[Cours d'Histoire de la magie] Premier cours

Heegor s'était levé ce matin-là avec l'estomac barbouillé.

Un rapide examen du corps d'Abercrombie dans lequel il s'était endormi ne lui révéla pas la source du dysfonctionnement. Sur le plan digestif, toutes les cellules fonctionnaient correctement. Une légère tendance à la constipation due à un manque de fibres et à une faible tonicité musculaire ne pouvait expliquer ce sentiment de malaise qui remontait dans sa gorge.

Cela faisait deux jours entiers – et deux nuits – qu'il n'avait pas repris sa forme originale. Ce corps conçu à la va-vite présentait quelques problèmes de coordination musculaire. Hélas, maintenant qu'il était apparu en public, il ne pouvait guère se permettre de recréer un autre corps. Tout aurait été plus facile s'il n'avait eu qu'à copier un humain existant mais il aurait alors couru le risque de rencontrer son autre moi. Les histoires de sosie marchaient bien dans les feuilletons moldus, mais ici, ca ne ferait que lui attirer les pires ennuis.

* Tiens, à propos, est-ce que mon enregistrement des « feux de l'Amour » a bien fonctionné cette nuit * A cette pensée, il se dirigea vers le petit réduit où il cachait son matériel moldu. Depuis de nombreuses années, il suivait l'évolution technologique de ces humains ordinaires qui fabriquaient petit à petit leur propre sorcellerie à base de silicium. Cela faisait désormais huit ans qu'il suivait ce soap, qu'il qualifiait lui-même d'insipide, navrant et complètement irréaliste et, bien qu'il soit sûr de pouvoir décrocher quand il voudrait , il n'avait pas raté un seul épisode depuis ces cinq dernières années.

Rassuré en voyant le compteur du magnétoscope connecté à son micro-téléviseur, les deux étant reliés au mur par un fil qu'on aurait pu suivre jusqu'à un petit générateur électrique, Heegor/Abercrombie se rasséréna. La pince qui lui serrait la gorge s'était un instant relâchée.

Plus qu'un bol de céréales à avaler pour faire alimenter tant bien que mal ce chef-d'oeuvre de gaspillage énergétique qu'on appelait corps humain, un coup de rasoir pour les poils inférieurs du visage, un coup de peigne pour ceux du haut et il serait prêt à affronter son premier cours.

* Aïe * La douleur était revenue d'un seul coup, plus forte que jamais.

*Se pourrait-il que... ? * Il se représenta les élèves de sa classe, leurs visages moqueurs tournés vers lui. L'envie de vomir lui coupa la respiration.

* Le trac. J'ai le trac. Bon sang ! Heu... je veux dire : Merlin ! * Ce n'était pourtant pas la première fois qu'il logeait dans un corps humain et qu'il affrontait des foules. Lorsqu'il était ministre de l'économie en Roumanie et qu'il avait dû affronter des paysans en colère, lorsqu'il était au service de Karkaroff qu'il fournissait en sujets d'expériences et qu'il avait du affronter des paysans en colère * Tiens, c'est vrai qu'il y a beaucoup de paysans en colère dans ce pays * Et même récemment, « Blackie » n'avait jamais eu le trac face à toute une bande de redoutables malfrats, fripouilles, tire-laines et coupe-jarrets (Les lectures de Heegor avaient tendance à lui faire utiliser des termes désuets mais dans ce cas, c'est plutôt l'émotion qui lui faisait ressusciter des vieux métiers disparus)

* Concentrons-nous. Voyons, comment chasse-t-on le trac déjà ? Ha oui, il faut imaginer son interlocuteur nu... Mais c'est n'importe quoi ce truc ! Pour un prof, c'est un truc de pédophile ! * Non, décidément, ça n'allait pas du tout. Il partit brutalement vomir son diner de la veille dans les toilettes qu'il avait fait installer dans le souci de crédibiliser Abercrombie. Hoquetant, crachant de la bile – son dîner était digéré depuis bien longtemps – il revint à petit pas, à peine soulagé par cet incident qui lui procurait un inconfort d'une autre nature, piètre distraction à son mal qui était toujours là.

* Et si je me déclarait malade ? * Ca ne servirait à rien d'autre que repousser le problème. Non, il allait imaginer que ces élèves n'étaient rien d'autres que des mannequins de chiffons. Ou des crétins de nains. Ou des blattes. Ou alors que leurs yeux ne fonctionnait pas. * Oui, c'est bien ça ! Non. En fait, c'est nul !* Il fallait lutter contre ce maudit trac ! * Je ne vais pas me laisser...* Soudain, Heegor réalisa que la colère qui montait en lui arrivait à faire refluer cette angoisse terrorisante. Il suffisait de maintenir un certain niveau de colère et il pourrait tenir à distance ce trac qui lui tordait les entrailles !

