On joue à chat perché ? • Thalia

On joue à chat perché ?

Leith s’ébroua. Les métamorphoses avaient eu beau s’arrêter il y a deux jours, il avait l’impression persistante d’avoir des poils qui lui collent à la peau, et ce n’était pas ceux de Machan et Fillan, son Maine Coon et le fléreur avec lequel il s’était lié magiquement un peu plus tôt dans l’année. Car bien évidemment, alors que tous les sorciers de l’école étaient touchés tour à tour par les métamorphoses, dès lors qu’ils baillaient, Leith, lui, s’était transformé en chat. Vu son amour pour ces mammifères, cela n’avait rien de très étonnant. A bien des égards, il ressemblait à un chat. Il aimait se prélasser au soleil, aimait faire son beau en roulant des mécaniques devant public, mais aussi se faire désirer. Il aimait l’affection, mais appréciait en recevoir lorsqu’il le voulait. Il aimait grimper aux arbres, escalader des murets, et semblait toujours retomber sur ses pieds, même lorsqu’il chutait.

Il avait eu du mal à se rendre compte de ses transformations, sentant à chaque fois une envie de courir partout, éprouvant un besoin irrépressible de liberté. Il avait fini par se dire que si tout le monde était concerné, lui aussi, d’autant qu’il avait vu Fred se métamorphoser en singe, et que son ami lui avait confirmé que lui se changeait en chat. Subir ces changements indésirables ne l’avait pas autant embêté que certains, mais le fait de ne pas garder le contrôle de son corps ne lui donnait pas spécialement envie de tenter l’aventure de l’Animagogie un jour –alors qu’il avait toujours trouvé l’idée sympa, et que le changement directrice McGonagall/chat sévère, l’avait beaucoup impressionné lors de son premier cours de métamorphoses.

La vue d’un félin attira son attention et ses yeux bleus cherchèrent automatiquement sa maîtresse. « Thalia ! », s’exclama-t-il en apercevant sa camarade. « Chess te colle partout, c’trop mignon ! Machan a tendance à faire un peu trop sa vie en c’moment, fait iech. Parfois, j’aimerais le faire apparaître comme c’est possible avec Fillan, ça m’éviterait de m’inquiéter quand j’le vois pas pendant plusieurs heures. » Leith avait enguirlandé son chat le jour où il avait discuté avec Katarzyna Ells parce qu’il le cherchait dans tout le château mais bien sûr, cela n’avait eu aucun effet sur l’animal. Il pouvait se montrer vraiment têtu lorsqu’il le voulait tel chat, tel maître !

Machan aurait sûrement été content de voir Chess. Il s’entendait bien avec et jouait avec lui très souvent, contrairement à Flocon, le chat d’Eurydice, qu’il avait du mal à approcher sans que Leith ne comprenne réellement pourquoi, d’autant que lui n’avait rien contre son aînée. « Ça roule ? Ça t’dit de sortir un peu ? J’ai mon chat intérieur qui veut grimper aux arbres ! Tu t’es changé en quoi d’ailleurs toi ? C’était chanmé, mais grave relou de pas savoir quand t’allais te transformer ! » La métamorphose avait-elle eu un effet sur la santé de Thalia ? Leith savait que la jeune fille avait une maladie car elle se rendait régulièrement à Saint Mongol, et qu’elle pouvait emprunter des cheminées pour aller en cours (Leith était très jaloux de ce privilège, le matin, il aurait aimé pouvoir en bénéficier au lieu de se taper les escaliers). C’était aussi une excuse pour échapper à tout un tas d’activités, du genre que le casse-cou qu’il était adorait. Cela ne l’empêchait pas de proposer à la brunette, sentant qu’elle avait envie de franchir les limites imposées par ses parents.

