“Petit à petit... Mon âme se reconstruit. Brique par brique.”
Même année. J'ai eu le mal du pays. La langue m'était totalement inconnue. Les gens me semblaient agressifs. J'étais totalement perdu, je n'avais aucun repère visuel auquel me rattacher. Même si Charisma murmurait parfois dans cette langue la nuit, à travers ses rêves, je n'avais aucune notion. Laurel Pratchett était mon unique guide, il me permettait de m'y retrouver... Je n'avais qu'un repaire dans cet autre part. La mentalité, le monde magique, les températures, les gens, tout avait une autre couleur, une autre odeur. Parfois, je me renfermais comme j'avais coutume de le faire, je restais bloqué dans le miteux appartement que m'avait prêté Pratchett... Le temps que je fasse mes marques...
Je m'étais assuré avant de partir, de ne plus avoir l'impression d'avoir des traces à Londres pour mieux m'en détacher... Mais mes rêves étaient teintés de visage que je connaissais si bien. L'envie de revenir, retourner au top départ et reprendre le train en marche quitte à manger de cailloux... J'avais l'habitude. Ma vie ressemblait à ça. Je ne faisais pas attention à l'univers qui m'enveloppait, j'oubliais parfois les gens et le temps qui défilaient... Puis, lorsque j'émergeais enfin, que je reprenais ma respiration, je me rendais compte que j'avais fait des ravages. Je me sentais triste un moment, tentaient de réparer les fissures en les bouchants avec du papier mâché... Puis je répétais les mêmes
erreurs. Mais au fin fond de moi-même, je savais que je ne jugeais pas fautif. C'était comme ça,
la vie, on m'avait fait ainsi....
La Russie, ça devait être un renouveau. J'ai vite appris la langue. Elle était difficile, complexe, et bien souvent incompréhensible pour moi. Mais les intonations me permettaient parfois de comprendre si on parlait dans mon dos ou qu'on était énervé de me voir me balader dans les environs. L'étiquette sang impur plaquée à l'arrière de mon crâne me suivait, sans que je n'aie eu besoin de le dire à qui que ce soit. Mais c'était habituel... Même si
tout avait été terminé depuis longtemps, qu'il y avait eu moins de piques à propos de ma nature, ici elle était bien plus présente qu'à Londres
d'aujourd'hui.
Une chance que j'avais une capacité phénoménale à ignorer ces remarques...
Pratchett m'avait amené un peu partout avec lui. Et chaque fois qu'il me présentait de nouveaux lieux, je commençais à
aimer, à
respirer.
C'était suffisant...
C'était ce dont j'avais besoin...
Puis mes rêves ont fini par devenir plus lisses, plus tranquilles. Les nuages sombres qui se perdaient dans mon subconscient ont fini par s'estomper jusqu'à ce que j'en oublie Londres, ma famille et mes amis. Je n'ai jamais réellement envoyé de cartes pour dire que j'étais en vie, je crois même en avoir envoyé aucune....
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