La mauvaise éducation [Libre !]

Citation :: ~~1 chaudron (modèle standard en étain, taille 2)~~
1 boîte de fioles en verre ou cristal
1 balance en cuivre

« Maria ! Nous allons maintenant chez l’apothicaire.»

Brandissant la lettre décrivant la liste des fournitures, Précieuse était déjà en marche vers la boutique de son choix. Il lui manquait en effet encore quelques ustensiles nécessaires pour le cours de potion. La domestique avait de plus en plus de mal à suivre le rythme rapide de la petite, surtout qu’elle devait porter toute seule tous les achats de la fillette. Elle suivit donc Précieuse, tout en portant une chouette dans une cage, un chaudron, un sac contenant des uniformes de Madame Guipure et la pile de livres et manuels. Elle avait de fortes crampes dans les bras et semblait sur le point de s’écrouler par terre. Malheureusement pour elle, la petite Précieuse s’en fichait. Les domestiques étaient bien payés pour faire le sale boulot à sa place, non ?

Quand Précieuse poussa la porte d’entrée de l’apothicaire, elle eut une soudaine envie de vomir. L’atmosphère sentait un mélange d’œuf pourri et de chou rance. Elle referma aussitôt la porte et attrapa le foulard qui se trouvait autour du cou de sa domestique. Elle le mit devant son nez pour que l’odeur nauséabonde n’atteigne pas ses délicates narines. Elle qui était habituée aux odeurs parfumée de rose ou de jasmin. Comme le gérant pouvait-il travailler là-dedans ? Il ne devait pas avoir de nez !

Précieuse poussa une fois de plus la porte d’entrée. Elle sentait encore la mauvaise odeur mais cela restait supportable. Par contre il y avait un autre problème, une file d’attente comprenant au moins dix élèves avec ou sans leur parents, se trouvaient devant elle. Précieuse croisa les bras agacé. Elle n’avait pas envie d’attendre aussi longtemps, surtout qu’elle avait prévu d’aller manger une glace juste après les courses. Maria, la domestique, l’avait rejointe à l’intérieur.

Alors qu’elle attendait derrière, la petite blonde se demanda si doubler tout le monde serait mal vue. Elle était quand même une descendante de la riche et noble famille McLane. N’étant pas comme tout le monde, elle avait surement le droit à un traitement de faveur. Le gérant reconnaitrait surement les traits de son père à travers son visage.

Sans demander la permission, Précieuse marcha devant elle et doubla toute la file de personne jusqu’à se placer au début de la queue. Les premiers murmures d’agacements se firent entendre dans la foule. Restait maintenant à savoir si quelqu’un rouspéterait assez pour l’obliger à retourner derrière et attendre comme tout le monde.

Les rues arboraient cet air moyenâgeux et sauvage qu’on avait voulu leurs donner. Les sols pavés, les murs sales, mais une ambiance pour le moins chaleureuse. Le ciel, malgré ses nuages blancs et son soleil caché, arborait sa plus belle couleur. Un léger vent tiède, qui soulevait les chevelures et les capes de tout être bougeant ici. Le chemin de traverse était pour ainsi dire agité. Des jeunes gens parlaient, gigotaient, se rendant d’un magasin à un autre, dans d’infernaux allés et retours. Gladys se tenait dans un coin de la longue rue magique, observant cette déambulation inhabituelle. Les sorciers s’y côtoyaient en se frôlant, hâtifs de faire de plus vastes emplettes. Pourvus de lourds sacs et de cages hululant, ils allaient et venaient, ne s’arrêtant que pour échanger un mot avec leurs tuteurs. La jeune fille serrait elle-même un sac contre elle, bien que celui-ci soit mince et peu développé. Il ne contenait que quelques robes de sorcier qu’elle avait prit le soin d’acheter à un prix convenable, même si elle vivait dans une modeste richesse. Une baguette demeurait déjà dans sa poche, celle-ci l’ayant choisie dès qu’elle était entrée chez Ollivanders. Assez étonnée par cette foule d’habitués, la fillette au sang moldu ne savait comment se comporter, où aller, que faire. Elle regardait ces visages inconnus, qu’elle aurait peut être la chance de revoir une fois scolarisée à Poudlard, et se maudissait de ne pas avoir cueilli de plus amples informations sur cette vie monotone, auprès des livres de la bibliothèque londonienne.