Rassemblant rageusement ses affaires, il jeta un œil sur le manuel d'histoire qu'il allait fourrer machinalement dans son cartable « Histoire de la magie, de Bathilda Tourdesac. »

Il le considéra quelques secondes.

«Raaaah ! Mais c'est pas vrai ! Je ne vais pas enseigner ces trucs grotesques quand même ! Ha ! Ils veulent de l'histoire ? Je vais leur en faire un, moi, de cours d'histoire ! »

Partant d'un lancer puissant, le livre démarra sa trajectoire superbement avant d'être intercepté par le plafond et de s'écraser contre le lampadaire qui rebondit sur le mur pour mieux se propulser vers la petite télévision qu'il renversa sur le sol pendant qu'Abercrombie, dans un magnifique élan pour sauver ce précieux artefact, se prenait les pieds dans le tapis et s'écrasait au sol, nez en premier.

Finalement, ce fut un professeur d'histoire sombre et furieux, deux cylindres de coton enfoncés dans les narines qui pénétra dans la bibliothèque, jeta son cartable sur le petit bureau qu'il avait installé là la veille et, sans savoir si les tables étaient occupées, jeta un :

« *on*our ! *euillez *ous a**oir ! »

La rentrée n’était pas si lointaine, mais déjà pourtant Keenan avait l’impression d’être chez lui à Taliesin. Il adorait les locaux, tout le monde avait l’air vraiment archi-sympa et étudier la magie c’était juste trop géant. Ainsi il ne fallait pas s’étonner de le voir partout et quasiment premier inscrit à toutes les activités proposées. Un cours facultatif ? Pas de problème ! Et c’est avec la plus grande motivation que Mister Connolly avait inscrit son nom parmi les participants au cours.

En tant que « maître des lieux » (laissons lui la douce illusion d’avoir l’impression de connaître l’école par cœur), il avait tout de suite repéré la bibliothèque et c’est donc pile poil à l’heure qu’il se présenta pour son cours facultatif. Il s’installa à une table pas trop loin de l’endroit où il pensait que le prof allait établir son pupitre et attendit sagement que le professeur arrive. Tant de zèle et de calme pour un simple cours ? C’était plus que louche connaissant Keenan. Mais nous mettrons ça sur l’euphorie des premiers cours, et surtout par sa très grande envie de bien commencer l'année.

Une fois installé, il sortit sa plume la plus longue et commença à remplir avec soin le micro questionnaire qui était présenté juste devant lui :

Citation :

Nom : Connolly
Prénom : Keenan
Age : 11 ans
Quel est votre personnage historique préféré ? Albus Dumbledore
Pourquoi : Parce qu’il était un mage très puissant et qu’il a eu un rôle très important dans la dernière guerre
Considérez-vous les évènements de l’année dernière comme faisant partie de l’Histoire ? Justifiez : Oui, car une grande guerre avait déjà éclaté a cause de Vous-Savez-Qui… Je pense que si la première fait partie de l’Histoire, celle-là aussi devrait en faire partie.

Remplir cette feuille ne lui prit pas trop de temps car il répondit sans vraiment réfléchir à ses réponses. Il tiqua deux minutes sur sa justification « pourquoi Albus Dumbledore » avant de hausser les épaules et de se dire qu’il verrait bien si on lui demandait une justification meilleure.

Une fois son petit papier rempli, Keenan s’impatienta rapidement de voir les autres élèves arriver et commença à pas mal remuer sur sa chaise. Son regard balayait toute la bibliothèque en quête d’élèves et il manqua de se faire un torticoli à force de se tourner la tête dans tous les sens.

Par chance, le professeur ne tarda pas à arriver. Son visage furieux au nez tout rouge orné de deux micro bouts de cotons avait un tel potentiel comique que Keenan dut se pincer très fort le bras pour ne pas éclater de rire au nez du « maître » Abercrombie. Décidément le cours promettait d’être drôle !

"Bonjour Maître" lança le garçon à l'attention de son professeur sur un ton où l'on entendait clairement percer une pointe d'amusement

Les narines obstruées n'allaient vraiment pas aider Abercrombie à construire l'image respectable qu'il avait souhaité donner pour son premier cours. Heureusement, les élèves n'étaient pas encore arrivés et personne n'avait pu observer sa piètre performance.

Ha !

