[TERMINE] Chère maman de Noël [PV]

Noel. Pas le réveillon mais le 25 décembre lui-même. A journée particulière, dodo particulier. Une fois n’est pas coutume, Rhys n’a pas mit son réveil pour se lever. Non seulement il souhaitait dormir un peu mais il s’était dit qu’il n’allait pas survivre bien longtemps s’il obligeait sa chambrée à ouvrir les yeux. Au programme de la journée, un fait exceptionnel. Rhys n’a pas prévu de travailler. Attention, n’allez pas penser qu’il ne le fera pas, c’est juste qu’il n’a pas organisé sa matinée pour.

Même si ce n’était pas le souhait du garçon, il a fini par se réveiller tôt. Le corps n’oubliait pas ses habitudes si facilement. A la fin d’un passage prolongé dans la salle de bain, le blaireau retournait dans la salle privée des siens. La vie commençait à reprendre de ses droits même si l’on sentait aisément que pour beaucoup de frères et sœurs, le bal avait été aussi fatiguant qu’agréable.

Rhys était d’une excellente humeur en cette froide matinée. Pas même le fait de ne pas retrouver ses parents pour les fêtes ne pouvait entamer son plaisir. En effet, Rhys avait demandé à ne pas rentrer pour les vacances afin de pouvoir continuer à travailler et ce n’était pas sans les livres de la bibliothèque qu’il allait pouvoir y arriver. Ses parents avaient accepté. Aussi tristes qu’ils pouvaient être de ne pas revoir rapidement leur petit garçon, ils n’allaient pas l’empêcher de faire son travail s’il estimait que c’était la chose à faire. Les émouvantes retrouvailles pourraient attendre encore un peu.

En plus du boulot, le garçonnet était curieux de découvrir son école sous une toute autre lumière, lorsque les élèves auraient déserté les lieux. L’ambiance devrait être radicalement différente et, espérait-il, il pourrait passer un peu de temps avec ses amis. Peut-être Romilly allait-elle rester. Aaaah si seulement…

Aussi souriant qu’une femme au salon international du thé ~~Avec des tonnes d’échantillons gratuits, bien évidemment~~, il est allé s’installer dans un coin avec un livre. Les mauvaises langues se délient déjà rapidement, je le sais, en disant qu’il n’avait pas prévu d’étudier mais qu’elles se reprennent, il s’agit d’un roman. ~~Non, pas le préfet.~~ Il ne l’avait visiblement pas sorti très souvent vu le nombre de pages lues mais il attaquait un chapitre à l’occasion. De son siège, il pouvait observer une grande partie de la salle commune. Il attendait une personne en particulier. En fait, il en attendait deux pour être précis mais Roy Bradley devrait attendre que son costume soit lavé pour lui être restitué.

Celle qu’il attendait, c’était sa préfète adorée, Eva-Rose Watters. Depuis le début de l’année, il l’avait généralement dans son champ de vision, ne l’eusse-t-elle pas remarqué. Elle l’avait sorti d’un début de déprime en début de l’année et il s’en sentait redevable. Il lui rendrait la pareille lorsque l’occasion se présenterait. Pour l’heure, ce n’était pas pour cette raison mais une toute autre qui lui mettait la pression. A la base, il serait bien allé la voir durant le bal mais plusieurs choses l’avaient retenu. Primo, il n’avait absolument pas envie de s’éloigner de sa cavalière, et c’était probablement la meilleure des raisons qu’il pouvait invoquer. Secundo, très proche de la première, son éducation lui avait interdit de laisser une jeune femme pour aller voir une autre. Tertio, il ne souhaitait pas déranger la demoiselle alors qu’elle était avec ses amis, tous beaucoup plus âgés d’ailleurs.

Pour l’heure, il attendait que la demoiselle se lève puis le moment propice. Il le savait d’avance, il allait galérer alors autant qu’ils soient seuls tous les deux sinon ça lui prendrait une plombe pour dire ce qu’il avait à dire. Il mit beaucoup de temps à trouver le moment opportun (et heureusement qu’elle ne prenait pas le Poudlard Express pour retourner auprès des siens, il aurait été sacrément embêté).

L’opportunité lui avait été offerte dans un couloir, plutôt froid d’ailleurs. Non pas qu’il la suivait à l’affut de la moindre occasion mais on va dire que si elle n’était pas à la tour, il s’arrangeait pour avoir des trucs à faire en dehors et, pourquoi pas, la croiser.

- EVA-ROSE.

