Loin des projecteurs [PV]

Cordélia se promenait dans Londres sans but précis. Elle était passée vérifier que la succursale londonienne des Pâtisseries Warldof se portait bien, c’est tout. Or, comme tout se passait comme sur des roulettes là-bas, la visite avait été rapide. Elle n’avait pas très envie de retourner au travail tout de suite… c’était un peu gêné aux entournures en ce moment avec Nolhan. Faut dire qu’ils avaient couché ensemble… Enfin, elle en avait visiblement été beaucoup plus perturbée que lui, c’était ce qui la dérangeait elle d’ailleurs. Les hommes étaient tous des insensibles sans cœur et sans âme ! Rongeant son frein pour la millionième fois, elle croisa un grand gaillard avec des lunettes noires sans réellement faire attention quand elle réalisa qu’en fait elle le connaissait. Transplanant sur seulement une centaine de mètres, elle se mit devant le jeune homme, souriante, les mains sur les hanches.

« Eyh Lexy ! Alors, on ne salue plus ses anciennes collègues de travail ? » Les deux jeunes gens avaient fait un seul et unique shoot ensemble mais ils avaient bien discuté ce jour là. Elle supposait que malgré ça, Lexy parlait à tellement de filles que ça ne l’avait peut-être pas marqué, ceci étant, il n’en connaissait peut-être pas beaucoup qui dirigeait des pâtisseries réputés dans le monde magique anglais. Il faut dire que Cordy avait bénéficié de la réputation de son père comme homme d’affaire lorsqu’elle avait débuté. Tout le monde voulait voir la petite fille de riche se rétamer avec son caprice, mais ce n’était pas ça pour elle, depuis toute petite elle avait rêvé de faire des recettes qui émerveillerait les gens, avec plein de bons produits et un cadre selon ses goûts. Elle y était parvenue, à sa façon, tranquillement. Elle avait appris les ficelles en apprentissage pendant deux ans, puis elle avait lancé sa boutique à Londres et maintenant elle avait sa nouvelle où elle s’était installée avec son fils et Julia pour fuir ses souvenirs avec Jan.

Pour qu’il la resitue mieux, elle enleva son petit bonnet blanc et libéra sa lourde chevelure brune qui avait fait son succès lorsqu’elle jouait les tops pour son papa ou ses amis. Cordélia était une très jolie femme mais elle n’était pas exactement faites comme un mannequin. Pour le dire franchement, elle était trop « grosse » pour les normes de ce métier. Elle avait les hanches très marquées et une poitrine opulente bien qu’elle fût si sportive que pour le reste, ce ne fût que du muscle. Elle ne rentrait pas dans les critères et n’avait jamais tenu à s’y plier, se contentant de faire des photos pour faire plaisir à son papa et quelques défilés privés. Mais ses cheveux… eux par contre, ils avaient fait des tas d’envieuses chez les squelettes. Et bien désolé mesdemoiselles mais elle ne vous livrera pas ses secrets !

« Alors, tu me reconnais ? » dit-elle pour finir avec un petit sourire en coin qui creusait ses joues d’une fossette mignonne. Voir Lexy lui faisait penser à autre chose qu’à Nolhan, ce n’était pas plus mal !

Evidemment, il ne l’avait pas reconnu au début. Heureusement, ça lui était assez vite revenu. Posant ses prunelles émeraude sur son ancien collègue de travail, elle lui sourit aimablement. Elle se sentait plus guillerette que ces dernières semaines. Sa vie était devenue étrangement compliquée dernièrement, elle était contente d’avoir trouvé Lexy, pour peu qu’ils discutent un moment, elle aurait un peu de répit. Elle n’avait pas beaucoup de points en commun avec le jeune homme, mais elle en avait au moins un : la notoriété. Même si maintenant, on connaissait plus son nom que son visage, Cordélia était depuis enfant la proie des vautours de par son père, ça la rendait connu, célèbre dans son domaine, et cette notoriété pouvait parfois peser très lourd. Hors, il n’y avait qu’avec ceux qui l’ont déjà vécu qu’on peut partager ce genre de choses sans passer pour une pauvre petite de riche qui ne sait pas à quel sujet se plaindre.

