de la Confédération Internationale de la Sorcellerie. Les meilleurs livres d'Histoire ont toujours expliqué que les pires comploteurs appartiennent aux gardes royales et impériales. L'erreur était alors trop évidente. J., l'oisillon en noir, s'approcha. Wieder se leva.
« Puisque vous ne semblez pas disposée à répondre aux questions que je suis légitimement amené à vous poser, j'en ferai un rapport détaillé aux Départements de la Justice Magique, de la Coopération Magique Internationale et des Mystères de votre Ministère de la Magie. Je suis un homme très patient, ma chère, mais s'il y a bien une chose qui m'est intolérable, c'est de perdre mon temps. »
Le dernier pion était entre les main de Pentagast. C'était à elle de jouer son dernier tour. Tour décisif.