Oui, oui. Vous avez bien entendu, il a élevé la voix pour se faire entendre de loin. Un exploit. Un excès de confiance. En tout cas, elle l’avait entendu et l’attendait pendant qu’il marchait vers elle. Il allait vraiment falloir qu’il se muscle sérieusement les gambettes puisqu’elles ne semblaient pas vouloir faire autre chose que se dérober lorsqu’il en avait besoin.

Arrivé à elle, il était totalement écarlate. Il en avait conscience. Il ne le cachait plus à la jeune femme, inutile.

- Pfiou, sacrée chaleur aujourd’hui.

L’humour, l’éternel ami du timide. Ca aide toujours à faire passer les choses.

- Désolé de te déranger mais il fallait que je te voie… que tous les deux.

Nerveusement, il farfouilla dans une poche de son pantalon et ressorti la main, le poing fermé.

- Ta main, s’il te plait.

Alors qu’elle lui tendait, il lui déposa au creux, un bracelet. Il tenait à le lui offrir. Noel est un moment qui se passe en famille et, maintenant, sa seconde famille, ce sont les Poufsouffles. Alors qui pouvait mieux incarner la maman de cette joyeuse fratrie en dehors de celle qui est à leur tête et que les soutient de son mieux?

Le bracelet, justement, est celui de la mère de Rhys. Elle lui avait donné avant son départ pour l’école. Il n’avait pas une grande valeur monétaire, c’était un cadeau pour qu’il pense à elle lorsqu’il serait loin. Depuis son arrivée, il ne l’avait jamais porté de peur de la perdre et aussi un peu parce qu’il n’aimait pas avoir un truc au poignée.

C’est justement parce que le bijou était symbolique qu’il avait décidé de l’offrir à son ainée. Elle avait veillé sur lui depuis le début de l’année, ca aurait été sa deuxième maman même s’il n'avait pas été un jaune et marron. Pas de problème pour la transmission de l’objet, la vraie mère du garçon ne dirait rien. Bien au contraire, si elle savait ce que Eva-Rose avait fait pour son petit chéri, ce serait bien plus qu’un bijou qu’elle lui offrirait, ça serait une place honorifique dans sa famille, une porte toujours ouverte, une assiette toujours pleine.

- Je…C’est… pour toi.

Sans blague? Ca ne vous arrive jamais de donner quelque chose à une tierce personne pour qu’elle fasse la livraison? Aller grande respiration.

- C’est pour te… remercier pour tout. Désolé pour le papier cadeau.

Effectivement, plus sommaire que pas de paquet, c’est difficile mais bon, en dehors d’une page de bouquin de botanique, il n’avait pas grand chose pour en faire non plus.

1119 mots

[Poudlard Express, début septembre]

Des éclats de joie retentissaient dans la cabine des Préfets sous l’œil amusé d’Elyna, Préfète en chef, et alors qu’Eva-Rose lançait un soupir malheureux, la paille la plus courte dans la main. Ca y était, sa chance tournait, elle avait écopé pour son septième et dernier Noël à Poudlard de la traditionnelle ronde du vingt-cinq décembre, celle que tous voulaient éviter parce qu’elle suivait le bal de Noël et était donc prétexte à grâce matinée. Bon, encore, à l’époque, ça avait été, la rouquine n’ayant pas prévu d’avoir de cavalier, et donc d’aller au bal. Sans compter qu’elle ne pouvait imaginer que la magie disparaîtrait. Bref, beaucoup de changements allaient intervenir dans la vie de la jeune Watters.

[Couloirs, 25 décembre 2002]

Le réveil avait été difficile, bien qu’Eva-Rose ne se fût pas couchée si tard que ça, le bal finissant de toute façon à minuit, heure à laquelle tous les élèves étaient censés retourner dans leurs dortoirs. Il y avait cependant tous ces à-côtés : le temps pour dire au-revoir à tout le monde, même sans aller au bal en couple, de retrouver la salle commune – y compris celle de Poufsouffle pourtant pas bien loin de la grande salle, et le débriefing dans le dortoir, bien entendu inévitable, surtout pour les camarades de la Préfète qui écoutait avec sa patience légendaire, n’ayant d’ailleurs pas forcément envie de dormir, malgré la perspective de la ronde maudite.

Et levée tôt, elle l’avait été. Pas la seule, bien évidemment, d’autres fous existaient – surtout qu’eux avaient eu le choix – non, Rhys n’est pas visé – mais elle ne pouvait rien y faire. Dire que même elle ne comptait pas travailler aujourd’hui, et pourtant certains s’y résignaient. Bref, ça n’était pas son problème, ils faisaient ce qu’ils voulaient, après tout, et travailler était toujours mieux que faire des bêtises qu’elle-même devrait réparer ensuite – ou sanctionner.

