[THEME] Jongleur du dimanche [TERMINE]

Potions, métamorphoses, défenses et sorts. Non, métamorphoses, sorts, soins et divination. C'était pas plutôt sorts, métamorphoses, botanique et potions ? Ah moins que ce ne soit pas sortilège du tout mais plutôt histoire de la magie... Ah, sacré nom d'un chien, ils avaient dit quoi déjà comme programme de révisions déjà, avec Ophy ?! Perdu dans une monticule de livres, de parchemins et de bazar en tout genre, Roman ne savait vraiment plus où il en était. Sacrebleu, que ces examens de fin d'année étaient stressants ! Et encore, ils n'étaient qu'en 6ème année ! Dire que l'an passé (et l'an prochain !) ils étaient vraiment notés sur leurs capacités... Cette année c'était un peu le repos de l'esprit, mais pas total, pas total du tout, même ! Ils avaient passé une année plutôt tranquillote scolairement parlant, mais alors la fin, on se chargeait bien de leur rappeler qu'ils étaient à Poudlard, et donc pas là pour se la couler douce. Merci.

Dans le doute, Roman prit toute les matières qu'il pouvait transporter jusqu'à la bibliothèque. Ophy y était déjà depuis près d'une heure, puisqu'elle avait courut à l'ouverture pour réserver une grande table à Roman et à elle. Elle avait pu s'organiser, elle, alors que Roman lui, c'était plutôt le roi de la panique et du chaos. Un jour il faudrait qu'il paie quelqu'un pour un cours de rangement et d'ordonnancement, c'était clair ! Roman dans une chambre c'était comme un éléphant dans un magasin de cristal, quand il était passé, ça se voyait.

Entassant ses livres les uns sur les autres tout en les maintenant intelligemment avec son menton, Roman prit la direction de la bibliothèque, bien décidé à y passer la matinée, voire la journée. S'il sautait un repas ce n'était pas trop grave étant donné qu'il en avait pris trois dans la nuit, les examens passaient avant tout. Roman n'avait qu'un an à tenir avant de quitter Poudlard, il voulait briller un maximum !

« Hey toi là ! Petit première année de Serpentard, tu peux me ramasser le livre et me le mettre sur ma pile s'il te plait ? Voilà... Merci ! »

Le préfet des Poufsouffle Oui, on parle bien de Roman venait – oui, oui – de dire s'il te plait à un Serpentard, comme quoi dans la vie tout arrivait. Il fallait dire que même si Roman les avaient détesté comme la peste, ça aurait été pareil, il ne pouvait pas poser tous ses bouquins au sol pour ramasser celui qui venait de tomber. Une fois que le petit garçon eut remis le livre sur la pile de Roman, le jeune jaune et noir lui sourit et continua sa route.

Il était dans un des couloirs de l'école, direction la bibliothèque, comme prévu. Mais alors que Roman arrivait aux premiers escaliers, perdu dans des pensées de métamorphoses purement physique, le préfet fit l'erreur fatale. The erreur, celle que même les 2èmes années ne faisaient plus. Rater la marche, la marche ! La marche bancale que tout le monde redoutait en allant aux sous-sols, celle qu'on connaissait tous et celle qui était la cause d'innombrables chutes spectaculaires et donc d'innombrables fous-rires. Oubliant carrément la marche (il fallait dire que quand on la voyait, ça aidait forcément à mieux l'éviter), Roman mit le pied dessus, sentit qu'il perdait l'équilibre et s'étala de tout son long sur le sol, voulant bien évidemment rattraper sa chute dans les marches, ce qui ne marcha pas.

« Non d'un Veracrasse borgne ! Non ! »

En plus de ne pas pouvoir se récupérer sur les marches, Roman trébucha sur la dernière, faisant tomber avec lui la multitude de livres et parchemins qu'il avait dans les bras. Tout s'étala gracieusement sur le sol, répandant avec ses parchemins toute la motivation de Roman. La moitié du couloir était plein de cours du jeune blaireau et pour tout ranger, il allait en avoir pour – bien – une demi-heure. Merlin !!! Pourquoi ?!

