Ξ Sujet: La pente glissante de l'existence [PV Tempérance] Sam 27 Fév - 16:07
« Je suis vieille. » Cette certitude, restée, jusqu’alors, larvée à la frontière de sa conscience, était venue la frapper de plein fouet dès son réveil, ce matin-là une bien belle journée en perspective. Les paupières encore closes, elle demeura un long moment étendue dans la pénombre de la chambre, attendant la mort cherchant ce qui avait pu faire naître cette conviction durant son sommeil. Devait-elle l’attribuer à l’attitude de sa fille aînée qui, à presque treize ans, avait fait une entrée fracassante dans l’adolescence, quand, lors du dernier cours de sortilège, elle avait obstinément refusé de s’entraîner au recurvite. Apparemment, elle ne voyait pas en quoi « apprendre un sortilège rétrograde pour ménagère soumise » allait l’aider à « être épanouie dans l’existence ». Susan avait regretté deux choses. D’abord d’avoir procréé encouragé le goût des mots et de la lecture chez Eléonore, lui ouvrant ainsi toute grande la porte de l'insolence éloquente. Ensuite d’avoir naïvement imaginé qu’avoir sa fille en classe serait un chemin parsemé de roses, sous prétexte qu’elle se dépatouillait bien, au quotidien, de la palanquée de cousins-neveux-t’es-qui-toi-déjà-dans-l’arbre-généalogique Montgomery-tout-ce-que-tu-veux, qui constituait une bonne partie des effectifs de l’école. Bref, Susan avait collé sa propre enfant renommée, au passage, Ingratitude - une expérience qu’elle ne recommandait à personne – et s’attendait, vu le regard noir dont elle avait écopé, à devoir recommencer sous peu.
Agacée, elle repoussa la couette dans un horrible craquement articulaire d’un geste sec. Il avait beau être encore tôt, Quentin était déjà parti. Elle ne s’en formalisa pas : il avait, la veille au soir, baragouiné quelque chose au sujet des soins à apporter aux… crabes de feu ? salamandres ? veracrasses ? botrucs ? A moitié endormie, elle n’y avait pas prêté beaucoup d’attention la communication dans le couple, c'est surfait, et avait simplement retenu qu’une bestiole quelconque requérait que le Serpentard filât à son chevet dès potron-minet. Les départs matinaux étaient, de toute façon, devenus communs, depuis qu’il avait ouvert la Jobarbille ( « Pardon ? Une animalerie ? Non mais ce n’est pas grave, on n’aura qu’à choisir lesquels de nos enfants ne feront pas d’études. Ce qui compte, c’est le bien-être animal. »). En réalité, ils se croisaient plus qu’ils ne se voyaient, dernièrement. Un jour ou l’autre, s’ils n’y prenaient pas garde, ils allaient finir par s’étonner de la présence d’un autre adulte dans la maison ( « Pardon, Monsieur, mais qu’est-ce que vous faites chez moi, exactement ? »).
Parfois, la Poufsouffle se demandait si elle n’était pas censée s’en inquiéter. Entre Poudlard, la boutique et les enfants bientôt mis en vente, bim, problème réglé, elle peinait à se rappeler à quand remontait leur dernière conversation qui ne tournât pas autour de 1. l’organisation de l’emploi du temps familial ( « Et c’est à partir de quel âge, qu’on estime qu’ils s’auto-gèrent ? »), 2. la gastro de la petite dernière ( « Ok, prépare-toi, d’ici deux jours, on est tous malades. ») ou 3. leur profession respective ( « Une heure de conseil pédagogique pour tomber d’accord sur le fait qu’il faut prévoir un autre conseil pédagogique. Brillant. Et toi ? Quel animal a voulu te boulotter les doigts, aujourd’hui ? »). Elle ne parvenait pas, pourtant, à s’alarmer de ce que d’aucuns auraient pu interpréter comme un signe de la lente déliquescence de leur union, d’une part parce qu’elle avait d’autres priorités à gérer (empêcher les jumeaux de s’entretuer autour d’un plateau de Monopoly, par exemple. La perte d’une gare : l’équivalent d’une tragédie shakespearienne pour un enfant de moins de dix ans), et d’autre part parce qu’elle avait foi en l’intelligence de Quentin. Or, aucun cerveau normalement cortiqué n’avait jamais eu l’idée de rejoindre une maîtresse / un amant / une créature affriolante version Hagrid à six heures du matin. Six heures du soir, oui. Six heures du matin, non. Sauf si les deux parties appartenaient au club des adultères insomniaques, évidemment.
