Dahlia avait sa tablette dans son sac. Elle retrouva aisément son fil de discussion avec sa sœur - il faut dire qu'elle ne parlait pas à grand-monde d'autre de manière régulière, si ce n'est peut-être Lucas ou Vanellope, et encore. Ce n'était pas tant qu'elle avait besoin d'être réconfortée, elle ne ressentait pas grand-chose à vrai dire. Ce qui était bien le signe qu'il s'agissait de la bonne décision, même si cette absence de sentiments vifs n'était pas un véritable indicateur pour elle : son impassibilité extérieure était généralement le reflet de ce qu'elle ressentait à l'intérieur. C'est-à-dire, des émotions présentes, mais lointaines, comme si elles étaient amoindries, séparées d'elle par un rideau opaque. Aussi loin qu'elle se souvienne, ça avait toujours été comme ça. Au sein de sa fratrie, Léo était celui qui semblait le plus lui ressembler en cela, mais elle savait aussi que cette attitude chez son aîné avait quelque chose de différent de son propre ressenti. Léo semblait parfois porter le poids du monde de ses épaules. Elle n'était pas confrontée à cette problématique-là. Elle éprouvait juste peu. Elle ne contactait donc pas Peony pour pleurer sur son épaule - ce n'était pas tout à fait le genre de la maison - mais parce qu'elle savait que sa sœur voudrait être au courant et que quel que soit le contexte, être auprès d'elle avait toujours été bénéfique. Elle n'était jamais plus à l'aise que lorsqu'elle se trouvait en compagnie de sa jumelle.
"Tu peux me rejoindre ? Je suis au stade." envoya-t-elle donc de manière succincte, jugeant que comme ce type de requête était rare de sa part, sa jumelle déduirait qu'elle avait quelque chose à lui dire. Il lui arrivait d'être plus expansive à l'écrit qu'elle ne l'était à l'oral, mais ça n'était pas l'un de ces jours-là. Elle avait laissé ses pas la mener inconsciemment jusqu'au terrain de Quidditch, un lieu où elle se rendait peu. Elle avait participé aux cours d'initiation au vol en première année (et ne s'était pas trop mal débrouillée), mais elle n'avait jamais cherché à rejoindre l'équipe de Serdaigle. Les sports d'équipe, ça n'était pas trop sa tasse de thé porter à bout de bras tous les bras-cassés, non merci ! Elle supposait qu'elle aurait pu tenter sa chance en tant qu'attrapeuse, mais en fin de compte, ça ne l'avait jamais attirée plus que ça. D'autre part, même si elle suivait les résultats, elle n'assistait jamais aux matchs - trop de surexcitation et de mouvements de foule dans des espaces restreints. Non merci. Mais aujourd'hui, la voie était libre. Le mois de février en Écosse n'était pas vraiment favorable à ce que les élèves s'attardent dehors. Cela dit, le froid ne dérangeait pas trop Dahlia. Au moins le stade était-il calme, et elle était plutôt posée dans les gradins. De rares élèves traînaient plus loin, mais ils ne lui prêtèrent pas particulièrement attention.
Dans l'attente de Peony, Dahlia chercha distraitement un jeu sur la tablette. Celui avec les bonbons l'avait bien occupée dans les débuts, et elle cliqua machinalement sur son icône. Fronçant le nez, elle désactiva le son, et fit glisser une première forme. Elle leva la tête après plusieurs minutes, lorsqu'elle entendit des bruits de pas s'approcher. Elle sourit à sa jumelle, délaissant la tablette à côté d'elle. « Je ne t'ai pas dérangée ? » demanda-t-elle d'une voix neutre, mais assez curieuse : elle supposait que Peony avait pu se trouver avec Alfie, ce qui semblait devenir une habitude dernièrement. Le vrai miracle était que Léo ne soit toujours pas au courant. Quant à Dahlia, elle était plutôt pour, tant que sa jumelle était heureuse. Elle ne lui souhaitait vraiment rien d'autre que ça, surtout après toutes les tourmentes du premier semestre. Par contre, si Alfie s'avisait de lui faire de la peine, il ne serait pas au bout de ses surprises. Léo paraissait plus dangereux, mais Dahlia n'était jamais en reste.
« Noé et moi on n'est plus... » Elle fit un geste vague de la main. « Enfin, tu vois. Ensemble. » articula-t-elle avec l'éloquence d'un poulpe desséché, réticente à utiliser des termes trop officiels même dans la rupture. Avant que sa sœur ne puisse s'insurger, elle reprit : « C'était d'un commun accord, et c'est vraiment la seule issue qui ait du sens. » Elle ne doutait pas que Peony s'accorderait avec elle sur ce point, elle n'avait pas été tout à fait discrète sur ses sentiments au sujet de Noé, et surtout de Noé en relation avec Dahlia. « La Saint-Valentin, c'était juste pas possible. Ils sont fous avec ça en plus dans cette école. » Comme pour étayer ses paroles, le groupe de filles assises quelques mètres plus loin commença à s'agiter : l'une d'elles poussa un glapissement qui fit froncer les sourcils de Dahlia. « Bref, c'était pour te prévenir. » indiqua-t-elle en haussant doucement les épaules. Elle se disait qu'en parler avec Peony l'aiderait à mieux savoir ce qu'elle devait ressentir, car pour l'instant elle se sentait surtout... Vide.
Ma sœur, nous avons des cœurs siamois et chaque coup que tu reçois ricoche et me frappe deux fois. Je tiens dans ma main ton poing serré et rien ne peut nous résister puisque nous l'avons décidé. C'est comme si une chaîne avait relié invisiblement nos poignets le jour où nous sommes nées. Alors si tu coules, je coule aussi et je tiens bien trop à la vie pour que ce puisse être permis. Personne n'a jamais dit que ce serait facile mais je serai là. Personne ne croit en toi comme j'y crois. Je serai là même s'il ne devait rester personne.
Un peu plus d’une semaine et demie après avoir passé l’après-midi avec Alfie alors que le reste de l’école était en sortie à Pré-au-Lard, Peony était plus heureuse qu’elle ne l’avait été depuis pratiquement un an. Non, elle ne sortait pas avec le septième année, loin de là même, mais les deux vipères s’étaient mises d’accord et se voyaient, en tête-à-tête et en toute discrétion, surtout pour éviter de se faire démasquer par l’aîné de la rouquine qui n’allait clairement pas apprécier de savoir que sa précieuse petite sœur batifolait avec l’un de ses meilleurs amis. Peony avait été très claire avec Alfie, la première fois passée. S’il voulait recommencer, elle n’y voyait pas d’inconvénient mais il était hors de question qu’il aille batifoler ailleurs. Elle avait trop d’amour propre pour laisser le blond à d’autres filles alors qu’ils semblaient relativement bien s’entendre dans ce domaine. Alfie avait, aussi étrange cela soit-il, accepté la condition de la rousse, et ils étaient donc ensemble, sur un point purement physique. La rousse n’en n’attendait rien de bien sérieux de toute manière et savait bien qu’elle ne souhaitait pas que cette situation s’éternise trop longtemps, c’était bien trop risqué. Mais pour le moment, son coeur et son esprit restaient muets, laissant son corps profiter de l’instant, et de l’anglais.