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* J'ouvre mon troisième oeil, j'ouvre mon troisième oeil, j'ouvre mon troisième... Mais bon sang, où est-ce qu'il est, exactement, le troisième oeil ?*

Une fois n'est pas coutume, Annagovia faisait grise mine, mais l'heure était bien trop grave pour se laisser aller aux sourires bonshommes : son examen de divination approchait à grands pas, et force était de reconnaître que la rouquine était loin d'être prête à affronter la terrible épreuve de la boule de cristal. Si la Poufsouffle avait fait preuve, dans sa candeur de néophyte, d'un enthousiasme débordant à l'idée d'apprendre à décrypter ce qui n'était, jusqu'alors, pour elle, que bouillie infâme au fond de sa tasse de thé ou bien encore lignes aléatoires dans ses mains, afin de "lever le voile du futur" et donc découvrir si elle avait oui ou non une chance d'épouser le Prince William, ainsi que le clamait, en grande pompe, son livre de cours, elle avait vite déchanté : au bout de près de neuf mois de cours, non seulement Anna n'était pas parvenue à lever le voile du futur, mais encore elle aurait été bien en peine de localiser ledit voile. Si l'auteur du bouquin pensait aider les élèves en recourant aux métaphores, il se trompait lourdement : en ce qui concernait Annagovia, les expressions "voix des astres", "yeux de l'esprit" ou bien encore "voile du futur" l'embrouillaient en la noyant dans un marasme dont elle avait bien du mal à tirer un sens. Et le Professeur Trelawney n'était pas d'un grand secours lorsqu'il s'agissait d'éclaircir les choses ! Le "troisième oeil" ? La "quatrième dimension" ? Les "impalpables pressentiments du devenir" ? Mais de quoi parlait-elle au juste ? Et pourquoi leur demandait-elle sans arrêt s'ils étaient dans "l'au-delà" ? Pour ce qu'elle en savait, Annagovia n'avait jamais quitté son pouf inconfortable pour voyager dans quel que "au-delà" que ce fût, si ce n'est celui de l'ennui profond et de la perplexité polie.

Pourtant, elle avait fait de gros efforts pour tenter d'éveiller ses talents cachés de devineresse. Que de fois elle avait espéré, à chaque nouveau cours, enfin percevoir un signe du futur, si mince fût-il ! Une vague forme dans les copeaux détrempés du thé, une ombre furtive dans la boule de cristal, un début d'interprétation dans la course des astres ! Mais elle avait beau faire, le fond de sa tasse restait une énigme, la boule de cristal ne lui renvoyait que son reflet déformé et les étoiles se gardaient bien de piper mot. Annagovia avait toujours estimé être douée d'une imagination débordante. Hélas ! Tout son talent pour dénicher des complots inexistants ou inventer des mystères lui était inutile en divination : la seule fois de l'année où elle s'était avisée d'avancer, d'une voix timide qui ne lui ressemblait pas, que peut-être, peut-être, sa voisine de classe avait un chimpanzé dans sa tasse, le Professeur Trelawney avait autoritairement démenti son hypothèse en lui prouvant par a plus b (et au moyen de force contorsions), que "mais enfin, ma pauvre chérie, vous ne voyez pas la tête de mort, juste là ?". Et de fixer la rouquine avec l'air désolé de qui sait avoir affaire à une irrécupérable idiote. La Poufsouffle s'était sentie si mal, après cet épisode (d'autant plus que sa camarade avait sensiblement pâli en entendant parler de tête de mort), qu'elle s'était bien gardée de prendre de nouveau la parole en cours... Fait suffisamment rare pour être relevé quand on la connaissait !

