Mea Culpa... [PV]

Opalyne sortait avec Corey depuis les vacances d’été. A la base ce n’était pas du tout calculé ! La rouquine aimait beaucoup trop de garçons en même temps pour savoir se focaliser sur un seul… mais elle avait eu l’occasion de discuter avec Corey, de bien s’entendre avec lui, même… Et du coup, elle avait finit par centrer son attention sur le garçon. Et elle lui avait demandé qu’il soit son petit copain. Et les choses s’étaient ainsi produites. Il avait accepté, ils étaient donc un couple… C’était incroyable !!! Lyne avait un petit ami ! Il était mignon, gentil, amusant et beau (pardon, ça va avec mignon ??). La rouquine était loin d’avoir une vie paisible… Entre les soucis de famille (qui étaient plutôt prenants et intenses) et son sentiment d’exclusion croissant, ce n’était pas franchement la joie. Personne n’était franchement méchant avec elle, oh non ! Mais elle se sentait décalée… pas spécialement dans le bain, quoi ; Et si à onze ans, elle s’en moquait comme de son premier biberon, à présent, alors que le regard des autres devenait plus primordial encore qu’il ne l’était jadis… Elle se sentait un peu dépassée. Heureusement, elle avait Corey ! C’était, en tout cas, ce qu’elle pensait…

Quand il lui avait donné rendez-vous, elle ne se doutait de rien du tout… Elle le rejoignit, toujous aussi pomponnée que d’ordinaire. Ses longs cheveux roux bien lisses et doux étaient détachés. Ses pommettes légèrement roses, ses lèvres parfaitement hydratées esquissèrent une moue interrogatrice devant la mine, triste, du garçon, alors que les prunelles couleur saphir de la jeune fille croisaient celles, tout aussi tristes, du garçon… Inquiète, elle lui prit tout naturellement la main :

« Corey ? Qu’est-ce qui ne va pas ? »

Lorsqu’il commença à parler, elle demeura étonnée, sans trop savoir que penser. Pas facile pour elle ? Elle n’avait pas la moindre idée de ce qu’il comptait lui annoncer… Et si elle l’avait su, qu’aurait-elle bien pu faire, alors ? Les impasses de la vie ne commençaient que maintenant. Plus le temps allait passer devant elle, la faisant grandir, plus elle allait souffrir… mais ça, elle ne le savait pas encore.

La phrase qui suivit, fit l’effet d’une douche glacée sur le cœur de la rouquine. Le souffle de la sorcière cessa d’un coup, tandis que son visage se stupéfiait mieux encore que s’il lui avait lancé le sortilège adéquat… Tétanisée, tremblante, elle lâcha finalement la main de Corey qu’elle avait tenu précédemment, le fixant d’un regard à la fois choqué et blessé.

« Pourquoi ? »

Elle ne comprenait vraiment pas… C’était si… Tellement… Et bien inattendu ! Elle avait fait tellement d’efforts pour être bien à ses yeux ! Elle faisait tellement d’efforts pour plaire… Pourquoi ça n’avait pas marché ??? Tremblante, elle se mordillait la lèvre, terriblement inquiète, avec un sentiment d’abandon bien trop lourd pour être soutenu par ses frêles épaules. Lyne se sentait abandonnée, trahie aussi… Elle faisait confiance à Corey ! C’était une confiance aveugle qu’elle avait eue vis-à-vis de l’Aigle. Parce qu’elle l’aimait… Et elle avait du mal à croire ce qui se produisait, là… A l’instant.

Corey déglutit. Pourquoi ? Qu'en savait-il ? Il n'avait pas de bonne réponse à donner à cette question, et pourtant, d'ordinaire, il les avait toujours, les bonnes réponses. Il était habitué à être parmi les premiers de la classe et c'était assez rare qu'il laisse un blanc dans un devoir. Mais là, il ne savait pas quoi dire pour qu'elle soit simplement moins triste, et il n'arrivait pas à se résoudre à passer pour un salaud alors qu'il ne l'était pas. Enfin pas plus que l'ado' moyen qui quitte sa copine du moins. Parce qu'à la tristesse, il y avait bien sûr une alternative qui était la haine, et dans ce cas, la réponse était facile, il fallait qu'il dise qu'il l'avait trompé, ou qu'il la quittait pour une fille plus jolie, mais ce n'était pas vrai. Il ne la quittait pas pour une autre, même si c'était vrai qu'il s'était bien rendu compte qu'il était plus à l'aise avec d'autres qu'elle. Et il ne pensait pas se remettre en couple tout de suite, il avait retenu la leçon, c'était déjà ça de gagné, car il allait réfléchir maintenant avant de sortir avec une fille.