Elle quittait justement le blond, remettant sa cravate en ordre et attachant ses longs cheveux en une queue de cheval haute quand elle entendit sa tablette lui signaler qu’elle avait un nouveau message. Elle haussa un sourcil, puis, voyant le message de sa sœur, déposa un dernier baiser sur les lèvres de son amant, avant de filer vers le terrain de Quidditch. « Tout va bien? T’y vas jamais, tu veux entrer dans l’équipe de Serdaigle? » répondit-elle rapidement à sa sœur, remarquant qu’elle était sortie du château sans même repasser par son dortoir et qu’elle avait donc seulement son uniforme sur le dos. Heureusement, elle avait son pull et des collants noirs épais, mais elle espérait que Dahlia lui prêterait un bout de son écharpe, sinon, elle allait pourrir d’hypothermie, c’était clair et net. Elle se demandait bien ce que sa soeur pouvait bien avoir à lui dire de si pressant. Surtout sur le terrain de Quidditch, alors que Dahlia n’y allait jamais. Les foules n’étant pas son truc, elle n’avait jamais vu un match et Peony, en bonne jumelle, avait toujours suivit sa soeur sans sourciller. De toute manière, elle avait Jensen pour lui raconter les matchs de long en large et en travers, donc ça ne servait clairement à rien qu’elle aille s’asseoir pendant elle ne savait combien d’heures à regarder ses amis voler après des balles. Elle était mieux au chaud, avec sa soeur.
Quand elle arriva sur le terrain de Quidditch, où elle ne mettait donc généralement jamais les pieds, ses talons s’enfoncèrent légèrement dans la terre givrée. Balayant les gradins des yeux, elle repéra rapidement sa jumelle et se mit en marche dans sa direction, grimpant quatre à quatre les escaliers en bois. Une fois à la hauteur de sa sœur, la vipère m esquissa un sourire et secoua la tête de droite à gauche, pour répondre à la question de la bleue et bronze. « Si, tu t’arrangeras avec Alfie, il était chaud bouillant le pauvre petit. Tu ne me dérangeras jamais, Lila, tu devrais le savoir depuis le temps. » Elle lui adressa un sourire tendre puis déposa un baiser sur la joue de sa sœur, évitant bien de lui tartiner la joue de rouge. Heureusement que son rouge à lèvres magique était sans transfert, Alfie aurait été découvert et tué bien trop tôt sinon. « T’en fais une tête, quelqu’un est mort ? » Peony n’était normalement pas si brutale, mais la tête de sa sœur ne lui disait rien de bon. Est-ce que Leo avait appris que Peony voyait Alfie? Elle en doutait, même si elle ne pouvait pas être complètement sereine tant que sa jumelle ne lui disait pas exactement ce qu’il se passait. Après tout, si Leopold avait vraiment été au courant, Alfie, tout comme Peony, seraient sûrement en train de vivre le pire moment de leur vie, et d’être enterrés six pieds sous terre...
« Oh... » fut tout ce que Peony pu dire quand sa jumelle cracha finalement le morceau. Sa bouche s’arrondissant de surprise, elle tentait de chercher le regard bleu de sa jumelle, et lui serra la main par réflexe. Elle savait qu’elle-même était plutôt contente de cette rupture, elle avait clairement fait comprendre que non, elle ne portait pas le Montgomery dans son coeur, mais si cela voulait dire que sa sœur allait tirer la tronche tout le reste de l’année, c’était hors de question ! « Comment tu te sens ? Tu n’as pas l’air ravie, mais pas déprimée non plus, c’est... Compliqué là, même pour moi. » Dahlia n’était clairement pas la reine des sentiments affichés, Peony le savait, mais la rouquine arrivait généralement à lire en sa sœur comme dans un livre ouvert. Sauf que là, Peony était un peu perdue, et si ça lui crevait le coeur de l’avouer, elle ne savait pas ce que ressentait la brune à ses côtés. « Lila, est-ce que tu l’aimes vraiment ? Parce que vraiment, si c’est ça, je saurais m’en accoutumer avec le temps hein. Je veux pas... » Elle poussa un soupir, légèrement déstabilisée par tout ce que sa jumelle venait de lui dire. « Je ne veux pas que ça soit à cause de moi. Je sais que je n’ai pas été cool avec lui, mais... Enfin... Je pense toujours que Quino est fait pour toi mais... » Mais Quino sortait avec Kate, depuis quelques semaines maintenant. La nouvelle avait surpris la rousse et elle avait du se retenir de toutes ses forces pour ne pas aller voir le greco-argentin et lui dire ce qu’elle pensait. Sa sœur avec Noé, les mois passant, elle pouvait comprendre qu’il ai eu envie de passer à autre chose, elle n’arrivait même pas à lui en vouloir. Elle serra un peu plus la main de sa sœur dans la sienne, se serrant un peu plus contre elle aussi, leurs cuisses de touchant désormais.
« Oui voilà, pour pouvoir donner des coups de batte accidentels à Weasley. » répondit Dahlia au message de sa sœur, secouant la tête sans autre témoin que le stade vide - le groupe de filles à proximité étant concentré sur ses propres histoires. Elle devait reconnaître que la tablette apportait un vrai plus à sa vie, quand bien même elle passait déjà la grande majorité de son temps avec Peony sinon elle est très sociable. Elles ne partageaient pas la même salle commune, or, elle avait parfois de savantes observations sarcastiques dont elle ne voulait pas priver sa jumelle t'es contente Peo' ? Au moins avec la messagerie instantanée, elles pouvaient vraiment échanger tout le tempsaprès cette page de pub', si Vanellope pouvait lui offrir les cent Noises promises...
Elle entendit Peony avant de la voir, et sourit en l'apercevant. Elle haussa les épaules à la promesse de sa jumelle - elle n'en avait jamais vraiment douté -, lui adressant un regard entendu. « T'étais avec Alfie ? » interrogea-t-elle en arquant un sourcil. Elle pointa du doigt sa cravate légèrement lâche avec amusement. « Mais non, personne n'est mort. Ça ça n'arrivera que si Léo apprend certains faits. » dit-elle en secouant la tête, et écartant ce souci-là de son esprit. Si Léo l'apprenait, il allait baliser, et il faudrait essayer de limiter la casse, mais a priori, elles avaient encore le temps. Leur frère avait beau être un peu étouffant, il n'était pas non plus omniscient aux dernières nouvelles.