La ronde n’avait pas été difficile, et déjà Eva-Rose rentrait sans avoir rien eu à faire, mais ça n’en avait été que plus ennuyant. Franchement, pourquoi fallait-il une ronde si tôt le matin de Noël, alors que tous les élèves étaient probablement encore au lit, du moins pour ce qui concernait les plus susceptibles de commettre des infractions ? D’ailleurs, s’ils y tenaient tellement, Rusard et McGonagall n’avaient qu’à s’en occuper eux-mêmes. Eva-Rose avait cependant fait contre mauvaise fortune bon cœur et s’était soumise à son devoir.

Tout à coup, une voix de jeune garçon l’interpella dans le couloir vide. Eva-Rose leva la tête pour voir Rhys et fut quelque peu étonnée de voir que c’était lui qui l’avait appelée si fort. Bref, elle lui sourit en l’attendant, contente de le rencontrer en ce matin de Noël. Le garçon arriva tout rouge d’avoir couru ou de timidité.

- Tu ne me déranges jamais, tu le sais bien. Que se passe-t-il ?

Il devait y avoir une bonne raison pour que Rhys l’ait interpellée de la sorte et voulût à tout prix la voir seule, même si la rouquine pouvait comprendre plus facilement ce point. En tout cas, sa surprise fut immense quand elle découvrit ce qui avait motivé le jeune homme, comme on peut l’imaginer. Son plaisir aussi, bien entendu, comme chacun peut s’en douter, personne à Poudlard – et peut être même chez elle – ne lui ayant jamais offert de cadeau aussi sincère.

- Je…oh…merci, Rhys…Eva-Rose ne savait pas quoi dire face à cette touchante marque de…d’amitié ? D’autre chose ? D’elle ne savait quoi de la part du première année, et elle aurait aimé avoir quelque chose à lui offrir en retour. D’ailleurs, elle trouverait bien dans son dortoir, mais rien sous la main, et même pas la possibilité de lancer un petit sortilège d’attraction pour le faire rappliquer illico. Bref, elle verrait plus tard. En attendant, la Préfète se pencha pour déposer un baiser sur la joue du garçon.

- Merci, répéta-t-elle. Tu marches un peu avec moi ? Raconte voire un peu ton bal.

[661 mots]

Parvenir à interpeler Eva-Rose et lui donner son cadeau directement dans la main, en face à face, c’était déjà un acte de bravoure. Réussir à articuler quelques mots qui allaient avec le cadeau, c’était encore mieux. Attendez, quinze mots, ce n’était pas rien non plus. Non, sincèrement, si vous ouvrez un dictionnaire pour atteindre le mot « courage », parmi les exemples avancés, il y a : Rhys prononça quinze mots de suite à sa préfète. Certes, tous les mots ne formaient pas particulièrement une phrase mais si on s’arrête tout le temps sur les détails, on ne va pas bien loin. Enfin bref… La véritable difficulté, à dire vrai, c’était de voir son amie touchée par le cadeau. Si elle avait du mal à trouver ses mots, comment lui pourrait faire pour entamer la discussion? A moins que ce soit le bon moment pour la laisser tranquille.

La jaune et noir l’embrassa et lui demanda de l’accompagner. Ca voulait dire deux choses. Premièrement, ils allaient discuter. Deuxièmement, si le sang de Rhys continuait de monter jusqu’à sa tête, il allait avoir quelques problèmes de santé dont l’absence de sang dans les jambes et le revoie du trop-plein crânien par les oreilles et les yeux. En ce qui concernait la première possibilité, cela importait peu mais pour la seconde… Il faut avouer que, tout de suite, ça retire un peu du charme de la conversation.

Ainsi donc, ils se mirent en route ensemble dans les couloirs pour le moins frais de l’école. Rhys allait devoir parler de la soirée de la veille. Ce n’était pas une obligation, loin de là, mais il le ferait quand même, parce qu’elle le lui avait demandé. Le garçon se sentait tout chose en pensant à la demoiselle qui l’avait accompagné. Pour dire vrai, c’est lui qui l’a accompagné mais ce serait jouer sur les mots. La miss était la dernière chose à laquelle il avait pensé en se couchant et la première en se levant. Les probabilités veulent qu’il ait continué sur sa lancé pendant son sommeil. Dommage que le Poufsouffle soit trop naïf pour comprendre ce qui lui arrivait. Après tout, tomber amoureux pour un gamin de onze ans, ça n’avait rien d’extraordinaire normalement, ça lui est déjà arrivé plus souvent que de pisser debout en arrosant la cuvette. Mais lui non, ce n’était pas un sentiment qu’il avait déjà vécu jusque là. Peut-être trop amoureux de ses parents et de son prochain ~~Enfin, son prochain, quand on a onze ans, ça ne fait pas des masses de monde~~ qu’il n’arrivait pas à faire la différence quand ça tombe sur une personne précise.

