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Etouffant un rire amusé la rouquine ne répondit rien à la remarque de son cadet qui manquait peut-être de modestie pour le coup (chose qu’elle n’allait aucunement lui reprocher, elle-même n’étant pas spécialement une figure mesurée). Une proie… Se rendait-il seulement compte à quel point le terme était bien choisi ? N’était-il pas cela justement pour la gamine gâtée qui l’observait avec délice ? Amusée par les propos tenus par le jeune homme, elle ne pouvait s’empêcher de penser qu’il était vraiment le jeu qu’il lui manquait. Oui, Siegfried incarnait en tout point le compagnon de chasse que la rouquine cherchait inconsciemment depuis quelques temps déjà. Et puis, elle avait une parole à tenir… Concernant la liberté et ce qu’il désirait entrait dans les cordes (multiples) du jeune mannequin qui répondit doucement :

« Peut-être saurais-je t’aiguiller dans tes recherches. »

Peut-être bien, oui… Les jeunes gens transplanèrent et Siegfried laissa finalement son ‘arme’ dans le tiroir, avec celle de la rouquine. Elle ne fit par ailleurs aucun commentaire à ce sujet, laissant son cadet agir librement pour le coup (elle ne lui fixait pas que des limites et des règles non plus quand même –paaf-). Elle écouta le jeune homme lui parler de son passé en silence (chose assez rare chez la rouquine pour être signalé, voire même souligner pour la peine !). Elle partageait le point de vue du sorcier, au détail près qu’ils n’avaient pas du tout grandi dans le même milieu tous les deux. Là où il avait vu misère, elle, elle avait vu réussite. L’ennuie (si l’on veut), c’est qu’au final, l’un comme l’autre étaient pourris jusqu’à la moelle. Au détail près que l’environnement de la rouquine tentait de le cacher derrière des faux semblants, vivant sous des couches d’apparences et de mensonges. Tandis que l’ancien milieu de Siegfried ne prenait même pas la peine de se cacher… Vivant le vice au grand jour, sans en éprouver la moindre honte. Ce qui semblait presque être plus sain… mais assurément moins amusant pour la rouquine. Ce qui la faisait vibrer, elle (la drogue mise de côté), c’était la manipulation. Obtenir ce qu’elle désirait en y mettant de simples formes… Il fallait parfois vraiment peu de choses pour faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre. Et c’était, à ses yeux, plus que jouissif. Souriant à la fin de la tirade de la vipère, elle répondit avec assurance, sans ciller :

« Je n’oublie pas, n’aies crainte. Mais dis-moi. Simple curiosité. Quelle issue visualises-tu actuellement ? »

Puis les deux jeunes gens se retrouvèrent dans la masse humaine. Keira y était plus à l’aise qu’en plein jour. La nuit, les règles changeaient. Et elle n’avait pas été longue à les apprendre, ni même à les faire tourner à son avantage. Elle savait se faire discrète quand il le fallait et jouer sans honte de ses dons pour parvenir à ses fins. Et le pire… c’est que ça marchait généralement. Bon, il y avait bien eu quelques bavures… Des fois où elle s’était vraiment fait peur… mais elle s’en était toujours tirée à bon compte, au final. Et ces évènements devenaient alors des souvenirs divertissants, chargés en adrénalines. Peut-être aurait-elle vu les choses différemment si elle s’était vraiment faîte à moitié tué… mais ce n’était pas le cas, aussi restait-elle toujours aussi imprudente et passionnée par ces échanges nocturnes qui les entouraient à présent. Tant d’excitation, de regards, de potentiel dans cette atmosphère déjà saturée en phéromones et oestrogènes ! Un petit sourire, et elle posa son regard sur Matheo, l’homme qui venait de poser la question (attendue et peut-être un peu redoutée ?) sur Siegfried. La vipère répondit avant la rouquine, et quelle réponse ! La sorcière ne pu que rire devant les regards étonnés et la seconde réplique de son ‘frère’.