Peu adepte du suspense, Dahlia annonça sa nouvelle à Peony, fixant sa jumelle dans les yeux tandis qu'elle se retenait admirablement de faire la moindre danse de la victoire on sait que t'en meurs d'envie. Elle fronça les sourcils. « Je ne ressens rien du tout, justement. C'est bien ça le problème... Je devrais ressentir quelque chose, non ? » Elle se sentait vide - détachée. Elle se connaissait assez pour savoir qu'elle ne se serait jamais effondrée pour une séparation, mais elle avait quand même pensé qu'elle éprouverait quelque chose - quoi que ce soit - de tangible. Est-ce que ça la rendait plus anormale qu'elle ne l'avait anticipé ? A nouveau, elle secoua doucement la tête, ne s'étant pas attendue à cette réaction de sa sœur - à de la culpabilité. Un sourire ironique apparu à ses lèvres. « Arrête, tu connais la réponse. C'est pas... » Elle réfléchit à la meilleure manière de formuler sa pensée. « mon genre. Les sentiments et tout ça. » compléta-t-elle avec un vague geste de la main. Elle s'était connue plus éloquente, mais elle était très loin de sa zone de confort. « J'veux dire... J'aime bien Noé. Vraiment. Mais pas... comme ça. » Elle doutait franchement d'en être capable, ce qui n'était pas un mal en soi. Parce qu'en vérité, qu'avaient apporté tous ces fameux sentiments à ses proches ? Peony et tout le drame entourant Léo, Jensen et ses multiples crises existentielles, Lucas et son amour à sens unique... Non vraiment, ça n'était pas un sort enviable. Et comme elle ne s'y voyait vraiment pas, elle se disait qu'elle était plutôt sauve à ce niveau-là.
« Ce n'est pas à cause de toi Peo'. Et Noé comprenait... globalement. » nuança-t-elle avec un sourire. Il n'avait après tout jamais critiqué ouvertement le comportement de sa jumelle à son égard. Et dans le fond, l'une des premières choses qui les avaient rapprochés était leurs liens si particuliers avec leurs jumelles. Si une personne à Poudlard était bien placée pour la comprendre sur ce point, c'était bien Noé. Et le Serpentard savait pertinemment que critiquer Peony devant elle - quand bien même sa jumelle se montrait a minima distante, sinon carrément hostile - revenait à se faire d'elle une ennemie. Que Peony désapprouve de Noé n'avait jamais été agréable, mais comme l'alternative que lui proposait sa jumelle se trouvait être un malotru qui l'ignorait depuis cinq mois, on ne pouvait pas vraiment dire que sa jumelle était en position de force sur ce sujet. « Même si t'aurais pu te montrer plus sympa avec lui. Et lâche l'affaire avec Quino. Déjà, fait pour moi ? Vraiment ? » Elle haussa les sourcils, ses paroles dégoulinant de scepticisme. « Il m'ignore depuis cinq mois, et la dernière fois que j'ai essayé de lui parler, il a fini par se barrer en courant, donc tu m'excuseras si j'arrête de faire des efforts. S'il m'en veut pour un truc et qu'il n'est pas capable de me le dire, c'est son problème. Moi j'en ai marre. » dit-elle dans une longue tirade qui pouvait laisser penser qu'elle ne s'en était pas tant lavé les mains que ça, mais en même temps, elle faisait des discours analogues sur Weasley, et ça ne voulait nullement dire que la Gryffondor était sa meilleure amie. Juste qu'elle était particulièrement agaçante, et génératrice de récriminations. Rien de mieux pour se défouler finalement.
Le message de sa soeur la fit pouffer de rire sur le chemin, et Peony ne put s’empêcher de répondre « Cool, je savais que Serpentard pouvait compter sur toi, t’es la meilleure ! », même si l’équipe de Gryffondor avait déjà été battue par l’équipe menée par Jensen. Cette victoire avait d’ailleurs fait grand bruit dans la salle commune des vipères, allant jusqu’à déshiniber Jensen, chose que Peony n’aurait jamais cru possible. Et pourtant, force était de constater que Jensen avait été très démonstratif ce soir là, et avait clairement fait comprendre à toute leur maison que Viska était sa petite amie et qu’ils ne jouaient pas aux échecs version sorcier lorsqu’ils passaient des moments en tête à tête. Rien que le fait de se retrouver avait fait grimper la température de la Salle Commune de plusieurs degrés. Il était donc facile d’imaginer ce qu’il se passait entre eux dans l’intimité.
Une fois sa soeur retrouvée, Peony fut presque vexée par le simple haussement d’épaules de sa soeur. Pensait-elle qu’elle était capable de l’abandonner pour un garçon ? D’ailleurs, Dahlia pointa sa cravate lâche, mentionnant le blond de septième année avec qui elle fricotait depuis à peu près un mois. « Je ne vois absolument pas de quoi tu parles. » laissa-t-elle entendre, un sourire taquin aux lèvres, adressant un petit clin d’oeil à sa soeur. Elle espérait sincèrement que toute cette histoire ne viendrait jamais aux oreilles de Leopold, sinon, les deux serpentard pouvaient clairement dire adieu à la vie. « Tu n’es pas censée être de mon côté ? Tu ne voudrais pas que ta jumelle d’amour meurt dans d’atroces souffrances, pas vrai ? » Et puis franchement, Leopold se tapait la moitié du château, elle pouvait bien, elle, se taper un seul garçon, non ?!
Lorsque la bombe fut lâchée, Peony ne su pas trop comment réagir ni quoi répondre. « Et bien… » Elle ne savait pas trop comment dire les choses pour que sa soeur ne le prenne pas mal. Dahlia avait toujours été la plus détachée sentimentalement des jumelles, la moins sociale, la plus renfermée. Peony à côté, allait voir tout le monde, même si elle avait beaucoup de mal à partager ceux qu’elle considérait dans son cercle intime. Voir des gens tourner autour de sa fratrie, de Jensen, Viska ou Karen était d’ailleurs très compliqué pour elle. « Peut-être juste que ce n’était pas le bon. Tu n’es pas obligée d’être amoureuse de tous les garçons avec qui tu sors, tu sais. Ca arrive de ne pas avoir plus de sentiments que ça. » Elle, avait été amoureuse de leur frère aîné, ce qui n’avait absolument rien de sain, elle l’admettait totalement, c’était d’ailleurs pour cela qu’elle s’évertuait à l’oublier, pour ne pas retomber dans de vieux travers. Et si elle aimait énormément Alfie et les moments qu’ils passaient ensemble, elle se rendait bien compte maintenant qu’elle n’était pas amoureuse du blond. Elle l’aimait beaucoup, vraiment beaucoup, mais si toute cette histoire s’arrêtait demain, elle serait, certes, un peu triste, mais pas dévastée.