Gladys se dirigea lentement vers le magasin le plus proche, observant d’un œil discret la liste parcheminée qu’elle tenait entre ses doigts. Faust, son chat, se tenait sur son épaule et observait tout autant qu’elle le paysage peu commun. Elle poussa la porte du magasin, constata qu’il s’agissait d’un apothicaire. A cette heure-ci, il n’y avait pas beaucoup de monde, mais sitôt la fillette introduite dans la file d’attende, une dizaine de jeunes gens vinrent prendre place derrière elle, accompagnés pour la plupart des plus jeunes. Elle se sentit alors bien seule, et bien jeune. Ses parents ne pouvaient pas l’accompagner parce qu’ils n’aimaient pas son propre sang ; Peter était trop jeune et ne montrait aucun signe magique. Et quant à ses ancêtres, il aurait été bien difficile d’aller les chercher dans leurs tombes, d’autant plus qu’elle ignorait même jusqu’à leurs prénoms. Elle soupira. Le temps passait relativement vite, mais la file, elle, semblait ne pas bouger d’un centimètre. Lorsque Gladys fût enfin deuxième, une jeune fille les doubla et se posta en première position, d’une manière hautaine qui lui déplut. Le garçon devant elle ne semblait pas vouloir rechigner, et marmonnait dans sa barbe avec discrétion. L’asiatique se déplaça d’un pas sur le côté, s’avança vers la nouvelle arrivante et l’observa quelques instants.

« Tu ne vois pas que tu gênes tout le monde ? C’est mal poli de nous doubler comme ça, tu ferais mieux de retourner à la fin de la file. Nous avons attendu longtemps pour passer, je ne vois pas pourquoi tu serais dispensée de cette attente… »

Gladys avait parlé sur un ton à la fois peu disposé à se laisser faire mais toutefois amical. Elle était toujours respectueuse de tout le monde, quel qu’étaient leurs statuts, mais elle n’aimait pas non plus se faire marcher sur les pieds.

*Mais où est ce qu’il est encore passé celui là ?*

Même si elle s’était placée de son plein gré en première position, Précieuse trouvait que cela n’allait pas encore assez vite. Le gérant avait en effet disparu au fond de la boutique pour aller chercher on-ne-sait-quoi. En même temps, vu le bordel de la boutique, il était normal de perdre cinq bonnes minutes à chercher un objet. Des fioles, des ingrédients et autres ustensiles étaient placés n’importe comment dans un ordre qui n’avait rien de logique. Il y avait même des insectes qui circulaient librement sur le sol. C’était absolument écoeurant.

Soudain, une fille qui semblait avoir son âge se planta et côté d’elle et se mit à la sermonner. Précieuse leva un sourcil et se tourna vers elle tout en croisant les bras. Si la personne qui l’interpellait avait été un homme, elle aurait sans doute fait profil bas sachant d’avance qu’elle ne ferait pas le poids. Mais là il s’agissait d’une fillette de la même taille qu’elle. Comme si elle allait retourner derrière pour elle ! La bonne blague.

« Et bien puisque tu as attendu tellement longtemps, tu n’es plus à 5 minutes près. Alors que moi, si je retourne au fond, j’en ai pour plus d’une heure. »

Ce raisonnement n’était pas très logique ni très fair-play mais il était en revanche absolument typique de la petite blonde. Précieuse remarqua alors qu’une grosse foumi trainait vers ses chaussures à talons. Sans attendre, elle l’écrasa avec la pointe de sa chaussure ce qui provoqua un bruit sec et désagréable. Elle releva ensuite la tête et constata que la fille ne semblait pas décidée à décamper. Elle sortit de son petit sec dix gallions et les tendit vers la fillette.

