Une soeur et son frère [PV]

Pré-au-lard. Elle avait hésité à y aller, à sortir de Poudlard. Elle savait intuitivement ce qui l'y attendait. Elle avait d'ailleurs à cet effet préféré se promener seule non loin de la cabane hurlante. Cette vieille maison était hantée selon les rumeurs, elle n'était pas la seule. Myrielle aussi avait son fantôme et il était derrière elle, elle sentait sa présence. Lentement, elle se tourna et le fixa. Il était là, en chair et en os. Son cauchemar, son rêve, sa peur, son envie... son frère. Elle l'aimait, il était sa chair, son sang, il était tout ce qui lui restait de leurs parents. Elle l'aimait mais d'eux deux elle était la seule à avoir réaliser qu'ensemble ils se détruisaient.

"Bonjour Nathan" dit elle d'une voix enrouée mais sans détourner le regard. Il n'avait pas beaucoup changé en un peu plus d'un an de séparation. Il était toujours plus grand qu'elle mais plus tant que dans ses souvenirs... Finalement, celle qui changeait toujours, c'était elle. Elle avançait quand lui restait à regarder leur passé et tout ce qu'ils avaient perdu. C'était probablement plus dur pour lui de tracer un trait sur leur vie d'autrefois. Il avait connu un passé dont Myrielle ne se souvenait pas, un passé où ils avaient des parents, où ils étaient heureux. Une enfance auquel Myrielle n'avait pas eu le droit.

Elle ne savait pas comment tournerait cette rencontre mais elle espérait que ce ne serait pas en affrontement. Un souffle de vent fit voler sa cape derrière elle et dévoila ses jambes qu'elle ne cachait plus. On ne voyait plus ses cicatrices, celles qu'il lui avait faites il y a longtemps, presque dix ans en fait. Le vent retomba, la cape aussi. Elle replaça une mèche de ses cheveux rouges derrière son oreille sans le quitter des yeux. C'était l'un des principes qu'il lui avait appris, on ne doit jamais quitter des yeux un ennemi potentiel sous peine de se faire attaquer par surprise. Elle était une Symphonie, elle avait retenue toutes ces leçons sans en oublier aucune.

Ils étaient frère et soeur et si leur parents étaient toujours en vie, ça aurait probablement tout changé. Peut être seraient ils heureux tout les deux, ensemble dans leur manoir. Cela n'aurait pas changer tout dans le présent de Myrielle mais beaucoup de choses et autant dire qu'elle était persuadé que cela aurait été encore plus frappant chez Nathan. Quel dommage... Quel gâchis... Il aurait dû faire un beau mariage, transmettre leur nom et au lieu de ça, il s'accrochait à elle et avait terminé à Azkaban. Comment se défendre de lui ? Oui. Elle en avait peur. Elle ne le montrait pas, mais elle le craignait et à n'en pas douter, il le savait.

Elle avait mal au ventre, comme si elle avait avalé quelque chose de très lourd... à moins que ce ne soit juste le poids de la culpabilité... d'avoir commencé une nouvelle vie dont son cher frère ne faisait pas parti.

Retrouver la liberté après de longs mois de prison avait quelque chose de grisant. Voire même d'un peu effrayant. Nathan avait le sentiment que ce soudain trop plein d'espace l'écrasait. Les cellules d'Azkaban n'avaient jamais été bien grandes, et à force d'y être enfermé toute la journée, le jeune homme avait pris l'habitude d'évoluer dans un espace clos qui limitait considérablement ses mouvements. Aussi l'immensité de la lande écossaise le mettait-elle mal à l'aise. Il se sentait gauche, comme ralenti, ce qui l'excédait au plus haut point.

