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 Le Clan des rats (suite)

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Ξ Sujet: Le Clan des rats (suite)   Le Clan des rats (suite) EmptyDim 30 Déc - 23:24

30. Braak.

La Justice du Clan était quelque chose qui n’avait plus cours depuis longtemps mais son souvenir inquiétant hantait les mémoires. C’était une mise à mort, bien sûr, mais particulièrement lente et pénible. On crevait les yeux et on coupait les moustaches du supplicié puis celui-ci était placé au milieu de tous les rats qui lui donnaient à tour de rôle un coup de griffe ou un coup de dent. Griffure après morsure, morsure après griffure, le condamné se débattait dans une nuit de douleur sans pouvoir se défendre et finissait par appeler la mort pour abréger ses souffrances.

Plus aucun rat vivant n’y avait assisté mais la sentence suspendue au-dessus de Braak fit frissonner l’assistance. Après quelques instants, des cris joyeusement féroces se firent entendre dans les derniers rangs. Visiblement la soif de vengeance ne semblait pas amère à tous.

L’enthousiasme de la foule fit vaciller la farouche attitude de Braak. Malgré ses airs de gros dur, il n’avait pas envie de finir en charpie. Skiìrt attendait ce moment.

« Braak ! Si tu expliques quels ordres tu as reçu, si tu confesses les complots de ton maître, si tu révèles des faits importants, ton sort pourra être changé ! »

La compréhension chemina lentement dans le cerveau de la brute. La réflexion prit encore plus de temps. On entendait presque les rouages de sa mémoire grincer.

- « Il y a… L’attentat contre toi ! » Bredouilla Braak.
- « Traître ! » Siffla Àrĭiķ qui commença à se débattre.
- « Salopard ! Avec tes idées de dingue, tu nous as foutu dans une belle merde ! » Rétorqua Braak qui s’agita, lui aussi.
- « Faites taire Àrĭiķ ! » Ordonna Skiìrt. Plusieurs rats imprégnés se roulèrent sur la tête du roi déchu qui regarda bientôt l’assistance d’un air hagard.
- « Raconte cet attentat. » Demanda-t-il ensuite.
- « Tu connais comment que ça s’est passé puisque t’y étais. J’ai voulu faire ça en douceur et pas te faire souffrir parce que j’t’aimais bien, dans le fond , mais tu nous as bien roulé et t’as filé entre nos griffes. C’était pas bête de jouer au mort. J’aurais dû m’douter que tu ruserais ! » C’était la façon qu’avait Braak de tenter d’amadouer celui qui pouvait réviser son destin. « De toute façon, moi, j’avais rien contre toi. C’est Àrĭiķ qui voulait que tu dégages de sa route. Y m’a dit de faire ça pour qu’ça passe pour un accident. Si on avait fait ça à ma manière, y’aurait pas eu de pépin ! » Ajouta-t-il avec un air de regret.
- « Àrĭiķ ! Ton complice a avoué ! Reconnais-tu maintenant ta forfaiture ? » Skiìrt venait de se tourner vers le deuxième accusé.
- « Crève ! » Cracha l’interpellé. Mais, encore étourdi par l’odeur de la sève, la folie qui l’agitait ne lui donnait pas encore l’énergie suffisante pour briser l’emprise de ses deux gardiens.
« La justice du clan pour lui aussi ! » Ce cri était parti de l’endroit le plus effervescent de la foule qui essayait de pénétrer dans l’espace réduit de la chambre royale.
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Ξ Sujet: Re: Le Clan des rats (suite)   Le Clan des rats (suite) EmptyMar 1 Jan - 17:20

31. Pillage

Fli’it se glissa jusqu’à lui. Elle lui susurra longuement quelque chose à l’oreille. Skiìrt sembla réfléchir plusieurs secondes puis lui jeta un regard d’approbation. Il se dressa sur ses pattes arrière pour prendre une pose qu’il espérait impressionnante. « Clan de Poudlard ! » Annonça-t-il, « Le sort du tyran va être décidé par le nouveau Conseil des Trois ! Y a t’il quelqu’un qui conteste ? »

Après un instant de silence prolongé, de légers murmures commencèrent à sourdre de la foule.

Les vibrations de ces susurrements ne reflétaient pas de colère. Skiìrt sentait dans ses moustaches qu’aucune contestation ne surgirait. Et cela valait l’acceptation tacite qu’il attendait et qui renforçait l’autorité du Conseil. Après cela, il serait plus facile d’imposer les décisions du Conseil auprès de ceux qui ne l’avaient pas élu. Avec un frisson, il songea qu’il commençait à penser comme un politicien.