C’est finalement avec plus d’aisance qu’il ne l’aurait pensé qu’il se mit à parler de tout ça. Il a commencé naturellement par sa rencontre avec Romilly, des essayages de costumes et de son scepticisme sur ce genre de tenu, la première fois où il a vu sa cavalière dans l’escalier, le buffet, la demoiselle, la danse laborieuse, la jeune femme. Oui, Romilly revenait très souvent sur le tapis sans que le garçon n’en soit conscient mais la préfète ne pouvait rater une telle information. Parmi toutes ses explications, il était tout de même parvenu à glisser discrètement que sa camarade de marche était, elle aussi, très jolie dans sa robe. En plus de quoi, il l’avait fait sans trop rougir. Avec de la chance, à la fin de l’année, il serait plutôt guéri de sa timidité avec elle.

578 mots

Eva-Rose écouta avec un plaisir certain Rhys lui raconter son premier bal de Noël à Poudlard. Elle n’était pas une commère, loin de là, et cela ne serait sans doute répété à personne avant de longues années – et encore, le premier qui entendrait de nouveau ces mots serait sans doute Rhys lui-même, si la Préfète et le première année étaient amenés à se revoir dans le futur – c’était peu probable, vue leur différence d’âge, mais qui savait ? Toujours est-il que cette conversation était bonne pour ressortir en cas de réunion des anciens élèves de Poufsouffle, particulièrement d’ailleurs si le garçon allait jusqu’au bout de ses idées avec cette Romilly qui semblait lui tenir particulièrement à cœur. Eva-Rose ne connaissait pas elle-même la Serpentard – trop jeune et d’une autre maison – mais elle l’avait entraperçue pendant le bal et sans doute pourrait-elle demander quelques informations sur elle à Marie. La rouquine ne savait pas si sa collègue les lui donnerait de bon cœur, mais après tout ça ne coûtait rien d’essayer, surtout si ça pouvait éviter quelque pétrin à son protégé, et la jeune femme savait que l’amour en amenait souvent, des pétrins, bien qu’elle ne pensât pas encore avoir été touchée par ce bonheur, et malgré ses pensées qui revenaient de plus en plus souvent vers le souvenir d’une rencontre aux Trois Balais.

- Et bien, même sans magie tu as au moins passé un bon premier bal à Poudlard, à ce que je peux voir, c’est bien. Elle t’a tapée dans l’œil, la petite Serpentard, non ?

Ce n’était pas dans les habitudes d’Eva-Rose d’être aussi franche et directe, et elle ne voulait pas faire rougir Rhys plus que de raison, mais elle pouvait le taquiner un peu quand même, surtout qu’il était en première année. Ne voyez pas dans cette réflexion une volonté de la rouquine de bizuter les petits nouveaux si longtemps après la rentrée, mais simplement elle était un peu plus à l’aise avec le garçon qu’elle ne pouvait l’être – par exemple – avec Damon, même s’il y avait alors d’autres raisons à sa gêne que je n’exposerais pas ici, dans la mesure où elles sont hors-sujet.

- Sinon, qu’est-ce que tu fais debout si tôt ? Tu n’avais pas envie de faire la grasse matinée ?

L’heure n’était plus aussi matinale que quand Eva-Rose s’était levée, mais en tout logique, et surtout à son âge, Rhys aurait dû être encore au lit, ou au moins au petit déjeuner dans la grande salle, mais pas tout fringant et réveillé comme s’il avait déjà passé toutes les étapes d’un lendemain de fête.

- Tu as goûté la bièraubeurre, d’ailleurs ?

C’était là sans doute la boisson préférée des sorciers, si l’on exceptait le jus de citrouille servis à tous les repas à Poudlard et dont Eva-Rose avait régulièrement assez. Bref, je parlais de la bièraubeurre, qu’on servait notamment aux Trois Balais et dont les Troisièmes années profitaient dès leurs premières excursions à Pré-Au-Lard, mais ce qu’elle voulait savoir était si son protégé avait osé y toucher, ce qu’elle-même n’avait pas fait lors de son premier bal, ignorant ce que c’était vraiment et préférant éviter les mauvaises surprises. Les deux Poufsouffle se ressemblaient-ils aussi sur ce point ?