Si la situation n'avait pas semblé aussi désespérée à la rouquine, elle en aurait sans doute ri de bon coeur. Seulement, Anna, malgré les apparences, était une élève sérieuse et appliquée, qui avait toujours cherché à faire de son mieux depuis qu'elle était arrivée à Poudlard, si bien que les notes qu'elle obtenait aux examens étaient plus qu'honorables. La perspective d'être recalée en divination, non seulement venait titiller son amour-propre, mais en plus l'angoissait au plus haut point. Et si cette incapacité à déchiffrer les mystères de l'avenir était la première limite posée à ses talents de sorcière ? Et si son ascendance moldue jouait contre elle ? Et si les choses n'allaient faire qu'empirer ? Et si son absence de talent s'étendait progressivement aux autres matières ? Et si elle était en train de perdre ses pouvoirs ? Cette idée l'inquiétait tant que, depuis quelques nuits, elle ne pouvait rêver d'autre chose que de boules de cristal, de devoirs de divination auxquels elle ne comprenait goutte et des grosses lunettes du professeur Trelawney la poursuivant partout dans les couloirs en piaillant "inapte, inapte !"

Dans son malheur, Annagovia avait cependant de la chance : la nature avait voulu qu'elle fût une Poufsouffle dans l'âme, c'est-à-dire une acharnée au travail, refusant tout net de rendre les armes sans avoir au moins essayé de combattre. Bien loin de s'apitoyer sur son sort, la jeune fille avait donc retroussé ses manches et emprunté bon nombre d'ouvrages théoriques à la bibliothèque dans l'espoir - certes un tantinet vain - de comprendre un peu mieux ce qu'on attendait d'elle au juste, songeant d'ailleurs que, si elle ne parvenait pas à voir autre chose que des volutes de fumée dans sa boule de cristal, la somme de connaissances accumulées lui permettrait toujours de briller à l'examen théorique... Et donc de sauver la face ! Assez étonnamment, l'idée qu'elle pût tricher en inventant tout simplement de prétendues visions, de préférence en adéquation avec l'état d'esprit de son professeur, ne lui avait jamais encore traversé l'esprit... Et quand bien même elle l'eût fait, il y aurait eu fort à parier qu'Annagovia se serait bien gardée de la mettre à exécution, tant le procédé lui aurait paru indigne.

BREF et là, tout le monde est content que j'arrive enfin au coeur du sujet. D'ailleurs tu notes, j'espère que, quelle délicate attention, j'ai bien mis le bref en majuscules, pour que tu puisses sauter tout ce qui précède. Sympa la fille !, ce jour-là, donc, Annagovia, les bras chargés d'ouvrages de divination qu'elle devait rendre, s'était une fois de plus dirigée vers la bibliothèque, avec la ferme intention d'en emprunter de nouveaux. Pour que la rouquine, qui s'était fait une ennemie de Madame Pince dès sa première semaine de cours à Poudlard, consentît à pénétrer aussi souvent, ces derniers temps, dans l'antre du dragon, il fallait que la situation fût bien préoccupante ! Toute à ses réflexions sur l'art subtil de l'orientation des astres et de l'ouverture du troisième oeil (* Il paraît que le suppositoire à la feuille de coca aide bien à élever son esprit... Je devrais peut-être essayer... *), la Poufsouffle n'avait prêté aucune attention à l'élève qui se trouvait plusieurs mètres devant elle ouuuh, un élève dans les couloirs de Poudlard ? Quelle est cette fantaisie ?... Jusqu'à ce que le bruit de sa chute la tire de ses pensées de future droguée.

- Houlàlà ! s'exclama-t-elle, avec une grimace horrifiée, en se précipitant vers son infortuné camarade, Tu vas bien ? Tu n'es pas blessé ? Tu... reprit-elle, d'un ton anxieux, en se penchant avec sollicitude sur l'étourdi... Et de s'arrêter net en reconnaissant Roman. Oooh, c'est toi..., commenta-t-elle, beaucoup plus froidement, avec un froncement de sourcils contrarié.