Pour ce que son ouïe attentive pouvait capter, les chuchotis n’étaient que des questions posées à voix basse à propos de ce concept de Conseil. Evidement, ce n’était pas très clair pour les rats restés au château qui n’avaient pas vécu l’épopée démocratique de ces derniers mois. L’ idée qu’autre chose qu’un roi pouvait diriger le clan des rats de Poudlard était si révolutionnaire que chaque explication devait être répétée plusieurs fois avant de faire son chemin dans les strates de certitudes héritées par des centaines, voire des milliers de générations. Progressivement, les chuchotis devinrent discussions, puis débats. Les inquiets se rassuraient progressivement. Du moment qu’une hiérarchie gouvernait leurs vies, ils se sentaient rassurés, peu importait finalement la forme qu’elle pouvait avoir. Trois têtes en valaient bien une. Quelques notions difficiles nécessiteraient d’autres explications. Ils avaient encore un peu de mal avec l’idée du changement de responsable en fin de mandat mais, s’ils adoptaient ce nouveau régime, comme l’espérait Skiìrt, ils ne pourraient qu’y souscrire.

Les deux clans n’avaient pas fusionnés en un seul, pas encore, mais l’organisation mise en place par les rats venus de l’extérieur était manifestement supérieure à celle, lamentable actuellement, du château qu’il semblait naturel que les rats de Poudlard se sentent attirés par ce nouveau groupe. Après tout, c’était celui de leurs amis, de leurs cousins, de leurs frères. C’était donc aussi un peu le leur, finalement. Mentalement, ils procédaient déjà à la réunification, leurs attitudes le démontraient déjà. Si la question de la légitimité d’Àrĭiķ était tranchée, la royauté ne serait plus qu’un mauvais souvenir et l’objectif de la réunification serait atteint sans qu’il soit besoin de convaincre quiconque.

Ce conseil fut long. Car derrière le sort d’Àrĭiķ, c’était aussi le destin des rats qui avaient suivi et exécuté ses ordres qui allait se décider. Pour l’instant l’humeur de la foule était plutôt joyeuse car elle pressentait l’abolition du régime qui les avait tant fait souffrir mais déjà quelques uns réclamaient vengeance. Dans quelques temps, si rien n’était fait, les opprimés tenteraient de se faire justice et deviendraient à leur tour des bourreaux.

La proposition de Bliîk d’appliquer la justice du clan à tous les coupables ne fut débattue que le temps de la rejeter. D’abord, les condamnés étaient trop nombreux et se battraient avec l’énergie du désespoir dès qu’il connaîtraient la sentence. D’autre part Skiìrt voulait trouver une solution pacifique qui calmerait les tensions accumulées par ces mois de souffrance. La mansuétude qu’il proposait fut aussi rejetée par les deux autres qui arguaient qu’elle permettrait à Àrĭiķ de regrouper ses forces et d’organiser quelque chose comme l’attentat où Skiìrt avait failli laisser la vie.

Soudain, un rat vint les interrompre en plein milieu de leur débat. On se battait à l’extérieur. Les réserves de nourriture qu’avaient amassé le roi venaient d’être découvertes et les rongeurs affamés étaient commencé à les piller avec allégresse. Puis la rumeur de la découverte avait attiré tous les autres ventres creux et les disputes avaient commencé, dégénérant rapidement en bagarres.

Le conseil des trois débarqua dans une pagaille générale. Certains individus gisaient à terre, se traînant faiblement, tout dégouttant de sang. Il n’y avait pas encore de morts, l’adversaire n’ayant pas de raison de s’acharner dès lors que l’autre abandonnait ses prétentions sur la portion de butin disputée. L’arrivée du conseil sur les lieux provoqua la rotation de quelques têtes aux yeux à demi fermés, babines retroussées sur des dents jaunes prêtes à mordre. L’immobilité des nouveaux arrivants généra un instant d’hésitation que les cerveaux durent mettre à profit pour réfléchir quelque peu car le changement d’attitude fut spectaculaire
fit cesser les combats, ce qui témoignait de l’impact qu’avait pu avoir en si peu de temps ce nouveau type de gouvernement sur les esprits. Skiìrt donna des ordres. On distribua la moitié de la réserve pour satisfaire la foule. Les portions distribuées n’étaient pas énormes mais suffisantes pour satisfaire les estomacs. Le reste fut conservé et mis sous bonne garde. Après une petite discussion du conseil, on décida de réserver ce stock pour nourrir les rats malades ou trop vieux pour aller chercher leur nourriture eux-mêmes. On organiserait plus tard des expéditions pour maintenir ce stock de sécurité afin de donner une assurance aux plus démunis. Quelques contestataires braillèrent qu’ils avaient faim maintenant et qu’il ne servait à rien de conserver de la nourriture pour demain mais la plupart trouvèrent l’idée excellente. La crise cessa et les museaux emmenèrent chacun la portion de nourriture qu’on leur avait distribué.
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Ξ Sujet: Re: Le Clan des rats (suite)   Le Clan des rats (suite) EmptySam 26 Jan - 22:08