Thalia était la parfaite incarnation du genre de filles que Leith s’était attendu à retrouver à Serdaigle : sérieuse, le nez toujours plongé dans un quelconque bouquin, et appliquée dans ses cours (de ce qu’il pouvait en savoir, en tout cas, car la brune ne faisait pas partie de son année). Le genre de filles clairement ennuyeuses avec lesquelles Leith n’avait absolument pas envie de traîner et qu’il préférait embêter, tentant de les déconcentrer lors des cours. Aucune n’atteignait cependant le niveau de la Chichiteuse en cheffe qui, en plus d’aimer les manuels plus que la quasi-totalité de l’humanité était arrogante et maniérée et hautaine et exaspérante she is aggravting. Bref. Thalia n’était pas comme ça. Elle était gentille et adorable et plutôt mignonne, même si elle ne correspondait pas à son genre physique qui lui est Chichi. Elle ne pouvait pas faire plein de trucs à cause de sa santé, mais voulait quand même tenter, et en plus elle aimait les chats. Leith aimait d’ailleurs beaucoup Chess, et Machan ne devenait pas trop jaloux quand il le caressait. « Vraiment ? Machan a pas eu l’air trop perturbé, lui », partagea-t-il. Mais cela était probablement dû au fait que son chat l’avait pris pour l’un de ses congénères, tout en sentant qu’il était familier. Après Chess connaissait Thalia depuis moins longtemps que Machan Leith. « Fillan s’entend bien avec les autres animaux, sauf l’aut’ sale Croup de Montgomery. » Mais vu la haine qui caractérisait la relation des maîtres des deux créatures, ce n’était pas vraiment étonnant. Machan n’avait pas l’air non plus d’apprécier Hercule d'ailleurs. « J’le f’rai apparaître t’à l’heure, s’tu veux. » Il lui adressa un sourire qui se voulait charmeur. Il aimait faire appel à son fléreur le plus souvent possible, et ce dernier ne paraissait pas lui en vouloir.

Les métamorphoses à répétition avaient eu un côté amusant, mais Leith aurait aimé les contrôler davantage. Il imaginait que c’était le cas de beaucoup d’autres sorciers, qui auraient préféré éviter de se changer en animal au moindre bâillement. Au vu des problèmes de santé de Thalia, il se demanda si les transformations avaient eu un effet négatif sur elle. « M’dame Pomfresh t’as vu pour vérif’ que tout va bien ? », s’enquerra-t-il, sincèrement inquiet pour son amie. Un écureuil, ça bondissait beaucoup, c’était le genre de trucs qui épuisaient vite le cœur. « J’me transformais en chat. Etonnant, hein ? », répondit-il d’un ton amusé en passant une main dans ses cheveux pour les décoiffer puis les recoiffer aussitôt.

Thalia accepta sa proposition de sortir dans le par cet il en fut ravie. « Ça t’dit pas d’essayer de grimper toi ? J’peux t’sécuriser hein ! » Ce n’était pas la première fois qu’il le ferait, même si, et il évita de le dire à Thalia, la fois où il avait initié Caitlyn à l’escalade s’était terminé par une chute de son amie. En même temps, retirer le risque de ce genre d’activités, c’était en retirer tout le fun ! « Naaan, j’suis pas totalement teubé t’sais. L’Arbre Boxeur c’pas un truc de tapette et j’réussirais un jour, j’t’assure mais aujourd’hui c’tranquille. Un arbre normal ira très bien ! », assura-t-il à sa camarade. Leith était quelqu’un de très casse cou, l’avait toujours été, mais il n’était pas suicidaire, et avoir failli se faire tuer par le saule qui bougeait lui avait suffi une fois. Il lui faudrait un plan pour s’attaquer à ses branches, et il était bien déterminé pour le concocter, mais chaque chose en son temps.