Ses relations avec Roman étaient restées très tendues, depuis leur dernière altercation, et Anna s'était efforcée, autant que possible, de ne pas penser à son ami au cours des dernières semaines, opération facilitée par la masse importante des révisions qui l'accaparait. Se retrouver donc d'un seul coup nez-à-nez (ou, plutôt, étant donné la position du jeune garçon, genou à nez), avec son préfet lui avait causé un grand choc : à court de mots, la jeune fille restait plantée dans l'escalier, partagée entre son désir de partir en courant, et la nécessité impérieuse qui lui commandait d'au moins s'assurer que le Poufsouffle n'avait rien de cassé avant de lui tourner le dos. Ses livres serrés contre sa poitrine, protection bien risible, Annagovia esquissa une moue ennuyée : elle se sentait parfaitement stupide.

(1329 mots)

Vautré par terre, parfaitement pitoyable, Roman hésitait à relever la tête pour regarder dans les yeux la personne qui arrivait. Faite que ce soit un élève de Serpentard que Roman avait déjà fait chanter, par pitié ! Un élève déjà sous chantage avait l'avantage de ne pouvoir rien dire à personne, bien évidemment. Pas couillon le Roman...

Le préfet se résigna tout de même à intercepter le regard de son interlocuteur, et fut bien embêté d'y trouver celui d'Annagovia. Ce qui devait arriver arriva, forcément, à force de l'éviter comme la peste, elle allait un jour ou l'autre se retrouver obligée de lui parler ! Bon, il fallait avouer que ces derniers temps Annagovia était passablement occupée dans ses révisions, domaine où Roman l'était également. Le préfet avait bien remarqué que son amie était absorbée corps et âmes à ses études, preuve en était qu'une fois ou deux Roman lui avait demandé sur quoi elle travaillait : elle avait répondu avec la plus parfaite nonchalance ! En temps normal Annagovia n'aurait même pas daigné répondre à Roman.

« Non, ça va. Bonjour Anna. »

Comme à chaque fois qu'il lui parlait, Roman était nerveux. Il avait toujours vu chacune de leur discussion comme une possible tentative de réconciliation et voir qu'à chaque fois ça tombait à l'eau peinait beaucoup le jeune Poufsouffle. Cette année il avait perdu une amie, ce à quoi il avait eut beaucoup de mal à se faire. Annagovia était bien loin des amies proches de Roman telles que Ophélia ou Kayliah, mais elle était tout de même une amie, une confidente et une alliée de poids. Il ne pouvait concevoir une année sans elle et c'était pourtant ce qui s'était passé. L'année où il avait le plus besoin d'elle, par ailleurs ! S'amouracher d'une Serpentard était en soi assez inquiétant pour qu'on n'ait pas en plus besoin d'ajouter de nouvelles péripéties.

« Je suis maudit. Maudit. J'en ai pour des heures pour tout trier ! »

Et Roman le pensait vraiment. Ses cours avaient fait des petits tas classés par matière, mais aux meilleurs endroits uniquement. En gros, on pouvait dire que tout était mélangé. Les chapitres de métamorphoses dansaient allégrement la rumba avec les recettes de potions et les notes sur le Lévicorpus flirtaient amoureusement avec les licornes et les épouvantards. Merlin tout puissant, faite que Roman ait un retourneur de temps, par pitié ! Un tout petit ! Juste pour une heure ! Pourquoi on vendait pas du Félic Félicis, hein ?
Tiens, Roman fabriquerait un gâteau à base de Félix Félicis, quand il aurait sa boutique ! Ça se vendrait super cher, mais ça vaudrait de l'or ! Ouais, c'était cool ça...
En attendant, le préfet de Poufsouffle était bien loin de savourer les bienfaits d'un Félix félicis, ça c'était clair ! A l'heure actuelle, Roman avait la tête plongée dans ses mains, désespéré. Même si Annagovia l'aidait (ce dont il doutait fortement), il en aurait pour des heures à tout reclasser. Et Ophy l'attendait, pendant ce temps ! Foutue, marche, elle avait vraiment le don de bien mal faire commencer la journée !

