Ce que l'on s'aime [PV]

Haven n’avait en soit, pas vraiment l’habitude de parler pendant des heures, sauf bien sûr s’il s’agissait de Quidditch. Mais là, c’était de lui dont on parlait, pas de Troy ou Mullet, et encore moins de la prochaine saison. Non, là, c’était lui, sa vie, ses sentiments, sa façon de penser, son état d’esprit… Peut-être que le jeune rouge et or se prenait trop la tête ? Ouais, ça devait être ça, ça ne pouvait qu’être ça ! Après tout, pourquoi il avait commencé à se torturer l’esprit ? Pourquoi il avait prit les sentiments qu’il avait envers Cherise si difficilement ? Pourquoi il avait tout simplement du mal à tout dire ? Tout ça parce qu’au-dessus de lui planait toujours l’ombre de sa sœur, sa précieuse sœur jumelle, qu’il aimait plus que tout. La perdre serait pour Haven la pire des choses, mais perdre Cherise serait tout aussi horrible. L’écossais était partagé entre deux filles, l’une qu’il aimait et adulait qui était sa sœur, l’autre qu’il savait comme l’élue de son cœur… A croire que la vie avait quelque chose contre lui. Il avait cru pendant un temps que Heaven ne supportait pas Cherise, à cause de son sang, sa maison, et tout pleins de choses dans ce style, qui faisait que Heaven était Heaven, et que Haven, qui se fichait du sang et autre comme de sa première couche-culotte, était Haven. Sur ce point, la brunette en face de lui avait raison. Les jumeaux Clarks étaient totalement différents sur leurs façons de penser, et c’était cela qui faisait que Haven était quelqu’un à part entière. Il n’avait pas à vivre dans l’ombre de sa sœur, mais devait briller par lui-même… Et lors des vacances, Heaven lui avait le plus beau cadeau, en montrant explicitement à Cherise qu’elle l’appréciait, et qu’elle l’acceptait. Heaven s’était prêtée au jeu de la jeune lionne, et Haven avait été ravi.

Alors que Cherise était en train de débattre sur le fait qu’ils devaient trouver quelque chose que pourrait dire le jeune lion pour rembarrer les mecs qui venaient lui parler seulement pour sa sœur, Haven, lui réfléchissait à autre chose. Ou du moins, il imaginait une tout autre situation. Cherise, lui, et un baiser… Chassant cette image de sa petite tête brune, il plongea son regard vairon dans celui de sa cerise, et finalement, la brune trouva. C’était plutôt pas mal même ce qu’elle avait trouvé, et Haven se nota cette phrase dans le coin de sa tête. Tiens, ça lui faisait penser, le journal… Est-ce qu’il serait aussi compétent que Maera ? Elle lui avait donné des conseils, et pour ça elle s’était montrée très gentille, mais Haven était comme ça, il doutait de lui…

« C’est génial ça, je le garde ! » assura-t-il, un petit sourire aux lèvres. Néanmoins, Cherise ne pourrait l’avoir sur le fait qu’elle n’allait pas bein. D’accord, elle n’avait peut-être pas envie d’en parler, ou de lui en parler, elle en avait tout à fait le droit, il ne la forcerait pas, mais qu’elle ne lui mente pas plus longtemps. Il voyait que ça n’allait pas, et même si elle ne lui donnait pas les raisons, il ne lui en tiendrait pas rigueur. Il voulait juste savoir. Savoir s’il avait raison, ou s’il avait tord… Quand la brune dit qu’ils étaient là pour régler ses problèmes à lui d’abord puis les siens ensuite, elle s’était vendue, il n’en demanderait pas plus si elle le lui demandait. Puis, son visage se baissa instinctivement, et ses lèvres se posèrent sur celles de la brune, doucement, tout doucement. Quand Haven prit conscience de la situation, il se redressa rapidement, tournant la tête, fixant un point à l’autre bout de la pièce, les rouges rosies par la gêne. « Désolé, je… Je sais pas ce qui m’a pris… »