[539 mots]

QUÊTE

Cela faisait beaucoup de bien au garçon de discuter avec son amie. Amie était peut-être une bien grand mot mais aux yeux de Rhys, elle était ce qui s’en approchait le plus pour lui, la seule a qui il acceptait de se confier. Même s’il parlait régulièrement avec du monde à la maison, personne n’était comparable à elle. Quoi qu’elle lui demande, il lui répondrait de bon cœur.

- J’ai passé une très bonne soirée. Vivement l’année prochaine.

Il souriait tellement de toutes ses dents qu’on aurait pu croire qu’il en avait emprunté à quelqu’un d’autre. Par contre, il ne comprenait pas ce qu’elle voulait dire à propos de Romy. De toute évidence, elle ne l’avait pas frappé. Non seulement, il aurait des marques mais le bruit qu’il se serait faire battre par une fille aurait parcouru l’école, parce que de toute évidence, il n’aurait jamais eut le dessus sur la Serpentard. Il y avait donc une autre signification. Il se lança.

- J’aime bien Romilly, elle est super gentille et n’a pas eut l’air de perdre patience en tentant de m’apprendre à danser. Il faut donc lui reconnaître une sacré patience.

Non, n’allez pas croire qu’il a fait une déduction logique du style. « Alors… l’œil est un organe. Il sert à voir. Voir permet d’apprécier ce qui nous entoure. Apprécier signifie aussi aimer, ça nous plait. Taper, c’est un choc, quelque chose d’intense. Voudrait-elle dire que Romilly me plait intensément? » C’était bien trop compliqué et, au risque de me répéter, si le Poufsouffle pouvait se montrer mature dans certains cas, ce n’était absolument pas le cas en ce qui concernait les filles.

- Et toi? Comment s’est passée ta soirée?

Même s’il l’avait vu à plusieurs reprise, il avait eut mieux à faire que de la surveiller toute la soirée. En plus, c’était la moindre des politesses que de retourner ce genre de question.

- Si je suis debout, c’est parce que je n’avais pas grand chose de mieux à faire. J’ai l’habitude de me lever tôt, ça reste ce genre de chose. En plus, je te cherchais… Maintenant que je suis debout, j’ai tout le temps pour passer du temps à marcher avec une amie et aller travailler comme il se doit après.

Il souriait, beaucoup même. Aucun rapport avec le garçon qu’elle avait réconforté en début d’année. A vrai dire, il aurait presque oublié sa mère. Seulement presque hein, ce n’était pas un garçon ingrat qui oublie vite les gens dès qu’il ne les voyait pas, mais il était bien à l’école.

- De la bière au beurre? Non, je n’en ai pas bu. Mes parents ne veulent pas que je prenne d’alcool, et c’est normal. Je me suis surtout limité aux sodas.

Pourquoi une telle question? La préfète souhaitait-elle punir ceux qui avaient bu de l’alcool en étant trop jeunes? C’était faire une erreur que de parier sur Rhys pour ce genre de faute. Vu sa faible constitution, il serait capable de finir ivre rien qu’en pensant à boire un verre.

Eva-Rose sourit de plus belle en entendant Rhys déclarer combien il avait adoré le bal, ce qui était plutôt rare pour un garçon de cet âge, et sans doute sa cavalière qu’il avait évoquée tant de fois n’y était-elle pas pour rien. D’ailleurs, la Poufsouffle en eut la confirmation quand le jeune homme répondit de façon plus ou moins adroite à sa question à propos de la Serpentard. Bref, il semblait à la rouquine qu’elle avait vu juste – ce qui n’était pas bien difficile à propos d’un jeune de onze ans, mais à son échelle n’était déjà pas si mal, ce dont elle était contente. Bon, il ne lui faut pas grand-chose, vous en conviendrez, mais à chacun sa gloire, ainsi va le monde.

- Bien, bien, tant mieux si ça t’a plu. Les filles auront au moins un cavalier l’année prochaine.

Eva-Rose continua à avancer sans rien dire après que Rhys lui eut demandé comment s’était passée sa soirée. Non qu’elle eut particulièrement à réfléchir : plus que toutes les années précédentes, la rouquine avait passé une très bonne veille de Noël, mais elle se demandait encore et toujours si elle n’aurait pas pu être meilleure. Bon, pas vraiment en fait, sauf à inviter un garçon qui lui plaisait particulièrement, ce qui 1) n’existait pas à Poudlard 2) elle ne l’aurait de toute façon jamais fait. Le problème était donc clos, et la Préfète put répondre.

- Très bien aussi, dit-elle simplement – à quoi bon ajouter plus de détails qui de toute façon ennuieraient le jeune homme ?