Nathan avait lancé au ciel un regard mauvais, les narines écartées et les mâchoires serrées, exactement comme s'il le tenait pour responsable de cette situation, avant d'enfoncer avec détermination ses mains dans les poches d'une cape désormais trop grande pour lui. Si les cellules d'Azkaban étaient petites, les repas - deux par jour - étaient certainement les pires de toute l'Angleterre. Ce qui n'était pas peu dire. D'ailleurs, les prisonniers, torturés par de sombres pensées, les finissaient rarement. Certains oubliaient même de s'alimenter. Oubliaient ou refusaient.
Nathan, lui, avait toujours tout avalé, mais ce "tout" était bien peu pour subvenir aux besoins réels de sa grande carcasse. Il avait maigri, à l'instar de tous les autres. Mais pour le moment, il s'en moquait. De toute façon, il n'avait jamais paru très épais.

D'un pas vif mais que l'on devinait encore incertain, le jeune homme s'était dirigé vers le point de rendez-vous. Il était un peu en avance, mais sa fébrilité grandissante, à l'idée de revoir sa chère soeur, n'avait pas supporté d'attendre tranquillement l'heure de partir.
Il s'appuya négligemment contre la barrière de bois et laissa son regard se perdre du côté de la Cabane Hurlante. Il ne doutait pas un seul instant que Myrielle viendrait. Dans son esprit, la jeune fille restait "sa chose", qu'elle puisse refuser de le voir était inconcevable, même après ces longs mois de séparation. Elle lui appartenait toute entière. Elle lui appartenait et pourtant...

...Pourtant, Nathan ne pouvait s'empêcher de penser que Myrielle avait certainement eu le temps de s'émanciper un peu de sa tutelle depuis qu'il avait été envoyé en prison. Ce qui le plongeait tout à tour dans un profond désespoir et une rage folle. De quel droit, de quel droit pouvait-elle penser qu'elle pouvait s'éloigner de lui alors qu'il lui avait tout donné, tout appris depuis le début ? Non ! Elle ne pouvait pas le laisser. Il ne lui permettrait pas. Et peu importe le nombre d'années qu'il devrait encore passer à Azkaban ! D'ailleurs, il serait plus intelligent cette fois-ci. Il ne se laisserait pas reprendre. Le retour du Seigneur des Ténèbres changeait, de toute façon, radicalement la donne.

Alors que Nathan laissait ses folles pensées vagabonder, il vit venir à lui la silhouette de Myrielle, reconnaissable entre toutes. Il esquissa un sourire sans joie, dévoilant en partie ses dents. Mais quand sa soeur parvint à sa hauteur, le sourire avait disparu.
Il la fixa d'un oeil perçant au fond duquel brillait une étrange lueur et répondit d'un ton froid, presque métallique :

- Myrielle...

Il hocha sèchement la tête et prit le temps de détailler la jeune fille de la tête au pieds. Parfaite. Comme de juste. Presque trop parfaite. D'autres que lui devaient l'avoir remarqué... Et ces cheveux...

- Comment vas-tu ?

Il avait énormément de questions à poser. Mais plus tard. Pour le moment, il s'agissait d'être civilisé. On n'attrape pas les mouches avec du vinaigre.

A la question de Nathan, elle haussa un sourcil perplexe et esquissa un sourire ironique voir amer. Comme s'il se souciait de comment elle allait véritablement. Elle n'était qu'un objet après tout, une arme.

"Ne pose pas de question dont tu ne veux pas connaître les réponses... Au fond, que je dise oui ou non, tu ne seras pas satisfait." Même si c'était un amour dangereux, elle savait que Nathan l'aimait. Si elle lui disait que non, elle n'allait pas bien pour x ou y raison, il serait peut être triste, ou en colère. Si elle répondait oui, il serait furieux parce qu'elle trouvait le bonheur sans lui. Il n'y avait pas de bonne réponse à cette question alors autant ne pas se prononcer et laisser planer le doute.

Elle le regarda alors, elle ne l'avait pas vu depuis des mois mais il ne semblait pas avoir beaucoup changé. Il avait juste...