Bon, c’était en soit, pas vraiment la meilleure réponse à donner, mais actuellement, la rouquine s’en moquait pas mal de ce qui était ‘bon’ ou ‘mauvais’ à répondre. Siegfried lui plaisait de plus en plus. Son caractère était si divertissant !!!! Elle en venait à se demander pourquoi elle ne lui avait pas parler plus tôt ! Tant de temps perdu… heureusement, ils en avaient une bonne réserve à disposition et la jeune fille ne comptait pas la gâcher ! Quand ils quittèrent ce groupe, une vingtaine de minutes plus tard pour aller au bar, la rouquine ne pu que murmure à l’oreille du sorcier :

« Et bien, je suis ravie d’apprendre notre nouveau lien de parenté, mon très cher frère… »

Le ton n’était pas aux reproches, aucunement ! Bien au contraire, elle en riait, en était amusée. Prenant place au bar, elle commanda un cocktail alcoolisé, posant ses prunelles azur sur son ‘frère’.

« Alors, tu as repéré quelqu’un qui t’intéresse ici ? »

Elle s’était tournée vers la masse qui n’avait de cesse de croître, tout sourire. Elle même avait déjà quelques conquêtes en vue… Des petits nouveaux qu’elle avait envie de chatouiller un petit peu… Pour le plaisir de jouer, une fois encore, avec le danger. Mais qu’en était-il de son jeune compagnon ?

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BAVBOULES

Keira avait plutôt bien pris l’idée du « petit frère ». Il n’avait pas pu s’empêcher d’ajouter une petite note d’illégitimité dans leur nouveau lien fraternel qui les unissait. Oh, ca n’était pas qu’une lubie de plus à ajouter à la longue liste d’éléments cyniques qui composaient sa vision du monde. Cette fois, il se référait également aux statistiques.

« Tu sais, j’ai lu une fois que dans une famille avec plusieurs enfants, le cadet avait une chance sur deux d’être le fruit d’une union adultère. Ca veut dire que de nombreux hommes élèvent des enfants qui ne sont pas les leurs. Je me demande à quel point ce genre d’étude ferait fureur à Poudlard. »

Siegfried accepta la boisson alcoolisée que Keira lui commanda, et il se demanda si toutes les grandes sœurs offraient ainsi ce genre de boisson à leurs cadets. Lui-même n’avait jamais vraiment eu de famille, même lorsqu’il était Evan, il avait été enfant unique, et ses parents n’avaient pas étés des modèles d’affection.
La question fatidique du « Quelle issue visualises-tu actuellement ? » Avait été évitée grâce à l’enchainement favorable des évènements, et Siegfried préférait continuer dans cette voie.

« Si il y a bien une leçon que j’ai apprise à Poudlard, c’est que sans famille, je partais avec un handicape certain pour m’élever. Surtout étant membre de la maison serpentard. Alors j’ai pensé que sur ton propre territoire, me faire passer pour quelqu’un de ta famille me rendrait les choses plus faciles tu vois… Profiter de ta réputation, ou de ton influence... C’est un reflexe tout à fait légitime ne penses tu pas ? Bon, voyons… Qui pourrait me plaire ici… »

Les représentantes du sexe féminin ne manquaient pas en vérité. D’un seul regard, Siegfried balaya la pièce, repérant rapidement qui était susceptible de lui plaire. Tout le spectre social de la jeunesse lui était proposé, et rapidement, il désigna une direction discrètement du bout du doigt.

« Elle… Oui, elle m’intéresserait vraiment. J’ai remarqué que d’autres garçons avaient déjà tenté leur chance, et qu’elle les avait rembarrés. Soit elle s’est trompé de soirée, soit elle veut se venger de quelque chose. En tout cas, elle est en colère, même si elle sourie et qu’elle n’en laisse rien paraitre. Elle a besoin de se sentir forte, et désirée. En bref, elle ne sera pas simple à avoir. J’aime les défis. »

Keira regarda dans la direction qu’avait pointée Siegfried pour apercevoir la fille en question, accompagnée de ses amies. Une brune, très mince, aux allures de princesse… Volontaire ou inconscient, Siegfried avait choisi une fille, qui en rappellerait une autre à Keira.

Keira esquissa un léger sourire amusé à la remarque de son cadet. Adultère… Ouai, ben ça n’étonnerait pas le moins du monde que sa chère et tendre mère soit allée voir ailleurs (et ce à diverses reprises, par ailleurs). Etonnemment, elle était intimement persuadée que son père, lui était resté fidèle à sa femme. Quel imbécile. Non, elle ne critiquait pas la fidélité dans le mariage (quoique… la rouquine pensait déjà qu’il fallait être plus que dérangé pour oser se marier *et elle était très sérieuse quand elle pensait –et disait- cela*) mais rester fidèle, en plus ??? Non vraiment… c’était parfaitement ridicule ! Elle ne répondit pas à la remarque de la vipère, mais imagina un instant la réponse que certains fourniraient à ce genre de remarques –et une pensée pour Elizabeth Harris, haha !-.