Son regard croisa celui d'un lutin qui se tenait, face à lui, assis sur une des chaises réservées aux élèves. Mais, au lieu de l'agressivité que tout lutin montre envers un elfe de maison, le bonjour que celui-ci claironna à son encontre au lieu lui fit réaliser que, tout à son angoisse, il avait juste oublié qu'Abercrombie était bien plus grand qu'à l'habitude et que le soit-disant lutin était en fait un élève de hauteur conventionnelle pour une première année. Le trémoussement du garçonnet sur sa chaise n'était en rien annonciateur d'une attaque lutine et ne semblait être dû qu'à l'excitation et l'enthousiasme de la jeunesse.


Remettant mentalement ses échelles de hauteur à jour, il balaya du regard le reste de la pièce pour vérifier que personne ne se dissimulait derrière une pile de livres. Les autres élèves brillaient par leur absence.

Poussant un soupir intérieur de soulagement d'avoir échappé au désastre d'un premier contact ridicule face à un large auditoire, il lança « *on*our, monsieur Connolly ! » Sa vue perçante d'elfe et sa capacité à lire à l'envers lui avait permit de pêcher l'information sur le questionnaire que le garçon avait déjà rempli. « Sauriez-vous où sont passés vos camarades par hasard ? L'elfe qui devait les informer que le cours débutait ici a-t-il accompli sa mission ? »

En même temps qu'il posait la question, ses narines s'étaient dilatées et avaient absorbé les deux cylindres de coton qui, une fois disparus dans la fosse nasale, furent transglissés discrètement dans la poubelle avec un léger *plop*

« Bien. Ceci étant un cours facultatif, j'imagine que cet elfe n'a pas jugé bon d'y mettre le zèle nécessaire » Et il ne va pas tarder à le regretter amèrement ajouta-t-il intérieurement. « A moins que vos compagnons n'aient décidé que la douceur de la couette était préférable à l'aridité d'un cours de Taliesin » Ce qui ne va pas améliorer leur moyenne!
« Et bien, sans plus attendre, nous allons commencer ce cours.

Je vois que vous faites partie des nombreux admirateurs de notre Merlin moderne. Choix très intéressant. Je pense que ne serez pas déçu par le cours d'aujourd'hui.

Mais il est encore un peu tôt pour faire de maître Dumbledore un personnage historique ! Alors, changeons d'époque !

Remontons de quelques siècles pour rencontrer un autre sorcier barbu qui fut l'inspirateur de nombreuses générations. Vous devinez de qui il s'agit, n'est-ce-pas ? »

Pendant que le jeune Keenan rassemblait les syllabes du nom de Merlin sur sa langue, Abercrombie poursuivit.

« Non, monsieur Connolly, ce n'est pas Myrrdrin, ou Merlin si vous préférez
l'appeler ainsi. Mais vous n'êtes pas tombé loin... »

Réalisant qu'il avait abruptement coupé l'élan du jeune homme, Abercrombie marqua une pause hésitante avant de rassembler ses esprits et de reprendre.

« … Nous nous intéresserons à son mentor, celui qui a instillé au jeune Merlin la plus grande partie de cet immense savoir dont seule une petite partie est parvenue jusqu'à nous. Ce professeur des arts anciens qui fut nommé « front blanc » à cause de la marque dépigmentée qu'il portait depuis la naissance... Ce « Tal -iesin » dont la gloire fut injustement éclipsée par son illustrissime élève et à qui ces murs vont restituer un peu de l'aura qui aurait dû être la sienne. »

« Venez, monsieur Connolly, nous allons marcher à sa rencontre »

Se levant du bureau sur lequel il s'était assis, il se dirigea vers la sortie et commença à prendre le chemin des ascenseurs, invitant le jeune élève à prendre sa suite.

Ella avait encore eu une de ces nombreuses migraines, faudrait vraiment qu’elle apprenne à se contrôler un peu plus si elle voulait faire des nuits un peu plus complète. Quoi qu’il en soit, pour son premier cours d’histoire de la Magie, la jeune fille était quelque peu en retard, en effet, un son qui ressemblait plus à un bourdonnement était venue la réveiller, mais sans grand résultat. Ella était donc en retard…

Honte à elle, en retard à son premier cours, en plus, elle ne savait pas ou se déroulerait celui-ci, c’est donc pleine de panique et de stress qu’elle se mit à s’habiller avant de filer des dortoirs pour se rendre à un quelconque endroit ou elle pourrait obtenir des informations sur le lieu du cours.