"Tu as maigri. Tu devrais t'acheter des beignets au chocolat pour te remplumer un peu. Si mamie te voit comme ça, elle va en faire un arrêt cardiaque. Oh mais j'oubliais tu devrais être en prison... Tu ne peux sans doute pas entrer dans une boulangerie." Un nouveau sourire, narquois celui ci, apparu sur le visage de Myrielle. Il y avait une guerre entre eux, elle ne pouvait pas se permettre d'être douce et gentille. Dans ses yeux il y avait un défi. Qu'il essaie de la frapper, elle lui rendrait les coups. Elle pensait cependant qu'il y avait une plus forte probabilité pour qu'il cherche à savoir jusqu'à quel point elle lui avait échappé. S'il cherchait la bagarre directement, il ne saurait rien. Il était trop intelligent pour ça... bien qu'impulsif.

Au cas où, elle gardait sa main droite le long de son corps pour attraper facilement le poignard dans sa cuissarde. Son autre main était sur sa hanche. Volontairement sexy, elle le provoquait. Il n'avait jamais supporté qu'elle séduise des garçons mais elle était une chasseuse, c'était lui qui l'avait fait comme elle était, et elle avait tout pour. Ils étaient des Symphonies, ils étaient parfaits.

Quand elle s'était enfuie de chez elle, il y a déjà plus d'un an et demi, elle faisait dans les un mètre soixante, soixante-cinq. Maintenant, elle faisait un mètre soixante-treize. Elle n'était plus une petite fille, elle était presque une femme. Elle se demandait si il le réalisait. La voyait il encore comme elle était il y a quelques années ? Fragile à s'en briser, entièrement dévouée à sa cause... Non, elle n'était plus tout ça. Elle était amie avec Alexander, elle était intégrée dans un groupe d'amis, elle avait une nouvelle famille, de nouveaux frères et soeurs. Ils ne remplaceraient jamais Nathan... Mais il était évident qu'elle ne pouvait plus le suivre...

Ah. D'accord. Nathan avait parfaitement conscience que Myrielle n'était plus une docile petite fille. Il l'avait appris à ses dépens. Mais jamais il se se serait attendu à ce qu''elle se montre aussi... Sarcastique. L'espace d'un court instant, il eut envie de la gifler. Sa main droite se contracta et il plissa imperceptiblement les yeux, l'air mauvais. Toutefois, l'image de sa cellule étroite et humide d'Azkaban suffit pour qu'il se contienne. Il n'avait pas envie d'y retourner. Il avait bien d'autres projets en tête pour le moment. Et il était autrement plus intéressants que la perspective de tourner en rond dans un clapier à lapin.

Résistant donc à sa poussée de violence, Nathan se contenta de fixer Myrielle un peu plus attentivement... Pour constater à son grand désarroi qu'elle avait l'air plus épanouie et moins décidée à lui obéir que jamais. Ce qu'il mit aussitôt et parfaitement arbitrairement sur le compte d'Alexancer Shinku. De toute façon, il était de notoriété publique que tous les maux de Nathan venaient des Shinku. Nathan serra les dents et se jura silencieusement d'éterniser les souffrances de cette saleté d'Alexander si jamais il avait osé toucher et même parlé à sa soeur. Non, en fait, il fallait mieux pour le gentil petit Shinku qu'il ne l'ait même pas regardé. La vengeance est un plat qui se mange froid et, dans le cas de Nathan, c'était carrément du surgelé. Tant mieux : elle n'en serait que plus jouissive.

