Thème • PV • Living in the currents she creates.

Living in the currents she creates

Lorsqu’Augustus lui avait apporté le faire-part, Karen s’était contenté de le saisir, de caresser les plumes de son hibou tout en lisant le petit texte de Freja, apprenant au passage le prénom qu’elle avait choisi pour sa fille, tout en ne manifestant aucune surprise -aucune émotion en réalité- devant cette nouvelle. Elle releva rapidement le regard pour examiner les réactions de ses pairs [c’était le vrai spectacle du jour] et entra dans leur esprit avec une facilité qui n’avait plus rien de déconcertant. Outre les informations que lui faisait parvenir son père de manière codée, elle se doutait que Freja avait préparé quelque chose de spécial pour annoncer l’arrivée de sa descendante [la seule que le monde sorcier connaissait] surtout après des mois à se tenir discrète. Avant, il y avait bien eu l’otage Nathan Symphonie remis à Poudlard qui avait eu son petit effet. Spingate, qui ne tournait déjà pas bien rond avant, avait fini par péter totalement son câble comme seuls les imbéciles dénués de tout sang-froid et incapables de se contrôler pouvaient le faire, épisode que Karen avait regardé, elle l’avouait bien volontiers, avec une certaine délectation. Voilà le sort réservé à ceux qui avaient l’outrecuidance de s’élever contre Magicis Sacra : oubliettés ou l’esprit totalement fêlé. Karen n’éprouvait aucune empathie tout court envers la blonde, elle devait néanmoins simuler devant Peony, qui avait découvert Spingate en train de se tailler les veines [dans les toilettes de la salle de bains qu’elle partageait...quelle amatrice] et, dans une moindre mesure, devant Jensen. Car le point le plus contrariant dans cette histoire, c’était tout de même que Jensen, qui avait pourtant pris un chemin bien plus acceptable ces derniers temps en s’éloignant de la mauvaise influence que Spingate était, s’inquiétait pour elle. Maintenant, il se sentait coupable, et il éprouvait toujours des sentiments forts pour cette presque Née-moldue [une honte] et elle ne savait plus quoi faire pour qu’il redevienne l’être qu’il était avant de tomber dans le piège de cette fille de petite vertu. Elle trouverait, néanmoins, elle le savait.

Ses doigts vernis de noir se posèrent sur la pierre qui se trouvait à son cou comme elle pensait à son ami d’enfance. Il le lui avait offert quelques jours auparavant, lors de son anniversaire. Un bijou élégant, raffiné, à la chaîne en argent et la pierre violette [ses couleurs]. Tout elle. Cela lui prouvait une nouvelle fois à quel point l’Ecossais la connaissait bien et elle avait été plus touchée par ce cadeau qu’elle ne se l’avouerait jamais. Néanmoins, chaque fois qu’elle se sentait débordée par des émotions [ce qui ne devait pas arriver], elle se rappelait son entraînement. Son père, via des hallucinations, lui avait montré ses amis se faire torturer et lui avait appris à résister au besoin compulsif de les protéger. Qu’elle soit une très bonne Occlumens, qu’elle sache lire les esprits mieux que n’importe quelle personne de son âge, qu’elle soit une espionne redoutable, importaient peu si elle se permettait d’avoir la moindre faiblesse. Elle ne se laisserait pas avoir la moindre faiblesse. Elle avait déjà une faille, immense, honteuse, qui lui crevait le cœur depuis la disparition de sa mère, elle ne pouvait se permettre d’en avoir d’autres. Peu importe à quel point elle aimait Jensen, peu importe à quel point elle appréciait Peony, peu importe que Michael soit son meilleur ami, peu importe qu’elle se surprenne à apprécier de plus en plus la compagnie de Lucas, tous ne devaient être que des personnes qu’elles pouvaient sacrifier si on le lui demandait. Uniquement des pions sur l’échiquier dont elle était la reine. Et ça ne devait jamais changer.