Descendant les escaliers, elle croisa un elfe de maison qui apparut tout juste devant elle, manquant de lui tomber dessus, elle en profita pour lui demander des informations :

« Si Miss Lewis s’était levée quand je suis venue la réveiller, elle saurait que le cours à lieu dans la bibliothèque et elle ne serait pas en retard non plus, » Répondit le petit elfe.
« Merci, et désolée encore pour la bousculade, mais c’est par ou la bibliothèque s’il vous plait ? »
« Miss Lewis remonte d’un étage, et elle trouvera dans le couloir à droite l’entrée de la bibliothèque. »

D’un signe de tête, elle remercia encore l’elfe et dit demi tour pour remonter les escaliers et après quelques minutes de recherche, elle retrouva le couloir, et ainsi la bibliothèque. Il y avait effectivement eu des traces de passage, mais plus de professeur ni d’élèves, simplement des feuilles avec des informations à écrire. Pensant que le professeur reviendrait, elle s’installa un instant pour répondre au petit questionnaire :

Citation :

-Nom : Lewis
-Prénom : Ella
-Age : 11 ans
-Quel est votre personnage historique préféré ? La magicienne Morgane
-Pourquoi ?J’ai toujours aimé ce personnage depuis toute petite, la femme qui a été avec Merlin, le plus grand magicien, que on retrouve ces deux personnalités régulièrement dans le monde magique et qu’en plus, ce fut une femme pleine de talent.
-Considérez-vous les 'événements' de l'année dernière comme faisant partie de l'Histoire ? Justifiez. Je n’ai pas vraiment tout suivie de ce qu’il se passait, mes parents voulait me préserver, néanmoins, je sais que la chute du mage noir annonce également la fin d’une terreur qui dure depuis très longtemps, bien avant ma naissance, qu’un enfant du nom de Harry Potter est responsable de la chute de Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom et que donc, ce sont des évènements qui doivent être inscrit dans notre histoire.

Toujours angoissée par son retard, le mal de crâne de la fillette se réveilla et c’est alors qu’elle entendit des paroles non loin de la. Prenant sa feuille, elle se leva et se dirigea vers ses paroles, devenant de plus en plus forte, elle trouva enfin le professeur et un élève avec lui. On dirait qu’Ella à trouver le groupe qui a pris l’option d’histoire de la magie.

« Bonjour Professeur, je vous prie de bien vouloir m’excuser, mais je me suis perdue dans les couloirs, et quand je suis arrivée à la bibliothèque, vous étiez déjà partis, je me permets donc de vous rendre la feuille que vous aviez laissé la bas. »

La jeune fille souffla un peu, tenant encore dans ses mains sa tête, les paroles s’estompèrent peu à peu, mais le mal de crane lui était toujours bien présent.

« Voyez-vous, monsieur Connolly, cette île recèle des trésors, au sens propre comme au figuré, en son sein comme à sa surface. Mais, et prenez-garde à ce que je vais vous dire ! C'est la connaissance qui est la clé ouvrant la porte sur ces richesses !»

Abercrombie commençait à prendre un peu d'assurance. Son trac de tout à l'heure l'avait quitté, pfuit ! Comme ça ! C'était comme s'il n'avait jamais existé. Et il découvrait pour la première fois le plaisir d'avoir un auditoire qui ne cherchait pas un moyen de le remettre à sa place de « vulgaire elfe de maison ». A bien y regarder, ce jeune Keenan Connolly pourrait peut-être faire un bon maître dans un avenir pas si lointain, on ne savait jamais. Il avait l'habitude des investissements à long terme. Il avait hélas aussi l'habitude de voir échouer un pourcentage conséquent de ses trop longs projets mais leur nombre garantissait presque toujours une réussite à terme. Et puis la patience était une de ses vertus. Notant dans un coin de sa mémoire de suivre la carrière du jeune homme, Abercrombie allait continuer son envolée lyrique, négligeant visiblement l'ascenseur qui était arrivé depuis déjà quelques minutes quand une jeune élève se dirigea vers eux, une feuille de papier à la main.

Avant qu'elle soit arrivée, Abercrombie avait déduit qu'elle faisait partie de ses élèves, vu que les très jeunes gens qui circulaient dans les couloirs étaient forcément des premières années et que ceux-là qui n'avaient pas eu la sagesse de s'inscrire à son cours était descendus dans la grande salle pour assister aux essais de vol en balai en salle, les premiers de l'histoire de la sorcellerie.

Abercrombie désapprouvait totalement cette « géniale » idée de maître Apophis, car il craignait que cela entraîne inévitablement à plus ou moins long terme des rencontres de Quidditch inter-école (les élèves étant encore trop peu nombreux pour des tournois internes), avec tous les chamboulements et désagréments dont la gestion incomberaient alors à Heegor !

L'élève en question, une certaine Angela Louisse (croyait-il se souvenir) les interpella. Une lecture rapide lui permit d'accueillir sa deuxième élève en lui épargnant la gêne mutuelle d'écorcher son nom.