Quand Cherise était rentrée dans la salle commune, il y a maintenant un petit moment, et qu'elle avait vu Haven, elle avait rougi. Pourquoi ? Tout simplement parce que des images lui étaient venues en tête et qu'elle s'en voulait... Elle savait que son coeur était partagé. Quand elle était toute seule, elle ne savait pas ce qu'elle préférait au fond d'elle. Voulait-elle que son meilleur ami devienne plus que son meilleur ami ? C'était dangereux, et pourtant, c'était ce genre d'images qui lui venaient en tête quand elle le voyait. Ou voulait-elle une relation impossible avec un jeune Poufsouffle au caractère opposé du sien ?...
Ce qui était sûr, c'est que la petite oscillait entre les deux idées en fonction des personnes avec qui elle était. Influençable ? On ne la connaissait pas comme ça, pourtant... En tout cas, dès qu'elle avait franchi le portrait de la Grosse Dame, il était évident que le jeune Jack Chandlers avait été refoulé dans un coin de sa tête. C'était pour cela que Cherise était mal, depuis un moment. Parce qu'elle sentait que ce n'était pas très glorieux ce qui se passait dans sa tête. Elle avait honte d'elle-même, notre petite lionne. Si honte qu'elle n'en avait parlé à personne, à part Orla, mais la jeune Serdaigle ne se rendait pas compte de ce qui était immoral ou pas...
Quand on y pense, Haven et Cherise se ressemblaient assez. Le garçon aussi était partagé entre deux filles. Sa soeur et elle. Mais bon, vous allez dire que ce n'est pas pareil. Certes, mais bon, c'est pas forcément mieux. Ce devait être pour cela que la brunette aimait tellement ce garçon, non seulement elle passait beaucoup de bon temps avec lui, mais au final, ils n'étaient pas si différents que ça. Et il n'y avait pas cette relation de malaise qu'il y avait entre Cherise et Jack...

Bref, de toute façon, la petite ne pensait pas à toutes ces choses, pour l'instant. Elle essayait de faire parler Haven de lui, elle savait que quelque chose n'allait pas, mais il y avait peut-être autre chose que le problème de sa soeur... Non, il fallait arrêter de se faire des illusions. La petite chassa l'idée qu'elle venait d'avoir. L'espace de quelques secondes, elle s'était dit : "et s'il était triste parce qu'il était amoureux de moi ?"
Mais cela lui avait paru bien vite improbable...

*Arrête tes fantasmes, Cherise, pour lui, tu es juste une bonne amie...*

La petite essayait si bien de se convaincre qu'elle avait presque réussi. Elle était contente que le garçon retrouve le sourire l'espace d'un instant par rapport au plan qu'elle avait proposé pour régler le problème de sa soeur.

*Tu vois, ça va mieux, c'est pas toi, le problème, c'est sa soeur...* pensait-elle pour continuer de se persuader.

Et au moment où elle était le plus convaincue que leur relation relevait de la bonne amitié et qu'il n'y avait aucune ouverture possible, le garçon baissa la tête et posa ses lèvres sur celles de Cherise. Il n'aurait pas plus la surprendre. Comme il l'avait déjà fait la première fois. Mais à ce moment-là, la petite avait à peine onze ans et n'avait qu'une idée très vague de l'amour et n'en ressentait pas le besoin. Du coup, la surprise s'était transformée en colère.
Mais là, la surprise se transforma autrement. Une immense sensation de plaisir envahit le corps de la petite fille. Une grande satisfaction. Comme si la petite voix au fond d'elle qu'elle avait essayé de taire lui disait à présent : "tu vois, c'est possible."
Elle se demandait à présent comment elle avait pu hésiter et se sentir mal pendant tout ce temps alors que cela se faisait à présent si naturellement, comme si c'était une évidence entre eux.
Mais apparemment, cela ne l'était pas tant que ça (il ne fallait pas oublier qu'ils étaient avant tout très bons amis), car le garçon fut saisi par le doute et se retira en s'excusant.