Karen avait toujours le faire part en main lorsqu’elle entra dans la bibliothèque. Que cherchait-elle dans cette pièce ? D’autres esprits à fouiller, d’autres données à analyser. Son père attendrait son rapport pour le soir même et elle ne comptait pas le décevoir. Mais c’est le visage charmant de Niels Koning qui s’offrit à elle et un sourire rompit la carapace de glace dans laquelle elle s’entourait toujours. Elle appréciait beaucoup le fils de Freja et savait que c’était réciproque. Pouvoir compter sur sa présence dans l’école de sorcellerie écossaise était reposant, d’autant qu’il n’y avait quasiment aucune probabilité qu’elle ne se retrouve à devoir le trahir aussi n’avait-elle pas autant besoin de verrouiller ses émotions avec lui qu’avec les autres. « Bonjour Niels. Fort bien et toi, comment te porte tu ? » Ils avaient abandonné le vouvoiement qui aurait paru trop étrange à Poudlard mais ce n’était pas pour ça que Karen se permettait de se montrer trop familière avec lui et d’oublier ses politesses, ça n’était pas du tout dans son genre.

Niels ne manqua pas, évidemment, de mentionner la nouvelle qu’ils avaient reçu tous les deux, mais aussi tout le château et une bonne partie du monde sorcier en réalité, et elle se remémora que, lui aussi, elle devait le surveiller. Freja voulait savoir comment il se débrouillait dans sa nouvelle mission et si son désarroi vis à vis de sa nouvelle petite sœur pouvait troubler certaines personnes. Karen s’imagina un instant à sa place. Son père fricotant avec une femme sans intérêt, parvenue, qui souhaitait lui mettre le grappin dessus depuis un moment, et avoir un enfant avec elle. Un tout neuf projet sur lequel se concentrer et la délaisser elle alors qu’elle était sans conteste sa plus grande réussite. Nul doute qu’elle aurait nourri des envies de meurtre envers cette vie innocente. « Bien sûr. Je savais depuis un moment. Une fille. Un scorpion. L'enfant d’une grande sorcière. Tu noteras que nous avons déjà beaucoup de points communs. » Une malice dansa dans ses yeux. Elle aimait sans doute un peu trop toucher les cordes sensibles et s’éloigner pour observer le chaos qu’elle avait engendré. « Te t’inquiètes pas trop. M. ne l’approchera sans doute que dans de rares moments, histoire d’épargner sa sensibilité et qu’il n’occasionne aucun scandale. Nous avons gagné une nouvelle alliée Niels, alors réjouis toi. » Elle s’assit en face de lui et planta son regard, gris acier ce jour là, comme le ciel nuageux et sombre. Sans forcer, elle tenta de s’immiscer en lui. Bien. Son esprit était encore protégé. C’était que malgré ce qu’il devait assimiler comme une mauvaise nouvelle ne l’ébranlait pas tant que ça au final.

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Même si Niels était la seule personne à Poudlard dont elle ne pouvait pas lire l’esprit [du moins en s’en tenant à la manière traditionnelle, et en ne forçant pas le passage], Karen réussissait tout de même à sentir ses émotions. Son père n’avait jamais reposé ses entraînements uniquement sur le seul don de Legilimens. Elle avait appris à lire sur les visages, détecter les traits de caractère dans les postures, percevoir les mensonges dans les regards. Elle analysait tout et elle savait reconnaître la méfiance lorsqu’elle la voyait. Néanmoins, elle pouvait tout à fait comprendre que Niels se méfie d’elle –et il avait raison de se méfier. S’il était bien évidemment hors de question qu’elle se marie sous peu, elle venait tout de même d’avoir seize ans et dans sa famille, il n’était pas rare que ce soit l’âge où on se fiance. Alors elle fréquentait Lucas depuis des mois, ils s’étaient même embrassé [mais en évitant la soupe de langues, merci bien] après le bal au Ministère de la magie et si elle convenait complètement qu’il était un partenaire tout à fait convenable [noble et Sang-Pur, il n’en sortait plus beaucoup des comme ça désormais], elle n’était toujours pas convaincue de la manière dont il cadrerait avec Magicis Sacra. Enfin. Karen tenait tout de même à rester proche de Niels, c’était dans son intérêt de bien s’entendre avec le fils de Freja. Il était déterminé à prendre une part plus importante dans l’organisation, contrairement à son père qui s’était toujours tenu loin du cercle le plus proche du pouvoir. Mais ses gênes ne faisaient pas tout et Karen le surveillait aussi pour plusieurs raisons. Elle n’écartait pas, en effet, que la direction de MS revienne aux Blackthorn, l’une des familles qui avait toujours grossi les rangs. Karen serait toujours loyale à Freja, mais Niels n’était pas sa mère et en dépit de ses capacités, il était encore loin de l’être.