« Je ne sais pas, j'aimerais pouvoir t'expliquer, mais je ne pense pas que cela t'aiderait à te sentir mieux car je n'ai aucune raison... que tu puisses accepter. » Ses raisons, il aurait pu les lui donner, mais ça ne l'aurait pas aider. Parce qu'il la quittait parce qu'entre eux, ça ne collait pas, donc parce qu'elle n'était pas ce qu'il attendait d'une petite copine... et du coup, à quoi ça servait de lui dire ? Elle était comme elle était, et lui aussi, ce n'était la faute de personne si l'alchimie ne fonctionnait pas. Enfin, si, c'était sa faute à lui car il aurait dû y penser avant de dire oui, mais après tout, il n'était pas si vieux qu'il puisse toujours réfléchir avant d'agir.

« Écoute... je sais que je te fais de la peine, et crois-moi, s'il y avait eu une autre solution, je l'aurais prise. Ça me fait mal de te faire du mal, parce que... je préfère tellement quand tu souris... tu es tellement adorable Lyne, un vrai petit rayon de soleil. » Il quitta son mur et frôla du bout de ses doigts le visage de celle qui était désormais son ex-petite amie. « Tu m'as ébloui avec ton sourire et être avec toi m'a permis de mûrir, mais c'est aussi parce que j'ai pris conscience de ce que j'attendais que ça ne peut plus fonctionner. Je suis différent de toi, je ne suis pas un soleil, je suis comme la lune, je ne brille que lorsqu'il fait complètement nuit, je suis... je suis le poète qui regarde la princesse, pas celui qui l'emmène sur le cheval blanc. »

Il avait l'impression d'avoir enfin trouvé une explication un peu plus convaincante et en même temps moins dure que « je ne t'aime pas » qui, pour le coup, était à la fois vraiment dur, et puis pas tout à fait vrai. Il y avait des choses qu'il aimait chez Opalyne, c'était juste que cela ne suffisait pas à faire en sorte qu'il soit amoureux d'elle.

« Avec moi, tu ne brilleras jamais Opalyne, et peut-être que tu t'en fiches, parce que pour le moment, ça n'a peut-être pas d'importance, mais moi je sais que ça ne marchera pas, parce que je le sens déjà, moi, que ta lumière noie ma nuit... » Le problème de la métaphore, c'était qu'il avait peur qu'il ne la comprenne pas, mais il lui parlait avec douceur, attendant qu'elle lui éclate à la figure en lui disant qu'il était idiot et qu'il n'avait aucune bonne raison. Sûrement que pour elle, ce ne serait pas une bonne raison, seulement elle finirait par guérir de cette blessure, ouverte, mais bénigne, et là, elle réaliserait qu'il avait eu des paroles sages. Et aussi que c'était la première fois qu'elle entendait la voix du vrai Corey et pas celui qui ne voyait que sa beauté. Son plus grand regret était qu'il aurait voulu lui aussi connaître la vraie Opalyne.

« Le chemin est long. Tu peux me haïr si ça t'aide, je ne suis pas très fier de moi sur ce coup de toute façon... parce que tu vois... à quoi ça sert d'être intelligent si on doit en arriver là, comme les autres. » Il s'était déjà excusé, il n'allait plus le faire, si elle n'avait pas vu la première fois qu'il était désolé, de toute façon, alors ça ne changerait rien qu'il le fasse encore. Comme il l'avait dit, il y avait des chances pour qu'elle le haïsse et qu'elle le descende auprès de ses copines, c'était typiquement ce que faisait Laurell donc... il se disait que c'était le sort qui l'attendait, il le prenait avec stoïcisme. Il jugeait que c'était mérité. Il ne s'était pas bien comporté en sortant avec Opalyne alors qu'il la connaissait à peine, il devait en payer le prix. Oh ! Il était triste aussi, et peut-être qu'il ne pensait pas vraiment le mériter. Après tout, il avait juste été honnête avec elle, mais c'est celui qui part qui doit assumer les responsabilités. Il aurait pu tout aussi bien attendre que Opalyne se rende compte qu'il était trop froid pour elle, pas dans le sens de méchant, mais dans le sens de peu expansif, il aurait pu attendre qu'elle se lasse de lui parce qu'il y avait d'autres garçons bien mieux que lui dans Poudlard. Il aurait pu, mais cela aurait été pire, car il aurait embrassé une fille qu'il n'aimait pas sincèrement. Pour les anciens baisers, ce n'était pas grave, il était de bonne foi, il réparait les dégâts, et d'ailleurs, il connaissait assez bien ses congénères pour savoir que pour un premier baiser, il valait bien un autre. Des mecs qui utilisaient les filles, il en connaissait. Il y était plus familier à Salem parce que finalement à Poudlard il connaissait surtout ceux de sa propre maison, mais le fait était qu'il savait bien qu'il y en avait. A Serpentard il en avait repéré, mais il y en avait partout. Ceux de la maison des vipères se voyaient plus parce qu'en plus d'être comme ça, ils étaient arrogants. Enfin, là, le méchant de l'histoire, ça restait lui, il ne pouvait que souhaiter que le prochain copain d'Opalyne serait mieux que lui (car il ne doutait pas une seconde qu'elle en retrouverait un facilement).

