Où en sommes nous ? Peut-être nul part [PV]

Dans la liste – assez longue – des choses qui perturbaient Fredericke, son ami Adrien était dans le peloton de tête. Entendons nous bien, il était clair pour tous les deux que leur petite aventure n’avait aucune valeur, ils passaient toujours de bons moments ensemble à Sterne mais il y avait quand même deux ou trois petits trucs… des trucs pas si important que ça dans le fond, mais qui titillaient la curiosité de Fred’ – pourtant pas vraiment curieuse de nature -. Déjà, première grande question qu’elle se posait : pourquoi Adrien s’était-il à ce point acharné sur Vincent ? Fred avait très mal pris de retrouver Adrien presque en forme même s’il avait le nez cassé et tout un tas de contusions tandis que Vincent était alité. Le Poufsouffle lui avait affirmé que Vincent avait frappé le premier et que lui, Ady, avait un peu perdu le contrôle de ses nerfs vu la situation. Cela lui avait quand même coûté une claque parce que Fredericke n’était pas le genre de fille à accepter qu’on tabasse son meilleur ami. Elle le croyait vraiment quand il lui disait que c’était la faute de Vincent mais n’était-il pas plus intelligent que ça ? Elle pensait qu’il n’y avait que le Serpentard pour sauter à la gorge de quelqu’un à la moindre occasion… et bien non, elle voyait maintenant que n’importe quel garçon pouvait devenir violent. Et encore, ce n’était qu’une partie du mystère Adrien. Comme tout le monde dans l’entourage d’Ady, Fred’ savait qu’il était amoureux d’Anabelle. En fait, un peu comme elle pour Vincent, tout le monde le savait sauf la principale intéressée. C’est fou ce qu’un meilleur ami c’est aveugle dans le fond. Le truc bizarre c’est que si Ady tournait autour d’Anabelle presque tout le temps, en présence de Vincent, c’était autour d’elle qu’il tournait. Elle en venait à remercier le ciel que Vincent ait arrêter Sterne car elle craignait que ça termine en véritable guerre ouverte. Par exemple, était-ce nécessaire que Ady passe ses doigts sur son bras avant de prendre la feuille de chorégraphie quand elle mangeait à la table des Poufsouffles ? le sourire de dragueur aussi elle le trouvait en trop. Bref, Fred’ vivait dans l’angoisse perpétuelle d’un nouveau combat que selon toute probabilité, Vincent perdrait encore une fois. Les deux ans de plus d’Adrien jouait en sa faveur sans compter qu’il faisait de la musculation quand Vincent se la jouait limace depuis aussi longtemps qu’elle le connaissait.

Ce jour là, elle était couchée par terre dans le parc malgré la neige qui recouvrait le sol et elle regardait le ciel blanc tout en continuant à tourner et à retourner les différentes choses qui l’embêtaient dans sa relation avec Adrien. C’est alors que le visage de son ami entra dans son champ de vision, faisant papillonner les yeux de la petite Gryffondor qui ne s’attendait à pas à une telle apparition.

« Salut chérie, t’a décidé de prendre froid ? » Fred’ se releva et grimaça. Adrien avait beaucoup changé quand même… Elle leva ses yeux clairs sur lui et lui sourit, retirant de ses cheveux blonds la neige. Le Poufsouffle se laissa tomber à ses côtés et elle le regarda d’un air gêné. « Je réfléchissais et le parc me semblait idéal. Et toi, c’est quoi ton excuse ? » Adrien haussa les épaules en souriant. « Bof, je t’ai vu de loin, je me suis dit que j’allais sécher ma séance de révision pour venir te voir. » Elle répondit à son sourire et prit son bonnet dans son sac pour le mettre histoire de pas attraper froid. « Joli bonnet. » Elle rit. « Merci. » « Alors, tu réfléchissais à quoi ? » Elle poussa un soupir très exagéré avant de dire « Aux garçons. Tu sais bien que vous êtes un grand et grave mystère. » Adrien s’approcha de Fred’, mettant leurs yeux au même niveau et lui répondit « Conclusion ? » Elle le repoussa et il se laissa mollement tomber puis se coucha dans la neige, Fred prit appui sur son torse d’une main et regarda le beau brun avec qui elle s’entendait si bien mais qui lui causait tant de réflexion. « Vous êtes des êtres étranges et bizarres ligués pour me compliquer la vie… » Elle eut un charmant sourire en coin. Vraiment, cette situation était juste stupide.

Et oui, c’est dur l’adolescence !