Elle voulait bien admettre qu’elle n’avait pas été des plus chaleureuses avec Noé, mais vraiment, elle ne comprenait pas pourquoi sa soeur s’était mise dans cette histoire. Ça n’était pas logique, alors que son ami jaune et noir avait été prêt pour se déclarer. L’herbe coupée sous le pied, la rousse restait frustrée. Et franchement, elle n’avait pas été désagréable lors du bal, Dahlia pouvait au moins admettre cela, non ? « Oui, je le pense vraiment. Je pense qu’il te faut quelqu’un radicalement différent et… » Et elle ne pouvait clairement pas dire à sa jumelle que le jeune homme s’était confié à elle l’été dernier, Quino ne lui pardonnerait jamais une telle trahison, elle le savait. Preuve en était, il avait fait la tête à sa propre soeur pendant presque six mois, juste pour une idiote histoire de rumeur, qui était complètement fausse. « Non, vraiment, son comportement n’est pas exemplaire. Mais je sais pas moi, il a peut-être peur ? » Après tout, sa soeur pouvait parfois avoir l’air d’un dragon, non ? Je t’aime Dada, ne l’oublie pas.« Bref, pour en revenir à votre rupture… T’es sûre que c’est une absence de sentiments ? Pas juste la peur de la Saint Valentin ? Parce que même Jensen va faire cette fête, tu sais… » Peony elle, n’y comptait clairement pas. Elle passerait éventuellement un moment en tête à tête avec Alfie, mais encore, elle n’était sûre de rien. Elle préférait éviter de faire des plans sur la comète pour ne pas être déçue après. Elle savait qu’elle s’attachait malgré tout au blond, et n’avait pas envie que tout cela ne devienne trop sérieux de son côté, car elle savait bien que ça ne le serait jamais pour Alfie. Elle s’estimait déjà heureuse qu’il ai accepté de ne pas aller voir ailleurs tant qu’ils coucheraient ensemble, c’était un grand pas pour le blond.
Dahlia leva les yeux au ciel avec amusement en lisant la réponse de sa sœur (qui visiblement, textotait en marchant ? Une pratique très dangereuse !) Sa dévotion au Quidditch était quand même très limitée, et concernait essentiellement Serdaigle, par pur chauvinisme. Elle n'irait pas faire du sabotage juste pour les beaux yeux de Jensen, désolée (mais pas vraiment). Parfois, elle se disait en revanche qu'elle prenait un peu trop de plaisir à savoir Peony et Victoire en froid. La Gryffondor avait quand même été son amie pendant les dernières années, et même pour l'impassible Dahlia ça voulait dire quelque chose. C'était bien pour ça qu'elle avait été aussi agacée par le comportement de Quino oui que pour ça. Mais elle n'était pas non plus maso au point d'essayer activement de réconcilier Weasley et sa jumelle. Peut-être que ce jour finirait par arriver, et ça elle pouvait l'accepter, mais ça ne serait certainement pas de son fait !
Ce n'était pas tant que Dahlia pensait Peony capable de l'abandonner pour un garçon, c'était surtout qu'elle prenait sa présence dans sa vie comme une évidence - un fait acquis. Elle tenait à sa jumelle plus que tout, mais si elle l'abandonnait réellement pour un garçon, sans doute aurait-elle réagi tout à fait différemment. La dénégation de sa jumelle concernant Alfie avait tout d'un aveu, et le sourire narquois de Dahlia s'élargit. « Je croyais qu'on ne se mentait jamais ? » répondit-elle, visiblement amusée. « Bien sûr que je suis toujours de ton côté. Et je ne compte pas te laisser mourir dans d'atroces souffrances. On gèrera Léo quand le moment viendra. » promit-elle avec assurance, s'incluant dans l'équation comme si c'était la chose la plus naturelle du monde. Alors non, elle ne ferait pas le sacrifice de sa personne pour Alfie Hartley tu peux crever la bouche ouverte Alfifie déso, par contre, dès que Peony était concernée, elle n'hésitait même pas une fraction de seconde. Malgré ses tendances misanthropes, elle était entièrement dévouée à sa jumelle.
Elle grimaça, vaguement horrifiée, en entendant le mot "amoureuse". Qui avait parlé d'être amoureuse ? « Tu prêches une convaincue Peo'. Le bon ? Qu'est-ce que ça veut dire en vrai ? Tu t'emballes là ! » lui reprocha-t-elle dans un grand élan de protestation. Elle voyait ce qu'elle voulait dire, évidemment, a priori leurs parents tombaient dans cette catégorie du couple bien assorti, complémentaire et aimant, mais pour une raison qu'elle n'avait jamais su s'expliquer - et qui lui semblait juste inhérente à sa personne - elle était très loin de tout ça. Sa famille était normale, mais chez elle, il devait manquer un petit câble ou un bouton, un truc qui l'aurait rendue aussi sensible que Peony, ou que Ash Léo est hors catégorie. « Je pense que je ne ressentirai jamais un truc comme ça. Je ne suis juste pas... câblée comme ça, comme diraient les moldus. Et c'est pas grave en soi, tant que tu ne trouves pas ça trop bizarre ? » Elle adressa un regard incertain à sa jumelle. Elle était la seule personne qu'elle savait aimer de manière inconditionnelle, ce qui signifiait bien qu'elle n'était pas un robot dénué d'émotions malgré ce que dit la rumeur populaire. Si Peony l'acceptait telle qu'elle était - vaguement dénuée d'émotions et tout le tralala - alors le reste ne lui importait absolument pas.
Quant à Quino, c'était un sujet qui était source d'irritation pour Dahlia dernièrement et paf elle a débloqué une deuxième émotion. Elle ne comprendrait jamais l'insistance de sa jumelle à les caser, d'autant plus qu'elle venait de lui dire que les relations amoureuses n'étaient pas faites pour elle. Ce qui était loin d'être dramatique : elle avait d'autres objectifs dans la vie. « Et ? » répéta-t-elle en arquant un sourcil, confuse devant les paroles de sa sœur. Certes, Noé et elle étaient plutôt proches de caractère, mais elle doutait que ça soit réellement ça qui ait pêché. C'était peut-être juste elle, non ?
Elle lâcha un rire incrédule en entendant Peony désigner le comportement de Quino comme "tout sauf exemplaire" avant d'en rajouter une couche en disant qu'il avait peur : « Peur de quoi ? De moi ? » Alors là, elle tombait des nues. Mais elle restait très sceptique. Elle n'avait jamais vu Quino avoir peur de quoi que ce soit, pas même des profs qui l'enguirlandaient à longueur de journée, donc elle voyait difficilement comment il pourrait avoir peur d'elle. Elle était parfois sévère, mais elle n'était pas exactement Cerbère. « Je ne sais pas pourquoi tu lui cherches des excuses. Tu devrais être de mon côté, je n'ai vraiment rien fait pour une fois, t'abuses ! » lui reprocha-t-elle en se sentant tout à fait dans son bon droit. Alors d'accord, parfois elle se montrait un poil... désobligeante envers certaines personnes, et sa jumelle était alors justifiée dans ses - légères - réprimandes, mais là ? Elle était totalement innocente dans cette affaire.
L'évocation de la Saint-Valentin ramena une grimace sur son visage pâle. « Ne me parle pas de cette fête, c'est une vraie calamité. Et oui, je suis sûre que c'est l'absence de sentiments, mais ça a aussi été précipité par ça. Entendre tout le monde - même Jensen - parler de ce qu'ils allaient fairedes choses pas très catholiques d'ailleurs et de ce qu'ils allaient s'offrir comme si c'était la chose la plus merveilleuse du monde. Alors que moi, j'avais juste envie d'ignorer que ça existait, tu vois ? » expliqua-t-elle en fronçant les sourcils. Toute cette vague de mièvrerie ayant touché Poudlard la rendait encore plus irritable que d'habitude. Est-ce qu'elle avait demandé à ce qu'on lui jette des confettis en pleine face, elle ? C'était bien ce qu'elle pensait.