Eva-Rose écouta patiemment l’explication du garçon et le pourquoi il était levé quand la plupart (si ce n’étaient tous) trainassaient encore au lit où étaient à peine au stade du petit-déjeuner. Un sentiment d’horreur l’envahit cependant soudain. Il n’allait quand même pas travailler (oui oui, c’est bien Eva-Rose qui dit ça) le jour de Noël ! Toute religiosité mise à part, c’était quand même une journée spéciale pour n’importe quel Anglais, ou presque. La jeune femme retint son protégé par le bras et lui fit face. Les yeux dans les yeux, elle déclara :

- Que ce soit bien clair, je t’interdit de travailler aujourd’hui. Vas jouer dans le parc, cherche Romilly partout, fais des bêtises si tu veux, mais que je te voie avec un cahier, je l’envoie dans la cheminée – à défaut de le brûler à la baguette, puisque même de tels sorts pourtant élémentaires pour une septième année lui étaient impossibles. Triste sort que connaissaient de toute façon tous les sorciers, aussi inutile de s’appesantir là-dessus.

- Belle preuve de maturité, dit-elle sans cesser de sourire quand Rhys déclara ne pas avoir touché à la bièraubeurre. Ou alors c’est simplement parce que tu n’en as pas encore assez entendu parler ? Bref, ça viendra, au plus tard dans deux ans, on est tous passés par là, tu sais.

Eva-Rose parlait plus pour elle-même que pour Rhys, qui s’en rendrait sans doute compte. Même si elle ne buvait pas beaucoup d’alcool, la Préfète devait en tout cas avouer que cette boisson était sacrément bonne. Prise chaude aux Trois Balais par une froide journée d’hiver, elle devenait tout simplement exquise.

Le garçon espérait qu’il ne serait pas le seul mec l’année suivante. Il n’aurait jamais l’énergie pour accompagner tout le monde. Soudain, éclair de lucidité, il n’y avait pas de huitième année à Poudlard, ce qui signifiait qu’ils allaient être séparés tous les deux. Un futur coup dur pour lui qui allait donc perdre la seule personne il avait vraiment.

-Mais je ne pourrais être le tien… Tu vas me manquer.

Pas de rougissement du tout ce coup-ci, seulement un trémolo dans la voix. Voir deux mères s’éloigner en deux ans, ça allait lui faire beaucoup au jeune homme. Mais l’heure n’était pas à l’apitoiement. Après tout, c’était Noël et donc pas un moment de tristesse. En plus, plus le temps passait et plus la fin approchait. Evidemment que la jeune femme avait déjà pensé à tout ce qu’elle allait quitter alors de quel droit pouvait-il se plaindre? Si lui allait perdre une amie, elle, elle allait en perdre beaucoup et une maison aussi. Autant éviter de le lui rappeler.

Quoi qu’il en soit, voilà qu’il venait presque de se prendre une remontrance. Voilà qu’on lui interdisait de travailler. Dans quel monde vivait-on? D’accord c’était Noël, une fête importante mais quoi? Fallait-il tout abandonner pour autant? Pour quoi faire? Aller dans le parc et marcher sur la neige? Quelle utilité? Voir Romilly? Il ne se faisait pas d’idée, elle était gentille et avait beaucoup d’amis, lui n’était qu’un rival avec qui elle a fait une trêve pour le bal. Ils n’ont jamais parlé de se revoir. Après tout, Rhys était plutôt insignifiant. Faire des bêtises? Idée encore plus absurde que la précédente. Le jaune et noir n’avait certes pas toujours été un ange mais il ne ferait rien qui pourrait nuire à sa maison.

A dire vrai, Rhys ne savait plus s’amuser. Sur un plan scolaire, il était irréprochable depuis le début de l’année mais si l’on devait dresser un bilan personnel, il serait rien désolant de le lire. Il n’avait tissé aucun lien particulier avec les autres élèves. S’il s’était montré très solidaire, il s’était surtout affirmé comme solitaire. Sa bonne volonté auprès de son blason l’avait enfermé dans un rôle duquel on ne sort pas de soi-même, il était tard pour se dire qu’on allait aller trainer les couloirs à bavasser avec ses amis.

D’un coup, les boissons lui semblaient une conversation dérisoire. A pu le beau sourire radieux qu’il affichait en apportant son cadeau. A pu cette gaieté qu’il voulait partager.

-Je suis content de t’avoir vu. Je vais aller ne pas bosser…

Commençant à s’éloigner, il planifiait une journée dans les sous-sols, assez loin de la circulation d’élève. Là-bas, au moins, il ne serait pas concerné par les gens qui savent vivre.