« Bienvenue mademoiselle Lewis, il s'en est fallu de peu que vous ne nous trouviez plus ! Je vous suggère la prochaine fois de prendre un guide, pourquoi pas votre camarade ici présent, ou de vous renseigner à l'avance sur l'emplacement de vos salles de cours car Taliesin est assez vaste pour s'y perdre, même si la plupart des galeries ont été obstruées. » La jeune fille eut un sourire mi-timide, mi-gênée et jeta un regard en coin à Keenan. Elle allait ouvrir la bouche quand Abercrombie poursuivit.

« Je crains que d'autres élèves soient dans le même embarras que vous, aussi je vais laisser des indications pour que les retardataires nous trouvent » Sans qu'il esquisse le moindre mouvement pour retourner vers la bibliothèque, son regard scruta attentivement le visage de l'arrivante.. « Vous avez l'air crispée, mademoiselle Lewis. Des problèmes avec votre petit déjeuner ? Si c'est le cas, n'hésitez pas à en faire part aux elfes, ils sont tout à fait à même de vous préparer une alimentation roborative adaptée à votre organisme. Ha... Je vois... vous avez mal au cou ou … à la tête ? C'est cela ? »

Un panneau translucide apparu dans la bibliothèque, flottant dans les airs en tournoyant doucement et recouvert de l'inscription suivante :
[ Le cours d'histoire est actuellement en surface. Pour le rejoindre, veuillez utiliser l'ascenseur central et monter à la surface en utilisant le mot de passe du jour #Manganèse#. Signé Professeur G.Abercrombie ].
Pendant ce temps, le professeur examinait rapidement la physionomie de la jeune fille

« Excusez-moi, mais je crois que vous serez bien plus à l'aise en changeant votre oreiller. Je pense que vous augmentez vos chances d'échapper à certaines céphalées inopportunes. » Tout en disant cela, une vertèbre cervicale de la demoiselle fut légèrement déplacée avec un petit claquement, libérant la pression exercée sur une artère spinale et augmentant légèrement le flot sanguin irriguant le cerveau.

« Bien ! Je pense que vous serez maintenant plus réceptive à mon cours ! Prenons donc cet ascenseur qui nous tends ses... qui nous attend ! »

Le professeur et ses deux élèves s'élevèrent donc au son d'un « Manganèse » presque joyeux.

Une fois son petit questionnaire rempli, Keenan reposa sa plume sur la table et sortit de son sac de cours plusieurs autres affaires. Parmi elles se trouvait une pile de cartes de chocogrenouille ; l’Irlandais ne s’en séparant que très rarement.
L’idée lui vint de les sortir car il savait tout simplement que ces cartes regorgeaient d’informations sur quelques sorciers célèbres. Or dans son esprit, quitte à parler de Dumbledore autant le faire intelligemment .

Alors qu’il retriait ses cartes de façon à enlever les doublons et à placer Dumbledore bien sur le dessus du tas, le professeur s’adressa à lui pour lui demander où étaient les autres élèves. « J’sais pas, j’ai vu personne… » observa-t-il avant d’ajouter à la hâte un « Maître » pour ponctuer sa phrase.

C’était vrai, il n’en savait rien mais il s’imaginait que ceux-ci avaient eu la flemme de venir. Les élèves avaient discuté du cours facultatif hier et les inscrits étaient nombreux. Cependant Keenan en avait déjà sentit certains hésitants à cause du poids de leurs premiers devoirs. L’Irlandais pour sa part avait la même quantité de devoir (et n’avait bien sûr rien commencé) mais il ne s’inquiétait pas de ce qu’il appelait un « point de détail » et se rendit quand même au cours par curiosité pure.

¤ Quand même qu’est ce qu’ils fichent ? Je croyais qu’Annago voulait venir ? ¤

Autant l’idée d’assister à ce cours ne lui déplaisait pas, autant il était hors de question de passer 1h ou plus en tête à tête avec ce prof bizarre : il avait une drôle de tête et il venait d’avaler ses deux cotons par le nez. Pire, Keenan n’avait personne pour rire avec lui de ce geste ridicule : nul !

« Hein ? Commencer maintenant ? »

Angoissé par l’idée que sa crainte se confirme, le 1ère année jeta un regard désespéré vers la porte d’entrée de la bibliothèque qui resta obstinément close. Il cessa alors de battre ses cartes et se raidit devant cette contrariété : être sous une surveillance constante de ce prof pendant tout le cours ? sans pouvoir à aucun moment rêvasser ou penser à autre chose ? ¤ Pas possible…¤ Keenan songeait déjà à simuler une crise d’appendicite quand le professeur lui posa une première question.