32. Procès
La réunion du jugement d’Àrĭiķ reprit. Cet intermède avait laissé le temps au subconscient de Skiìrt de trottiner jusqu’à une nouvelle possibilité. Expulser les indésirables du château en les laissant s’établir dans la vieille abbaye fraîchement abandonnée était satisfaisant sur bien des points. Les ruines étaient toutes aménagées et accueilleraient sans problème les nouveaux exclus. Avec un peu de nourriture au début et en leur enseignant deux ou trois choses, la survie à court terme leur serait quasiment garantie. Ce serait comme s’ils étaient prisonniers à l’extérieur du château.

Dans une lune ou deux, quand les esprits se seraient apaisés, on pourrait envisager quelques rapatriements assortis d’une période de mise à l’épreuve. On pourrait, voyons… leur faire effectuer des tâches d’intérêt général, après quoi, ils pourraient réintégrer librement le clan si leurs comportements avaient donné satisfaction.

De façon prévisible, Bliîk protesta contre la douceur de ce traitement mais comme ses propositions tournaient toutes autour de sanctions plus ou moins sauvages, les suivre n’aurait certainement pas facilité le retour de la paix. A force d’arguments, les deux autres arrivèrent à le calmer légèrement jusqu’à une acceptation molle d’une solution pacifique. Fli’it se proposa alors comme candidate pour donner les cours de survie en extérieur aux bannis mais, outre le fait que le conseil avait besoin d’elle, les risques étaient trop grands pour une jeune femelle face aux rustres qu’elle aurait du former. Deux jeunes mâles furent choisis pour assumer cette tâche.

La question épineuse que tous trois évitaient depuis un moment revint inévitablement. Qu’allait-on décider pour l’initiateur de tout ce bazar, le germe de la discorde, le trublion de la paix, le faux-roi ? En d’autres termes, que fallait-il faire d’Àrĭiķ ? Le bannir, c’était lui permettre de reconstituer ses forces et de redevenir une menace. Le tuer, Skiìrt était farouchement contre. Il était sûr que le clan réunifié ne devait pas maculer la page d’histoire qu’ils étaient en train d’écrire avec une tache de sang, fut-il aussi noir que celui qui devait couler dans les veines d’Àrĭiķ. Bliîk était de l’avis opposé comme on pouvait s’y attendre et Fli’it n’arrivait pas à trancher. Elle aurait aimé être d’accord avec son ex-idole devenue son confrère et dont l’allure juvénile ne la laissait pas insensible bien qu’elle n’en laissait rien paraître mais elle était aussi d’accord avec Bliîk quand il disait qu’on ne pouvait pas relâcher ce dingue sanguinaire qui ne penserait qu’à se venger.

Une idée finit par germer dans son esprit. Si on enfermait l’ex-roi dans un réceptacle de bois suffisamment épais pour qu’il ne puisse s’en échapper qu’après de très nombreuses heures de grignotage, on pourrait confier l’ensemble à la rivière qui se chargerait de l’emmener très loin. Assez loin pour qu’il ne puisse pas revenir. Cette solution permettrait de bannir l’ancien monarque sans espoir de retour.

Skiìrt trouva l’idée originale et séduisante dans un premier temps. Mais, après quelques instants de réflexion, il se rappela avoir entendu que toutes les rivières se jettent dans la mer. Finalement, il objecta que cette solution n’était qu’une mise à mort lente et cruelle. Devant l’incompréhension des autres, il dut expliquer ce qu’était la mer à ses deux compagnons qui n’avaient jamais quitté l’univers du château. Le concept d’une étendue d’eau si vaste qu’on ne pouvait pas la traverser à la nage était trop incroyable pour qu’ils puissent imaginer ce que leur décrivait leur ami. Ils objectèrent que le banni pourrait toujours se jucher sur sa prison pour attendre de toucher la rive. Skiìrt leur parla alors des courants, des vents et du fait que le bois finirait par s’imbiber et couler si le naufragé n’était pas mort de faim avant. Famine ou noyade, c’était presque assurément le sort auquel ils condamneraient le banni. Cette idée d’une mort lente et cruelle fit grincer des dents de plaisir Bliîk mais il ne fit aucun commentaire.