Dire qu’Eva-Rose fut surprise de la réaction de Rhys n’est largement pas exagérer. Le garçon avait-il vraiment songé à être son cavalier ? La différence d’âge, ce n’était pas rien, surtout pour un gamin de onze ans, la rouquine se rappelait encore qu’il la vouvoyait, au début, la prenant pour une adulte – comprendre, pour une vieille dans l’esprit de la jeune femme qui, si elle pouvait parfois avoir le comportement de personnes plus âgées – ou disons, plus matures - ne se sentait quand même pas avoir…vingt ans ! Elle n’en avait que dix-huit – pas encore d’ailleurs, mais ça n’allait pas tarder – et était bien loin encore de passer ce stade fatidique. Bref, là n’était pas le problème et il fallait surtout qu’elle rassure son protégé comme elle le pouvait, encore une fois. D’ailleurs, ce ne serait sans doute pas aussi terrible que les trémolos qu’elle avait entendus dans l’exclamation du première année le laissaient entendre.

- Bah, il te suffira de m’envoyer des lettres, je ne serais jamais très loin, tu sais ! Et ne t’inquiètes pas, tu m’oublieras vite, la petite Serpentard ou d’autres filles s’en chargeront.

Eva-Rose était persuadée en effet qu’au plus tard à cette même date l’année prochaine (soit le 25 décembre 2003, pour ceux qui ne suivent pas), elle serait bien loin des pensées du jeune Rhys. Non seulement il aurait sans doute beaucoup à faire, la charge de travail ne faisant qu’augmenter avec les années, mais en plus il aurait bon nombre d’autres filles dont s’occuper, que ce soit celles de sa propre année, les plus âgées, les nouvelles…après tout, il y avait quand même du choix pour tous les âges, à Poudlard. Et puis il y aurait deux nouveau Préfets. Qui ? La rouquine n’en avait pas la moindre idée, mais ils n’auraient aucun problème à combattre la nostalgie du garçon, elle en était convaincue.

Si la remarque de Rhys quant à au départ prochain de Poudlard d’Eva-Rose avait étonné la Préfète, que dire de son comportement ensuite ? L’avait-elle vexé en lui interdisant de travailler ? Rah, que les jeunes étaient difficiles à comprendre ! Autant, jusqu’à présent, le garçon s’était comporté à peu près comme la rouquine quand elle était entrée à Poudlard, autant là, elle ne savait que penser. Quoi que, à bien y réfléchir, c’était quelque chose qu’elle aussi aurait pu faire, à l’époque (bizarrement, au moment où elle en avait le moins besoin !) ; mais les choses avaient changé, et la jeune femme comptait empêcher Rhys de commettre les mêmes erreurs qu’elle et l’obliger à se socialiser, contre son gré s’il le fallait (preuve que même les Poufsouffle peuvent être tyranniques !).

- Rhys, mais reste ici ! Heureusement, vue la taille du gamin, elle n’avait pas besoin de courir pour le rattraper, ce qui fut fait en quelques foulées. Qu’est-ce qu’il t’arrive ? lui demanda-t-elle, on ne peut plus sérieuse. Je t’ai vexé ? Si c’est le cas, je te prie de m’excuser, ça n’était pas volontaire.

Peut-on oublier ses parents? Peut-on oublier ses amis partis trop tôt? Peut-on oublier ceux qui nous brisent le cœur? Certains le peuvent. D’autres non. Pour Rhys, ce n’est pas faute de le mentionner, Eva-Rose était cette seconde mère qui allait profondément le blesser en quittant l’école. Bien sûr, ça n’avait rien d’intentionnel de sa part, elle ne pouvait tout de même pas rater ses études pour lui, chacun devait voler de ses propres ailes. Le problème était que Rhys estimait ses ailes beaucoup trop petites pour le porter.

Envoyer les lettres, c’était bien pour garder contact mais ça se limitait là. Comment discuter avec quelqu’un pour retrouver le moral quand il y a de longs délais d’attente? Il ne faut pas être au bord du suicide. En plus, Rhys aimait voir les gens sourire. Pas qu’il était un fétichiste des dents, qu’on se rassure, mais ça faisait toujours du bien au cœur de voir quelqu’un aller mieux, ne serait-ce que l’espace fugace d’un sourire. En plus, par courrier, on ne vit plus rien ensemble, on vit chacun de son côté et on raconte à l’autre ce qu’il a manqué.

