Guerre et paie! •Fiona•

Guerre et paie !

Fiona + Ciara

(c) princessecapricieuse

Fiona vivait sa vie tranquille, sans rien demander à personne. Elle avait quitté la salle du cours de sortilèges, sac accroché à l'épaule et avait pour seule ambition de monter déposer ses affaires dans son dortoir où elle pourrait s'affaler comme un jeune cachalot apathique pendant quelques minutes, avant de descendre pour le dîner. Elle réfléchissait à son programme de révisions pour le lendemain - les examens de fin d'année approchaient à grands pas, et ça semblait dernièrement être le seul mot que les profs avaient à la bouche -, l'esprit relativement serein - elle n'était pas particulièrement en retard - quand on attrapa son coude. Fronçant les sourcils, elle fit aussitôt volte-face, prête à envoyer paître l'outrecuidant venu l'importuner. Elle arrêta son mouvement destiné à se dégager quand elle réalisa qu'il s'agissait de Ciara, son expression passant de l'agacement à la surprise.

« Hey ! » Elle sourit à sa camarade de dortoir, mais sentit monter la confusion en analysant l'expression se trouvant sur son visage. Cela ne faisait que quelques semaines que Ciara s'était confiée à elle sur sa famille, et Fiona jugeait qu'en six années passées dans le même dortoir, elles n'avaient jamais été aussi proches que depuis ce moment. Elles avaient continuellement été à la limite de l'amitié. Elles traînaient ensemble, avec les autres filles de leur dortoir, parce que leurs emplois du temps s'y prêtaient et qu'elles s'entendaient - globalement - bien, mais les amis proches de Fiona s'étaient toujours trouvés à Gryffondor. Avec Ciara, en particulier, ça avait longtemps semblé trop compliqué : il y avait le facteur Graham, et l'envie irrépressible qu'éprouvait Fiona envers les capacités magiques de la brune. Tout semblait se faire sans effort pour Ciara, comme si jeter des sorts était aisé, alors que pour Fiona, c'était tout l'inverse. Sans le faire volontairement, elle lui faisait éprouver un bon vieux sentiment d'infériorité intellectuelle qu'elle abhorrait - d'autant plus qu'elle n'en avait pas l'habitude. Elle avait été forte à l'école moldue, avant que sa vie ne bascule dans la magie, les grimoires et les potions nauséabondes.

« T'as l'air très sérieuse, qu'est-ce qui se passe ? » L'idée que ça concerne Graham ne lui traversa pas l'esprit : elle avait déjà bien à faire avec Perrine, sans se préoccuper de Ciara par dessus le marché. Surtout que depuis le temps, il faudrait que ça finisse par lui passer - Ciara était trop intelligente pour se complaire dans ce béguin à sens unique qui avait déjà nettement trop duré au goût de Fiona ! Elle pensa plutôt qu'il était question de la vie de famille de la brune, par exemple, quand bien même s'il s'agissait effectivement de ça, alors elle ne comprenait pas la légère hostilité qui semblait émaner de sa camarade de dortoir.

Vaguement ennuyée, elle se laissa pourtant entraîner jusqu'au dortoir - ne serait-ce que parce que c'était de toute façon sa destination initiale. Poussant la porte de leur chambre, elle posa son sac par terre, et se laissa tomber sur son lit avant de relancer Ciara : « T'en fais du mystère ! Balance alors ! » Elle espérait que ça n'était rien de trop dramatique, car sinon elle en viendrait à regretter son manque évident de tact. Mais c'était plus fort qu'elle : Ciara se montrait excessivement louche, et elle avait un mauvais pressentiment.

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Ciara était hyper louche, ce qui aurait eu le don d'alarmer Fiona si elle ne s'était pas focalisée sur l'idée que ça puisse avoir une origine perso, voire familiale. Elle était aussi directive que lorsqu'on leur assignait des devoirs à faire ensemble, ce qui n'était à la fois pas nouveau mais pas non plus très agréable. Fiona n'était pas (plus ?) nulle, merci bien. Elle avait des notes correctes dans la plupart des matières, et elle ne tolèrerait pas que Ciara la prenne de haut. Mais il ne s'agissait pas d'études, et la brune ne voulut même pas lui donner de piste avant qu'elles ne se rendent dans leur salle commune. Fiona n'avait jamais été très patiente, pourtant elle prit sur elle pour ne pas insister davantage. Si Ciara était déjà fébrile, ça ne servait à rien de l'asticoter encore plus - une leçon apprise avec les années passées en proximité l'une de l'autre.

