[Terminé] T'es sûr que c'est toujours un appartement, ça ?

Faith haussa les épaules d'un air indifférent à la dernière remarque que fit Erwan concernant Peter. Elle ne se sentait pas du tout gênée ou quoi que ce soit, tout simplement parce qu'elle savait qu'il n'y avait absolument rien entre elle et lui. C'était aussi simple que ça. Il était un bon copain, un élève de sa maison qu'elle n'avait rencontré que très récemment mais qu'elle appréciait déjà, et ça s'arrêtait là. Rien d'autre à ajouter. Ils étaient allés au bal en amis, ils en étaient repartis comme tel, rien n'avait changé. Elle ne tenait pas particulièrement à retomber bêtement amoureuse après Eric de toute façon, donc tout était pour le mieux. Pas qu'elle ne croyait plus en l'amour et tout le tralala ultra romantique, elle était juste un peu plus désabusée qu'auparavant. Elle n'était pas naïve non, elle voyait bien comment se comportaient ses deux frères, elle n'avait pas de vision idéalisée de l'amour, ceci dit, elle était consciente de tomber trop aisément sous le charme d'un type particulier de garçon. Et il n'était plus question que ça arrive de nouveau, non. « Mais oui, je sais bien que tu es le seul et l'unique prétendant à ce titre » le rassura-t-elle d'un ton léger. Hein ? Qui ça ? Edward ? Si avant la bagarre, leur relation n'était clairement pas géniale, disons que depuis, elle était tout simplement au point mort. Et malgré tout, elle n'arrivait pas à le détester. Elle en était incapable, mais elle ne lui pardonnait pas ses actes pour autant. Mais de toute façon, elle avait le sentiment qu'il se fichait totalement de ce qu'elle pouvait faire ou penser, alors qu'est-ce que ça pouvait bien changer ?

Elle n'était même pas au courant qu'Erwan savait danser, pour être tout à fait honnête. Erwan, danser ? Mais comment peut-on laisser faire une chose pareille ? Une chose aussi atroce ?! Mais où va le monde je vous le demande ! Bon, elle se doutait bien qu'il devait savoir se trémousser sur une piste de danse, ceci dit elle n'avait jamais eu l'occasion de le voir à l'œuvre. Quoique, ça pourrait être une bonne chose en un sens... « Oh et puis t'as raison, allons-y pour la danse. J'ai bien envie de rigoler un peu » commenta-t-elle en lui adressant un sourire resplendissant. Voir Erwan se déhancher au rythme – ou pas – de la musique, ça devait valoir de l'or ! Ceci dit, elle jugeait elle jugeait, mais elle n'en savait rien au final. Peut-être était-il un dieu de la danse, qui sait ?

Faith jeta un regard courroucé à son frère lorsqu'il lui proposa le poste de paillasson. Non mais ! Aucun respect ! Comme si une fleur délicate et fragile comme elle pouvait mériter un tel traitement. C'était insultant, et profondément criminel, oui, parfaitement, passible de peine de prison même. Elle se demanda un instant s'il y moyen d'organiser, à la va vite, un petit entretien privé avec le ministre de la Magie, histoire de trouver avec son aide, un châtiment adapté aux crimes dont se rendait jusqu'alors coupable Erwan. Voyons voir, si elle faisait la liste chronologiquement... Il y avait avant toute chose ce sourire vicieux qu'il lui avait adressé à leur première vraie rencontre, dans le couloir devant la salle de sortilèges, sourire de gros pervers oui ! Bref, ensuite le coup du "oh mince j'ai invité mon pote à la maison mais je ne suis pas là donc vas-y sors avec lui pour passer le temps", parce qu'au final, c'était un peu sa faute si elle avait rencontré Eric, tout à fait ! Et si on continuait, arrivait LE plus haut délit qu'il ait commis jusqu'à ce jour: le vol de la salle de bain. Seul un psychopathe pouvait faire une chose pareille, un détraqué, un grand malade à interner au plus vite même, c'était évident. Et maintenant, cerise sur le gâteau, il lui proposait de devenir son paillasson personnel, histoire de se faire piétiner à tout bout de champs. Son énumération interne prit quelques longues secondes, durant lesquelles elle resta silencieuse, les sourcils froncés dans une attitude d'absolue concentration. Finalement, elle se décida à reprendre la parole. « Et le Accio tu connais mon pauvre vieux ? T'as eu tes ASPICs dans une pochette surprise ou quoi ? » répliqua-t-elle d'un air supérieur. Non mais oh ! Fallait pas non plus la prendre pour une poire la cocotte, on ne la traitait pas de paillasson impunément, ça non ! « Pour ta gouverne, sache qu'on ne laisse pas une douce et délicate *kof kof* jeune fille comme moi servir de vulgaire paillasson. C'est très barbare comme pratique. » Ouh, horreur et damnation, n'avait-elle pas employé le ton de sa mère là ? Elle eut un hoquet épouvanté. C'était la fin. Elle allait finir vieille, aigrie, cupide, à mener une vie sans amour... La vie de sa mère quoi.