La remarque de sa jumelle la fit rire, et elle répondît aussitôt, tout en remettant sa cravate correctement en place, cherchant ensuite l’approbation de sa sœur. « Les gradins ont des oreilles, ma chère. » Et surtout, elle se méfiait des filles un peu plus loin, même si elles étaient complètement absorbées par leur discussion sur la Saint Valentin, mot que Peony avait capté entre deux « rose », « chocolat » et « âme sœur ». La rousse était plutôt romantique dans l’âme, elle devait bien l’avouer mais disons que les dernières semaines avaient eu raison de son romantisme, et elle laissait son corps lui dicter ce qu’elle désirait. Force était de constater que cela plaisait particulièrement à l’anglais de septième année. En même temps, ils pouvaient enfin laisser libre cours à leurs envies et leurs désirs, sans trop se soucier de Leopold. Enfin, il restait toujours présent et menaçant, mais quand même, ils réussissaient pour le moment à ne lui en faire voir que du feu. « Tu es amour, je t’aime de tout mon coeur. » Elle déposa un nouveau baiser sur la joue de sa sœur, un sourire aux lèvres.
La vert et argent leva les yeux au ciel quand l’aiglonne grimaça. Vraiment, était-ce si atroce que cela de ressentir quelque chose ? Oui, Peony, oui. Tu en as limite fait une dépression on te rappelle.« Mais non je ne m’emballe pas. Il y aura forcément un garçon qui réveillera quelque chose en toi. Tu n’as pas un coeur de pierre. » Malgré tout ce qu’elle pouvait bien penser, Peony était sûre et certaine que sa sœur était capable de ressentir quelque chose pour quelqu’un. Force était de constater que ce quelqu’un n’était absolument pas Noé Montgomery. Alors qu’elle lui demandait si elle trouvait cela bizarre, la rousse fronça les sourcils, vexée que sa sœur imagine une chose pareille. « Tant que tu m’aimes moi tu sais... » La rouquine esquissa un sourire, tout en haussant les épaules, réellement sincère pour le coup. Sa jalousie possessive avait toujours été bien plus forte concernant sa famille. Si elle redoutait plus que tout que sa sœur ne l’abandonne pour un garçon, tant qu’elle savait qu’elle avait un bout de son coeur, elle serait plus ou moins sereine. Peut-être était également à cause de cela qu’elle avait eu autant de mal à accepter Noé aux côtés de Dahlia.
Levant les mains, l’air innocente, Peony fixa sa sœur, qui venait de rire à ses mots, lui demandant si Quino avait peur d’elle. « Je ne sais pas moi. Ce ne sont que des suppositions ! Il a peut-être peur de tout ça. » Elle agita vaguement la main, pour désigner la situation globale. Après tout, il ne parlait plus à sa jumelle depuis plus de cinq mois, il devait donc bien y avoir quelque chose qui clochait, en dehors de son couple -ou ex-couple- avec Noé Montgomery. « Je suis de ton côté ! Tu le sais bien ! Mais j’ai aussi envie que tu sois heureuse. Et malgré tout ce que tu tenteras de me dire, avec Noé, ce n’était pas ça. » Est-ce qu’elle avait eu des papillons dans le ventre ? L’envie irrépressible d’être avec le jeune homme plus qu’avec n’importe qui d’autre ? Est-ce qu’elle souriait niaisement à la vue du blond ? Pas du tout vraiment. Et Peony l’avait bien vu. Mais il devait bien y avoir quelqu’un, quelque part, qui réveilleraient un semblant de ces sentiments chez sa sœur ! « Tu ne vas pas rester seule toute ta vie ! Je veux être marraine, je te rappelle. » Et bien quoi? Elle comptait bien l’être et comptait d’autant plus sur sa sœur pour lui offrir un ou une filleul.e ! Elle n’était toujours pas sure de pouvoir accepter les poules de son frère, même si elle avait tourné la page -plus ou moins en tout cas.
Pour ce qui était de la Saint Valentin, Peony ne savait pas trop quoi en penser. Elle n’avait jamais vraiment accordé de l’importance à cette dernière, mais en même temps, elle n’avait pas eu l’occasion de la passer en compagnie d’un garçon. « Bon, je t’avoue que Jensen et Viska vont plus tenter de battre leur propre record qu’autre chose... Mais ce n’est une fête si horrible. On pourrait faire un truc toutes les deux ? Avec des montagnes de chocolat ? Même si on n’a pas vraiment besoin d’une excuse pour manger du chocolat... » Elle s’approcha encore un peu de sa sœur, passant un bras autour de ses épaules, la serrant contre elle. « Je t’aime moi, n’en doute jamais Lila. » et déposa un nouveau baiser sur sa joue.
Dahlia était parfaitement sincère quand elle garantissait sa loyauté à Peony. Elle n'était peut-être pas capable de grands discours ou de déclarations émues, mais ce qu'elle ne pouvait pas faire par la parole, elle compensait par les actes. S'en prendre à sa jumelle revenait à se faire d'elle une ennemie à vie, quand bien même cet état de fait était légèrement amoindri en ce qui concernait leur frère aîné. Certes, il faisait souffrir Peony, mais elle ne pouvait pas le haïr ou s'en prendre trop violemment à lui - il restait leur frère. Par contre, elle pouvait s'allier à sa jumelle face à lui, voire tout mettre en œuvre pour qu'une telle confrontation ne se produise pas. Ces histoires stupides de Saint-Valentin ne la détourneraient pas de la nécessité de protéger Peony coûte que coûte. « Moi aussi. » souffla-t-elle doucement, et même si ça n'était pas dans ses habitudes. Elle savait sa sœur nettement plus sensible qu'elle à tout ça, et elle ne voulait pas la peiner alors que c'était vrai - même si elle ne le disait pas.
Face aux déclarations convaincues de sa jumelle, cependant, elle se vit hausser les épaules, circonspecte. « J'en doute, mais c'est pas grave. » souligna-t-elle, imperturbable. Avoir la réputation de posséder un cœur de pierre ne la dérangeait pas outre mesure. Ça n'était pas pire que d'être un cœur d'artichaut la bise à la future belle soeur ou une cinglée finie, comme Weasley Dubois. Au contraire, elle était loin d'envier tous ses camarades qui semblaient en proie à tant d'émotions contraires : ça semblait surtout être synonyme de beaucoup trop de complications. Elle passa le bras autour des épaules de sa jumelle, souriant. « Bon bah dans ce cas, tout va bien. » déclara-t-elle plus sereinement. Tant que Peony continuait à l'accepter telle qu'elle était - telle qu'elle avait toujours été - alors elle n'avait ni regrets, ni soucis.