S'installant dans le dortoir comme elle avait prévu de le faire initialement - avant d'être interceptée sauvagement - Fiona largua ses affaires de cours et prit place sur son lit à baldaquin. Il n'y avait aucune nouvelle que Ciara puisse lui annoncer sans qu'elle ne soit vaguement affalée sur son matelas. C'était son droit. Elle avait passé une longue journée.

"Oh oh" songea-t-elle en voyant Ciara se retourner vers elle avec une lenteur monumentale. Elle ne s'était pas non plus attendue à ce qu'elle balance son propre sac : la blonde le suivit des yeux alors qu'il atterrissait parfaitement sur le lit de sa camarade de dortoir. Évidemment. Levant les yeux au ciel, ces derniers retrouvèrent le visage de Ciara quand elle se décida enfin à prendre la parole pour énoncer... des paroles qui n'avaient absolument aucun sens pour l'Anglaise.

« Hein ? » laissa-t-elle naturellement échapper, mue par un réflexe de pure confusion. Quelque chose dans l'attitude de Ciara la poussa pourtant à se relever pour pouvoir lui faire face, plutôt que d'être à moitié étendue sur son lit dans une position de faiblesse. Ciara avait l'air prête à en découdre, et Fiona se demanda brièvement si quelqu'un ne lui avait pas fait ingurgiter le même philtre d'amour que celui qu'avait subi Alfie au bal de Noël.

« Entre moi et lui ? » Dans un éclair de folie elle pensa qu'elle parlait de Jensen, mais écarta tout aussi rapidement cette pensée fugitive de son esprit : ça n'aurait aucun sens. « Attends... » Elle écarquilla les yeux. Etait-il possible que... Elle secoua la tête avec incrédulité, scrutant le visage si parfait et si bouleversé de sa camarade de dortoir. « Ne me dis pas que tu parles encore de Graham ! » intima-t-elle, davantage désespérée qu'énervée. Elle ne voulait pas revivre une énième fois cette conversation, pas avec Ciara, qu'elle appréciait - à l'inverse de cette dinde de Perrine.

Les paroles lancées avec pure fureur la firent sortir de ses gonds à son tour. Adressant un regard exaspéré à la brune, elle lui rétorqua avec force : « Mais t'es complètement fêlée ma pauvre vieille ! Combien de fois je vais devoir te répéter que je ne sors pas avec Graham, que je ne suis jamais sortie avec Graham, que je ne sortirai jamais avec Graham ! » Elle avait ponctué chaque mot de gesticulations un peu approximatives, emportée par le côté ubuesque de cette situation. « Il faut que tu te détendes Cia', tu craques sévère là ! » lui dit-elle en tapotant son index contre son propre crâne, les sourcils toujours froncés. Et dire qu'elle avait prévu de se détendre, voilà qu'elle devait encore composer avec le béguin apparemment éternel de Ciara pour son meilleur ami. Parfois, la vie était incroyablement injuste.

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Un peu lente à la détente, Fiona avait enfin capté que Ciara l'avait traînée là pour en découdre. Se sentant vaguement vulnérable en étant affalée sur son lit à baldaquin, elle se redressa pour faire face à la brune, alors que celle-ci lui balançait à la figure des paroles qui n'avaient ni queue ni tête : comment ça, "ce qu'il y avait entre lui et elle" ? Déjà, le "lui" était interprétable je suis très demandée Ciara peux-tu être plus précise stp ? Mais Fiona déduisit - justement - qu'il était encore question de Graham, à savoir le prénom que Ciara avait constamment à la bouche, au grand désarroi de Fiona.

Énervée de se retrouver une fois de plus dans cette situation, et surtout, de se faire traiter de menteuse sans justification aucune, Fiona perdit son calme à son tour, enjoignant à Ciara de se montrer raisonnable - mais de manière nettement moins diplomatique. Pour sa défense, ce n'était pas comme si c'était la première fois que Ciara la questionnait sur ce sujet, et après un an, la blonde jugeait qu'il aurait dû y avoir prescription. Elle n'avait jamais été intéressée par Graham, et de toute façon, Graham n'aurait jamais été intéressé par elle, puisqu'aux dernières nouvelles, il préférait les garçons. Que Ciara se montre aussi bornée était hautement frustrant : elle qui était si intelligente en temps normal devenait totalement irrationnelle dès que le préfet de Gryffondor était concerné.

Elle suivit Ciara des yeux alors que cette dernière se dirigeait vers son lit, les sourcils froncés. Est-ce qu'elle allait lui faire la gueule à présent ? S'enfermer derrière les rideaux de son lit en attendant qu'elle quitte le dortoir ? Raté : poussant un cri soudain et virulent, la brune attrapa son oreiller pour s'en servir de projectile. Prise de court, Fiona chercha à l'esquiver, mais trop tard : il ébouriffa tout le sommet de son crâne avant d'atterrir derrière elle. « Mais qu'est-ce qui te prend ! » s'écria-t-elle en se redressant prestement, tapotant ses cheveux blonds en pagaille. Par réflexe, elle se mit en position de défense, reculant pour attraper son propre oreiller alors que Ciara revenait vers elle, armée à nouveau. Apparemment, sa camarade de dortoir avait vrillé pour de bon, cette fois.