Refusant de s’appesantir davantage sur cette hypothèse, Susan sauta au bas du lit et se brisa le col du fémur, fermement décidée à ne pas se laisser miner par son grand âge. Si elle évitait de croiser son regard dans le miroir de la salle de bain ( « Elle était là hier, cette ride ? »), et qu’elle ne pensait pas trop au fossé générationnel qui la séparait, désormais, de ses élèves les plus âgés, tout se passerait bien. Hélas ! Ses bonnes résolutions restèrent vaines : l’idée d’être sur la « pente glissante de l’existence » ne la quitta pas de la journée, si bien qu’elle était passable irritée, quand elle fit entrer les 7ème année, en dernière heure. D’un pas un peu raide l’arthrose, probablement, elle circula entre les rangs pour distribuer le sujet d’examen blanc sur lequel la classe devait pleurer des larmes de sang travailler. - Miss Biel, dit-elle, le ton plus cassant qu’à l’ordinaire, en marquant un arrêt devant la place de Tempérance, vous n’oublierez pas de venir me voir à la fin du cours.
La chose était convenue ainsi. Depuis que Susan avait obtenu l’aval de Minerva, plus rien ne s’opposait au projet d’avenir de Tempérance esclave ès copies : il était temps de définir concrètement le rôle qui serait le sien, lors de la rentrée de Septembre. Peut-être était-ce là la lala ? cause son malaise grandissant, songea-t-elle, alors qu’elle balayait du regard les têtes penchées sur les parchemins. Tempérance allait se retrouver exactement dans la même position qu’elle près de vingt ans auparavant hop, mini arrêt cardiaque, lorsque, tremblante d’émotion, elle avait frappé au bureau du Professeur Flitwick. Merlin. Bientôt vingt ans. Pas surprenant qu’elle se fît l’effet d’une petite mamie rabougrie : son subconscient, qui avait depuis longtemps fait le calcul, était en train de lui donner de gros coups de coude en hurlant « Allez la vieille, place aux jeunes ! ». Susan fronça les sourcils. Tout ceci était ridicule : elle était très contente d'accueillir Tempérance dans le département de sortilèges, et son arrivée ne la poussait certainement pas vers la sortie ( « La maison de retraite, c’est par là. Au menu ce soir : purée de pommes de terre et compote de pommes. A boire. Avec une paille. »). Essayant de se raisonner ( « Au pire, je la tue, mouahahaha ! »), elle pria sèchement un élève du premier rang de bien vouloir garder le nez sur sa propre copie, au lieu de lorgner celle de son voisin , et passa le reste de l’heure à corriger des dissertations de cinquième année "Kostas… Troll… Non, le sortilège d’attraction n’est pas le nom d’une technique de drague.".
- C’est terminé. La cloche avait à peine retenti qu’elle ramassa les devoirs d’un coup de baguette souple. Elle aimait beaucoup cette technique, qui lui épargnait les négociations larmoyantes avec les retardataires ( « Mais j’ai presque finiiiii ma conclusioooon… »), auxquels elle finissait toujours par céder, ayant elle-même fait partie de leur groupe, quand elle était élève. Elle regroupa les copies dans son sac de cours, laissant ainsi le temps à Tempérance de la rejoindre et vu son talent inné pour se prendre des coins de table, et trébucher sur ses propres pieds, elle était large. - Bon, Tempérance, attaqua-t-elle finalement, les deux mains à plat sur le bureau, j’ai vu la directrice pour vous : elle ne voit pas d’objection à vous intégrer bénévolement à l’équipe pédagogique en Septembre. Il faut donc que nous fassions le point sur l’organisation de votre travail et les tâches qui vous seront dévolues à partir de la rentrée. ça vous ennuie beaucoup, de gérer Kostas, par exemple ? A moins,, ajouta-t-elle, en jetant un coup d’œil interrogateur à la jeune femme, que vous n’ayez changé de projet ? Il n'était, après tout, pas trop tard pour fuir.