C’est avec cette idée en tête qu’elle répondit : « Ah oui ? Et qu’aurait-elle dû faire à la place ? T’oublies l’arrivée de ta tante et de toi en Ecosse, et Nathan Symphonie. » Le petit cadeau de Freja à Spingate avait, selon Karen, parfaitement rempli son objectif. Spingate était encore plus brisée qu’avant, loin de pouvoir relancer sa pitoyable brigade de bras cassés, et tous les élèves voyaient bien que même loin de Poudlard, MS pouvait frapper un grand coup. « Et elle n’est pas un parasite gênant, elle vient de naître. Tu veux qu’elle te fasse quoi ? Baver sur ta chemise ? C’est une Sang-Pure et pas une qui risque de trahir son sang, ne laisse pas ton ressentiment personnel oublier ça. » Par mesure de sécurité, elle parlait à voix basse mais elle se permettait de laisser filtrer autant de ses vraies pensées parce qu’elle avait scanné la bibliothèque et qu’ils étaient quasiment seuls dans la pièce.

« Elle ne le livrera pas. A moins qu’il ne commette l’irréparable. Tu peux ne pas l’aimer Niels, mais tu dois bien reconnaître qu’il est utile et doué dans ce qu’il fait. On ne peut pas se permettre de perdre les bons, encore moins de les livrer et de risquer des contestations et des tensions. » Freja avait beau être leur leadeuse incontestée, elle n’était pas à l’abri qu’un petit groupe se rebelle en cas de décision jugée illégitime de sa part. Freja ne pouvait se permettre aucune erreur.

Niels en avait visiblement marre de parler de sa sœur [il dégageait tant de haine et de jalousie et ça perturbait son jugement, ce n’était pas bon] mais le sujet qu’il choisit pour engager la conversation dans une autre voie surprit Karen. Une. Deux. Trois secondes. Un éclair de surprise dans les nuages gris de son regard. Ses cils qui ne cillent pas. La bouche légèrement entrouverte. Puis l’esprit qui se ressaisit. « Laisse Mertvyy parler. Il ne peut rien contre moi. Personne ne le croira s’il prononce mon nom et personne n’est assez doué dans cette école pour fermer son esprit, répliqua-t-elle. Il est incapable de contrôler ses émotions et il semble refuser d’utiliser sa propre Legilimancie. Mais il pourrait être utile pour nous. » Il contrôlait les flammes et il avait ce désir insatiable de se venger de son géniteur, deux caractéristiques qui le rendait intéressant aux yeux de MS et son père était entièrement d’accord avec elle. Restait son côté imprévisible, sa manie de se mêler de ce qui ne le regardait pas, et son incapacité à fermer sa bouche visiblement. « Merci du conseil mais ne t’en fais pas, je gère très bien mon don. Personne ne suspecte ma véritable allégeance. » Une flamme dangereuse avait assombri fugitivement son expression avant qu’elle ne retrouve son apparence habituelle de glace. Elle n’appréciait guère que Niels se permette de lui donner des conseils sur son don, il venait d’arriver dans l’école, il n’avait aucune idée de ce qu’elle avait fait avant, mais elle ne pouvait se permettre de l’affirmer trop vivement. Il pouvait lui-même voir, elle le sentit essayer, son esprit était impénétrable, elle avait travaillé assez dur pour cela.