{736}

Adrien regardait Fredericke qui était au dessus de lui avec une lueur étrange dans le regard. La jeune allemande avait beau lui dire que c’était les garçons qui étaient un mystère, lui, il avait bien du mal à s’en sortir avec les filles. D’abord il y avait eut Heaven, la belle brune des Serpentards au regard troublant. Elle était aussi somptueuse qu’envoûtante mais il semblait évident qu’elle n’était pas pour lui. Il n’avait pas le caractère assez bien trempé. Ensuite, il y avait bien entendu Anabelle mais ça lui semblait très différent. Il savait que c’était de l’amour mais c’était venu très différemment de celui qu’il avait ressenti pour Heaven. Avec la Serpentard, ça avait été comme un coup de foudre et puis tout s’était subitement accéléré. Avec Anabelle, il l’avait d’abord vu comme une bonne amie, puis comme sa meilleure amie et enfin, il ne l’avait plus vu du tout pareil. L’ennui c’est qu’il savait qu’Anabelle ne partageait pas ses sentiments. Elle se fichait assez souvent de ses frères pour qu’il sache que l’amour était quelque chose qui laissait la jeune fille totalement froide, si ce n’est carrément de glace. Il se voyait donc assez mal lui faire sa déclaration. L’avantage c’est qu’il n’y avait aucun autre garçon, elle refusait de voir l’amour comme possible avec quiconque. Alors, il attendait. Il était très doué pour ça, attendre. Mais il y avait Fred… Il ne l’aimait pas, enfin, pas comme ça du moins, mais elle était attirante et… disponible. Il s’en voulait toujours pour leur flirt, et pourtant, quand il passa la main dans les cheveux de Fred’, il pensait à recommencer. Finalement, peut-être avait-il un problème d’hormones… Ou alors il a juste quinze ans ?

Enfin, outre le fait que Fredericke soit belle et étourdie (qui se met au dessus d’un garçon comme ça sans réfléchir hein ?), Adrien devait s’avouer à lui-même que faire enrager Vincent était devenu l’une de ses occupations favorites. Après tout, il sortait avec Marie, alors ce que lui, Adrien, faisait avec Fred, ça ne concernait pas le Serpentard mais juste eux. Et ça, c’était pas franchement terrible comme pensée. On n’embrassait pas une fille dont on était même pas amoureux juste pour faire bisquer un imbécile qui a raté sa chance – quoi que Marie soit très belle, Adrien dit pas -. Pour en revenir au moment présent, Adrien était justement dans un moment de flottement… Où il ne savait pas ce qu’il voulait – enfin, à part Anabelle mais ça c’était réglé – et où du coup, son attitude était ambigu. Les rayons du soleil faisaient briller les cheveux de la jeune fille d’une lueur dorée et il les caressait machinalement. Finalement il se releva sur les coudes et répondit à Fredericke d’un ton dans lequel perçait toutes ses incertitudes « Parce que tu penses que vous êtes mieux ? ». Fredericke changea légèrement de position et il posa la main sur la sienne tout en baissant les yeux. « Je pense que c’est plutôt l’être humain d’une manière générale qui est incompréhensible. » Houla, il entrait dans des considérations trop compliqués pour Fredericke qui haussa un sourcil.

« Tu as eu un problème avec Anabelle ? » Aïe, touché. Enfin, même si c’était plutôt l’absence d’événements le problème. Il avait beau être patient, il n’en avait pas moins quelques moments de découragement. « Non, c’est comme d’habitude. Elle rouspète contre ses frères, elle vénère cet idiot de Shawn et elle essaie de découvrir mes secrets. Bref, elle est égale à elle-même. » Fred pressa sa main d’un air compatissant. Vincent et Anabelle avaient beau être comme le jour et la nuit, elle comprenait ce que ressentait Adrien. Ce n’était pas facile de contenir ses sentiments parce que l’autre ne nous voyait pas comme on voudrait. « Elle est vraiment pas futée. Il suffit de voir comment tu la regardes pour comprendre. » Fred’ repoussa un rideau de cheveux blonds derrière ses épaules, l’air très sûre d’elle et Adrien lui répondit par un sourire amusé. Il prit un peu de neige et la lança dans le cou de la Gryffondor qui recula de surprise. « Tu crois que Vincent est mieux ? Plus aveugle que lui ça n’existe pas ! » Fredericke enleva la neige et haussa les épaules. « Il a au moins l’excuse d’être à Serpentard. Ils ne sont pas réputés pour leur empathie chez eux. » Mouai, enfin à Poufsouffle on était loyal et travailleur, rien à voir avec l’empathie non plus. Puis Anabelle était spéciale comme Poufsouffle de toute façon. « Tu m’excuseras ma belle amie, mais je ne suis pas très convaincu par l’argument de la maison. Nos meilleurs amis sont aussi aveugles l’un que l’autre, mais la mienne au moins est logique. L’amour c’est pour les nuls paraît-il. Enfin, c’est plus compliqué que ça mais après c’est Anabelle… » Ouai et Fred’, elle comprenait souvent pas de quoi parlait la Anabelle en question. En plus, elle aimait pas sa cousine. Et Fred aimait pas qu’on aime pas sa cousine. Enfin vous avez compris. De toute façon, Adrien s’était penché sur Fred avec un petit sourire moqueur. « Enfin, ce n’est pas bien grave… mais si tu te proposes pour me consoler, je veux bien être triste… » Erf, attention, terrain glissant…

