Rencontre littéraire inattendue [PV]

Les vacances de Pâques étaient arrivées. Les dernières vacances de l’année scolaire : les vacances d’été étaient bien trop longues, Amélie ne les appréciait pas du tout de la même façon. À chaque fois, elle passait les dernières semaines à se languir avec morosité, attendant désespérément de reprendre l’école. Après sa première année passée à Poudlard, ce serait encore plus pénible de patienter tout l’été ! Heureusement, les vacances durant l’année scolaire étant courtes, Amélie les savourait à leur juste valeur : elle aimait retrouver Londres, ses parents, son frère, sa chambre, son jardin, ses habitudes... Elle en profitait pour faire du cheval, pour prendre des photographies, pour revoir ses amis moldus, pour mener une vie familière et différente, qui n’existait pas à Poudlard.

Ce jour-là, le père d’Amélie avait emmené son frère Karl voir un match de base-ball. Amélie était allongée sur le sol de sa chambre, occupée à dessiner des maisons biscornues et colorées. Les crayons et les feuilles étaient éparpillés tout autour d’elle sur le parquet. La porte de la chambre s’ouvrit et la tête de Daisy apparut dans l’entrebâillement.

« Lily ?
- Oui ? répondit la jeune fille sans lever la tête, concentrée sur le coloriage d’un toit vert et sable.
- Ça te dirait de sortir ? Puisqu’on est toutes seules, on pourrait aller sur le Chemin de Traverse. »

Le menton posé sur le dos de sa main gauche, qui maintenait la feuille qu’elle utilisait, Amélie releva directement ses yeux bleus vers sa mère. Un sourire étira aussitôt ses lèvres.

« Oh oui ! »

Depuis l’achat de ses fournitures pour la rentrée, Amélie n’avait pas souvent eu l’occasion d’aller sur le Chemin de Traverse, bien qu’elle habitât à Londres. Ses parents n’avaient pas l’habitude de s’y rendre, même son père sorcier. De plus, depuis la réception de la lettre d’inscription à Poudlard d’Amélie, un léger mal à l’aise s’était installé dans la famille : personne ne savait si Karl, le petit frère de huit ans, était sorcier ou non. Sa possible identité moldue n’était pas un problème en soi, mais il était tellement attiré par le monde magique que ses parents craignaient qu’il soit déçu s’il découvrait, le jour de ses onze ans, qu’il n’était pas attendu à Poudlard. En attendant, ils ne voulaient pas trop l’exposer à la magie. C’est pourquoi ils préféraient qu’Amélie lui parle peu de Poudlard et qu’elle se rende sur le Chemin de Traverse sans le mettre au courant.

Pour autant, Amélie ne tirait pas de cette situation un sentiment de fierté. La magie n’était qu’une part de sa vie, elle avait bien d’autres choses à partager avec son frère et ses parents. Cela ne la dérangeait pas de devoir tenir cela un peu à l’écart et elle n’en profitait pas non plus pour narguer Karl. Ce n’était tout simplement pas dans sa nature.

En tout cas, elle était ravie de se rendre sur le Chemin de Traverse, avec sa mère en plus, moldue, qui s’adaptait remarquablement bien à cet univers. Il faut dire qu’elle était mariée depuis plus de quinze ans avec un sorcier, quand même ! Évidemment, Amélie et elle ne se fondaient pas dans la foule. Au milieu des robes de sorciers et des chapeaux pointus, elles avaient totalement l’air de moldues, même si le côté bohème et nature de leur style vestimentaire passait pour un effort de s’intégrer. Sans se soucier cependant du regard des autres, la mère et la fille flânaient main dans la main, l’attention passant de vitrine en vitrine.

« Alors, où voudrais-tu aller ? Tu as une envie particulière ?
- À Fleury & Bott ! La librairie !
- J’aurais dû deviner » commenta Daisy en souriant.

Amélie lui proposa de la laisser seule dans la boutique, surtout car elle savait que sa mère n’était pas forcément attirée par les livres. Mais Daisy insista pour l’accompagner : elle était très prudente et pour elle il était hors de question de laisser sa fille seule dans une rue commerçante. Amélie ne comprenait pas cette attitude sur le Chemin de Traverse : dans le monde magique, elle se sentait tellement en sécurité, comme dans un monde imaginaire où rien ne peut se passer, qu’elle n’arrivait pas à voir la situation avec les yeux de sa mère. Et pourtant, Daisy avait peut-être raison : il n’y a pas si longtemps, il s’était produit des évènements horribles dans le monde magique. Le mal ne s’arrête pas aux portes du Chemin de Traverse.

Pas mère poule pour autant, Daisy laissa Amélie vagabonder dans la boutique en liberté. Elle l’attendait près de l’entrée, essayant de s’occuper en observant l’arrangement des rayons et les va-et-vient de clients. La jeune fille, elle, flânait entre les montagnes de livres, glissant un doigt sur les étagères. Dragons des cieux, Mort subite au Quidditch, Les jumeaux magiques... Que choisir ? Chaque ouvrage lui donnait envie de s’asseoir dans un coin pour le feuilleter. Mais sa mère attendait, alors il fallait se décider. Dur dur !