« Qu'est-ce que tu racontes ! » répondit-elle en brandissant son oreiller, prête à assommer Ciara pour faire revenir un peu de raison dans son esprit. Mais derrière la colère, elle lut la peine, et son bras retomba mollement. Elle déglutit avec hésitation. « Cia', c'est pas à cause de toi, tu n'y peux rien et lui non plus. » dit-elle doucement, restant alerte malgré tout. S'il y avait bien une chose qu'elle avait appris de la brune, c'était qu'elle pouvait se montrer imprévisible. Ce n'était pas parce que Ciara semblait se dégonfler comme un ballon de baudruche qu'elle n'allait pas lui mettre un coup d'oreiller à bout portant, et cette fois, son gagne pain visage pourrait être touché de manière frontale. Elle était éreintée, elle n'avait pas envie que sa journée se termine dans un nuage de plumes d'oie, agressée dans le confort de son propre dortoir.

« J'sais pas Cia', on ne peut pas contrôler qui on aime. Mais ce dont je suis sûre, c'est qu'il faut que tu tournes la page là, ça dure depuis trop longtemps. Tout ce que ça t'apporte, c'est de la peine. » Elle regardait son amie avec compassion, l'invitant d'un geste de la main à s'asseoir sur son lit. « Tu comptes encore m'attaquer ou pas ? Je préfère savoir à quoi m'attendre. » avertit-elle d'un air sévère.

« On peut faire un plan pour t'aider à aller de l'avant, si tu veux. » proposa-t-elle d'une voix hésitante. Elle craignait quelque peu que se montrer trop directive ne les amène vers le chemin de la violence à nouveau. Mais ne disait-on pas que pour oublier un garçon, la meilleure solution était de se concentrer sur un autre ? Après tout, ce n'était pas comme si Poudlard manquait de mâles disponibles.

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Fiona était parée pour une nouvelle attaque : oreiller en main, elle observait Ciara avec méfiance alors que cette dernière s'était rapprochée d'elle une fois de plus. Pourtant, sa camarade sembla se dégonfler comme un ballon de baudruche aux paroles de la blonde concernant Graham. Jugeant qu'une sorte de trêve temporaire semblait installée, Fiona haussa doucement les épaules, tout en reposant son oreiller sur son lit. Les rumeurs sur la sexualité de Graham allaient bon train - surtout que son double titre de Mister Poudlard avait eu le don de le mettre constamment sous le feu des projecteurs ces dernières années. Et son meilleur ami avait partagé certaines informations avec Louis et elle au cours de l'été précédent - sur le fameux baiser surprise et sur ses propres sentiments pour les garçons -, mais bien qu'elle apprécia Ciara, Fiona n'était pas partie pour éventer la vie privée du préfet de Gryffondor. C'était son jardin secret, à lui seul (n'en déplaise à Perrine et à sa langue de vipère !). Cela dit, elle voulait aussi aider Ciara à aller de l'avant - sentiment renforcé par l'attaque éhontée et injustifiée vécue au cours des cinq dernières minutes.

S'asseyant à côté de la brune, Fiona soupira. « Je veux dire qu'on ne peut pas forcer des sentiments ou une attirance s'ils ne sont pas là. » Et a priori, Graham était plutôt attiré par les garçons, ce qui signifiait qu'il ne risquait pas de remarquer Ciara de sitôt. Mais Fiona ne comptait pas s'avancer plus que ça sur les choix du préfet : elle n'était pas dans sa tête, et les gens ne rentraient pas aussi simplement dans des cases. Ce qu'elle savait pour sûr, c'était que Graham était au courant du béguin de Ciara - au moins partiellement, il ne pouvait pas se douter du niveau de folie que Fiona venait d'observer ! -, et qu'il n'avait rien fait en ce sens. S'accrocher ad vitam eternam apparaissait juste contre-productif pour Ciara, et le développement d'une vie amoureuse épanouie.