« J’aimerais bien en parler à une ‘amie’ je suis sûre que sa réaction serait des plus… intéressantes. »

Oui, le terme ‘amie’, elle l’avait employé avec sarcasme. A l’heure actuelle, Keira détestait profondément Elizabeth. Pas autant que Lexy, Luca ou Dawn… Mais au moins autant que Kaïn ! L’explication du jeune garçon quant à son choix de se faire passer pour son frère fit simplement sourire la rouquine. Elle n’était vraiment pas sûre qu’il puisse en tirer les bénéfices qu’il envisageait. Ce qu’elle lui expliqua sans en éprouver la moindre honte :

« Oh, je ne suis pas sûre que ma réputation soit très reluisante… En fait, je suis même plutôt sûre qu’elle est très mauvaise… Ce n’est vraiment pas dit qu’elle te serve comme tu l’entendais. »

Elle haussa les sourcils. Ben quoi ? Il était prévenu. Keira se faisait (plu ou moins) respecter et (toujours) connaître, mais elle avait une très mauvaise image. Elle était une fille facile, qui ne se cachait pas de ses vices. Tout le monde (ou presque) savait qu’elle avait décroché plusieurs contrats de façon peu orthodoxe. Elle n’hésitait pas à se vendre pour obtenir ce qu’elle désirait. Sans être une prostituée (elle n’était pas dans un réseau –paf-) elle tendait très dangereusement vers cette image. Pour l’influence, en revanche, Keira lui accordait que ça pouvait lui être bénéfique… la rouquine avait beau avoir une mauvaise image, elle restait influente. De par sa position dans la société, son travail, et son don (qu’elle usait à tord et à travers, puisqu’elle refusait d’échouer professionnellement parlant).

Siegfried montra une sorcière du doigt (bien plus discrètement que l’aurais fait Keira quelques années plus tôt, évidemment). Cette dernière n’était pas sans rappeler une certaine personne à la rouquine, qui ne se gêna pas le moins du monde pour le faire remarquer à son cadet.

« Oh, je voie… Avec un peu de chance, elle aura les yeux vairons. »

Ben quoi ? Elle haussa les épaules avant de poursuivre :

« Enfin la probabilité pour que ce soit le cas est assez faible quand même… »

La rouquine, toujours souriante, observa son cadet (puisque le terme ami semble être un peu déplacé ?). Elle aimait sa façon de percevoir les choses… de les désirer, d’agir… Il était vraiment passionnant dans son genre !

« Et comment comptes-tu t’y prendre, petit frère ? »

Elle restait assise, confiante. Elle avait hâte de voir Siegfried en pleine action. Elle ne doutait pas une seconde que ce serait palpitant.

Siegfried leva un sourcil pour souligner la remarque de Kheira qui faisait référence aux yeux vairons d’Heaven. C’était bien vrai que cette fille à l’autre bout de la pièce lui ressemblait un peu. Pas de quoi en faire un plat quand même ! Keira était néanmoins lucide et prenait plaisir à le mettre face à ses propres contradictions. Refusant catégoriquement d’admettre cette faiblesse, Siegfried se retrancha derrière une attitude on ne peut plus hypocrite faisant une fois de plus preuve de mauvaise foi alors qu’il refusait d’admettre la vérité.

« Ce n’est pas ma faute à moi si toutes les brunes se ressemblent. »

Comble de la mauvaise foi, effectivement. Mais personne ne rapporterait ces paroles à qui de droit. Réajustant sa veste et se passant la main dans les cheveux, Siegfried rassembla toutes ses fourberies dans sa tête pour se préparer à passer à l’action. Il avait un plan assez simple dans sa tête. Il ne voulait pas faire sa vie avec cette demoiselle, donc, il fallait juste susciter en elle une étincelle de sentiments accrocheurs, quelque chose qui lui ferait oublier toutes ses exigences et… Qui lui attirerait ses faveurs grâce un autre levier que l’affection. C’était tellement surfait l’affection.

« Je pense que je vais jouer sur ses deux plus gros pêchers. L’orgueil et la jalousie. Ce sont toujours les plus gros pécher des femmes avec la gourmandise, enfin, sans vouloir te manquer de respect bien entendu. »

Siegfried fit un pas vers sa proie, et puis s’arrêta brutalement. Se retourna et revint vers Keira.