« Je suis venue voir ma succursale londonienne mais visiblement, ils n’ont pas vraiment besoin de moi, alors je erre sans but. » Elle haussa les épaules, n’osant pas dire qu’elle ne voulait juste pas rentrer et être de nouveau seule avec son assistant. Pourtant, on pouvait sentir qu’il y avait un non dit, ce serait-ce que parce qu’une femme d’affaire comme Cordélia ne pouvait pas décemment errer sans but, il y avait forcément une origine à cette errance, sinon elle serait en train de faire fructifier son entreprise ou tout au moins, elle serait chez elle. Mais chez elle, on pouvait la trouver.

« Je te paye un café ? Ça fait longtemps qu’on ne s’est pas vu. » Elle sourit au mannequin et mit les mains dans ses poches, elle n’avait pas vraiment froid mais elle ne dirait pas non à un endroit plus chaud. Re-pensant au projet qu’il y avait sur sa table ce matin, elle ajouta après quelques secondes supplémentaires de réflexion « En plus, j’ai peut-être quelque chose à te proposer, du travail. Pas aussi standing que d’autres que tu as pu faire mais ça vaut peut-être la peine qu’on en parle, tu ne crois pas ? » En fait, Cordélia travaillait en ce moment sur un projet publicitaire pour sa boutique, une courte vidéo. Mais tous les mannequins ou acteurs qui s’étaient proposés lui avait semblé un peu fade. Lexy n’était pas vraiment son type d’homme (Nolhan non plus de toute façon XD) mais il avait du charisme et pour avoir posé avec lui, elle savait ce qu’il dégageait sur pellicule. Après, une publicité pour une boutique ce n’était pas non plus une photo dans l’edito de Vogue… cependant, ça ne coûtait rien d’en parler.

Cordélia rit, imaginant la tête de ses employés londoniens si elle retournait sur ses pas pour leur dire qu’ils étaient tous virés parce qu’il fallait qu’elle leur soit indispensable. Vu qu’après sa rupture avec Jan, elle les avait abandonné pour ouvrir une autre boutique ailleurs, ce serait quand même un peu culotté de sa part. ça l’arrangeait de n’avoir pas besoin de venir souvent, elle n’aimait pas se rappeler des moments qu’elle avait passé dans cette boutique à rêver de sa vie avec son premier amour, une vie qui n’existerait jamais même s’il lui avait laissé un cadeau en leur fils, Stephen, le trésor de Cordélia.

« Non, je crois qu’ils n’apprécieraient pas d’être virés parce qu’ils font leur boulot. » Elle sourit et pensa à Nolhan, lui il avait dépassé le contrat et Cordy ne savait toujours pas ce qu’elle était supposée en faire. Elle savait qu’elle aurait dû prendre une assistante. « Puis je dois t’avouer qu’on me cherche sûrement à l’heure qu’il est mais que j’ai volontairement coupé mon téléphone. » D’ailleurs, on lui enverrait sûrement bientôt un hibou express mais elle avait encore un peu de marge avant que Julia n’en arrive à ces extrémités.

« Ok, on fait comme ça alors. » Ils avaient tous les deux les moyens pour un café – même de luxe – donc ils n’allaient pas chipoter sur qui devait payer. « On a qu’à aller dans ce salon de thé, ils ont de mes pâtisseries – celles que je vends aux moldus bien sûr -. » En effet, Cordélia avait deux marchés, celui des sorciers et celui des moldus, c’était justement la succursale londonienne qui s’occupait du marché avec les moldus vu qu’ils étaient mieux implantés quand Cordélia fournissait personnellement les sorciers de son petit village. Les pâtisseries imitation moldus étaient moins extraordinaires que les inventions de Cordélia avec le mélange de sucré et de magie pour la décoration mais elle n’engageait que des gens doués, ça restait bon. Comme elle était une sugar addict, elle en avait quelque chose !

Ils s’installèrent et c’est sans surprise qu’elle remarqua que Lexy était galant mais aussi relativement directif. Un vrai mec quoi. Ils ne s’étaient jamais côtoyés qu’au sein du travail alors elle découvrait forcément des choses sur son camarade de photos. Elle remarqua aussi qu’elle avait piqué sa curiosité. Elle sourit à sa demande et se pencha d’un air de conspiratrice vers lui.