« Heu… Me… »

Mais emporté par une vague d’enthousiasme, le prof ne lui laissa pas le temps de formuler sa pensée et déjà enchaînait avec la suite de son cours. C’était fou comme il parlait ! Il n’arriverait jamais à tout retenir !

Il resta ainsi pétrifié un moment, jusqu’à ce que M. Abercrombie lui fit signe de le suivre et fit mine de vouloir quitter la bibliothèque.

¤ Han peut-être qu’on va explorer des grottes ou un sanctuaire ? ¤

Très intéressé par cette idée, Keenan cessa d’imaginer des moyens de se sauver du cours et suivit le professeur à l’extérieur de la bibliothèque tout en affichant un air semi-attentif et intrigué. Il tentait tant bien que mal de mémoriser les moindres paroles de M. Abercrombie mais il devait avouer qu’il avait du mal à suivre un tel flot ininterrompu de paroles.

¤ Oh cool ! ¤

Alors qu’ils passaient devant un tableau particulièrement lugubre, Keenan fut le premier à apercevoir Ella trottiner au fond du couloir. Ella, sa sauveuse qui allait lui tenir compagnie durant le cours . Il lui adressa de loin un grand geste de la main avant de poser sur elle un regard de vénération éternelle.

La nouvelle arrivante échangea quelques excuses avec le professeur qui les accepta bien vite et lui glissa de prendre Keenan comme guide la prochaine fois.
Cette idée ne le fit sourire qu’à moitié : il adorait se promener dans l’école et aurait bien aimé balader d’autres élèves avec lui (quoi que Ella était une fille donc forcément trouillarde et chochotte), mais que ça soit un prof qui le suggère bof bof… Il ne se sentait pas l’âme d’un fayot et n’avait surtout pas envie de passer pour tel.

Ainsi une fois Ella à ses côtés, Keenan profita du fait que le prof recommence à débiter son cours pour se pencher vers la miss et lui adresser un « T’étais où ? J’ai cru que j’allais faire le cours tout seul ! » à voix basse.

Franchement, ça craignait mais grave là ! Il ne voulait pas y aller POINT BARRE ! CVa l'intéressait pas de parler de maccabées ou encore de crétins, débiles de l'histoire juste parce que ça faisait "bien" d'en connaître un peu plus sur la culture sorcière. Lui il s'en moquait éperdûment ! C'était l'histoire moldue qui l'intéressait ! Tous autant qu'ils étaient ils ne le comprenaient même pas ! Quand il reviendrait dans son pays, qu'est-ce que ça ferait aux siens qu'il connaisse Albus Dumbledore ou encore Merlin l'Enchanteur ? Certes, ces vieux y avaient mis un point d'honneur à ce qu'il joigne "Maître" Abercrombie afin de s'assurer des bases solides dans le monde sorcier mais... mais mince à la fin !!! Lui il voulait parler de John Kennedy, de la Guerre Froide, du Moyen-Age en passant par la Renaissance et la Seconde Guerre Mondiale. En somme, une étude des moeurs moldues auraient été largement plus appropriée pour lui quoi !

Lorsqu'il en fit la suggestion à "Maître" Sykes il avait remarqué que ce dernier s'était décomposé d'un coup rien qu'à cette seule idée. Un peu comme si on lui avait dit : "ouais, ça serait bien qu'on transforme Taliesin pour en faire un centre Thalaso...". Il en était sûr, il aurait dit ça, l'autre aurait été moins surpris !
Puis il avait insisté quoi : "tu iras !" et il lui avait répondu "nan, j'irai pas, c'est nul !" et Sykes avait rétorqué pour finir : "tu iras où je te ferai bouffer tes jambes !" - "pourquoi mes jambes spécialement ?" - "car après c'est moi qui t'y tirerai en fauteuil roulant...". Enfin bon, il l'avait emporté ! Quoique...

Le matin où il avait fallu daigner se lever pour assister à ce cours de bouffon, il avait décidé de ne pas bouger du lit. Motif ? Ohh bah il avait pas entendu le réveil ! Puis on repprochait aux elfes de maison de jamais trop insister pour les tirer du plumard alors...
La différence pour lui fut que l'elfe qui alla le chercher n'était pas petit, menu et chauve mais grand, gros, blond et qu'il avait donné du poing contre la porte comme un sauvage sur un "C'EST L'HEURE, LEVE-TOI, OU JE TE FAIS BOUFFER TES JAMBES !" des plus entrainants et qui donne tout de suite envie de lui ouvrir la porte. Ensommeillé, la tête toute de travers et les yeux glauques, Nikita était sorti de sa chambre sous son uniforme qu'il n'avait eu le temps que de jeter sur ses épaules. Bof, ça n'avait pas impressionné Sykes qui l'avait saisi par le bras direction la bibliothèque.