Quand Karen avait appris l’existence de Niels Koning, elle s’était aussitôt dit que le garçon serait un précieux allié pour l’avenir. Nul doute que Freja avait veillé à éduquer correctement son fils unique, à le baigner dans les saines valeurs de Magicis Sacra, afin qu’il ne risque ni de trahir l’organisation, ni de la rejeter comme cette ingrate d’Eurydice. Quand elle avait rencontré son cadet durant l’été, cette idée qu’ils étaient faits du même bois de baguette s’était confirmée. Elle était sure qu’elle pourrait compter sur lui, même si elle devait aussi se montrer prudente et le surveiller, que ce soit pour Freja ou pour elle-même. Comme Niels avait bien évidemment été réparti à Serpentard, les deux jeunes gens étaient proches, Karen se proposant de le guider dans le château, mais sans être trop proches non plus afin d’éviter que les élèves se posent des questions. Elle avait toutefois dit à ses amis que Niels était le fils d’un ami de son père, ce qui écartait tout un tas de présomptions. Niels avait été formé à la Legilimancie et à l’Occlumancie, et il savait maîtriser ses émotions. Sauf, visiblement, lorsque cela concernait sa demi-sœur ce que Karen ne comprenait pas. Ce bébé était une bonne nouvelle pour le monde des Sangs-purs mais aussi pour Magicis Sacra. Sa jalousie déplacée d’enfant unique obscurcissait vraiment trop son jugement. « Mésestime-tu vraiment autant ta mère pour juger qu’elle s’est faite avoir ? C’était son choix de garder cet enfant. Elle a pensé à notre avenir, l’avenir de l’organisation. Tu as une vision trop étroite. » Elle secoua la tête de gauche à droite, ses boucles brunes se balançant à un rythme lent. Elle ne comprenait pas que Niels, entre toute autre personne, puisse se permettre ainsi de douter de leur leadeuse. Elle avait maintes fois prouvé qu’elle était amplement capable de les diriger et ses plans étaient toujours parfaitement pensés.

« Vraiment ? Dois-je en conclure que toi-même tu serais capable de la trahir ? » Elle posa un regard cryptique, mystérieux, insondable, sur Niels. Il se montrait critique envers Freja et parlait maintenant de loyauté. C’était des signes que Karen comptait bien divulguer à qui de droit. Ils étaient trois à Poudlard maintenant, ils ne pouvaient pas se permettre de ne pas suivre la même lignée. « Presque aucun enfant éduqué avec nos principes ne pourrait se retourner. On sait que c’est la bonne voie, l’unique voie à suivre. Il n’y a que les enfants Foster. Eustache a vraiment laissé Eulalie faire n’importe quoi. » Les Foster était trois -trois ! Et hormis peut-être Erwin, Karen craignait bien qu’ils ne soient perdus pour la cause. Elle savait qu’une des missions de Niels était de conquérir la dernière, Eurydice, mais Karen l’avait assez analysée pour savoir qu’il s’échinerait pour rien : la Serdaigle était la digne fille de sa mère, entêtée, pleine de principes dépassés et insupportablement naïve. Dommage, car à cause de son handicap, elle avait dû apprendre à maîtriser rapidement les sortilèges informulés et montrait un certain talent en magie.

Comme certaines de leurs conversations passées, Karen se permis de donner des conseils au Danois, qui ne le prit pas très bien [la susceptibilité était un signe de mauvaise maîtrise de soi, décidément, Niels n’était pas aussi impassible qu’elle le pensait au début] et se compara avec Katarzyna Ells, la grande ennemie de Karen, ce qui ne manqua pas de faire sourire la Vipère. « Effectivement. Au moins, avec toi, je ne risque pas de fuite de magie à la moindre petite contrariété. » Une petite plaisanterie suffirait-elle à calmer Niels ? Elle n’en était pas sure. « Je me permets juste de t’adresser un conseil. Si tu poursuis ton chemin dans notre organisation, tu seras forcée de travailler avec des personnes que tu n’apprécie pas. Tu ne pourras pas les écarter juste parce que tu les considères comme des parasites. » Ce qui était d’autant plus vrai s’il visait la place de sa mère. Mais chaque chose en son temps. Niels venait juste de débuter sa première mission, il ne fallait pas qu’il rêve trop grand non plus.