Elle leva les yeux au ciel lorsqu'il se protégea à l'aide de l'album photo. Peuh, comme si elle était du genre à employer la violence ! ... Qui a ri ? Qu'il se dénonce tout de suite ! Bref, elle ne le toucha pas, préférant ne pas risquer la vie de son précieux album.

Et brusquement, l'atmosphère détendue laissa place à la tension. Le visage de la jeune fille s'assombrit, même si son frère n'ajouta plus rien concernant ce qui s'était passé avec Edward. Elle ne se remettrait pas de cette vision, c'était évident, et l'idée que quelque chose de bien pire aurait pu se passer la hantait. C'était aussi pour ça qu'elle avait commencé à détester Keira. Le pire, c'était sans doute qu'elle ne comprenait pas son acte. Pire encore que l'acte, le fait d'être à côté de la plaque, de ne rien comprendre, d'être larguée. Elle considérait la jeune fille comme une amie, comment avait-elle pu faire ça ? Qu'elle sache ou non les sentiments qu'Erwan éprouvait pour elle d'ailleurs. Elle savait quel genre de mec était Edward, et surtout elle savait qu'il était le demi-frère du Poufsouffle. Elle ne se sentait pas capable de lui pardonner, et pourtant, elle avait habituellement le pardon facile. Le comportement de Keira était peut-être encore pire que celui d'Edward à ses yeux, parce qu'elle, elle lui faisait confiance. Et ça faisait mal de voir une fois de plus tout partir en fumée.

Amputation ? AMPUTATION ? Elle grimaça. L'ambiance n'était plus la même que tout à l'heure, et elle n'avait plus tout à fait la force de rire comme elle l'avait fait. Faire comme si tout allait bien lui semblait au dessus de ses forces, pourtant elle fit un effort. « Tu ne touches pas à ces doigts, Snedlditetikasi. C'est compris ? Sinon c'est les tiens que je coupe ! » l'avertit-elle en s'éloignant de lui d'un ou deux pas, histoire de préparer une potentielle fuite. Et c'est là que ça devînt irréel. Erwan et Faith, dans une cuisine ? Sérieusement ? Elle pencha la tête sur le côté, jouant distraitement avec une mèche de cheveux qui lui passait sous la main. « Tu préfèrerais pas appeler un livreur ? » Pourquoi se fatiguer quand des gens sont là pour vous apporter la nourriture déjà préparée ?