Cependant, Peony trouva soudain de bon goût de ramener Quino sur le tapis, ce qui fit perdre tout sourire à Dahlia. Elle arqua un sourcil alors que sa jumelle faisait un geste vague dans sa direction générale, semblant la désigner toute entière. Elle supposait que son air blasé n'aidait pas sa cause. « Comment ça tout ça ? » répliqua-t-elle tout de même en se redressant, vaguement scandalisée. Son regard passa machinalement sur sa propre tenue, qu'elle jugeait tout à fait standard : pas de quoi effrayer qui que ce soit à part la fashion police.« Oui eh bien ça ne sera pas avec Quino non plus, lâche l'affaire. » déclara-t-elle d'un air entendu, espérant bien que sa jumelle comprendrait le message, cette fois. Peony était peut-être de son côté, mais elle défendait aussi nettement trop la cause d'un gréco-argentin au comportement douteux.
« Marraine ? » répéta-t-elle platement, observant sa jumelle comme si elle avait officiellement perdu la boule, cette fois. « Je suis très bien toute seule. Et pour les filleuls, ou les neveux et nièces, je te conseille plutôt de tenter ta chance avec Ash. » Peony avait vraiment de drôles d'idées parfois ! Elle la connaissait, non ? (Encore qu'avec pareilles déclarations, elle tendait à en douter !) Comme si elle avait envie de se coltiner des enfants maintenant ou dans un futur proche (et même lointain, elle avait ses réticences).
Son aversion pour la Saint-Valentin n'était qu'un symptôme de plus, attestant 1. du fait que les sentiments, la mièvrerie et elle ne faisaient pas bon ménage et 2. que sa relation avec Noé avait atteint ses limites. Elle était certaine que dans les bonnes conditions, il aurait pu se réjouir un minimum de cette fête - il aimait offrir des cadeaux, lui -, c'était simplement que ce qu'il y avait entre eux ne s'y prêtait pas. Avec le recul, ils avaient eu un parcours nettement meilleur que ce qu'elle aurait pu anticiper. Pas de regrets, en somme à part quand José lui a renversé son jus de pomme. « Franchement, qui l'eût cru. Jensen ne nous avait pas préparées à ça. » ricana-t-elle en songeant que s'il l'entendait, le meilleur ami de sa jumelle verserait probablement de l'arsenic dans son prochain chocolat chaud. Être le petit-frère de la prof' de potions apportait apparemment son lot de séquelles. Ses yeux étincelèrent d'enthousiasme à la mention de montagnes de chocolat. « Excellente idée ! Je suis pour. » Elle haussa un sourcil. « Tu n'as pas prévu un truc avec Tu-Sais-Qui ? » Une question légitime. Après tout, Dahlia n'était vraiment, vraiment pas romantique, mais aux dernières nouvelles, Peony l'était, elle. Même si Hartley était un coureur de jupons émérite, ça ne signifiait pas qu'ils n'avaient rien planifié.
« Je sais. Moi aussi Peo'. » répéta-t-elle, plus apaisée qu'elle ne l'avait été avant l'arrivée de sa jumelle. Peut-être que quelque chose clochait chez elle - elle l'avait toujours senti - mais en définitive, est-ce que ça importait vraiment ?
Peony était sérieuse, elle ne pensait pas que sa sœur ait un coeur de Pierre. Une certaine déficience côté sentiments, d’accord, mais pas non plus un coeur de pierre -ça c’était plutôt Leo, si vous vouliez son avis d’experte. Lovée contre sa jumelle, ce qui la réchauffait nettement -quelle idée de sortir sans cape et sans écharpe !- Elle esquissa un sourire quand la brune lui dit que tout allait bien. Elle n’avait pas spécialement besoin d’être rassurée sur les sentiments de sa sœur à son égard, mais cela faisait toujours plaisir à entendre, elle ne pouvait pas le nier.
« Bah, toi, Noé, Kate, tout ça quoi. » La rousse haussa les épaules, ne sachant pas quoi ajouter. Sa sœur n’était-elle pas censé être dans la maison des érudits ?Alors que Lila lui disait que son bonheur ne viendrait probablement pas de Quino non plus, Peony poussa un soupir. Vraiment, quand elle n’y mettait pas du sien, il fallait réussir à la supporter ! « T’es jalouse de Kate ? » La question était sortie toute seule, alors que Peony fronçait les sourcils. La blondinette, désormais petite amie du greco-argentin, sortait un peu de nul part dans toute cette histoire, la rousse voulait bien en convenir. Aux dernières nouvelles, elle était amoureuse de son meilleur ami, un autre Poufsouffle, qui ne ressemblait en rien au trublion qu’était Quino. Et pourtant, ils s’affichaient depuis à peu près deux semaines, ne manquant pas de s’embrasser devant tout le monde, même si le jaune et noir semblait très gauche dans toute cette histoire.
Alors qu’elle demandait tout de même quelque chose de simple, la réaction de sa sœur ne se fit pas attendre. Était-ce si horrible que cela de vouloir être la marraine du premier de sa sœur jumelle, franchement ? « Tu ne fais vraiment aucun effort. » laissa-t-elle entendre, plus pour embêter sa sœur qu’autre chose. Quant à leur petit frère... « Dois-je te rappeler qu’il a le coeur brisé parce que Lu’ passe son temps pendue au bras de son "meilleur ami slash partenaire de danse slash il-ne-se-passe-absolument-rien" ? Tu aurais du le voir le lundi quand Thiago est arrivé... » Son frère était aussi sensible -voire même plus- qu’elle, toute la fratrie Lloyd le savait. Ce n’était pas pour rien que Peony le couvait et que Leo et Dahlia tentaient de l’endurcir -Peony aussi, mais elle était passée en mode poule couveuse depuis le premier février. Mais le voir comme ça avait brisé le coeur de grande sœur de la rousse. L’espace d’un instant, elle avait même été en colère après l’argentine, alors qu’elle n’y pouvait, au final, pas grand chose.
Les histoires d’amour de son meilleur ami lui extirpèrent un rire, que Dahlia ne fut pas la dernière à prolonger. En même temps, le brun était tellement prude que de savoir qu’il avait couché avec une fille avait tout d’abord choqué Peony. Pas que ça soit Viska le problème, non, au contraire, mieux valait, sans doute, qu’il se soit s’agit de la blonde. Mais bon, on parlait de Jensen quand même. « Avec Voldemort? T’es glauque mon chat. Non, on n’est pas ensemble, Lila. On est juste des amis qui s’embrassent... Et peut-être plus. Mais c’est tout. » Elle coula un regard prudent vers sa sœur. Elle avait préféré attendre un peu plutôt que de lui dire tout de suite après qu’elle avait couché avec le blond de septième année, mais c’était plus par peur de sa réaction qu’autre chose. Elle était la romantique des jumelles, là où Dahlia était bien plus détachée. Si Peony ne faisait toute une affaire de sa première fois, elle savait qu’elle ne l’aurait tout de même pas fait avec n’importe qui. Là, c’était Alfie, pas le premier venu non plus. « Même si je passe une heure avec lui, ce qui peut arriver j’en conviens, on peut quand même dévaliser les cuisines, tu sais. » Elle haussa les épaules, ne sachant pas trop quoi ajouter. Peut-être qu’elle passerait du bon temps avec l’anglais le quatorze février, mais il était clair qu’ils ne feraient rien de romantique, comme sortir à Pré-au-Lard où se faire un déjeuner en tête à tête. C’était bien trop flagrant, et clairement pas ce sur quoi ils s’étaient mis d’accord. Pas de sentiments, seulement du sexe. Et des baisers volés au détour d’un couloir. C’était bien assez comme ça.