Et arrivés là-bas, horrible stupeur qui fit éclater de rire le jeune homme. Muuuahahahahaa !! Le prof s'était barré dans les couloirs ! Muuuahahahaaa !! Sykes devrait le conduire jusque là ! Muuuahahahahaaa ! Il allait se foutre en retard !

"Hihihihiihihihi, vous allez trop galérer pour m'amener là-bas !".

Et sur un sourire goguenard :

"Vous devriez me laisser là et aller à vot' cours, vous savez avant que... AÏE !".

"Tu vas fermer ta g*eule, oui ?".

La mandale prise, Nikita s'était assis à une table -tout en notant que le prof avait compté trop de pupitres pour le nombre de ploucs qui viendrait- et avait commencé son petit mémoire sur "qui c'est que j'admire dans le monde sorcier". En voici donc le compte-rendu :

-Nom : Satchev.
-Prénom : Nikita Sergueïovitch
-Age : 16 ans.
-Quel est votre personnage historique préféré ? Lord Voldemort.
-Pourquoi ? Je trouve sa vision du monde et des choses parfaitement correcte et déplore qu'il ait eu une fin si tragique lui qui aurait pu n'apporter qu'un progrès profitable à notre civilisation. Mais bon... il est mieux là où il est sans doute !
-Considérez-vous les 'évèments' de l'année dernière comme faisant partie de l'Histoire ? Justifiez. Oui, absolument. C'est la meilleure façon d'apprendre une seule chose : il ne faut jamais croire que tout est gagné d'avance !

"Hep ! Vous regardez pas, ok ?".

Et l'autre avait enfoui ses mains dans ses poches, l'air de rien.

"C'était pas mon attention, rassure-toi... Et qu'aurais-tu pu mettre ? "Mon personnage préféré c'est Merlin l'Enchanteur ?"".

"Non, avait-il rétorqué, j'ai mis que c'était vous, Maître...".

Il l'avait saisi par le collet. Mais ça c'était uniquement car Nikita avait bien voulu le laisser faire hein...

"Allez va... j'ai bien assez d'un seul Heegor !".

Ils étaient alors sortis de la grande bibliothèque, direction le coin paumé et mort qu'Abercrombie leur avait décrit. De temps à autre, Niki jetait un regard à sa montre juste histoire de se dire que, pour une fois, c'est Apophis qui s'en prendrait plein la tête d'être autant en retard à son propre cours... Juste retour de bâton n'empêche !
Ils avaient pris l'ascenseur central en formulant le fameux mot "manganèse". Il avait laissé son professeur s'en charger, signifiant par-là qu'il ne ferait jamais AUCUN effort pour un cours qu'il considérait aussi soporifique qu'inutile, une véritable perte de temps puissance 10 !
Ca lui donnait mal au coeur en plus cet ascenseur et il ne se gêna pas pour le faire remarquer et que ça devrait changer à l'avenir quand même. Ils arrivèrent finalement à destination, là où un petit groupe s'était déjà formé. Heegor au milieu de deux de ses petits élèves. Satchev leva les yeux au ciel -car, franchement, vu comment ça partait, ça allait craindre c'est sûr- et s'avança de très mauvaise grâce et en râclant des pieds.

Et fallait bien sûr compter sur l'autre maniaque pour en rajouter une bonne couche. Une tape dans le dos pour le forcer à réagir, il incita son protégé à saluer son Maître de l'Histoire de la Magie. La mention "tu le fais sinon je te fais bouffer tes jambes" ou toute autre saleté du même cru était inscrite sur son front... dingue quoi ! Le jeune Russe arbora son plus beau sourire, charmeur au possible, bordant des yeux plein de confiance droit sur Abercrombie. Il lui tendit une main respectable et respectueux... et là, sérieux, il avait intérêt à la serrer sinon...

"Bonjour, Maître Abercrombie. Et navré de mon retard".

Il lui bailla la feuille qu'il tenait entre les mains, un petit sourire goguenard sur les lèvres, jetant un regard en coin à ses camarades dans l'attente qu'il lise bien touuut ce qu'il avait écrit.
Il ajouta sur un même ton enjoué :

"Eh bien ? Le cours n'est pas trop avancé dans le temps j'espère ? Je vais pouvoir suivre ?".

Et de jeter un regard angélique à son directeur :

"Merci, Maître Sykes de m'avoir accompagné. Sans vous je crois bien que je me serais perdu...".

"C'est tout naturel, voyons...".