Le soleil s’était-il réellement levé ce matin là ? N’y avait-il pas eu un souci ? Un monde parallèle devenant soudainement plutôt perpendiculaire que parallèle et percutant celui dans lequel tout le monde vivait dans une pseudo harmonie ? Ce n’était pas possible que le temps d’une nuit, un tel b*rdel puisse s’installer sans que personne n’ait l’air d’en avoir conscience ! Ce n’était pas possible… Etait-ce une farce ? Vilaine, cruelle, mais juste une farce ???

Un tourbillon de sentiments s’entremêlait dangereusement dans le cœur de la jeune fille. C’était violent, inattendu, troublant et renversant. Elle souffrait comme jamais elle ne pensait pouvoir souffrir un jour. Dire qu’elle croyait (naïvement) que ses souffrances familiales étaient les pires qu’elle ait à endurer dans sa si terne et placide existence… Quelle idiote ! Elle s’en voulait tellement… Elle se sentait si bête ! Si… ridicule. Dire qu’elle avait ne serait-ce qu’oser croire qu’elle aussi avait le droit d’être aimée… Juste un peu… Mais rien n’y faisait, il y en avait pour les autres, mais jamais pour elle… Sa famille lui préférait Jade, son petit ami ne l’avait jamais aimé… Elle se sentait profondément trahie.

Elle l’écouta parler, mais elle n’entendait plus rien. Elle était perdue, enfermée dans un profond sentiment de solitude, d’abandon. Personne ne l’aimait. C’était une réalité qui la frappait en plein visage. Avec violence, et sournoiserie… Elle avait Corey… Avant. Alors ça lui donnait un peu d’espoir. Mais elle ne l’avait plus à présent, c’était si réel, si intense, que c’en était plus troublant encore… Les larmes coulaient sur ses joues devenues bien pâles à présent. Que répondre ? Elle n’avait jamais été douée avec les mots, encore moins avec les sentiments obscurs… Certes, elle parlait beaucoup, mais généralement, c’était pour ne rien dire… Et pour les sentiments, elle avait l’habitude d’afficher une joie constante… Mais dans ce cas-ci… A quoi bon ? Personne n’était suffisamment dupe pour tomber dans ce stupide panneau.

Finalement, avec acidité, elle répliqua :

« Je m’en fous de ton soleil et de ta lune Corey. De tes histoires de poète et de chevalier ! Je m’en fous, tu comprends, ça ? Tu n’aurais jamais dû me dire oui, si c’était pour me faire mal comme ça après. »

Les yeux replis de larmes, alors qu’il continuait à débiter sa panoplie de conneries, la rouquine finit par lâcher, avec une colère qu’elle ne prit même pas la peine de maquiller :

« Oh mais ferme là avec ta philosophie à la c*n. »

Elle recula et s’éloigna d’un pas rapide, bien que peu assuré. Où aller ? Où fuir cette cruelle réalité ? Elle se sentait terriblement mal… Le cœur battant puissamment et douloureusement dans sa poitrine lui rappelait violemment son échec et sa peine. Désillusionner, elle avait mal. Elle était perdue, et ne savait même pas qui voir… Personne ne pourrait la comprendre. Alors quitte à être incomprise, qui la comprendrait un peu mieux, entre Ruby et Joy ? Tanguant sur ses pieds malhabiles, la rouquine opta pour sa meilleure amie… Avec sa sœur, c’était plus compliqué… Oh, elle avait confiance en Ruby, mais depuis que leur vie avait changé, cette dernière avait l’air d’être dans un plein rêve, tandis que pour Lyne, c’était tout l’inverse, plus les jours défilaient, plus elle s’engouffrait dans un violent cauchemar… Et elle commençait à douter du fait qu’elle puisse finir par en sortir un jour ou l’autre…