La seconde déclaration de la rousse eu au moins pour résultat d’apaiser un peu sa sœur. Peony n’avait jamais été avare en déclaration d’amour, sa fratrie et ses parents savaient à quel point la sorcière les aimaient, elle leur répétait souvent, sans attendre qu’ils ne lui disent aussi en retour. Mais que Dahlia le lui dise, et ce, deux fois presque en moins temps qu’il n’en fallait pour dire « Quidditch » l’emplissait de bonheur. « De toute façon, je ne vais pas te lâcher d’une semelle, tu sais? Tu vas devoir te coltiner ma présence tout le temps, quand on aura fini l’école. » Mais tout ça, Lila le savait déjà non? Rien de nouveau sous le soleil, de ce côté là de toute manière, Peony avait toujours été très claire sur son penchant sangsue.
L'explication de Peony ne vînt nullement contenter Dahlia : "toi, Noé, Kate, tout ça quoi" ? Pouvait-on savoir précisément ce qu'il y avait, dans cette liste, de si terrifiant pour Quino ? Elle l'avait vu se dresser nez à nez avec un Rusard arborant son haleine fétide du matin sans jamais fléchir, quitter une retenue en toute sérénité comme s'il avait s'agit d'une activité optionnelle ("Vous savez Pomona j'ai bien réfléchi, et rempoter des mandragores, ça me chauffe moyen") et énerver plus d'élèves de sixième et de septième années par ses farces qu'il ne pouvait être prudent de le faire. Alors que "tout ça quoi" vienne lui faire peur au point d'éviter Dahlia ? Non, ça n'avait aucun sens, et Dahlia était surprise : elle avait connu sa jumelle plus éloquente que ça ! Si tu défends trop Quino tu vas finir par en prendre pour ton grade Peo ! « Ok, il va falloir être plus explicite Peo', parce que là, j'ai rien compris. » déclara-t-elle platement. Et pourtant, sa jumelle avait l'air de considérer que sa déclaration voulait tout dire. Elle aurait pu lui certifier que "mais bien entendu Lila, Vénus était alignée avec Ganymède, sous le signe du lézard à deux têtes, c'est pour ça que Quino se comportait bizarrement" que ça n'aurait pas été beaucoup moins clair pour elle. Elle sentait bien que cette frustration était réciproque, puisque Peony soupira et pire, arbora un air indéchiffrable qu'elle lui avait déjà connu par le passé. Ça n'y manqua pas : sa question suivante n'apporta que davantage de confusion à Dahlia on l'a perdue adieu.
« Jalouse de Kate ? Encore faudrait-il que je sache de qui il s'agit ! Non je ne suis pas de mauvaise foi, si j'étais de mauvaise foi, je dirais que son prénom ressemble au nom d'une maladie tropicale, mais je ne le dis pas, parce que je ne sais pas à qui tu fais référence. Katarzyquoi ? A tes souhaits ! » répéta-t-elle en tournant la tête vers Peony, s'étant attendue à tout sauf à une pareille question. « Jalouse de quoi ? Que Quino mette ses pattes pleines de confitures ou de liquides visqueux sur moi ? » Pour être jalouse, il aurait fallu qu'elle les voie, or elle ne faisait pas une habitude de traîner avec les Poufsouffles ou avec Kate, qui passait a priori l'intégralité de son temps à parler de thé sous toutes ses formes : sa préparation, quelle théière choisir et quelle était l'eau la plus pure. Ou peut-être que son vrai raisonnement, c'était que cette histoire était vouée à l'échec car comment égaler Dada ? un peu comme sa relation avec Noé, qui n'avait jamais eu de réel avenir. Ou encore, parce que Ells ne l'irritait pas autant que Weasley, et qu'il n'était donc pas aussi satisfaisant de lancer des piques acerbes à son sujet que ça l'était pour la Gryffondor. Et d'accord, il fut un temps où elle s'était vue profiter de sa proximité physique avec Quino pour poser ses lèvres sur les siennes, au diable le regard curieux de Théobald mais ce n'était pas comme si elle voulait sortir avec lui. Il était toujours surexcité de manière inexplicable et surtout, royalement immature, il le lui avait bien prouvé dernièrement. Elle souhaitait bien du courage à Ells. « Je les vois rarement. » finit-elle par déclarer, l'air de ne pas y toucher et parce qu'elle ne pouvait décemment pas exposer tout son raisonnement à Peony - au risque de passer pour une hystérique.
Peony poussa la blague jusqu'à lui dire qu'elle voulait devenir marraine, sous-entendu de ses enfants à elle et dans un futur proche, ce qui suscita forcément la sidération de Dahlia mais elle supposait que Quino était un enfant alors sortir avec lui serait un peu comme avoir un filleul pour Peony. Plutôt que de continuer sur cette pente savonneuse, elle fronça les sourcils quand Peony rebondit au sujet d'Ash. Il semblait que leur petit-frère avait cédé aux appels de l'amour, lui aussi. Personne n'y échappait donc ! « C'est sûr qu'ils vont sortir ensemble ces deux-là, même à moi ça me paraît évident... » Et pourtant, elle était loin d'être la reine des sentiments pour ceux qui n'auraient pas suivi. Elle se fit pensive pendant quelques instants, puis soupira en ramenant les yeux sur le terrain. « Tu as réussi à le réconforter un peu ? » demanda-t-elle avec une curiosité réelle. Si quelqu'un dans leur fratrie était à même d'épauler Ash là-dedans, c'était bien Peony, parce qu'elle n'était pas douée du tout pour cette partie-là - venger son frère, elle pouvait, ensorceler un malotru qui l'aurait malmené, sans souci, mais lui tapoter le dos pendant qu'il pleurait ? Nettement plus compliqué - et Léopold était parfois (souvent) blessant voire cruel dans ses propos. Il voulait qu'Ash soit plus fort et lui imposait une austérité que leur cadet ne pouvait pas comprendre, là où Dahlia ne savait simplement pas comment l'assister.
Tant qu'il était question de personnes sensibles, elles en vinrent à parler des relations de Peony cette fois, ou plutôt de la relation qu'elle entretenait avec Alfie. Dahlia connaissait sa jumelle : elle était une romantique dans l'âme, et cet arrangement avec Alfie ne pourrait pas perdurer indéfiniment - et de toute façon, il quitterait l'école à la fin de l'année, comme Noé. Mais si c'était ce dont elle avait besoin en ce moment, alors elle était bien décidée à la soutenir. « Ne t'enflamme pas, je n'ai pas dit que vous étiez ensemble, mais intéressant que tu réagisses comme ça ! » nota-t-elle avec amusement. « Attends, plus que ça ? Tu veux dire que vous avez couché ensemble ? »hurla-t-elle pour qu'on l'entende jusqu'à la salle commune de Serpentard, game over Hartley ! Elle arqua un sourcil, observant sa jumelle avec attention. Elle avait l'air louche, donc Dahlia pensait voir juste. Restait à attendre qu'elle développe un minimum.
