[Thème - PV] Révisons les examens ou faisons comme si !

Carry hocha la tête en signe d’assentiment et elle ne voyait pas bien quoi dire d’autre. Elle ne le faisait vraiment pas exprès, c’était quelque chose qui lui venait naturellement. A l’origine, elle le faisait parce qu’on le lui imposait, il lui semblait même qu’enfant elle avait une ou deux fois utilisé des marques de familiarités avec ses parents, mais ensuite sa mère était morte et elle était partie en Angleterre, tout avait changé, et ses bonnes manières étaient devenues une protection contre l’intrusion des autres dans sa vie. Protection bien illusoire puisque finalement, petit à petit, son entourage à Poudlard s’était agrandi. Il y avait d’abord eu Damon et Gaël, puis Eva-Rose et Tosca, Emma et Elyna… et bien sûr Enry, mais elle n’était pas certaine qu’elle puisse le classer dans la même catégorie. Leur relation n’avait pas toujours été bonne, la preuve c’est qu’au début il la craignait un peu.

« Cela me passera sûrement pour certaines personnes, mais dans l’ensemble, maintenant cela fait parti de moi, je ne crois pas que je pourrais parler aux autres naturellement comme vous le faites. » Et elle n’était pas sûre de le vouloir, certes elle s’était faite des ami(e)s mais en ce qui les concernait cela restait des sortes d’exceptions à la règle, au fond elle pensait toujours et avec la même force que l’être humain était pourri jusqu’à la moelle… ce qui ne l’empêchait pas de temps en temps d’envier les filles plus positives comme Elyna.

« En effet, mais même de simples révisions me semblent arriver à me mettre le cerveau sans dessus dessous ! » Mais après une petite pause catalogue et cacahuète, elle se sentirait sûrement plus en forme pour recommencer à réviser. Sûrement que cela faisait trop longtemps qu’elles étaient en train de repasser leurs leçons, d’où cette sensation de trop plein, mais elles étaient intelligentes, cela leur passerait sûrement.

« C’est vrai que je devrais les essayer mais c’est un catalogue de vente par correspondance… mon tuteur ne me laisse pas beaucoup sortir alors je ne perds jamais une sortie pour aller faire du shopping, je commande tout sur catalogue ou alors c’est mon elfe qui me fait mes vêtements. Dorémi est très doué en couture, mais elle ne sait pas faire de maillots de bain, ou alors il couvrira trop de peau, il faut un juste milieu tout de même. » Elle ne voulait pas particulièrement ressembler à péripatéticienne en vacances mais il devait sûrement y avoir un juste milieu entre les deux, et celui sur le magazine, pour au moins ce qui était de la forme, semblait tout à fait correspondre aux exigences de la brunette. Il montrait assez de peau pour être aguichant mais cachait le principal.

« Si monsieur Griffins ne vient pas, vous serez seule avec votre cousin ? Cela ne semble pas très amusant comme vacances, seulement à deux, et en famille. Mais ce maillot est bien, il vous ira parfaitement. » Bon, en même temps, elle n’avait pas vu ses cousins depuis qu’ils avaient quitté l’école et même là, elle leur avait à peine adressé la parole ! L’un dans l’autre, donc, elle ne pouvait pas voir l’intérêt de vacances avec un cousin.

« Je ne suis pas sûre qu’il en cache beaucoup moins que le précédent, mais il est plus suggestif, trop sûrement. » Accorda-t-elle tout en tournant une page t en regardant d’autres modèles. « Et en effet, monsieur Stanley est… et bien jaloux je crois. Je ne comprends pas de quoi, mais c’est un autre problème. » Elle ne comprendrait jamais qu’il puisse être jaloux alors qu’elle était aussi impopulaire !

« En réalité, ça ne me dérange pas qu’on me tutoie, c’est juste moi qui ne peut pas rendre la pareille. Certaines habitudes sont tellement bien ancrées en nous que nous ne pouvons pas faire autrement que de les suivre. Je vouvoyais même mes parents d’ailleurs du temps où ma mère était encore en vie, alors bien entendu, je vouvoie Andrew aussi, mais c’est autre chose. Je crois que je vouvoyais mes parents parce que j’y étais obligée, je vouvoie mon tuteur parce qu’il serait trop heureux que je fasse autrement. J’ai l’esprit de contradiction. » Termina-t-elle tout en prenant à nouveau quelques cacahuètes. De fait, elle n’avait peut-être jamais autant parler de sa vie privée (sans rapport avec Enry) à sa camarade de chambre, mais elle espérait que ces simples paroles suffiraient à la préfète pour se rendre compte à quel point Charisma faisait de son mieux envers elle, que ce n’était pas à cause d’un quelconque ressenti qu’elle la vouvoyait, elle ne le faisait vraiment que parce que pour elle, ce qui n’était pas naturel, c’était de tutoyer les gens, du coup ça lui demanderait un effort considérable qu’elle n’était pas prête à fournir, encore moins en période d’examen.

« Je préfère le salé, même si je ne dis jamais non à du chocolat. » Elle sourit et reprit une poignée de son propre en-cas.

« Mon tuteur refuse que je sorte, je dois demander une permission détaillée avant de faire le moindre pas dehors. A côté de ça, je suis bien plus libre à Poudlard. » Mais en même temps, elle comprenait qu’Andrew agisse ainsi avec elle, après tout, il l’avait acheté, il n’était donc pas très étonnant qu’il veuille contrôler le moindre de ses faits et gestes.