Passé ce sujet ainsi que celui de Vignot, que Karen n’appréciait pas forcément, notamment parce qu’elle avait toujours trouvé que son comportement de chienchien avec Freja était pitoyable, Niels crut bon de lui faire savoir que Thomé avait vendu la mèche concernant leur altercation. Finalement, elle préférait en soi que cette information soit tombée dans l’oreille de Niels, et pas de n’importe qui, même si le brun en profita pour la juger [il aurait mieux de s’abstenir]. « Tu ne sais rien de ce qu’il s’est passé, alors je me passerais de ton avis. Tout était planifié, tout. J’ai appris bien plus sur Mertvyy qu’il n’en saura jamais sur moi. » Ce n’était pas tout à fait vrai. Karen n’avait pas prévu que Thomé puisse sentir sa présence dans son esprit, mais ça, Niels n’avait pas besoin de le savoir. « Je suis tout à fait d’accord avec toi. Mais tu oublies que c’est ma cinquième année ici, j’ai analysé tous les élèves, et ceux doués pour lire dans les esprits des autres se comptent sur les doigts d’une main. » Son ton était calme, ne montrant évidemment pas à quel point le moralisme dont faisait soudainement preuve Niels l’agaçait. Ne jamais laisser voir aux autres qu’ils vous avait atteint. -c’était la base.

La conversation ne prenait décidément pas un tournant très agréable. Cela chiffonnait Karen car elle avait sincèrement apprécié Niels jusque-là et qu’il était important pour la suite qu’il reste de son côté –mais c’était valable pour lui également. Elle ne pouvait cependant supporter qu’il critique aussi vertement sa propre mère. Karen était une espionne née, aussi pouvait-elle trahir n’importe qui, même le plus précieux de ses amis, s’il le fallait, mais elle était loyale envers Magicis Sacra et envers la personne qui dirigeait l’organisation, soit Freja. Elle n’était plus loyale qu’envers une seule personne, et il s’agissait de son père –mais pour le moment, il n’avait aucune raison de se retourner contre leur leadeuse. Niels était censé être un atout pour elle, un atout pour MS, et s’il commençait à laisser ses émotions obscurcir son jugement, cela n’annonçait rien de bon pour la suite, Karen en avait bien peur. Car au vu des paroles du Danois, ce problème de jalousie ne se réglerait pas en quelques conversations mère-fils, elle le craignait. « Bien sûr, je n’oserais jamais croire que je la connais mieux que son propre sang. Comme il a dû être difficile pour toi de rester éloigné d’elle pendant toutes ces années. » Elle accompagna ses paroles d’un sourire, mais ce sourire avait quelque chose de cruel dans son expression. Bien sûr, elle ne compatissait pas à la situation de Niels [pas vraiment, à vrai dire, elle espérait surtout que cet éloignement l’avait forcé à se construire une carapace justement et pas uniquement à créer un sentiment d’aigreur inapproprié chez lui], mais remuait le couteau dans la plaie. Il avait beau être le fils de Freja, elle espionnait pour son compte depuis ses onze ans et descendait d’une des familles sorcières les plus influentes du Royaume-Uni et dans MS, il ne fallait pas qu’il l’oublies.