{882}

Fred’ eut un petit sourire en coin. Elle approcha un peu plus son visage du sien et murmura « Ah oui ? Mais qui te dit que je me propose ? Tu es bien sûr de toi… » Adrien passa la main dans les cheveux blonds de la jeune fille et il caressa délicatement sa nuque, lui faisant un peu pencher la tête. « Tu veux dire que tu ne veux pas ? » Il frôla ses lèvres des siennes sans pour autant y poser son empreinte et cela amusa Fred dont le sourire s’élargit. « Je n’ai pas dit ça. » Adrien ne répondit pas et embrassa pour de bon la jolie Gryffondor qui répondit à son baiser. Elle pria quelques minutes que personne ne passe pour aller répéter ça à Vincent parce qu’il avait beau avoir interdiction de se battre, Fred le connaissait, ce n’était pas ce qui l’arrêterait s’il était vraiment en colère et… pour ce qu’elle en savait… s’il apprenait qu’elle flirtait encore une fois avec Adrien, celui-ci était un homme mort. Du moins dans la tête de Vincent, parce que Fred’ doutait qu’il veuille réellement le faire…

Cependant, par un effet magique, Fred oublia complètement Vincent dès qu’Adrien l’attrapa par la taille pour la rapprocher de lui. Ils s’embrassèrent plusieurs minutes avant qu’Adrien la lâche pour déposer des petits baisers dans le cou encore humide de neige de son amie. Elle ferma les yeux et quand elle les rouvrit, le soleil l’aveugla, elle rit et mit sa main pour se protéger, c’est alors qu’elle vit sa gourmette et que son meilleur ami lui revint à l’esprit. Elle enleva son bonnet et elle le mit à Adrien. « ça ne te va pas du tout ! Tu n’as pas une tête à chapeau ! » Adrien grimaça et frotta le dos de la jeune fille. Il se demanda si c’était prudent qu’ils restent là, dans la neige. Elle était d’une santé fragile, si fine qu’il s’imaginait souvent que s’il la serrait trop fort, elle se casserait. Mais ce n’était pas le cas, elle était bien plus forte que lui… Elle cachait sa tristesse, elle s’était presque aussitôt remise et elle avançait… Lui, quand Heaven l’avait quitté, il s’était juste arrêté… Fredericke était pourtant loin de se considérer ainsi. Elle ne se trouvait pas forte mais au contraire incroyablement faible… sinon, elle n’irait pas chercher du réconfort auprès d’Adrien ou de Roman. « On devrait rentrer ma puce, tu es gelée. » Elle avait les mains gelées. Le Poufsouffle les prit entre ses mains et souffla dessus pour les réchauffer. « Je n’ai pas envie de rentrer. C’est plus amusant ici… » Il la serra un peu plus et finalement, ouvrit son manteau pour qu’elle se glisse un peu plus contre lui et qu’elle lui vole toute sa chaleur humaine… Elle le laissa l’y installer car elle n’y voyait pas d’inconvénient. « C’est plus amusant mais ce n’est pas raisonnable. Tu vas tomber malade et après on dira que c’est ma faute. » Elle haussa les épaules ce qu’Adrien, à défaut de le voir, sentit. « Si le on c’est Vincent, il me sait suffisamment bête pour m’endormir dehors. Tu n’as pas de souci à te faire. » Même si Adrien avait plutôt l’air de chercher la bagarre avec le Serpentard qu’autre chose mais c’est vrai que ce dernier avait un peu tendance à accuser le chorégraphe de Sterne de tous les maux de la terre. Bientôt ce serait aussi sa faute si elle avait des mauvaises notes.

« C’est uniquement ta santé qui me préoccupe. Vincent je m’en fiche complètement. » Fred soupira et écouta le battement régulier du cœur d’Adrien dans son oreille. C’était idiot mais rien qu’à ce bruit pourtant propre à tous les humains, elle sentait la différence entre Adrien et Vincent. Le cœur de son ami tapait fort, lentement et régulièrement à son oreille, prouvant qu’il était parfaitement maître de lui. Alors que son meilleur ami lui c’était autre chose, même au repos, son cœur battait plus vite que celui d’Adrien et cela lui donnait l’impression que c’était du coup des battements beaucoup moins forts. Elle savait, Adrien le savait aussi, que c’était dans les bras de Vincent qu’elle voulait être, que c’était lui qu’elle aurait voulu embrasser… Elle aurait même pu se contenter de jouer dans la neige avec lui. Ce n’était pas important. Mais il n’était pas là, elle avait l’impression qu’il n’était jamais là pour elle en ce moment… même si elle se raisonnait en se disant que c’était une pure vue de l’esprit car si elle lui demandait, sûrement qu’il viendrait…

« Il n’empêche que… je n’ai vraiment pas envie de rentrer… » Et elle ne pensait pas Adrien assez fourbe pour l’y forcer.

{796}