« Mais ça ne coûte rien de lui demander si je peux faire un après-midi shopping avec vous. De toute façon, Enry va devoir commencer à s’occuper de trouver du travail. » Préoccupation ô combien lointaine pour Carry qui n’était qu’en cinquième année et voyait ça loin, très loin, de son quotidien. Déjà, est-ce qu’elle travaillerait ? Ce n’était pas certain puisque, comme elle venait de le souligner, elle appartenait à Andrew. Son tuteur ne serait sûrement pas d’accord pour qu’elle prenne son indépendance.

« Chez moi, enfin chez Andrew plutôt, peut-être voyagerons nous mais je n’aime autant pas, je m’ennuie lorsque je suis avec lui, nous n’avons jamais de vrai conversation, il m’écoute bien sûr, ce n’est pas le problème, mais lui n’a jamais rien à dire. » Elle savait tellement peu de choses sur son tuteur que même pour elle, pourtant discrète, c’était effarant. Mais bon, il faut dire aussi que sa discrétion avait pour limite sa curiosité, aussi grande – voire plus -.

« En effet. » Répondit-elle en tournant de nouveau les pages du magazine. Elle ne rajouta pas qu’elle ne savait parfois plus si Enry l’aimait ou non, elle préférait éviter, au risque de mettre de l’huile sur le feu, et puis, c’était une question stupide qu’elle préférait garder pour elle. Cette réflexion causa par ailleurs un ricanement lointain de la part des voix à l’intérieur de sa tête, à l’évidence, elle était parfaitement en accord avec le terme stupide.

« Il y a beaucoup de modèles… j’aurais aimé un maillot blanc, mais la plupart du temps, ils sont transparents je crois, non ? » Et elle ne voulait pas qu’il soit transparent, ça non !

« Cela m’est même naturel. » C’était le tutoiement qui ne l’était pas, et elle avait mis pas mal de temps à accepter le fait que ses camarades se tutoyaient entre eux, au tout début, comme elle avait toujours vécu dans sa bulle, ça lui avait semblé plus qu’étrange. Elle ignorait pourquoi ce sentiment dominait en elle, celui que le monde comme il était n’était pas fait pour elle, qu’elle aurait dû vivre dans un autre pays ou dans une autre époque… mais le monde allait comme il voulait et son avis n’intéressait pas la marche du destin, du coup elle était résignée depuis longtemps à être l’électron libre de l’école.

« Les glaces sont souvent trop sucrées, vous ne trouvez pas ? J’aime autant un chocolat chaud, de toute façon c’est très mauvais de manger froid quand il fait chaud et c’est pourtant là que tout le monde veut en prendre une. Cela dit, j’aime bien les sorbets, mais c’est différent. » Elle se souvenait encore du sorbet qu’elle avait mangé lors de son premier rendez-vous avec Enry et de comment cela avait tourné. Tout ça lui réchauffait le cœur bien que ça ne la motive pas beaucoup plus pour les examens et ses révisions que la vision du catalogue de maillot de bain. A l’évidence pour les deux filles c’était plus qu’une pause et carrément la fin des révisions qui s’annonçaient.

« Andrew n’est pas à proprement parler sévère, il ne veut pas trop que je sorte, un peu comme s’il avait peur que je m’enfuis, mais ceci mis à part, il me laisse faire ce que j’ai envi. De toute façon, comme vous le dites, ça ne coûte pas grand-chose de le lui demander, au pire il refusera. » Et en signe d’impuissance, elle haussa les épaules. Elle était trop habituée aux manies de son tuteur pour s’en offusquer. Elle ne s’était jamais vraiment sentie prisonnière avant de sortir avec Enry, maintenant ça la dérangeait parce qu’elle avait peur de ne pas voir son petit ami, mais ceci mis à part, elle n’éprouvait pas un besoin assez ardant d’aller se promener pour se sentir opprimée par cette seule règle. Elle n’appréciait clairement pas Andrew (en réalité, elle s’en méfiait surtout) mais cela s’arrêtait là.

« Sûrement si vous partez ensemble. » Charisma se montrait rassurante pour cacher ses propres angoisses, après tout, rien ne servait de paniquer, elles s’en sortiraient avec leurs petits amis respectifs, qu’ils aient ou non deux ans de plus. La confiance c’était la clef du succès, on le lui avait toujours dit, et c’était tout justement le moment d’en vérifier la véracité.

« Voilà un programme bien chargé. A côté, mon seul objectif d’aller passer un après midi à la piscine avec monsieur Stanley paraît insignifiant. » Mais Charisma avait toujours eu des problèmes pour se projeter dans l’avenir, même demain lui semblait incertain tant elle avait eu autrefois des déconvenues. Après tout, il y a quelques années, elle n’aurait jamais imaginé être vendue par son père, donc pourquoi espérer en l’hypothétique ? Toutefois, elle se promit d’améliorer son planning auquel elle pouvait d’ors et déjà ajouter une sortie avec Elyna.

« Il faut qu’il soit doublé, ou avec des motifs, des motifs bleus peut-être. » Réfléchit-elle tout en regardant sans vraiment les voir les modèles du catalogue. « Dites moi mademoiselle Artanis, plutôt que de continuer à réfléchir à tout ça seules, ne devrions nous pas partir à la recherche de nos petits amis pour savoir ce qu’ils en pensent ? » Un petit sourire amusé passa sur les lèvres de Carry rien qu’à l’idée de la tête de Seth et Enry à cette question. De toute façon, elle n’avait plus envie de travailler alors autant faire dans le constructif (mais si, mais si, ça l’est !).