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* Si je dis que j'ai les deux mains prises et que du coup, je ne peux pas l'aider, est-ce que c'est vraiment un argument mesquin ? * songea la jeune fille, en plissant les yeux à la manière d'un chat s'apprêtant à jouer un sale tour. Car Dame Nature avait beau avoir fait d'Annagovia une Poufsouffle dans l'âme, elle l'avait également généreusement pourvue dans la catégorie "rancune tenace et injustifiée". Roman l'avait appris à ses dépens.

* C'est que tout de même *, poursuivit-elle en son for intérieur, et avec une mauvaise foi évidente, * il a semé un sacré bazar dans l'escalier, et j'ai beaucoup trop de choses à réviser pour perdre mon temps à lui filer un coup de main ! Après tout, je ne suis pas préfète, moi ! Je n'ai pas obligatoirement à aider un élève dans la panade ! * rajouta-t-elle, non sans se sentir un peu - mais un peu seulement - coupable de sa propre petitesse. Son ancien comparse de tours malicieux avait décidément le don de l'amener à tenir des raisonnements indignes d'elle, depuis qu'ils s'étaient brouillés : si la rouquine continuait sur cette voie, d'ici trois minutes, elle allait arguer qu'elle ne pouvait rester car Rusard risquait d'arriver et de piquer une crise de nerfs à la vue des cours éparpillés en tout sens. Or, il fallait mieux qu'il trouve un Roman seul au milieu de ses parchemins et lui enlève cinquante points pour "trouble à l'ordonnance du château", plutôt qu'un Roman et une Annagovia auxquels il ôterait cinquante points chacun. D'où un repli stratégique possible sur une pirouette un brin branlante du type : "Désolée, Roman, je ne peux pas t'aider, ce n'est pas contre toi, mais c'est pour le bien de Poufsouffle, tu comprends !" Un Serpentard ne ferait pas mieux. Preuve supplémentaire s'il en était que le jeune garçon, n'avait pas besoin de lorgner du côté des Vipères pour trouver une pétasse sans scrupules : Poufsouffle en était visiblement bien pourvu également !

Annagovia n'en était pourtant pas là. Pas encore, du moins, et, pour tout dire, elle ne pouvait voir Roman ainsi désemparé sans éprouver un certain malaise, qu'elle se refusait toutefois, dans sa rancoeur, à associer à de la compassion. Après tout, pour le Poufsouffle aussi, l'heure des examens approchait, et ses récriminations prouvaient assez qu'il était probablement dans un état d'inquiétude semblable à celui d'Annagovia.

* C'est amusant, tout de même, on aurait pu penser que le stress des examens diminuait au fil des années et qu'au bout de la sixième... * Mais elle interrompit elle-même son propre raisonnement, sous le choc de l'idée qui venait de lui traverser l'esprit. Attendez une minute... Sixième année ? Son regard, perplexe, passa plusieurs fois de suite de son camarade aux cours dispersés sur le sol avant qu'elle ne bégaye, trop surprise pour se souvenir qu'elle lui tenait rancune :

- Mais... Mais... Attends, Roman... Tu veux dire que tu ne connais pas de sortilège pour récupérer tous tes cours d'un coup de baguette ?, s'exclama-t-elle, visiblement stupéfaite de découvrir que les élèves de sixième année n'étaient pas tout puissants, et scandalisée à l'idée que, dans un monde où les chutes de cours, livres, casseroles, accessoires divers et variés étaient fréquentes, on ne jugeait pas utile d'apprendre aux jeunes sorciers un sort de "ramassage instantané", connaissance pourtant autrement plus pragmatique et plus précieuse que de savoir changer une belette en brosse-à-dents.

- Je veux dire, continua-t-elle en fronçant le nez d'un air concentré, ça ne te les classera sûrement pas, mais au moins, on ne sera pas obligé de se contorsionner pour récupérer des feuilles parties se cacher derrière une armure...