« En fait, je cherche un mannequin pour figurer dans les publicités du magasin. Je veux quelqu’un qui s’accorde bien avec moi sur papier, mais ce n’est pas aussi bien payé que d’autres jobs que tu peux faire donc c’est toi qui voit. Si tu veux, je peux te montrer le projet, je l’ai dans mon sac ? » Même quand elle fuyait son taff, elle l’emportait dans son sac, c’est ça d’être une vraie pro ! Elle ouvrit son sac (magique) et en sortit une grande pochette avec le projet de vidéos et d’affiches. Elle voulait des affiches pour le chemin de traverse mais aussi pour le monde moldus donc deux versions, mais une seule vidéo uniquement pour les non-sorciers, les autres n’ayant pas la télévision – même si la plupart des nés moldus en possédait une mais la regardait peu -. « J’ai choisi un concept assez poétique puisque je vise essentiellement un publique féminin. Le but est d’insister sur la nécessité d’un peu de douceur dans la vie, donc de pâtisseries. » Puis pour les hommes, bah, il y aurait elle sur les affiches, elle était assez alléchante comme ça, non ?

Le terme de propagande la fit sourire mais elle ne répondit pas et quelques minutes plus tard, ils étaient devant un café en train de le siroter tranquillement. Au moins, elle ne pensait pas Nolhan pour le moment, s’occuper de sa publicité lui permettait d’oublier un peu son amant pour être un peu plus… Elle-même peut-être. Enfin, celle qu’elle était avant que ça ne tourne mal avec Jan. Tout ceci était vraiment trop embrouillé pour elle alors que la pâtisserie, son affaire, ça c’était concret, elle savait le gérer, c’était son job, ce pour quoi elle avait été formé.

Elle tendit la pochette à Lexy et fit signe à la serveuse de lui apporter un gâteau. Elle l’avait pris plein de sucre mais hou la chanceuse c’était loin d’être un problème pour la brunette qui sans être la plus mince était loin d’être dans la catégorie des grosses. Elle était juste bien comme elle était, et elle aurait accepté de prendre quelques kilos pour pouvoir continuer à manger. Elle détestait se restreindre sur le sucre bien qu’elle en connaisse les méfaits, si elle avait choisi ce métier, c’était parce qu’elle adorait les gâteaux et elle n’en démordrait pas, le sucre c’est la vie !

« On pense utiliser des teintes assez ternes pour le fond et les personnages mais ajouter ensuite un grand arc-en-ciel vers lequel ils tourneraient leur regard qui se transformerait en délicieux gâteaux. Enfin… quelque chose comme ça toujours, le meilleur… » et là, elle baissa la voix « c’est que pour la vidéo, même pas besoin d’effets spéciaux, un coup de baguette magique et hop ! » Elle fit un petit geste de la main, imaginant déjà la scène. Cette pub serait un carton !

Elle sourit lorsqu’il lui demanda quand ils commençaient mais elle sortit tout de même son agenda, regardant les dates qu’elle avait de libre. Normalement, dans ces moments là, elle appelait Nolhan, c’était lui qui avait l’agenda à jour mais… là, elle avait éteint son téléphone et très loin d’elle l’idée d’envoyer un SOS à son assistant. Comment ça elle le payait pour ça ? Simple détail on vous le dit X_x’

« Et bien… je ne sais pas, quand tu veux en fait. Moi je ne peux pas les week-ends car j’ai mon fils avec moi, mais en semaine il y a toujours moyen de s’arranger. » C’était la première fois depuis le début de la conversation qu’elle mentionnait son fils, d’habitude elle le faisait bien avant, mais son instinct maternel se bataillait présentement avec celui de femme d’affaire (après tout, ils parlaient boulot avec Lexy) et de femme tout court (pas pour rien que son téléphone était éteint). De toute façon, Lexy était déjà au courant pour Stephen n’est ce pas ? Donc il avait dû anticipé le fait que le samedi, c’était niet, le tout petit réclamait sa maman !