« Voilà dix gallions de compensation pour que tu me fiches la paix. »

En plus voilà que le gérant revenait. Il fallait absolument qu’elle soit la première qu’il servirait. Précieuse repensa à la glace qui devait l’attendre dehors. Vivement qu’elle déguerpisse de ce lieu à l’odeur infâme.

Gladys eu l’envie irréprochable de gifler cette demoiselle qui se croyait tout permis, en face d’elle. Il lui aurait été facile d’adopter un poing masculin puisqu’elle en avait l’habitude, mais il y avait du monde, et ce n’était pas là les bases du respect qu’elle avait toujours apprit. Elle l’observa alors de ses yeux noisette, sans ciller ni même froncer les sourcils, d’une manière calme et posée, malgré la colère qui commençait à monter en elle. Elle avait toujours détesté ce genre de blondinettes hautaines qui ne vivaient que dans la richesse illimitée et qui, une fois dehors, nageaient encore dans un rêve fantasmagorique de pseudo princesse. Certes, il était vrai qu’elle n’était pas à cinq minutes près, mais si la fillette avait prit le soin de lui demander correctement une place favorable, avec une explication plausible, Gladys n’aurait pas hésité à la faire passer devant elle. Parce qu’elle était beaucoup trop gentille. La jeune asiatique soupira face à ce comportement puéril. Derrière eux, les gens les observaient avec perplexité, cherchant à savoir si les deux jeunes filles étaient la cause du retardement ou si le gérant était une fois de plus occupé à chercher un objet dans sa masse de désordre. Un désordre vacillant, se classant en monticules d’objets fragiles près à s’écrouler comme des dominos ; et qui faisait également office de terrain de jeu pour les insectes. L’un deux vint d’ailleurs mourir sous le talon de la nouvelle arrivante, qui sortait de son sac de l’argent. Elle comptait la payer pour la paix ? Un sourire vint naître sur le visage de Gladys. Celle-ci ferma le poing, le jeta tout contre le poignet de la demoiselle ; avec une force limitée qui causait toutefois des dommages. Les pièces tombèrent, roulèrent au sol. Elle ne su pas si son coup lui avait mal –puisqu’en principe cela devait être fort douloureux, mais elle était satisfaite de voir les gallions toucher le sol.

« Tu peux garder ton argent, et ne compte pas sur moi pour te laisser tranquille aussi facilement, car je déteste les filles dans ton genre qui ne vivent que sur leurs richesse. L’argent ne fait pas tout tu sais ? »

Le gérant fit irruption dans la pièce, se dirigea vers le comptoir pour accueillir un nouveau client. Très vite, avant même que la blondinette ne puisse prendre tête, Gladys poussa le garçon en face d’elle afin qu’il puisse passer ; et sa méthode marcha car le gérant n’accorda qu’un regard à la fillette.

« Aie ! Espèce de folle ! » hurla Précieuse quand la peste brune lui donna un coup de poing dans le poignet.

Le coup n’avait pas été très fort mais comme la blonde était de nature fragile, cela provoqua immédiatement la chute des gallions qui se trouvaient dans sa main. Précieuse était stupéfaite du manque de respect dont la petite venait de faire preuve. Elle ouvrit la bouche en grand et regarda médusée les pièces rouler sur le sol. Elle remua légèrement sa main et fit semblant de ne pas pouvoir la bouger.

« Bravo à toi, tu viens de me casser le poignet. J’espère que tu es contente ! » vociféra-t-elle d’une voix des plus ironique.

Précieuse se fichait pas mal d’avoir perdu quelques gallions mais en revanche elle n’appréciait pas du tout qu’on lui manque de respect. Elle ne comptait pas laisser cette petite garce s’en tirer aussi facilement. Entre temps, la brune avait poussé le garçon qui se trouvait juste derrière Précieuse devant le gérant. Elle avait donc un peu de temps pour réfléchir à ce qu’elle allait pouvoir faire subir à la petite impertinente.

Puis Précieuse eut une idée. Alors qu’un mouvement de foule permettait à chacun de faire quelques pas en avant, la blonde en profita pour écraser le pied de la brune avec son talon.

« Oups, pas fait exprès, » déclara-t-elle d’un ton qui exprimait son manque de sincérité.

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