Seule, s'en moquant, se foutant de tout

Johanna était assise sur le canapé émeraude de la salle commune, un parchemin sur les genoux, avec quelques mots griffonnés dessus. Ses yeux se baissèrent et lorgnèrent la feuille, presque désespérés. C’était fou, pourquoi les profs s’amusaient-ils à leur mettre des devoirs pareils ? Elle n’était qu’en première année, mais nan, ils s’en foutaient, il fallait qu’ils leur rabâchent l’histoire de tel ou tel sort alors que savoir si Expelliarmus avait été inventé par Dark-Yoda Dominusrosaetemplum XXL ne l’aiderait pas plus à exécuter le sort.
La fillette posa la plume et ferma le parchemin. Elle croyait entendre la voix de McGonagall marteler dans son cerveau asphyxié : « Miss, c’est irresponsable ! Soyez un peu digne, vous n’êtes qu’une… qu’une pauvre petite impertinente ! »
« La pauvre gamine impertinente t’embrasse » songea Johanna en sortant un livre de son sac. A peine eut-elle parcourut quelques lignes qu’elle devina que c’était un gnangnan-bouquin. L’histoire d’une certaine Lisa Taylor qui découvrait que son copain était un mage du Clan des Ténèbres. Encore un truc irréel bon à faire rêver les filles candides et ingénus. Mais tant de naïveté amusait Johanna. La fillette de Serpentard se demandait si l’auteur voulait se moquer des adolescentes enfoncées jusqu’au cou dans la romance et l’Orlando-Bloom-club ou s’il prenait vraiment son métier au sérieux.
A seulement douze ans, Johanna avait déjà acquis un certain cynisme.
Elle se tourna pour voir la tête de ses camarades et reçut de plein fouet des regards dégoûtés signifiants clairement : « Le Choixpeau est malade ! Envoyer une Sang-de-Bourbe dans notre si aristocratique maison ! »
Une fille se leva même et s’approcha d’elle, qui sentait le Sang Pur.

-Tu es une Sang-de-Bourbe, je le sais, siffla la fille.

Et voilà, merci ma chérie, maintenant toute la salle commune est au courant.

-J’étais au courant, merci, répondit tranquillement Johanna en la regardant dans les yeux.

Lorsque la fille rejoignit ses copines, Johanna retourna à son livre. Quelqu’un d’autre s’approchait d’elle, elle l’entendait, la tête penchée et cachée par ses longs cheveux bruns.

Lucas était tranquillement installé dans la Grande Salle. Il avait pratiquement terminé son devoir ... Dès leur arrivée, les professeurs les chargeaient de travail. Après avoir inscrit le mot de la fin sur son parchemin, il soupira, leva les bras plus haut que sa tête afin de s'étirer et laissa retomber ceux ci sur la table. La, il rassembla ses feuilles et ferma ses bouquins. Il n'en pouvait plus ... Il aimait bien travailler, mais la, c'était beaucoup d'un seul coup. Enfin, il se leva puis se dirigea d'un pas assez rapide vers les cachots, afin de rejoindre sa salle commune. Sur le chemin, il rencontra quelques Gryffondors et Serpentards plus grand que lui ... IL n'y fit pas attention, jusqu'à qu'il entende un petit garçon qui semblait ne pas atteindre le metre quarante dire qu'il avait l'air méchant ... Lucas releva un sourcil et tournât la tête vers lui, lui lançant un regard noir ... Le petit garçon baissa les yeux et Lucas reprit sa route, en secouant la tête. Alors c'était bien vrai .. Les Gryffondors craignaient bien les Serpentard ... Bref. Lucas entra enfin dans les cachots pour aller prononcer discrètement le mot de passe au tableau qui pivota, le laissant pénétrer dans la salle commune.
Beaucoup d'élèves étaient présents, soit devant le feu, soit devant le canapé ou même dans leur dortoir ... Lucas jetta un rapide coup d'oeil partout, puis avança vers les escaliers pour monter ranger ses affaires dans le dortoirs des garçons. Il posa une main sur la rampe, puis se retournât, entendant une fille dire à quelqu'un avec un certain ton moqueur une phrase du genre " Tu es une Sang-de-Bourbe." Et alors? Ca lui faisait quoi? Lucas aussi l'était... Alors forcement, ça ne lui avait pas trop plu d'entendre ça ... Le pire, c'était que la pauvre idiote l'avait crier assez fort pour que tout le monde l'entende... Puisque les Serpentards détestaient toutes les autres maisons, pourquoi se disputaient-ils aussi entre eux? C'était idiot ... Il se mit sur la pointe des pieds pour voir à qui était adresser cette phrase, et vit qu'elle parlait à une personne assise du un des fauteuil ...
Voyant la petite peste retourner parmi son troupeau de hyène, il posa ses affaires sur les escaliers, puis se dirigea vers la jeune fille assise sur le canapé. Elle paraissait vraiment intéressée par sa lecture... D'ailleurs, il n'apercevait même pas son visage car celui ci était caché par la longue chevelure brune de la demoiselle. Lucas se racla la gorge avant de demander d'un ton neutre...

" Je peux m'asseoir? "

Habituellement, Lucas ne serait pas resté ici, à demander à cette jeune fille si il pouvait s'asseoir à coté d'elle... Mais ce jour la, les regards de dégoûts et les murmures lui étant adresser l'agaçaient fortement. Et ce, pas parce que c'était adressé à une fille, pas parce que c'était adressé à une de ses camarades de maison, pas parce qu'il avait pitié, mais parce que tout simplement tout ce qu'il entendait la, avait l'air valable pour lui ... Et puis, fallait bien qu'il rencontre du monde alors, si ce monde la pouvait être des gens qui lui ressemblait ... C'était encore mieux.

Après ce qu’avait dit la fille, Johanna s’attendait à être traitée en inférieure, mais elle ne se laisserait pas faire. Ce n’était pas son genre. Et si on l’embêtait trop, la fillette était capable de mettre une droite dans la mâchoire des imbéciles. Donc, quand elle entendit la personne arriver derrière elle, c’était pour se préparer à un « Stupide gamine prétentieuse » au mieux ou, au pire, « j’ai envie de te casser ta figure de traîtresse. » Elle fut donc étonnée d’entendre un ‘Je peux m’asseoir ?’ tout ce qu’il y avait de plus zen.
La fillette leva la tête et tourna ses yeux verts vers le garçon de son âge, qui n’était pas un aristo Sang-Pur, Johanna le devinait instinctivement.

-Oui, répondit-elle d’un ton neutre.

Comme elle avait envie de s’amuser (à sa façon ^^) elle rangea la bouquin sur cette cruche de Lisa et s’apprêtait à échanger quelques paroles avec l’inconnu. Un sourire indéchiffrable apparut sur ses lèvres. Johanna savait ce qu’elle faisait.

-A la base, quand on est poli, on ne dit pas « j’peux m’asseoir ? » mais « bonjour, désolé de te déranger, la place est libre ? »

Cette tirade n’était pas dite d’un ton de mère-poule, oh non, Johanna n’était pas une donneuse de leçons de morale, mais plutôt d’un ton moqueur. C’était vache, il était sympa avec elle et elle l’envoyait un peu bouler à sa façon, mais on pouvait s’attendre à tout de la part de Johanna Butterfly, la Serpentarde au nom ridicule voie pitoyable.