« Est-ce que tu le connais même si bien que ça, au final ? » demanda-t-elle précautionneusement, parce qu'elle craignait un retour de flamme. Mais comment le dire autrement ? A force, Fiona avait surtout l'impression que Ciara avait beaucoup idéalisé toute cette affaire d'amour fou pour le Gryffondor. Elle qui était habituellement si raisonnable et raisonnée perdait les pédales dès lors que le préfet était concerné, alors qu'en définitive, elle semblait rarement lui parler ! « Il est vraiment très bavard ce garçon, pas capable de te raconter une anecdote sans s'éparpiller dans mille histoires annexes qui n'apportent rien au récit à part des détails obscurs sur l'opération du genou de sa tante Cecil. Insupportable. » plaisanta-t-elle en souriant et en espérant surtout détendre l'atmosphère. Ciara était au bord des larmes, et Fiona n'avait pas l'habitude de gérer ça c'est gênant maintenant tu arrêtes : 0 compassion. « J'suis pas dans sa tête Ciara. Je ne peux pas parler pour lui. » ajouta-t-elle en soupirant. Peut-être Ciara aurait-elle simplement dû se déclarer auprès de Graham. Arracher le pansement. Ça aurait été une situation peu agréable pour les deux concernés, mais au moins Fiona n'aurait-elle pas fini quasi assommée par un coussin toujours garder le sens des priorités.

Fiona peinait à comprendre comment Ciara pouvait se prétendre aussi amoureuse de Graham, sans pour autant le côtoyer plus que ça. Un béguin inoffensif, ou une attraction physique, elle voyait tout à fait, mais être éprise à ce point ? Jusqu'à développer une jalousie sans bornes et attaquer sa propre camarade de dortoir avec un oreiller c'est la destruction de son brushing qui la traumatise le plus ? Ça lui semblait quelque peu excessif - mais elle avait assez d'instinct de préservation pour ne pas le formuler comme ça. « Tu pourrais commencer par essayer de traîner un peu plus souvent avec lui... » suggéra-t-elle raisonnablement. Par exemple, en passant du temps avec Fiona lorsqu'elle se trouvait avec Graham ? Ça aurait au moins le mérite de se faire naturellement - alors que si Ciara le collait soudainement, Graham risquait de s'effaroucher en deux-deux. Elle connaissait la bête.

Elle paniqua en voyant les larmes couler silencieusement sur les joues de son amie. « Oh Ciara ! » Zut de zut ! Elle avait pensé faire rire Ciara en lui parlant des tergiversations de Graham, certainement pas la faire pleurer ! Sans doute était-ce indélicat, réalisa-t-elle avec effroi : elle n'avait fait que souligner qu'elle le connaissait mieux que la brune. Ciara avait disparu derrière son oreiller, et Fiona cherchait vainement une technique pour la réconforter - et éviter de faire redoubler ses larmes, de préférence. Lui tapoter le dos ne ferait sans doute pas l'affaire. A la place, elle attendit que le visage de Ciara réapparaisse pour se tourner pour de bon vers elle, et venir la serrer dans ses bras. Parfois, un câlin valait mieux que mille mots, non ? « T'inquiètes. » souffla-t-elle alors que la brune s'excusait, car oui, elle était rancunière et elle n'appréciait pas les agressions - surtout injustifiées - sur sa personne, mais elle savait aussi reconnaître que Ciara était sincèrement troublée.

« S'il y a une chose dont je suis certaine, c'est que t'es loin d'être idiote, Cia'. » dit-elle avec solennité, s'étant écartée pour adresser un sourire timide à son amie. Elle ne voulait pas l'encourager à s'accrocher à Graham non plus : ça ne serait recommandable pour personne. « Qu'est-ce que tu penses de mon plan pour passer à autre chose ? Il y plein d'autres mecs à Poudlard et t'es... toi, je te promets que tu as l'embarras du choix. » Ciara était intelligente, jolie, passionnée : Fiona avait du mal à voir qui ne serait pas intéressé - sauf peut-être une personne préférant l'autre sexe. Elle sourit. « De rien ! J'suis là pour ça. » promit-elle, plus détendue à présent que Ciara ne pleurait plus. « Tu sais les béguins sans issue ça arrive à tout le monde. » ajouta-t-elle par souci d'équilibrer les choses. « Il y avait toute une période quand on était plus jeune où je craquais sur Louis, c'était terrible. » Et pour le coup, elle connaissait bien l'ancien Gryffondor, puisqu'il était le meilleur ami de Graham. Elle le voyait et les battements de son cœur s'accéléraient sans qu'elle ne lui ait rien demandé, à cet idiot (de cœur, pas de Louis !). Sans parler de la sensation de s'être convaincue que ça n'était rien - ce qui était aisé quand il n'était pas à proximité - tout ça pour chuter comme une bleue dès qu'elle le recroisait. Heureusement, ce fâcheux béguin s'était dissipé, d'abord quand il avait commencé à sortir avec Payton, puis pour de bon quand Louis avait quitté l'école.

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