« Et à propos, jusqu’où l’exercice doit il aller ? Est-ce qu’on considère qu’avec un simple regard de sa part je serais arrivé à mes fins, où dois-je aller plus loin ? Nous n’avons pas fixé cette règle. Non, je préfère demander parce que si je dois pousser l’expérience au plus loin, peut être auras tu besoin toi aussi d’avoir un garçon pour te tenir compagnie. Tu crois pouvoir envouter quelqu’un pour la soirée toi ? »

Hésitation ou réelle provocation de sa part ? Même lui n’aurait su répondre à cette question. Le jeune garçon nageait dans l’inconstance en permanence, et la seule chose qu’on pouvait attendre de lui de manière certaine, c’était sa facilité prononcé à entrainer les autres dans ses propres méfaits.

« Tu n’as pas prévu de rester seule toute la soirée et de m’observer en me tenant la chandelle n’est ce pas ? »

La rouquine eut un sourire mi amusé, mi sarcastique à la réponse que lui fournit son cadet au sujet de la (très forte) ressemblance entre la brune qu’il visait et son ex petite amie (accessoirement, meilleure amie de Keira –bien que ses valeurs aient été un tantinet altérées depuis qu’elle avait découvert de nouveaux amis, appelés molécules chimiques possédant des propriétés psychotropes… mais ceci est une autre histoire !-). Elle n’avait pas envie d’accentuer les choses, de pousser la moquerie, mais elle restait sur sa position (et en rapporterait peut-être même quelques éléments à la brunette, si jamais elle la revoyait –chose dont Keira doutait dernièrement, avec son train de vie actuel… Elle n’était vraiment pas sûre que voir Heaven était une bonne idée. Elle avait perdu des gens, et Eve entrait dans ceux qu’elle préférait (vraiment) ne jamais perdre. Et la solution, pour que cela se fasse était sans doute de prendre quelques distances ? –ou comment démontrer toute l’ambiguïté de la chose…-.

Puis le jeune homme lui exposa (vaguement) la ligne de conduite qu’il comptait suivre pour mettre la brunette dans son sac. La sorcière l’écouta avec le sourire. Elle ne partageait pas son avis, au sujet des péchés des femmes (puisque elle-même savait que le sien était d’avantage la luxure que l’orgueil (elle n’avait, de toute façon, pas de fierté, étant donné le niveau auquel elle était parfois emmenée à s’abaisser…)). Ceci étant, la rouquine avait (aussi) conscience qu’elle était loin d’entrer dans les normes… Et que les autres filles (et femmes, plus généralement) étaient sans doute différentes… ~~sinon on aurait encore des prostituées à tous les coins de rues… Et personne ne s’en cacherait~~. Sans prendre la mouche, le mannequin esquissa un petit sourire moqueur :

« Bien entendu… »

Puis, il l’interrogea sur les limites de l’exercice (de ses propres mots). La jeune fille se contenta d’hausser les épaules, répondant ce qu’elle pensait (tout bonnement) :

« Tu fais ce que tu veux d’elle, Siegfried. Je ne t’impose aucune limite, et je pense que tu devrais faire de même. Les bornes, les lignes à ne pas dépasser, les règles… c’est tellement barbant, tout ça… En ce qui me concerne, je m’arrange toujours pour faire le plus de choses possibles, j’exploite toutes les possibilités qui s’offrent à moi. Et je te conseille vivement d’en faire autant. »

Il allait partir, quand il se tourna vers elle, l’interrogeant sur ses propres intentions. Plait-il ? Il osait (encore) poser ce genre de questions ridicules ? Il avait encore quelque chose à comprendre, de l’avis de Keira. Et elle allait le lui dire sur le champ, histoire qu’il ne la sous-estime pas, sur ce plan là.

« Ne me prends pas pour une débutante, Siegfried. Si je veux quelqu’un, je peux t’assurer que je ne passerais pas la soirée seule. »

Elle haussa les épaules, pas vraiment décidée à bouger pour l’instant, elle préférer regarder son cher et tendre ‘petit frère’ agir, avant d’aller voir (elle-même) une proie qu’elle avait observé un peu plus tôt. De toute façon, rien ne pressait pour la sorcière. Elle avait toute la nuit devant elle, et elle n’avait pas forcément envie de passer du temps avec un homme ce soir, elle voulait s’amuser et son tout nouveau jouet était déjà fort divertissant…

Keira savait se montrer déterminée avec un détachement qui forçait le respect. Prenant acte de la permission qui lui était donnée d’aller là où il le souhaitait, Siegfried frappa dans ses mains en lui déclarant.