« Écoute, moi ça me va. T'es sûre que votre arrangement te convient toujours ? » insista-t-elle tout de même, car elle aurait eu l'impression d'être une jumelle indigne si elle ne le faisait pas. Elle avait besoin de toutes les billes pour savoir si elle devrait aller refaire le portrait d'Alfie, et quand. On ne blessait pas Peony impunément sinon tout va bien chez les Lloyd, à part le léger souci de contrôle de la colère.
C'était vraiment un jour spécial, car Dahlia se retrouva à retourner la déclaration de Peony deux fois d'affilée - que sa jumelle en profite, car ça n'arriverait pas tous les jours ! Elle fronça les sourcils, perplexe, quand il fut question de leurs avenirs. « Mais d'ailleurs, comment on va faire ? Si tu travailles dans la mode, est-ce que tu pourras venir avec moi si on m'envoie aux quatre coins du monde ? Les briseurs de sorts voyagent beaucoup. » lui fit-elle observer d'un air pensif. Elles avaient encore du temps, mais peut-être fallait-il commencer à anticiper sur les questions de logistique dès maintenant !
Peony eu un petit rire à la réflexion de sa sœur jumelle et haussa les épaules. Elle ne savait pas vraiment ce que Dahlia attendait d’elle. Après tout, elle ne pouvait pas lui dire que Quino était (ou avait été ?) amoureux d’elle, sous peine de se mettre le Poufsouffle à dos. « Dahlia, je croyais que c’était toi la Serdaigle de nous deux ? » Mais la rousse le savait, sa sœur et les sentiments ça faisait deux, voire même plus, tout dépendait des situations et des personnes concernées. « Tu ne les vois pas souvent ensemble, mais tu sais qu’ils sont ensemble... » Et peut-être que c’était assez ? Après tout, Peony avait été jalouse de toutes les garces que son frère se tapait, même si elle ne les voyaient pas. Le seul fait de savoir qu’elles existaient l’avait ébranlée et rendue particulièrement insupportable... Et Dahlia était sa jumelle. Même si elles étaient très différentes sur tous les points, il devait bien y avoir certains choses qui les réunissaient par-ci par-là. « Mais très bien, si tu te dis que ça ne te fais rien, je n’insiste pas ! » Après tout, ça ne serait pas non plus très sympa pour Kate. Même si Peony était bien plus proche de Karen que de la blonde, elle l’aimait bien, malgré tout ce que pouvait en dire la violoniste.
Pour ce qui était de Lucrecia et Thiago, Peony préférait rester en dehors de cette histoire. Elle avait déjà déboulé comme un boulet de canon dans la vie sentimentale de son petit frère, pas sûr que l’argentine apprécie qu’elle en fasse de même avec la sienne. Surtout que Peony ne con agissait pas spécialement Thiago ni les limites qu’il avait. Pas folle la guêpe donc. « Je ne sais pas. Ils se tournent autour, c’est sûr mais Lu a toujours dit qu’il était juste son meilleur ami et partenaire de danse. Enfin, après ça les regardent hein. » Et puis, Peony avait déjà bien assez à faire entre Dahlia, Viska et Victoire, donc elle laissait volontiers Kate, Karen et les autres quatrièmes années gérer leurs problèmes. Préfète, peut-être, mais pas marieuse non plus. « Bof. Tu sais comment il est. » Mais elle ne baissait pas les bras pour autant, ce qui devait sûrement être le pire pour Ash, car Peony n’allait pas le quitter de sitôt.
La remarque de sa jumelle la fit sourire. Elle ne se voyait pas du tout en couple avec Alfie. C’était plus un échange de bons procédés, du « et plus car affinités ». Elle n’avait pas de lubies étranges, qui concerneraient le blond, une bague à son annulaire gauche et une robe blanche, merci pour elle. C’était pour cela qu’elle avait remis les pendules à l’heure. Elle ne sortait pas avec Alfie. Elle couchait avec, à intervalles réguliers, voilà tout. Elle hocha la tête, un petit sourire aux coins des lèvres à la question de sa sœur, avant de reprendre la parole « Disons qu’on a pas vraiment arrêté. » Elle n’avait pas de problème pour parler de sexualité avec sa sœur, ou avec qui que ce soit d’autre, d’ailleurs, si ce n’est Leo. Mais on ne pouvait pas vraiment dire que son frère aîné était le mec le plus tolérant du monde non plus, donc bon... Ce qu’il ne savait pas ne risquait pas de lui poser problème. « Promis, ce n’est pas pour rendre Leo complètement fou, on fait attention à ce qu’il ne se rende compte de rien. » Et elle ne se faisait pas de films, n’imaginait rien digne d’Hollywood en ressortir. Ils prenaient du bon temps ensemble, et voilà. Pas la peine d’épiloguer cent ans sur la question, de toute façon. « Oui, ça me va. Il est un peu à moi, comme ça. Mais je crois que je ne l’ai pas vraiment aimé. Je veux dire, si on arrêtait demain, je ne serais pas dévastée. » Un peu comme Dahlia avec Noé, en gros. Encore que, les deux relations ne se ressemblaient absolument pas.
La vie d’adulte semblait encore bien lointaine, pourtant, les jumelles s’en rapprochaient dangereusement, déjà, elles seraient majeures au mois de Septembre et pourraient transplaner où bon leur semblerait -en dehors de l’école bien sûr- au grand damne de Leopold qui avait toujours du mal à les voir autrement qu’en couche-culotte, à quatre pattes sur le parquet du salon. Pourtant, Dahlia aborda un sujet qui couvait, et que Peony ne savait pas trop comment gérer pour le moment. « Et bien, tu ne seras pas une briseuse de sorts pro tout de suite, non ? Tu ne vas pas aller te tuer le lendemain de la sortie de Poudlard, si ? » Il devait bien y avoir une formation avant non ? Quelque chose qui forcerait Dahlia à rester auprès d’elle, encore un peu ? Peony n’avait aucune idée de comment on pouvait devenir briseuse de sorts, tout ce qu’elle savait, c’est que c’était dangereux. Et que ça mettrait sans aucun doute la vie de sa sœur en danger. Et elle n’était pas sûre d’être prête pour autant de soucis. « Les stylistes aussi voyagent beaucoup. Mais je doute que ça soit aux mêmes endroits... » Peony poussa un petit soupir, un pli soucieux barrant son front. Elle n’avait jamais réellement pensé à l’avenir, à l’après-Poudlard et au moment où, inévitablement, elle devrait se séparer de Dahlia. « On a encore deux ans et des poussières pour trouver une solution... » En espérant qu’elles y arriveraient. Parce que Peony ne voyait pas trop ce qu’elle irait faire dans une grotte au fin fond de la forêt amazonienne ! « On rentre boire un chocolat chaud ? Je meurs de froid. » Elle frissonna des pieds à la tête en se levant, tendant sa main à sa jumelle. A deux, elles réussiraient toujours à aller bien non ? Peu importe les garçons qui gravitaient autour d’elles.