Le visage de Faith se rembrunit quelque peu à la mention du nom de Keira. Et dire qu'elle la considérait comme une amie, qu'elle l'admirait limite, qu'elle se rappelait avoir souhaité être aussi pimpante et amusante qu'elle... Autant dire que désormais, tout ce qu'elle souhaitait, c'était éviter de se retrouver de nouveau face à la jeune fille. Elle ne pouvait pas comprendre pourquoi elle avait fait ça, pourquoi elle avait passé la nuit avec Edward, sachant ce que ressentait Erwan. Ou ne le sachant même pas d'ailleurs ! Elle savait parfaitement comme était son frère, et une véritable amie n'aurait jamais provoqué une espèce de troisième guerre mondiale comme ça, sans aucun remord, avec autant d'aplomb. Oui, elle lui en voulait, et peut-être même plus qu'à Edward, parce que lui, elle le connaissait, et elle n'en attendait pas mieux de lui, mais Keira ! Et elle ne comprenait pas qu'Erwan ne lui en veuille pas à elle, d'ailleurs. Elle ne cherchait pas à défendre son frère en faisant couler Keira, mais elle était au moins aussi coupable que lui. Au moins. Mais elle ne revînt pas là-dessus, ce n'était ni l'heure ni l'endroit. Pas la peine de plomber davantage l'ambiance.

Elle se contenta donc d'un très léger sourire, pas franchement enjoué, et l'écouta plutôt lui vanter ses prouesses. La Jaune et Noire leva les yeux au ciel, atterrée, il était juste intenable ! « Merci pour cette image de toi et du professeur Flitwick en train de batifoler, mais je crois que moi, je m'y prendrai autrement pour mes examens, ok ? » Oui enfin, c'était juste une proposition hein. Mais bon, désormais, il était clair qu'elle ne verrait plus jamais son professeur de Sortilèges du même œil, à son grand damne d'ailleurs. Pourquoi fallait-il qu'à chaque fois où ils se retrouvaient tous les deux, Erwan lui assène de nouvelles séquelles psychologiques ? Mais la réponse était simple voyons, tout simplement parce qu'il la jugeait comme étant une menace pour son génie, bien sûr ! Il craignait de la voir mieux réussir ses ASPICs que lui on y croit du coup il lui ramollissait le cerveau à coups d'images traumatisantes. C'était tout bonnement évident, et tout à fait vicieux ! Comment ça ‘n'importe quoi’ ? A peine ! Et puis c'était tout à fait plausible, on pouvait s'attendre à tout de la part d'un esprit machiavélique comme le sien.

Le reste des moqueries de son demi-frère ne l'atteignit même pas, comme on dit, la bave du crapaud n'atteint pas la blanche colombe, n'est-ce pas ? Sauf que ça, elle ne le dirait pas à l'oral, de crainte de lui suggérer de nouvelles vannes la comparant elle à un visqueux crapaud. Écœurant. « Et comment tu sais ça au juste ? Oh non Erwy, me dis pas que t'es encore allé essayer ma garde-robe ! » Elle lui lança un regard atterré, puis reprit en soupirant. « Combien de fois faudra-t-il que je te le dise, si tu veux te travestir, moi ça me pose pas de problème, je te respecte comme tu es *tousse* mais achète toi ta propre lingerie sérieux. A chaque fois t'élargis mes fringues avec ton postérieur d'hippopotame. » se plaignit-elle sur un ton faussement désespéré. En plus, c'était pas une blague, une perruque blonde bouclée et des pamplemousses en guise de poitrine, et il se transformait en une toute autre femme le Erwy, tout à fait.

Sa remarque sur son incapacité à devenir une bonne femme au foyer la fit sourire. Elle haussa les épaules avant de répliquer: « Et toi alors, tu peux parler ! Macho, a une libido débordante, laisse traîner des strings partout... Je peux te garantir que t'es pas non plus un cadeau frangin ! » lui garantit-elle tout en lui adressant un sourire resplendissant. Elle pourrait peut-être faire passer une annonce du genre dans la rubrique "Cœurs à prendre" de la Gazette du sorcier ? Elle était certaine que ça ferait des ravages !

Vînt le moment de choisir leur destination pour aller se ravitailler, et Faith se lança dans une intense réflexion tandis qu'ils quittaient tous deux l'appartement. « Va pour un japonais alors ! » Ou comment Erwan termina la soirée à Sainte Mangouste avec une baguette plantée dans le nez, mais ça, c'était une toute autre histoire...