Alors que Niels montrait désormais ouvertement qu’elle l’agaçait [ce n’était pas ainsi qu’il lui prouverait, ou à qui que ce soit, qu’il était digne de sa mère], Karen gardait son sang-froid à toutes épreuves. Elle fut un poil rassurée de savoir que Niels ne comptait pas, d’après ce qu’il disait, trahir ni sa mère ni MS, mais resterait sans doute plus méfiante après cette conversation qu’elle ne l’avait été jusqu’à présent. « Je ne vois pas pourquoi tu cherches à nous mettre en concurrence. Je ne suis pas ton ennemie, Niels. Pour ta gouverne, j’ai montré que j’estimais cette organisation bien des fois. » Ce n’était pas n’importe qui à qui l’on confiait une mission importante, après tout. Karen était destinée à figurer parmi les plus hauts membres de MS et ce n’était certainement pas Niels, roi ou pas, qui l’en empêcherait. Néanmoins, et toujours dans un esprit d’apaisement, elle répondit, concernant Eurydice : « Je ne doute pas que ton charme et tes talents feront des merveilles », même si elle n’y croyait pas vraiment. Le seul bien que pouvait faire Eurydice Foster, c’était de continuer à ne rien dévoiler à personne concernant l’allégeance de son père. Bien que Karen ait découvert, à l’occasion de l’une de ses sessions fouillages d’esprits du mardi, qu’un de ses amis le savait. Mais le petit frère Lloyd savait visiblement garder un secret et tant mieux pour lui. Sinon, Karen aurait dû employer une méthode forte pour le lui faire oublier –non que cela soit un problème, ce n’était pas parce que c’était le frère de Peony qu’elle reculerait devant son devoir.

Evoquer Katarzyna Ells n’allait pas vraiment dans le sens de la stratégie de Karen d’éviter tout conflit car même à distance, Kate avait tendance à agacer Karen. « Pas devant moi, mais oui, je sais qu’elle en a déjà fait », répondit-elle avant de laisser un rire incrédule à l’idée que sa plus grande ennemie détienne un pouvoir incroyable. « Oh, crois-moi, c’est uniquement parce qu’elle ne sait pas se contrôler. C’est la colère, la raison de ses crises, et son incapacité à la gérer, pas un prétendu pouvoir. Je peux t’assurer, en toute objectivité que cette gourde ne peut, en aucun cas, nous être utile. » Parce que si ça avait été le cas, et contrairement à ce que Niels pouvait être capable ave sa propre demi-sœur et avec sa tante, elle aurait rongé son frein, mis sa haine de côté pour tenter de recruter Kate. « Bien sûr que non, Niels. Mais un nom ne fait pas tout, tu as toujours tes preuves à faire dans l’organisation », le prévint-elle alors qu’il semblait mal prendre son conseil [alors qu’elle cherchait uniquement à l’aider, franchement !]. Elle ne parlait pas seulement d’elle. Beaucoup de membres de MS suivaient Freja, mais ne seraient pas à faire de même avec son descendant.

Niels finit, lui aussi, par calmer le jeu, ce qui soulagea Karen. Elle présageait que leur petite querelle laisserait des traces mais rien n’irréparable n’avait été dit ni commis, bien heureusement. « La professeure Gibson a appris la Legilimancie et l’Occlumancie auprès de son mari, qui souhaitait la protéger de son père. Son frère jumeau, le professeur Clarks, n’a lui-même jamais rien appris et j’imagine qu’elle a pensé que Jensen n’avait pas non plus besoin d’apprendre à fermer son esprit. » C’était un choix comme un autre et peut-être Heaven Gibson attendait simplement que Jensen grandisse encore avant de lui donner quelques cours, mais Karen ne savait pas, en réalité, si c’était dans ses intentions.

Curieusement, à la remarque de Niels, les lèvres de Karen se relèvent en un sourire amusé, presque satisfait. La pique du Danois lui vrillait le cœur, comme seules les remarques concernant sa mère pouvaient réussir à le faire, mais elle n’allait pas le montrer, bien sûr qu’elle ne montrerait pas qu’elle avait été touchée [jamais]. Même à Niels, un supposé allié. Ne jamais, jamais montrer de signe de faiblesse. C’était la première règle que s’était efforcé d’inculquer son père. Son père l’avait forcé à écouter ce genre de remarques, inlassablement, pour qu'elle apprenne à les encaisser sans trembler. Et Karen ne s’abaisserait pas non plus au niveau de Niels, malgré le nombre de répliques assassines qui lui venaient en tête. Elle était plus forte que ça. Elle lui montrerait qu’elle était plus forte que lui. « Voilà un peu de cruauté. Enfin, tu essayes, c’est déjà pas mal. Je commençais à me dire que tu n’avais pas trop la trempe pour être accepté parmi nous. » Karen considérait qu’il fallait être prêt à tout, et surtout au pire, pour s’engager dans l’organisation. Aussi elle était satisfaite de voir que Niels avait ça en lui. Qu’il n’était pas qu’un prince pourri gâté qui ronchonnait maintenant qu’il avait de la concurrence dans le cœur de sa mère.