Leith fronça les sourcils alors que Thalia lui assurait que Chess était dressé pour la protéger. Il n’avait jamais entendu parler d’une chose pareille. Bien sûr, les animaux pouvaient sentir quand vous alliez mal, et Machan s’était souvent frotté contre sa mère à des moments où elle était triste, que ce soit à cause du divorce ou parce qu’un souvenir douloureux du temps de la guerre contre Voldemort était remonté. Mais de là à la défendre et à la protéger ? Leith aimait beaucoup son chat, mais il avait des doutes. « C’est pas l’taff d’un cleps ça ? Genre la meuf blonde qui s’est faite kidnapper par son daron là, Viska, elle se trimballe avec un truc tout moche, paraît que c’est un chien qui la protège, j’sais pas quoi. » Pourtant, les chiens étaient censés être interdits dans le règlement –ce qui ne dérangeait pas spécialement Leith, qui était bien plus chat que chien de toute façon. « C’est un chat magique ? », demanda-t-il donc, intrigué. Machan, non. Il avait été adopté quand il n’était qu’un chaton, chez un éleveur de Maine Coon, ça il s’agissait de la race que voulait absolument l’Ecossais. Un Maine Coon était doux et gentil, mais le sien était aussi indépendant. Il n’était pas vraiment un chat de canapé et aimait suivre Leith lorsqu’il partait escalader dans le parc de Poudlard. Leith était en tout cas content de voir l’enthousiasme de Thalia concernant l’apparition de Fillan, le fléreur avec lequel il s’était lié magiquement.

Outre le côté imprévisible des transformations en animal que Chess n’avait pas semblé apprécié, Leith s’inquiétait surtout de l’impact sur la santé de Thalia. Bien sûr, elle ne se limitait qu’à ses problèmes de cœur, et Leith le lui répétait d’ailleurs assez souvent comme ça, mais il était normal qu’il s’inquiète pour elle. Elle était son amie, après tout. « Mais si elle t’as dit ça…p’têt que ç’aurait été mieux si t’étais allée à l’hosto. Mais bon, si tu t’sens bien…c’est l’principal », répondit-il, toujours un peu soucieux mais ne souhaitant pas que Thalia se fâche, car elle aurait l’impression qu’il la prenait en pitié, la traitait comme un bébé ou il ne savait quoi.

« Genre j’suis pas mims en humain ? », interrogea Leith en jetant un coup d’œil à Thalia, bizarrement devenue toute rouge. « Mais ouais, c’dommage que j’ai pas d’photo quand j’étais un chat », regratte le garçon. Il aurait bien aimé voir à quoi il avait ressemblé pendant quelques instants –et puis on ne pouvait pas dire que Fred ou ses autres amis qui l’avaient vu en chat étaient bons niveau description. "Tu avais quatre pattes et une queue touffue. Et tu étais brun clair, comme tes cheveux."

Histoire de se dégourdir les jambes, Leith avait envie d’escalader quelques trucs hauts dans le parc, et il proposa à Thalia de l’accompagner. « Mais nan. On choisira un truc tout petit pour toi. J’ai vu un sapin riquiqui, genre il fait même pas un mètre. C’trop facile pour moi, mais pour toi c’est impec’ », la rassura-t-elle. Il aimait lui proposer des activités sportives qu’elle n’avait pas le droit de faire en temps normal, genre la course sur balai, mais il ne risquerait pas sa vie non plus. Il n’était pas aussi inconscient qu’il le laissait paraître. « Me font pas peur, wesh ! », s’exclama-t-il en riant alors que Thalia lui disait que si elle se cassait un membre, il devrait s’expliquer avec son frère aîné et à l’infirmière en cheffe de Poudlard. Mais peu importe, il ferait en sorte qu’elle ne tombe pas. « Ouais. J’ai t’jours bien aimé, t’sais. J’grimpe sur tout d’puis qu’j’suis gosse. Genre les murets un peu hauts, le portail de la maison…j’vais sur le toit aussi à Aberdeen, à partir de m’chambre », détailla-t-il, l’air crâne. Il aimait se lancer des défis, et se prouver son agilité hebdomadairement en était un –ce qui ne ravissait jamais sa mère, mais elle savait, à force, qu’elle ne pouvait arrêter son fils unique.