Il fut obligé de prendre sur lui pour quitter la délectable vision d'un Alexander Shinku se tordant de douleur et de repentir dans une longue agonie et revenir à Myrielle. Il avait de plus en plus de mal à rester concentré depuis qu'il avait été enfermé à Azkaban. De toute évidence, la prison n'avait fait qu'accentuer un peu plus sa folie latente. Azkaban était très réputée, lorsqu'il s'agissait de faire sombrer ses pensionnaires dans la folie. Même les plus sains d'esprit ne pouvaient y résister. Alors quand on avait des prédispositions...
Le jeune homme eut un signe - qui relevait du pur tic - impatient de la tête avant de répondre d'un ton détaché :

- Laisse les beignets où ils sont et dis-moi plutôt... Comment va ce cher Shinku ?

Oui, chez lui, ça tournait à l'obsession destructrice... Ce n'était peut-être pas la meilleure façon de se concilier Myrielle mais cette dernière n'avait pas l'air d'avoir très envie de se montrer conciliante de toute façon. D'ailleurs, Nathan ne se sentait pas capable de jouer les parfaits grands frères. Mieux valait-il aller droit au but. Lui demander comment elle s'en sortait en cours, par exemple, aurait sonné atrocement faux. Et il ne réussirait qu'à s'aliéner un peu plus sa précieuse soeur.

On y venait. Le sujet préféré de son frère depuis la mort de leurs parents : Alexander Shinku. Nathan était obsédé par l'idée de venger Anaelle et John, Myrielle s'en moquait. Elle ne se souvenait même pas d'eux, et quand bien même ce serait le cas, elle avait la présence d'esprit de se rendre compte que le coupable était déjà en prison pour payer son crime. Alexander était l'unique héritier de cette famille, mais il n'avait qu'un an quand ses parents étaient morts, il n'était coupable de rien, si ce n'est d'être né, au même titre qu'elle.

Que répondre ? Hum... Myrielle choisit la provocation.

« Il va très bien. Il se portait encore mieux quand tu étais loin de nous mais nous savons tout les trois que rien n'est jamais totalement parfait. »

Elle croisa les bras sous sa poitrine, le décolleté de sa chemise laissant apparaître un des cadeaux d'Isaac : une croix en argent. Elle ne savait pas pourquoi elle l'avait mise, peut être pour se donner du courage. C'était suite à sa relation avec Isaac qu'elle avait laissé son frère, s'apercevant qu'ils se détruisaient mutuellement dans une relation trop fusionnelle. Isaac était le seul à comprendre sa douleur... même Alexander, le plus au fait du caractère et de la violence de Nathan, était trop concerné pour vraiment voir les effets de cette relation fraternelle viciée sur Myrielle.

« En fait, nous sommes devenus bons amis. Devenir est probablement exagéré, nous l'avons toujours été... même si tu as tenté de m'effacer la mémoire pour que je l'oublie. »

La seule erreur de Nathan. Elle lui avait coûté cher. Myrielle était toute dévouée à son frère, elle aurait tout fait pour lui, elle acceptait toute les souffrances physiques qu'il lui imposait... mais qu'il touche à ses souvenirs, ça, elle ne l'avait jamais admis. Il avait été trop loin et trop fort.

« Mais dis moi Nathan... Pourquoi tiens tu à savoir des choses qui vont forcément te déplaire ? »

Ses yeux pâles étaient posés sur son frère et on pouvait y lire une tristesse profonde et ancienne, aussi vieille qu'elle. Pourquoi était il venu ? Pour lui faire mal ? Pour faire souffrir ses amis ? Pour tuer Alexander ? Elle ne le laisserait pas faire. En était il conscient ? Elle n'accepterait pas l'échec. Et perdre pour elle revenait à laisser son frère détruire ce qu'elle avait construit avec tant de difficulté ces dernières années. Maintenant, elle était heureuse. Il ne pourrait rien contre ça, elle l'empêcherait de tout détruire encore une fois. Elle n'était plus dans la même logique que lui et surtout, elle n'avait plus huit ans. Elle avait quinze ans, ce n'était pas vieux, mais la vie dure qu'il lui avait fait menée l'avait endurcie avant l'âge. Elle était tout à fait capable de lui tenir tête, surtout qu'elle savait qu'il ne la tuerait pas... L'inverse n'était pas forcément vraie, car Nathan ne vivait plus depuis longtemps. Myrielle avait fini par le comprendre. Elle espérait réussir à sauver son frère malgré lui, mais s'il échouait, il serait sa première et dernière victime par l'art qu'il lui avait appris. Elle était déterminée. Ce ne serait pas aujourd'hui, là, ils se jaugeaient, comme deux animaux avant un combat, mais un jour, la lutte serait inévitable. Ce jour là, il lui faudrait gagner, le prendre à son propre piège... et peut être le sauver... en même temps qu'Alexander et elle même.