« Très bien, j’y vais, admire l’artiste. »

Et c’est donc sans aucune gêne que Siegfried se dirigeât vers sa proie. Il se mêla sans difficulté au groupe d’amis qui parlaient entre eux. L’alcool et l’ivresse de la nuit, mais aussi le bruit ambiant jouèrent en sa faveur pour se faire passer pour un ami de son voisin de droite. Un voisin de droite à qui il avait expliqué la seconde d’avant qu’il était un très bon ami de son voisin de gauche. Usant et abusant de la crédulité et surtout de la bêtise de son entourage, Siegfried acquit rapidement le statut « d’amis du groupe » sans que personne ne se rende compte de la supercherie.

Le jeune serpentard joua alors un jeu subtile cherchant à prêter le moins d’attention possible à sa proie, dont il apprit rapidement qu’elle s’appelait Léonie, tout en propageant dans les discutions qu’il avait avec ses nouveaux « amis » une fausse histoire le concernant comme quoi il venait de se faire larguer salement par son ex-copine. Chemin faisant, et ragot courant, sa fable finit par être portée aux oreilles de Léonie. Ah, brave Léonie…
Siegfried ne s’était pas trompé sur son compte, la jeune fille venait elle-même de se faire jeter comme une vielle chaussette pour reprendre ses propres mots. La jeune fille avait deux besoins ce soir, même si elle ne les avait pas explicitement déclarés. Tout d’abord, elle avait besoin de cracher son venin sur son ex en saturant les oreilles de ceux qui voulaient bien l’écouter de remontrances et de reproches à l’attention de son ancien compagnon. Siegfried songeât que le garçon en question ne pouvait être aussi mauvais qu’elle le décrivait si elle était restée un temps soit peu avec lui.

Ensuite, Léonie avait besoin qu’on lui prête attention, et qu’on la plaigne. A ce petit jeu là, les autres garçons se montraient particulièrement serviles. Il faut dire que Léonie se démarquait par sa beauté dans cette assemblée, et tous avaient l’espoir de s’attirer ses faveurs en chantant ses louanges et en pleurant avec elle sur son triste sort.

« Moi aussi j’ai le même but qu’eux » songeât il. « Même but, manières différentes. »

La première loi de la contradiction. Elle repousse ce qu’elle peut avoir, et elle est attirée par… Ce qu’elle ne peut pas avoir…

Alors évidement, lorsqu’elle s’aperçu que ce garçon, à l’autre bout de leur assemblée, ce garçon qui lui aussi avait eu à subir une séparation douloureuse, ce garçon qui ne semblait pourtant pas s’intéresser à elle comme le faisaient les autres, évidement, comme la parfaite petite créature orgueilleuse qu’elle était, elle vint jusqu'à lui s’asseoir à ses cotés pour venir chercher sas dose de compassion.

« Et la voila qui se jette dans mes griffes, sans je j’ai eu à lever le petit doigt. C’est presque trop facile. » Murmura t il.

Et là, vint une longue conversation compassionnelle remplie de mensonges telles que « oh, toi aussi tu t’es fait larguée ?» et aussi de « quel idiot il a été de te larguer » sans oublier le fatidique « moi je ne pourrais jamais laisser tomber une fille comme toi si tu étais ma copine ».

Siegfried jouait à l’innocent, le garçon trop fragile et trop sentimental, exactement ce que cette fille cherchait ce soir. Certainement dans l’espoir de le séduire et de le larguer elle-même, juste pour pouvoir se sentir à la place de celle qui a le pouvoir dans la relation, une vengeance par projection en quelque sorte.