Tout compte fait, Àrĭiķ commençait à se faire vieux et il suffisait de le garder sous surveillance pendant encore quelques mois pour que le temps fasse son œuvre et fasse disparaître ce sinistre personnage. On pouvait le garder enfermé dans un de ces pièges que Rusard laissait traîner un peu partout dans le château. A trois ou quatre, on pourrait facilement transporter cette cage improvisée dans les sous-sols profonds où personne ne s’aventurait. Avec quelques gardes pour l’empêcher de s’échapper et un peu de nourriture de temps en temps, le problème pourrait être considéré comme réglé.

« Non, Bliîk, pas question de le laisser crever de faim… »

La décision enfin prise à l’unanimité, ils eurent l’impression qu’un poids avait été enlevé de leur échine. Ce fut d’un pas léger qu’ils rejoignirent la troupe qui attendait depuis plusieurs heures de résultat de leurs délibérations. Les accusés étaient là, encadrés de vigoureux mâles qui décourageaient les tentatives de fuite. Des mouvements d’énervement agitaient la foule maintenant nombreuse. La tension dans l’air était presque palpable.

Les trois rats les plus importants du clan traversèrent solennellement la masse grouillante et vinrent se poster près des prisonniers. Bliîk s’avança comme convenu.

- « Àrĭiķ, le Conseil a décidé… »
- « Foutaises ! C’est ce petit salopard, là, qui mène sa vengeance ! » Àrĭiķ désignait du museau Skiìrt. « Il vous a tous manœuvré pour me voler mon trône ». Les sifflements de rage croissaient en intensité.
D’un coup, le roi déchu se dégagea de l’emprise des gardiens qui l’encadrait et, avec une vivacité et une force étonnante pour un mâle vieillissant, il bondit vers le petit rat brun, griffes en avant et incisives découvertes.

La victime visée avait lui aussi de bons réflexes et, d’un bond sur le côté, il laissa passer la lourde masse de l’agresseur qui devait faire le double de la sienne. Sur le plan de la force, il n’avait aucune chance. Son principal avantage était dans sa légèreté et dans sa rapidité. Malheureusement, il y avait trop de monde dans la petite cave pour qu’il puisse arriver à épuiser son adversaire avant de se faire attraper et mettre en pièce.

Àrĭiķ avait fait demi-tour et s’apprêter à bondir de nouveau. Les rats effrayés, se rappelant les démonstrations de brutalité qui avaient fait leur quotidien depuis si longtemps, s’écartaient du vieux tyran déchu en lui dégageant l’espace pour qu’il prenne son élan. Dans le même temps, les mouvements de foule réduisait la zone de liberté de Skiìrt, raccourcissant d’autant ses trajectoires d’évasion.

Derrière Skiìrt, une brève lutte et un cri. Braak venait de se libérer à son tour. Face à ces deux brutes, le seul recours était la fuite, mais il était coincé. La masse de Braak lui fonçait déjà dessus, éjectant les rats qui se trouvaient entre eux comme un poisson fendant les eaux. De l’autre côté, Il entendit l’ex-roi commencer sa course en sifflant de fureur. Echapper à l’un, c’était se jeter dans les griffes de l’autre. Au dernier instant, Braak sauta par-dessus Skiìrt, figeant ce dernier de surprise. Il s’était attendu à ce que l’énorme rat utilise toute la force de son élan pour l’assommer mais il continuait sa course et percuta Àrĭiķ en pleine course, l’envoyant bouler contre le mur.

Un clignement de paupière plus tard, Braak était juché sur son ancien chef et, d’un coup d’incisives expert, lui arracha la gorge. « C’est fini, les conneries ! » Gronda-t-il. Il recula lentement, fixant toujours le corps sanglant de l’épouvantable tyran.

La panique des spectateurs fut remplacée par la stupeur. Le terrible Àrĭiķ ne terroriserait plus personne. Son meurtrier se retourna vers Skiìrt, les poils du museau dégoûtant de sang. Un regain d’effroi agita l’entourage du rat. Le vide commença à se créer entre les deux. « Nom d’un fromage ! Comment vais-je m’en sortir ? » pensa Skiìrt. Vu la facilité avec laquelle Braat avait expédié le terrifiant Àrĭiķ, il était probablement le meilleur combattant du clan. Il n’allait faire qu’une bouchée de lui.
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