Cherise resta béate un instant, comme si elle n'avait pas réalisé ce qui venait de se passer, puis elle cessa de se contrôler pour dire ce qu'elle pensait.

"Ce qui ne va pas... Tu m'as demandé ce qui n'allait pas..."

Puis elle afficha un immense sourire, un sourire qui n'avait jamais été aussi sincère depuis plusieurs mois. Le sourire qu'elle avait perdu. Le sourire qu'elle venait de retrouver. Le sourire cherisien qui lui était propre.
Elle regarda Haven droit dans les yeux et se pencha pour lui rendre son baiser. C'était cela sa réponse. Pour lui montrer que c'était ce qu'elle attendait, finalement. Que la lettre de son père n'avait plus aucune importance, à présent. Même s'il lui semblait qu'il n'y avait pas besoin de mots pour appuyer son message, elle écarta ses lèvres d'à peine un centimètre et chuchota :

"Non, je ne vois rien qui n'aille pas bien, à présent..."

Si Haven s’était écarté en s’excusant, c’est parce qu’il s’était souvenu de la dernière fois où il avait embrassé Cherise, qui était également la première fois, mais là n’était pas le problème. Le problème avait été la réaction de Cherise, ainsi que la sienne. Il avait été odieux, avait blessé la jeune fille, et s’en était mordu les doigts. Il en avait même pleuré. Quand bien même il n’était pas aussi cœur de pierre que sa sœur, il n’avait pas non plus pour habitude de pleurer devant quelqu’un. Il était un garçon, il avait donc une certaine fierté et dignité, mais là, il avait tout laissé tomber. Il aimait Cherise, il n’avait jamais voulu la blesser, et pourtant il l’avait fait… Il pouvait donc vraiment être un mec méchant, quand il le voulait… Il n’était pas toujours le gentil petit Gryffondor, le gentil lionceau, il pouvait mordre, et il lui arrivait de le faire…

Mais là, les choses semblaient différentes. Déjà, Cherise ne lui criait toujours pas dessus, et aux dernières nouvelles, elle était toujours assise sur les genoux du garçon. Haven lui, fixait toujours un point sur le mur d’en face, cherchant désespérément une excuse qui pourrait justifier son acte. En effet, pour le jeune écossais, il était impossible que Cherise puisse éventuellement l’aimer, comme lui l’aimait. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’il pensait ça impossible, parce qu’il n’était qu’un garçon stupide, qui avait osé lui faire du mal, quand bien même se fut involontaire peu avant leur premier Noël à Poudlard. Il aurait très bien pu affirmer qu’il ne savait vraiment pas ce qui lui avait pris, mais cela aurait été mentir, ou du moins à moitié. Parce qu’il avait en partie contrôlé son geste, bien que cela ait été instinctif d’un côté. Il y avait longtemps qu’il voulait embrasser une nouvelle fois Cherise, juste pour sentir son souffle chaud sur sa peau, pour la sentir contre lui…

Haven risqua quand même un regard vers la petite brune lorsqu’elle prit à nouveau la parole, qui afficha ensuite à ses lèvres, le sourire que le jeune lion aimait tant. Celui qu’il ne voyait plus depuis un bon bout de temps, bien que la demoiselle ait grandement tenté de ne rien montrer. Pour le coup, le rouge et or ne comprenait pas trop ce qu’il se passait (oui, il ne pouvait pas réfléchir et analyser en même temps, c’est bien connu que les garçons ne peuvent pas faire 2 choses en même temps !). Sans qu’il ait le temps de comprendre grand-chose de plus, il sentit de nouveau les lèvres de la lionne sur les siennes, mais cette fois, c’était elle qui l’avait embrassé… Alors, soit Haven rêvait, et il se réveillerait d’ici quelques secondes, soit tout était réel… Doucement, lorsque la brune affirma que tout allait bien à présent, Haven resserra son étreinte, serrant la brunette tout contre lui, l’embrassant doucement dans le cou, et lui chuchotant un petit « Je t’aime » à l’oreille.

[Terminé]