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Compté

Dans un mouvement purement machinal, Nathan serra le poing droit en entendant Myrielle lui répondre avec un détachement teinté d'insolence. Elle avait incontestablement gagné en assurance et en effronterie et, si la première n'était pas pour déplaire au jeune homme, la seconde, par contre, lui était abjecte. Que Myrielle se montre effrontée avec ses professeurs ou le personnel de l'école d'une manière générale lui importait peu, mais qu'elle aussi, de manière aussi consciente, le braver lui, alors qu'il lui avait toujours tout sacrifier que tu crois, que tu crois, était absolument inconcevable.
Pour la seconde - ou était-ce déjà la troisième ? - fois depuis qu'elle était apparue, il éprouva un besoin sauvage de la frapper jusqu'à ce qu'elle comprenne enfin qui était son maître, qui elle devait respecter. Mais il parvint à se contenir... Après tout, Myrielle, livrée à elle-même, avait été soumise à toutes les influences néfastes qui pouvaient bien baguenauder dans les couloirs de Poudlard... Tout compte fait, l'y envoyer avait été une grossière erreur.
Il n'était cependant plus temps de regretter et Nathan chassa bien vite l'image d'une Myrielle en uniforme de Durmstang de son esprit. Il n'était, d'ailleurs, que très peu porté sur les regrets : ce que Nathan voulait, il le voulait à vie et une fois qu'une décision avait été prise, il ne revenait jamais en arrière. Or, sa décision du jour était de mesurer l'ampleur des dégâts qu'avait engendré, che Myrielle, une trop grande liberté de mouvements. Il n'avait pas l'intention de s'arrêter en si bon chemin : pour mieux ramener sa précieuse soeur sur le droit chemin, il lui fallait d'abord savoir contre quoi - ou plutôt contre qui - il se battait.

Il pinça donc les lèvres et plissa les yeux pour mieux fixer Myrielle d'un air étrange, qui oscillait entre une haine farouche et un "je vais te sauver malgré toi" plutôt vain. Savoir un être aussi vil et méprisable que Shinku avec Myrielle lui donnait la nausée... Mais Alexander n'en aurait plus pour très longtemps à lui pourrir la vie. D'ici peu, il aurait retrouvé la place qui aurait dû toujours être la sienne en ce monde, à savoir aucune. Tuer Alexander ferait probablement partie des meilleurs moments de l'existence de Nathan. Et il avait bien l'intention de faire durer le plaisir en regardant le Poufsouffle agoniser lentement.
Mais d'ici là...
Malgré lui, il se rapprocha de sa soeur - houlà, elle avait bien grandi, cette petite ! - d'un air menaçant, jusqu'à se trouver à quelques centimètres de son visage. Là, il chuchota entre ses dents, d'un ton glacial :

- Je veux savoir Myrielle parce que, que tu le veuilles ou non, j'ai bien l'intention de te ramener à la raison. Tu es ma soeur et je ne te laisserai jamais l'oublier.

Il toucha ensuite d'une main dure la joue de Myrielle avant de s'éloigner de quelques pas, l'air farouchement déterminé et - disons-le franchement - un peu fou.
Il agita la main d'un geste lent, comme pour dire "Laissons Shinku où il est pour le moment et poursuivons". Il estimait en savoir désormais assez sur cette vermine japonaise pour lui faire l'honneur de parler de lui plus longtemps. Aussi poursuivit-il, en prenant visiblement sur lui pour conserver une voix calme et détachée :

- Et Isaac, comment va-t-il ?