Karen revint un peu sur sa pensée. Que Niels agite le fait qu’elle ne savait soi-disant pas tout [c’était bien mal la connaître que de penser qu’elle se restreignait à Poudlard niveau espionnage] prouvait simplement la faiblesse de son argumentaire. Sérieusement, on aurait dit une réplique de cette gourde de Katarzyna Ells, et ce n’était [vraiment] pas une belle comparaison. « J’en sais assez, ne t’en fait pas », assura-t-elle avec arrogance. Elle était hautaine et sure de ses capacités, il fallait qu’il s’en remette. Il n’était certainement pas habitué à avoir une personne de ses capacités et de sa mesure en face de lui, certainement, mais il allait devoir apprendre à gérer. Parce que même s’il se montrait incompréhensiblement agressif et sur la défensive, ils allaient forcément devoir apprendre à collaborer. Pour la cause.

Niels continua de s’enfoncer en évoquant Katarzyna Ells. Avait-il voulu la mettre en situation de faiblesse ? C’était bien mal connaître Karen que de penser cela. La jeune fille avait pensé que Niels et elle s’étaient compris, s’étaient reconnus entre sorciers faits du même bois de baguette mais elle commençait à avoir des doutes. Ou alors ils se ressemblaient tant qu’ils se frittaient ? « Je connais Ells depuis bien trop de temps à mon goût, je sais que je ne passe à côté de rien. Mais si tu veux te confronter à cette imbécile pour découvrir qu’elle n’a aucun pouvoir exceptionnel du tout, je t’en prie. » Elle lui adressa un [faux] sourire avant d’ajouter : « Tu ferais mieux toi aussi de ranger ta rancune de côté. Tu risques de louper quelque chose avec ta sœur. » Eh oui, Niels Koning, en alliés comme dans l’adversité, tous les coups étaient permis. « Je n’en doute pas. Moi aussi », répondit-elle d’un ton radoucis. Elle se savait implacable et intransigeante, elle jugeait rapidement et se montrait tranchée dans ses jugements. Elle avait eu une bonne impression sur Niels, Et elle revenait désormais fortement sur sa bonne impression. Elle n’était pas habituée à montrer un signe de tempérance, mais elle savait aussi qu’ils avaient été éduqués de la même manière, à sans doute quelques entraînements près, et elle pouvait reconnaître certaines attaques de Niels [et les respecter].

Etrangement, Karen se crispa plus lorsque Niels évoqua [et insulta] Jensen. Son visage était toujours impassible mais elle sentait un relent agiter son être, le même qui la prenait lorsque Kate l’insupportait au point de la mettre sur les nerfs. Jensen avait beaucoup de défauts, elle était la première à le reconnaître, et notamment niveau cœur, il s’empêtrait dans des histoires compliquées avec des filles sans intérêt. Mais elle n’aimait pas entendre de critiques sur son ami d’enfance. « Jensen finira par se rallier à nous, j’en suis persuadée », affirmée-t-elle, le visage fermé. Et quand il les rejoindrait, il serait formé par son père, comme tous les nouveaux entrants et deviendrait à son tour Legilimens et Occlumens. Elle le salua alors qu’il partait rejoindre Eurydice [lui aussi aimait passer du temps avec des filles sans intérêt, visiblement] et se leva à son tour. Elle aussi avait quelqu’un à retrouver.

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