Siegfried sentait qu’il faisait mouche, et qu’il pourrait faire ce qu’il souhaitait de cette fille en la manipulant, jusqu’au moment où, dans un élan de faiblesse, elle lui dit « Tu sais, ce garçon qui m’a larguée comme une vieille chaussette, je l’aimais vraiment. Tu sais, quand il m’a lâché, ca m’a fait tellement de peine, encore plus que… que… que… Que quand j’ai vu Titanic. »

…
…
…

Dix minutes plus tard, Siegfried se présenta seul devant Keira, commanda une boisson très alcoolisée au barman, vida son verre d’un trait et, lorsque Keira fit une moue agacée pour lui intimer de s’expliquer, il se passa la main sur le visage dans un geste las et parvint à dire :

« Erreur de casting je crois… Non, franchement, tout s’est bien passé, elle était aussi orgueilleuse et nunuche que je le pensais mais… Elle a dit quelque chose… Ca dépassait tout ce que je soupçonnais… Elle était carrément… Stupide ! Greluche ! Inintéressante ! Ca me parait bizarre de dire ca, mais je crois que je me suis habitué à un certain standing dans mes relations. Dis-moi… C’est anormal pour un garçon de ne pas réussir à disons… Concrétiser avec une fille qu’il estime être en dessous de ce qu’il vaut lui-même ? Ou alors le fait qu’elle soit jolie et excitante aurait du être suffisant pour que je passe à l’acte sans hésiter ? »

Souriant, la rouquine laissa donc son cadet filer vers sa proie (alias Eve bis pour les intimes –paf-). La jeune fille l’observa un instant, distraitement, puis finit par détourner le regard quand la jeune femme brune aborda la vipère. Ce n’était pas que ce n’était pas intéressant, mais elle avait une vie à mener elle aussi, et actuellement, elle avait bien envie d’avoir un peu de drogue gratuitement (bon le terme ‘gratuit’ était peut-être exagéré, disons simplement qu’elle ne payait pas en monnaie sonnante et trébuchante, voilà tout…), aussi ne tarde-t-elle pas à s’entretenir avec Tony (le même que dans l’après midi, on ne s’en lasse pas !). Ses doigts caressant négligemment le bras de l’homme qui lui faisait face, elle lui adressait un petit sourire complice quand Siegfried décida de la rejoindre. Agacée, elle du laisser partir sa proie et ne retint pas un soupire exaspéré quand son cadet but son verre d’une traite sans rien daigner lui expliquer… Il venait de la casser dans son élan, alors il avait intérêt à avoir une excuse béton, le saligot ! Et ce qu’il expliqua à la rouquine la laissa de marbre qu’un court instant avant qu’elle ne se mette à rire, réellement amusée par les propos de Siegfried. Il était tellement amusant ce petit garçon ! (Bon d’accord, elle avait peut-être besoin de revoir sa définition de ‘petit garçon’ mais quand même !). Elle lui exposa son point de vue sans pouvoir cacher un sourire réellement amusé à son cadet :

« Bienvenue sur terre, Siegfried. »

Elle désigna la salle d’un mouvement de la main, englobant tous les groupes formés de ce simple geste.

« Honnêtement, tu trouveras très rarement des personnes réellement dignes d’intérêt ici… Tous, ou presque, sont de véritables attardés mentaux. Les trois quart n’ont pas la moindre ambition et sont, je te l’accorde, les moins intéressant d’un point de vue ‘élévation sociale’. Ils sont en revanches de très bon pour tout ce qui touche à l’intégration. C’est grâce à ces gens là que tu te fais une réputation et que tu peux, après approcher ceux qui valent réellement le détour. »

Keira désigné d’un léger mouvement de menton un homme qui devait avoir une cinquantaine d’année, en compagnie d’un autre d’une vingtaine d’année.

« Regarde les, par exemple. L’homme d’âge mur est un haut gradé. Il a beaucoup d’influence, mais l’approcher sans t’être fait une bonne image auparavant relève du suicide social, pur et simple. Il possède une bonne partie de la ville, mais ce n’est pas pour autant que tu peux lui parler comme ça, en débarquant de nulle part. l’idéal, pour l’approcher, lui, c’est de faire connaissance avec son fils qui est un abruti fini… En ce qui me concerne, j’ai pris quelques… substances, on va dire, qui m’ont permis de franchir des frontières que je n’aurais pas pu franchir en étant totalement sobre. Mais rien que le fait de passer une nuit avec Richard, le fils, m’a permis d’entrer dans la vie de son père… Et donc de monter les échelons. Tu comprends les règles du jeu ? »

La rouquine savait que Siegfried la suivrait, parce qu’il était au moins aussi malade qu’elle… Elle lui adressa un léger sourire :

« Tu n’as jamais testé ? Autre chose que le tabac et l’alcool, j’entends. »

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