Comme il avait prononcé "Shinku" un peu plus tôt, le prénom d'Isaac était lâché du bout des lèvres, comme si Nathan craignait de se souiller à la seule évocation du jeune garçon.
Oui, à n'en pas douter, le petite exercice auquel il se livrait était difficile pour lui... Mais sa soeur en valait bien la peine.

Comme si elle pouvait qu'ils étaient de la même famille de dingue ! Ils avaient le même sourire cynique, les mêmes yeux bleus... Impossible de renier cette ressemblance entre eux. Il était son frère, elle le savait et ne pouvait l'oublier. Ce serait même probablement plus facile si elle le pouvait car dans ce cas elle n'aurait qu'à appeler à l'aide et à faire coffrer cet homme dangereux... Mais elle ne pouvait pas le trahir en connaissance de cause. Gardant les bras croisés en dessous de sa poitrine, sa main se contracta sur son bras nerveusement. Il ne voyait rien, il était toujours aussi aveugle...

"Tu es stupide Nathan. Complètement stupide."

Elle lui crachait ses paroles à la figure, les yeux remplies de haine. Pourquoi ne voyait-il pas qu'il détruisait le peu de raison qu'il lui restait en la pourchassant ! Pourquoi ne pouvait-il pas simplement accepter les choses comme elles doivent être ? Elle, mariée avec des enfants, et lui seul, loin d'elle en tout cas, faisant sa vie en tant qu'héritier Symphonie. Voilà ce que voulait la rousse, voilà comment les choses devaient être entre eux. Si il revenait à la raison il pourrait sûrement trouver le bonheur... Il était un sang pur, il pouvait faire un beau mariage lui aussi, fonder sa propre famille... Pourquoi rester obsédé par elle ? Ce n'était pas sain, cela trahissait son traumatisme et ça ne faisait que les faire souffrir tout les deux.

"Celui qui a perdu la raison c'est toi... Et je suis au regret de t'apprendre que ce n'est pas nouveau."

Sa voix se faisait triste et bien que parfaitement audible, elle était faible et triste. Triste pour lui parce qu'elle, elle s'en tirerait toujours... Plongeant ses yeux bleus glacés dans ceux de son frère dans lesquelles brillaient une lueur un peu folle. Il essayait de rester calme, mais Myrielle devinait que ce n'était qu'une apparence qu'il se donnait pour l'amadouer. Pourtant, elle ne voulait vraiment pas le voir si calme, elle voulait qu'il la frappe pour qu'elle puisse lui rendre les coups... Bizarrement, pour une fois qu'elle voulait le voir violent, il était décidé à ne pas l'être. Contrariant ce petit. Bien... jouons à qui perd gagne une nouvelle fois. Sujet chaud brûlant numéro deux : Isaac Irving.

Machinalement, Myrielle porta la main à son collier et le tripota quelques secondes avant de répondre.

"Isaac va bien. On s'amuse beaucoup ensemble. Je crois qu'il me trouve très à son goût dans tout les domaines..."

Bon, bon, c'est pas beau de mentir Myrielle ! La rousse le savait mais mettre Isaac, déjà ciblé de toute façon, dans l'histoire en grossissant le trait évitait à Alexis de subir le même sort. En plus, on ne pouvait pas vraiment dire qu'Isaac soit en odeur de sainteté en ce moment, il l'avait embrassé alors qu'il sortait avec sa meilleure amie... Elle pouvait bien faire croire à Nathan qu'elle faisait plein de choses avec lui, ce ne serait jamais si horrible que le sentiment de dégoût qu'elle ressentait envers elle même rien qu'en ayant échangé un simple baiser.