C’était avec une mélancolie à croissance exponentielle que le garçon partait lorsque sa préfète la rattrapé. Soit elle n’avait pas saisi qu’il n’avait plus envie de parler, soit elle s’en fichait. Il n’avait pas le moindre ressentiment contre elle, après tout elle n’avait rien fait de plus que de l’interdire de travailler. Le Poufsouffle était parti tout seul pour la prise de conscience de sa solitude.

Même s’il son ainée n’était pas sportive, il ne pouvait pas lui échapper pour diverses raisons. Il n’était pas lui-même sportif, il avait de plus petites jambes et il ne se voyait pas se mettre à sprinter dans les couloirs en criant pour avoir du secours. Ne pouvant fuir, il se retourna. Le visage plus fermé que jamais. Ce n’était pas la première fois qu’il démontrait qu’il pouvait passer du garçon le plus souriant au monde à celui le plus dépressif étant.

- Il n’y a rien. Tu n’as rien fait… C’est juste que…moi… si je ne travaille pas… je suis… seul. Tu es la seule qui me parle pour autre chose que les cours et la maison.

Il lui devenait particulièrement difficile de continuer à parler sans fondre en larme. Vieillir était bien trop compliqué pour lui, en voulant avoir le meilleur esprit d’équipe, il n’avait fait que s’auto-éjecter de ladite équipe, sans rien comprendre. Béni était le temps où sa mère était là pour l’aider, le conseiller et le soutenir. En fin de compte, peut-être que lui non plus ne serait plus là l’année suivante. La raison de sa présence était la magie et elle avait raté son inscription à Poudlard, autant rentrée dans son foyer pour retrouver ses proches.

Qu'une chose soit claire pour le futur Monsieur Watters si jamais il devait exister : qu’il n’espère même pas avoir d’enfant. Devenir énorme pendant neuf mois pour ensuite avoir à s’occuper d’un gamin qu’elle ne comprendrait pas ? Non merci, Eva-Rose passait le chemin. Non qu’elle n’aima pas parler avec Rhys, ne déformez pas mes propos, mais en revanche gérer un enfant lui semblait bien compliqué : comment agir avec quelqu’un dont vous ne comprenez pas les actes ? Pourquoi tout à coup cette fuite, ce visage fermé, et tout ce qui s’ensuit ? Sérieusement, faire ça un an, deux à la limite – et en tant que jeune Préfète, soit avec encore un minimum d’intelligence, c’était possible, mais à quarante ans et toute sa vie, ça n’était définitivement pas pour elle, donc pas de bébé pour Miss Watters, au risque de me répéter.

Eva-Rose se passa la main dans les cheveux, ne sachant pas trop quoi répondre à Rhys, puis s’accroupit afin d’être à la hauteur du visage du garçon qu’elle fixa encore une fois droit dans ses yeux. Elle non plus n’avait pas eu de contacts autres que formels avec les gens de sa classe, du moins pendant un moment, sauf qu’elle n’avait pas eu de Préfet pour l’aider, seulement une demi-sœur un peu…disons bien différente d’elle.

- Parce que tu es plus entouré quand tu travailles ? commença-t-elle, avant de se reprendre en sentant la dureté de son ton – ça n’était pas le moment d’ennuyer un peu plus Rhys, le pauvre paraissait déjà assez malheureux comme ça pour ne pas en rajouter, je veux dire, il faut que tu fasses toi aussi l’effort d’aller vers les autres, sinon personne ne se parle ! Samara est très gentille, je suis sûre qu’elle ne verra aucun problème à passer un petit moment avec toi ! Vous ne devriez pas avoir trop de problème à trouver des activités communes.

Eva-Rose se releva – ça faisait mal aux jambes de rester à genoux – et invita Rhys à continuer, sans cesser de parler.

- Tu connais les échecs sorciers ? Et la bataille explosive ? D’ailleurs si tu veux apprendre des jeux de cartes, j’en connais un paquet. Tu peux faire beaucoup de choses avec un paquet tout simple, tu sais ? La divination, par exemple. Ca peut être très intéressant à condition de faire un peu attention et de ne pas forcément prendre au sérieux tout ce que les cartes – et le professeur – racontent.

Après cette trop longue tirade, Eva-Rose s’arrêta de parler sans cesser cependant de fixer Rhys, essayant de prévoir ses prochaines réactions. Que ne possédait-elle pas le don de Carry ? Ca aurait pu être utile pour éviter de retrouver le garçon dans les cachots en train d’être maltraité par des Serpentard ou n’importe qu’elle autre brute d’une autre maison comme il en sortait une de temps en temps, cependant bien vite remise à sa place par les Préfets ou d’autre brute, en général.

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