"On". A trop suivre le fil de son raisonnement au point d'en oublier sa querelle avec Roman, elle en était venue naturellement à s'inclure dans le ramassage des parchemins fugueurs. Or, porter secours à son "ennemi", était-ce encore le considérer comme tel ? Les propos d'Annagovia, pour farfelus qu'ils pussent sembler (mais après tout, il s'agissait d'Annagovia), semblaient montrer la voie de la réconciliation. La rouquine n'en était cependant pas consciente, lorsqu'elle poursuivit, avec un enthousiasme forcé (car Roman faisait vraiment trop de peine à voir pour qu'elle eût le coeur de se montrer dure) :

- Et puis trier des cours, ça aide pour les révisions ! Tu sais, pour la mémoire... Tout ça... acheva-t-elle maladroitement, car même avec la meilleure volonté du monde, il fallait bien reconnaître que cet argument ne valait pas grand chose. Au mieux c'était un raisonnement de grosse feignante.

(759 mots)

Géométrie, Géographie, Maths, Potions, Méta', et ça... Potions aussi. Ce tas-là allait avec celui-ci et paf, le chapitre 2 de la 4ème année de potions était complet ! Ne restait plus que les 5 autres chapitres de l'année, ceux de la première, seconde, troisième et cinquième année, et enfin, tous ceux des autres matières ! Quelle riche idée il avait eut de tout embarquer avec lui ! Au choix, ou Ophélia était morte de rire de ce qui était arrivé à Roman, soit elle ouvrait des yeux comme des billes en s'exclamant à travers la bibliothèque "Quoi ? Tu rigoles ?! "SILENCE dans la bibliothèque !.

« S'il existait je le connaitrais, crois-moi ! »

Il y'avait des sortilèges prévus pour regrouper un bloc de feuilles, mais Roman n'allait pas s'amuser à l'utiliser. Le formuler reviendrait à perdre encore plus de temps, Roman préférait de loin passer un peu plus de temps par terre, mais au moins il n'aurait pas à repasser feuille par feuille chaque cours dans la bibliothèque. A ce genre d'activité, il y passerait la journée, au mieux...

« Non, je préfère les ramasser et les trier tant qu'elles sont là, parce qu'une fois rassemblées, ce sera ter-mi-né ! »

Rien que d'y penser, Roman bouillait. Quel crétin il avait été de faire l'équilibriste comme ça dans les couloirs ! En plus la bibliothèque était vachement loin des sous-sols, il aurait mieux fait d'emprunter l'ascenseur de trouver une idée lumineuse qui lui aurait évité de jouer au jongleur du dimanche. Roman avait beau être un sorcier intelligent et plutôt doué dans ses études, son côté moldu prenait souvent le dessus et combien de fois il avait utilisé ses propres pattes plutôt que de faire appel à la magie. On ne change pas toute une vie de débrouillardise en une scolarité, ça c'est clair !

« Ouais, si tu le dis... Enfin, je préfère quand même nettement les révisions tranquilles bien posé à une table. »

Rien ne valait des révisions un bon soir d'hiver, dans la salle commune, près d'un bon feu de cheminée, avec une tasse de café tiède, dédicace à Roumanoff de chocolat Guanaja avec pointe de caramel chaud . Limite, dans ces moments là, les révisions étaient superflues superqui ?...

« Avec la poisse que j'ai aujourd'hui tu vas voir que Rusard va débarquer et se mettre à meugler. »

Annagovia savait que Roman – comme tout élève qui ne s'appelait pas Fawcett normalement constitué – détestait Rusard. On pouvait cependant noter le fait que depuis que Roman était préfet, le concierge était un peu remonté dans son estime. Un peu juste. Ça venait sûrement du fait que Roman avait moins de punitions qu'auparavant. A moins que ce ne soit dû à une soudaine hausse de confiance en soi qui faisait que Roman avait pris de l'assurance ou de la prétention comme on dit chez Serpentard face au concierge du château. Bref, dans tous les cas, il lui faisait beaucoup moins peur qu'avant.