C’était sans doute un peu immature – mais Leith n’avait jamais prétendu être quelqu’un de mature, il n’avait même pas encore treize ans, après tout – mais le blond jugeait souvent les autres à partir de leur amour (ou non) des félins. Ainsi, il ne lui paraissait pas du tout étonnant qu’une personne aussi désagréable que Chiara Montgomery préfère les animaux baveux et collants qu’étaient les chiens, même si, en soi, le fait qu’elle apprécie un quelconque animal était étonnant, à ses yeux. Aussi, et comme il appréciait vraiment bien Thalia, était-il content de savoir qu’elle préférait les chats aux chiens, et qu’elle ne s’était pas rabattu sur le choix de Chess par défaut (car clairement, ni un hibou, ni un crapaud, ne se montrait aussi câlin qu’un mammifère, même si Ewen savait être affectueux, surtout lorsqu’il voulait une rasade en plus de Miamhibou). « Ouais les clebs c’est genre trop contraignant ! Les chats, c’beaucoup mieux », commenta-t-il avec le sourire avant d’apprendre que Chess possédait un côté magique. « Chanmé ! Genre il a un triple sens et tout et tout ! », s’enthousiasma-t-il alors que le chat aussi grand que Machan venait vers lui -il en profita évidemment pour le caresser, car il ne pouvait s’en empêcher. Chess ronronna, et se frotta à ses jambes, et Leith continua un moment ses caresses avant que le félin ne retourne vers sa maîtresse.

Leith passa sur le sujet de la santé de Thalia, alors qu’elle lui promettait qu’elle se sentait bien. Ce n’était pas la peine d’insister, elle finirait par le prendre mal, par croire qu’il ne lui faisait pas confiance, qu’il croyait mieux tout savoir qu’elle, alors que c’était elle qui vivait avec sa maladie. Elle l’avait rassuré, et c’était, au final, tout ce qui comptait. D’autant que la suite devint plus intéressante, alors que Thalia assurait, les joues très rouges, qu’il avait dû être très mignon en chat. Thalia s’enfonça encore plus par la suite, faisant des grands gestes dans tous les sens, bafouillant quelque peu, alors que lui se marrait intérieurement. « Ah ? Et qu’est ce tu voulais dire ? », demanda-t-il en haussant les sourcils, sourire aux lèvres. Ok, il la torturait peut-être un peu trop là mais c’était trop tentant ! « Quoi ? J’suis très moche en humain ? », répéta-t-il en déformant volontairement sa phrase pauvre Thalia. Il avait cru entendre qu’elle le trouvait mignon (et il l’était objectivement!) mais autant en être sûr et certain !

Pour rassurer son amie, Leith lui avait parlé d’un défi pas trop important, un petit sapin qu’elle grimperait sans difficulté aucune. Il rit alors qu’elle s’offusquait de ces paroles. Il n’avait pas eu l’intention de la vexer. « Y’a plus grand s’tu veux wesh. C’était juste pour qu’tu risques r ! Mais...un mètres cinquante deux juste ? T’es à peine plus grand que moi meuf ! », la taquina-t-il. Et il avait que douze ans et il était petit pour son âge ! Mais qu’importe, il n’avait rien contre les filles petites, tant qu’elles étaient mignonnes et sympa comme Thalia ! « Ooooh faudra qu’j’demande à James, il conaît p’têt le mec, il pourra m’filer les bails pour éviter de finir tout cassé ! Ma daronne va jamais s’en remettre sinon... » Après, ils avaient toujours la magie pour le réparer, mais certaines blessures laissaient des marques que même la sorcellerie ne pouvait arranger. « T’inquiètes j’suis un vrai bonhomme moi, j’suis solide ! Mais j’essayerais pas l’Arbre boxeur tout d’suite, j’vais m’préparer avant, tu vois ! » Pour réussir à grimper au dessus sans tomber ni finir amoché de partout, évidemment !

Leith était très fier d’être Ecossais, ce n’était un secret pour personne. Aussi, alors qu’ils prenaient la direction du parc et que Thalia lui demandait de parler d’Aberdeen, il se lança joyeusement, avec son habituel rythme de paroles rapide : « C’est la plus belle ville du monde, wesh, j’aime bien Bristol aussi, mais à côté, c’est du pipi de Machan. Beaucoup de maisons sont en granit, mais y’a aussi plein d’fleurs partout et des parcs, et on est au bord de la flotte. La plage est trop chanmé même si bon, fait toujours un peu froid. Il y a plein de châteaux super hantés pas loin. L’université est trop classe, aussi, genre j’pense elle bat Oxford », fanfaronna-t-il, sachant bien que Thalia protesterait, vu que c’était le lieu où ses parents enseignants et où elle avait grandi.

746 mots