L'autre lui jeta son plus mauvais sourire juste avant de s'effacer sur un dernier adieu... et un dernier doigt d'honneur refilé en douce au jeune élève qu'il était. Mais nom de... raaaahhhh !! Il allait le tuer un jour !!
Bon, autant rester calme et serein et se raccrocher à autre chose... Nikita tâcha d'évacuer sa colère et cette rancoeur tenace envers cet homme (ce pauvre mec ouais !) et de se concentrer un peu plus sur ce que l'autre professeur Binoclard pouvait bien baver. Sourire candide, oeil frais et attentif, c'était parti ! Et il pourrait compter sur lui pour être le meilleur de sa catégorie, oui ! Jamais il n'aurait vu pareil élève de toute sa carrière celui-là !

[ 1143 mots sans la présentation ]
GUIRLANDE

Arrivés à la surface, Abercrombie et ses élèves, respirèrent l'air humide et franchement glacial de cette matinée galloise.

Se doutant que le cours ne pourrait pas se prolonger bien longtemps si les élèves prenaient froid, il refusait de les renvoyer chercher des vêtements chauds. Cela faisait près d'une demi-heure qu'il aurait du commencer et il n'avait pas encore envoyé une seule phrase de son cours.

Le sort pour réchauffer l'atmosphère n'étant pas trop discret, il rechercha mentalement une ascendance d'air chaud dans les environs. Sans trouver véritablement ce qu'il voulait, il réussit néanmoins à localiser un vent vaguement tiède qu'il envoya au bas de la colline d'une vigoureuse poussée mentale. Les élèves resserrant spontanément leurs vêtements autour d'eux ne perçurent pas la soudaine surpression qui était suffisamment loin pour rester discrète mais, l'air tiède commençant à remonter les flancs de la colline, la température remonta discrètement en quelques minutes, avant que les enfants n'aient eu le temps de se refroidir.

« Hum, bien ! Nous voici au sommet d'un royaume de légende, fameux entre tous et qui se nomme... »

Il perçu soudain la présence du maître dans la bibliothèque. Les divers systèmes d'alarmes qu'il avait dissimulé dans chaque ombre, chaque coin de Taliesin le prévenait de ses moindres déplacements. Habituellement il n'y prêtait qu'une attention distraite mais la présence du maître en ce lieu pouvait signifier qu'il était à la recherche de son elfe.

Se concentrant sur les yeux d'araignées habilement logés dans les interstices du plafond, il détecta une autre présence auprès d'Apophis. Vu la dégaine, cela ne pouvait être que ce chenapan de Nikita. Halala, il aurait bien besoin d'être canalisé celui-là. Mais pas question pour lui de s'en charger car, vu la rudesse du jeune homme, Abercrombie serait alors obligé d'abattre quelques une de ses cartes et, pour l'instant, il n'y tenait pas.

Les yeux des élèves le fixaient intensément. Quoi ? Il avait un bouton sur le nez ? Non, il avait vérifié tout à l'heure. Ha, oui, il s'était arrêté au beau milieu d'une phrase. Bien.

« … mais votre camarade Satchev a finalement décidé de nous rejoindre. Nous allons donc l'attendre pour enfin débuter ce cours en plein air »

Heureusement, l'attente fut de courte durée grâce aux indications qu'il avait laissé dans la salle.
Maître Apophis n'avait pas seulement envoyé l'élève, il était venu en personne. Que voulait-il ?

Mais finalement non. Après les excuses parfaitement minimales arrosées de mielleuses intonations proférées par le jeune fat, Maître Apophis regagna l'ascenseur d'un pas lent. L'impression qu'il regardait encore avec l'arrière de sa tête persista tant qu'il ne fut pas hors de vue.

« Bon, cette fois, nous n'attendrons plus les retardataires. Si je vous ai fait venir ici, c'est pour vous montrer une page d'histoire. Laissez moi vous présenter.... Avalon ! »

D'un geste théâtral, il décrivit un immense arc de cercle avec son bras tandis que le paysage se transformait comme si l'on tirait un immense rideau.

L'île paraissait bien plus grande. Plus verte aussi. Une fine file de rochers partait vers le continent, supportant un chemin de bois qui tenait à la fois de la route et du pont.

Un soleil brillait dans le ciel et les bâtiments de pierre semblaient avoir poussé sur l'île.
« En réalité, ce lieu est plutôt le berceau qui deviendra Avalon dès que Myrrdihn le mage en soufflera l'idée à son roi. Vous le voyez au moment précisément au moment où un certain barde vient y prendre séjour. Tenez : le voilà ! »

Sur le pont de bois, une petite silhouette avançait lentement vers l'île, enfoncé dans une grande cape grise.


« Sauriez-vous me dire quels étaient les rôles et attributions que l'on donnait à un barde à cette époque ? »