Tout ceci n'empêchait pas que le concierge était parfaitement agaçant et que si on pouvait éviter de le croiser, c'était tip top « Décales-toi Annagovia pour voir. Encore un peu. Ah oui, c'est bien Rusard qui est derrière toi. »

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Annagovia avait esquissé une grimace lorsque Roman avait repoussé la possibilité d'utiliser un sortilège pour se tirer d'affaire. Ainsi c'était bien ce qu'elle redoutait : il allait falloir tout ramasser et trier à la main, ce qui prendrait, à n'en pas douter, un certain temps. Une sorte de chasse à l'oeuf de Pâques revisitée, en quelque sorte, songea-t-elle en oscillant entre l'amusement et l'exaspération. Franchement ! Elle avait bien d'autres chats à fouetter que d'aider son préfet à rassembler ses cours. Quelle idée, aussi, de chuter dans les escaliers ! On aurait pourtant pu croire qu'après toutes ces années passées à Poudlard et, surtout, toutes ces escapades nocturnes, le jeune garçon était capable de déambuler les yeux fermés à travers toute l'école. Dans son malheur, le Poufsouffle avait néanmoins de la chance, car Annagovia ne songeait désormais plus à fournir une excuse aussi bidon que "j'ai les mains prises, désolée", pour le laisser se dépatouiller tout seul avec ses feuilles éparpillées dans tous les sens. Tout au contraire, la rouquine déposa avec précaution ses livres de divination (si Madame Pince passait par là, elle allait faire une syncope : "Hiiiii ! Qui a osé mettre ces livres dans les escaliers ?", mais pas avant d'avoir enlevé cent cinquante points à Poufsouffle) sur la première marche et se baissa à son tour pour commencer à rassembler les parchemins dans les marges desquels on pouvait lire "Marie forever". L'enquête avançait.

- J'ai un bout de recette de goutte du mort vivant, là... Tu as l'autre ? Ah... Attends, c'est peut-être ça... Euh... Non, laisse tomber, ça, c'est de la métamorphose... Et là, j'ai des sortilèges... commentait-elle, au fur et à mesure qu'elle ramassait les feuillets, avant de demander d'un air perplexe, Tu as l'intention de réviser toutes ces matières cet après-midi ? Tu as arrêté de te nourrir, c'est ça ?

Elle coula alors un oeil inquisiteur en direction du Poufsouffle, un peu comme si elle cherchait à percer à jour tous ses mystères. N'avait-il pas un peu maigri, depuis Septembre ? A bien y réfléchir, c'était la première fois que la jeune fille prenait la peine d'observer réellement son camarade depuis plusieurs mois : peut-être le sentiment qu'elle avait de le trouver changé était-il lié à l'indifférence dont elle avait fait preuve à son égard jusqu'alors ? A moins que l'angoisse des examens ne lui mît trop le coeur au bord des lèvres pour qu'il pût manger correctement ? Ou alors il ne vivait plus que d'amour, d'eau fraîche, et d'aveuglement fatal ? Un peu inquiète à l'idée que la bonne santé de Roman pût être vacillante, Annagovia plissa les yeux et reprit, de but en blanc :

- C'est pour ça que tu es tombé ? Parce que tu n'as pas assez mangé ? Tu veux un chocogrenouille ? proposa-t-elle.

Sans attendre la réponse de son ami, la Poufsouffle plongea la main dans son sac de cours et en retira une friandise, certes un peu écrasée, mais qui promettait néanmoins d'être aussi bonne que si elle venait tout juste d'être achetée. Elle s'approcha alors de Roman d'un pas déterminé et lui remit d'autorité le chocolat dans les mains en commandant d'un ton bourru :

- Tiens, mange ! Mais n'oublie pas de me rendre le papier pour ma collection !