Tempérance Biel
Parchemins : 823Âge : 19 ans { 24/02/1998 } Actuellement : Assistante de Sortilèges Points : 0
Ξ Sujet: Re: La pente glissante de l'existence [PV Tempérance] Sam 13 Mar - 23:49
La pente glissante de l'existence
Tempérance + Susan
(c) princessecapricieuse
Tempérance avait dernièrement manqué d'attention en classe, ce qui était regrettable pour une personne souhaitant s'orienter vers une carrière d'enseignante à l'issue de ses études. Pourtant, tous les voyants étaient (avaient été ?) au rouge vert. Prenant finalement ses jambes à son cou son courage à deux mains, elle avait fait part de son vœu pieux d'orientation à sa directrice de maison : devenir calife à la place du calife rejoindre le département de sortilèges, et devenir son assistante - à la manière dont elle l'avait jadis elle-même été, lorsque le professeur Flitwick était titulaire c'était ça ou rejoindre la chorale en tant que crapaud. Il lui restait à obtenir l'approbation de McGonagall, ce qui, elle le savait par expérience, n'était pas une mince affaire. Mais derrière sa maladresse quasi pathologique et son don pour la détonation non préméditée, Tempérance avait toujours été une élève studieuse. Elle avait eu besoin de tutorat en histoire de la magie, certes, car elle était catastrophique lorsqu'il s'agissait d'apprendre des choses par cœur "Hé Tugdual, viens par là, oui toi là. Hein ? Pourquoi t'arrêtes pas de répéter le mot 'Ted', ça va pas bien ? Tu fais un malaise ?", mais vaille que vaille, Cole avait traîné son poids mort jusqu'à l'obtention d'une BUSE (un Acceptable obtenu à la sueur de son front, et une petite partie de son âme, morte sur l'autel de l'apprentissage de toutes les dates clés des guerres opposant les Géants : "6 juin 1712, Boris Le Frileux fête son anniversaire mais omet intentionnellement d'inviter Fionula La Bavarde : s'ensuit une bataille rangée dont les projectiles sont des bougies enflammées - Igor Le Borgne en héritera son surnom.") Inutile de dire qu'elle avait lâché cette matière comme une patate trop chaude dès qu'on lui avait demandé d'établir son emploi du temps de sixième année ("Je vais juste prendre Sortilèges et mettre une option sur les séances de siestes, ça sera tout merci").
L'arrêt de sa matière honnie, et l'abandon de la botanique ("Quand une plante essaye de me bouffer les doigts, elle n'est pas 'mignonne' Teddy, on appelle juste ça une erreur de la nature") lui avaient permis de vivre une vie nettement plus sereine pour ses deux dernières années à Poudlard. Elle avait de bonnes notes, et le stress post-traumatique de l'apprentissage par cœur semblait loin derrière elle - d'autant plus qu'elle n'était pas complètement inconsciente : elle savait bien que pour enseigner, il lui faudrait nécessairement retenir des choses par cœur le nom des élèves par exemple. Elle s'était même plutôt bien débrouillée, avant de se laisser emporter par une vague de drame adolescent. Noé l'avait embrassée, et elle s'était engouffrée sans se retourner dans un tourbillon de doute et de culpabilité.
Venu le moment des examens blancs - et en particulier celui de sortilèges -, la blonde était parvenue à retrouver une once de concentration - après s'être fait rappeler à l'ordre par Teddy, ce qui était tout de même le comble de l'ironie. Oui, elle pensait encore à son futur, non elle ne voulait pas se faire déshériter désavouer par Montgomery-Bones Susy pour les intimes ? car ce serait-là la spirale infernale et elle le savait : pas de boulot, peut-être plus de petit-ami si elle ne trouvait pas d'issue à sa crise existentielle et/ou si Julian ne lui pardonnait pas ce qui s'était passé avec Noé (qui n'était tout de même pas né de son initiative, soulignons-le), sans doute pas d'appartement si Erin revenait sur sa décision et la détestait finalement, bref, la déchéance la plus totale, condamnée à vivre tel Tanguy aux crochets de sa mère et de l'AA, infâme personnage qu'elle ne pourrait jamais supporter, qu'elle assommerait sans doute malencontreusement contre une porte de placard et finalement, prison.