Et de lui jeter un regard farouche, signifiant clairement qu'il n'avait pas intérêt à discuter cet ordre s'il tenait à la vie, avant de retourner empiler des parchemins égarés... En prenant grand soin de tourner le dos à Roman pour lui dissimuler le rosissement intempestif de ses joues. Elle se sentait, en effet, un peu gênée, de lui parler et de partager ses chocogrenouilles avec lui comme si les derniers mois n'avaient pas existé, et elle ne savait trop que dire. "Et alors, les amours ?", par exemple, ne lui semblait pas une approche très subtile. D'un autre côté, il était difficile de ne pas songer aux confidences que le Poufsouffle lui avait faites le soir de la rentrée. En tous les cas, il lui paraissait impossible de rassembler les parchemins sans échanger un mot : il lui fallait impérativement empêcher au silence de s'installer. Ce fut certainement la raison pour laquelle elle renchérit, sans se retourner, et en haussant les épaules :

- Barf, si Rusard arrive, on lui fera croire que tu as eu un malaise pour qu'il nous fiche la paix... Et si Madame Pince voit les livres de l'école dans les escaliers, je compte sur toi pour sortir la même excuse. Je ne tiens pas à être de nouveau persona ingrata à la bibliothèque ! Déjà qu'elle a du mal à me supporter...

(776 mots)

Annagovia avait justement constaté que Roman n'était plus trop le même depuis plusieurs semaines. D'un, sa traditionnelle énergie était allée en décrescendo depuis le début des examens et bien que les amis de Roman mettaient ça sur le compte d'un sérieux frôlant la perfection, Roman lui mettait ça sur le compte de la fatigue et de l'épuisement intellectuel. Pour dire vrai, il lui arrivait de rater un de ses 8 repas les dîners, les déjeuners, et même les goûters reprends tes esprits lecteur, ça va finir par s'arranger ! tellement il avait autre chose à faire que de perdre de précieuses minutes à aller dans la grande salle pour casser la croute du pain qui de toute façon, était dégueulasse. Non, Ophy et lui avaient assez de jugeote pour piocher dans leurs réserves personnelles quand ils avaient faim, ou du moins quand ils pensaient à faire une pause.

« Ca va. Je suis tombé parce que j'ai pris la marche bancale, je te dis. Ça n'a rien à voir avec mon alimentation ! »

Roman faisait preuve d'une facilité déconcertante pour mentir : Il fallait dire que plus il passait du temps à s'expliquer à Annagovia, plus il en perdait pour réviser ses examens : Et le temps, c'était encore tout ce qui lui restait.

« Même s'il est vrai que je n'ai pas mangé depuis hier midi... »

Roman restait un garçon honnête, et mentir, ça ne faisait pas partie de ses attributions. Non, Roman ne mentait jamais, quitte à se prendre des poings dans la figure. Bon des fois il cachait la vérité, mais c'était totalement différent, c'était pour protéger des personnes lui, entre autre !

Roman attrapa volontiers la Chochogrenouille que lui tendait Annagovia : c'était une de ses friandises préférée et il pouvait en manger juste des dizaines sans craindre d'avoir mal au ventre. C'était si bon ! La carte était celle de Mopsus, numéro 73.

« Je l'ai déjà. Tiens. »

Comme tout sorcier intelligent qui se respecte, Roman faisait la collection des cartes de Chocogrenouilles. Question de bon sens, en fait.

« Au pire je feindrai d'être allongé sur le sol, et tu n'auras qu'à pleurer, ça renforcera le côté dramatique de la situation. En fait, tu n'auras qu'à dire qu'un Serpentard m'a attaq... Bref. »

Roman voulait laisser le sujet des Serpentard sous silence encore un moment. Pas que c'était tabou, mais presque. Le préfet n'avait pas tellement envie d'aborder le sujet de Marie avec Annagovia, c'était bien là la dernière de ses volontés. Surtout qu'ils semblaient plutôt en bons thermes là. Tout gâcher ne serait vraiment pas une bonne idée.

Roman et Annagovia finirent donc de ranger les affaires du préfet, et plusieurs longues plus tard, sans que personne ne soit passé dans le couloir, ils eurent terminés. Après avoir échangé quelques mots, Roman proposa à Annagovia de la revoir ce soit dans la salle commune, pour échanger une partie d'échec. Roman avait vu que faire de temps en temps des pauses permettait de mieux travailler ensuite. Il allait devoir essayer, tiens. En attendant, il quitta sa jeune amie pour rejoindre Ophy qui devait l'attendre depuis assez longtemps pour la faire râler, à présent, c'était certains.

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