Cette perspective totalement réaliste lui avait fait l'effet d'un électrochoc : elle devait réussir ses examens. Peut-être que tout le reste partait à vau-l'eau, mais au moins pouvait-elle encore garder le contrôle sur ses notes. Assise dans la salle de sortilèges, lunettes moches et dépareillées chaussées sur son nez c'est dire les sacrifices auxquels elle se prête, stylos alignés sur sa table, elle attendait qu'on lui distribue sa copie en espérant que Susan n'avait pas oublié leur deal pour pré-cocher les bonnes réponses. Elle acquiesça d'un hochement de tête quand sa directrice de maison lui rappela qu'elles avaient rendez-vous ensuite pour boire du bourbon cul-sec.
Quand sa copie s'envola vers d'autres cieux le professeur, Tempérance éprouva un certain soulagement elle avait eu le temps de finir son Sudoku tout va bien. C'était fait et elle pensait ne pas s'en être trop mal sortie Troll c'est la meilleure note, on est d'accord ? Adressant un signe de tête à Teddy et Jo', elle fit un effort louable pour essayer de rattraper le stylo qui avait décidé de se faire la malle après qu'elle ait - inévitablement - heurté sa table en se relevant. Son plongeon vers l'avant fut vain : le stylo explosa par terre dans une avalanche d'encre bleue. Priant tous les dieux pour que son enseignante ait été trop occupée par ses copies pour contempler sa disgrâce, elle sortit sa baguette et nettoya les dégâts à l'aide d'un sortilège informulé. Elle utilisa un autre sortilège pour ranger ses affaires - de toute évidence, sans magie, on ne pouvait pas lui faire confiance -, puis se dirigea finalement vers le professeur Montgomery-Bones. Arrivant à son niveau, elle retira machinalement les lunettes dépareillées, qu'elle fourra sans ménagement dans son sac.
Ses yeux s'éclairèrent de joie. « C'est vrai ? Ah non c'est une blague ? Je suis virée ? Vraiment ? » laissa-t-elle échapper par réflexe, avant de le regretter aussitôt. Elle poursuivit avant que sa directrice de maison ne puisse changer d'avis en fait vous êtes trop bête ça ne va pas être possible sans rancune !« C'est une merveilleuse nouvelle, je suis vraiment très contente ! » dit-elle avec la sincérité qui lui était caractéristique. Elle secoua aussitôt la tête en signe de dénégation. « Non non non non je n'ai pas changé d'avis ! Je souhaite toujours rejoindre l'équipe » La formulation la perturba. « pédagogique. » termina-t-elle avec moins d'aplomb qu'elle l'aurait espéré. Tu es une adulte se répéta-t-elle en ayant l'impression d'être une horrible escroc, d'autant plus qu'une autre voix, nettement plus sonore, lui rétorquait que s'il y avait bien une chose qu'elle n'était pas, c'était une personne gracieuse adulte. Bones devait forcément le savoir, non ? Bien sûr qu'elle le savait, elle était son élève : elle savait parfaitement qu'elle n'avait rien d'une grande personne. Et pourtant, elle semblait la croire capable de rejoindre l'équipe pédagogique, mieux : crédible à prétendre à ce poste la pauvre, déjà sénile !
Elle se racla la gorge pour chasser ses pensées parasites. « Comment seront réparties les tâches, du coup ? Bourbon dès huit heures, comme convenu ? On s'est positionné sur l'heure de sieste ou pas encore ? Est-ce qu'il y a des choses que je peux entreprendre dès maintenant, pour anticiper ? » Elle savait qu'il allait être bizarre d'être présente aux cours en tant que grouillot qu'assistante, d'autant plus face à certains élèves qu'elle côtoyait encore aujourd'hui dans les couloirs "Miss Faraday je vous prierai d'arrêter de me faire des croche-pieds quand je passe dans les rangs, nous savons toutes les deux que je n'ai pas besoin de ça pour me rétamer lourdement par terre".
La pente glissante de l'existence [PV Tempérance]
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