¤ L'histoire en 30 baisers de Charisma Kostovak ¤

Je ne me rendais que trop compte de ce que j'avais fait et de ce que cela allait entraîner pour moi. J'allais avoir du mal à expliquer que j'avais embrassé Axel, surtout Axel tout bien réfléchi. Mais la colère était toujours présente en moi. Enry ne se rendait pas compte de ce qu'il me demandait. Il voulait que j'abandonne tout pour lui, que je fasse fi d'Andrew, de mon passé, de mes problèmes. Ce n'était pas ainsi que j'envisageais notre relation, et pourtant, cela faisait quasiment un an que nous étions ensemble.

Le lendemain du baiser avec Axel, j'avais fait comme si de rien n'était. Enry m'avait parlé, essayant de me faire des excuses maladroites que j'eus du mal à accepter. Seul la culpabilité me fit les accepter. J'évitais avec soin mon meilleur ennemi, faisant en sorte de me faire porter pâle pour les quelques cours que nous avions en commun.

L'infirmière comprit assez vite que je n'étais pas du tout malade, mais elle me laissa tranquille. Nicolas ne prit pas cette peine. Il vint me voir dès la fin de sa journée, s'asseyant sans gêne particulière près de moi, croisant les pieds, les balançant avec légèreté, l'air de dire « Si tu ne veux pas parler, je le ferais pour toi. ». Je me tins coite en dépit de cette menace sous-jacente. Hors de question de lui raconter ce que je pensais de mes histoires de cœur, qu'il s'occupe donc plutôt des siennes, tiens ! Il était presque étonnant, à ce propos, qu'il ne soit pas avec Emma. J'aurais pensé qu'il l’emmènerait pour faire du deux contre un.

« Tu as décidé de devenir muette ?
- C'est une option que j'envisage très sérieusement si vous continuez à rester ici. Puis-je connaître les raisons de votre visite ? Comme vous le voyez, je n'ai nul besoin de votre sollicitude.
- Oh ça... je n'en ai jamais douté. Mais je me suis laissé dire que tu avais peut-être besoin d'un ami.
- Si c'était le cas, je vous l'aurais fait savoir. »

Que voulait-il que je lui dise exactement ? Je n'étais pas prête à lui parler. « Tu es toute pâle Carry... » Remarqua mon ami. Je tournai la tête vers la vitre instinctivement pour avoir une vision de mon reflet. Effectivement, je n'étais pas très en forme. Quand le mental ne suivait plus, le physique lâchait. J'avais pleuré aussi, quelque chose que je ne faisais pas souvent. Je n'étais tout bonnement pas habituée à des émotions fortes, elles m'usaient. « Je suis juste fatiguée. » Nicolas balança une nouvelle fois ses pieds, mais je notai que son geste était devenu nerveux. « Je sais ce que c'est. Tu n'as pas besoin de me mentir. » Peut-être... ou peut-être que si. Nicolas avait souffert, comme moi, mais pas de la même manière. On ne pouvait pas se mettre à la place des autres. « Je n'ai pas assez confiance en... moi. Je crois que... ça va tuer ma relation avec Enry... et... il ne semble pas près à nous sauver Dorémi et moi. Je ne peux pas le faire moi-même, pas comme ça. Alors... à quoi bon ? » Nicolas se pencha un peu sur moi, me regardant dans les yeux. « Tout ira bien Carry. Un jour, on te sauvera. » Il plaqua sa main sur mon front, et je ne sais pourquoi, je m'endormis aussitôt.

Lorsque je me réveillais, le crépuscule était tombé. Ce fût plus fort que moi, j'y vis un signe, ceci d'autant plus que le visage d'Axel était penché sur le mien. Je sentais encore le poids de son baiser... « Vous... ne devriez pas être là... » Je soupirais, l'éloignant d'un geste ferme alors que je me relevais. « C'est un prêté pour un rendu. » Il se tenait debout devant moi sous les rayons orange d'un soleil déclinant pour laisser place à la nuit. Cela avait quelque chose de fascinant. « Pourquoi... pourquoi ai-je l'impression que je devrais savoir quelque chose à votre sujet... sans réussir à mettre le doigt dessus ? » Axel sourit d'une manière que je jugeais énigmatique. « Qui sait ? Quand tu auras la réponse, tu n'auras qu'à revenir me voir. En attendant, tu n'as qu'à te dire que tout ça n'est jamais arrivé. » Il me tournait déjà le dos lorsqu'il lâcha « Reviens vite en cours la folle aux voix. » Mes dents grincèrent sans que je m'en rende compte, et je replongeais dans le sommeil.

Nicolas m'avait jeté un sort, tellement efficace que le lendemain j'avais oublié une grosse partie des événements des derniers jours.

« Tu m'as trompé. » Oui, oui, ça va, c'est bon, on a compris.

Je me souviens combien j'avais envi de me mettre en colère à ce moment là, sauf que je me contentais de le fusiller du regard. C'était moins violent, moins visible, mais quelque part c'était encore plus violent de ma part.

« Si je voulais votre pardon, je le demanderais, or vous avez sûrement remarqué que je ne l'ai pas fait. » Le fait était que Enry parlait dans le vide, Nicolas m'avait jeté un sort et ma mémoire n'était pas très fiable. Au demeurant, si Nick ne m'avait pas prévenu qu'il avait agi ainsi, je ne serais même pas au courant de ce dont me parlait Enry. A priori je l'avais trompé avec quelqu'un, mais personne ne m'avait dit qui, et ils commençaient sérieusement à me gonfler tous autant qu'ils étaient.

« Et bien, tu devrais peut-être te remettre en question Carry, parce que le fait est que tu l'as fait, et que le minimum serait encore que tu t'excuses ! » Peut-être, en effet, mais je n'en avais pas envie. Comme je n'éprouverais aucun désir de poursuivre cette conversation. « Soit. Je vous prie de m'excuser. Mais pour quelque chose dont je n'ai aucun souvenir. » Je me levai et lui fit une révérence moqueuse avant de m'en aller. Il m'agaçait, mais il n'était pas en tête des personnes à abattre à mes yeux.

« Monsieur Griffins ? Vous n'auriez pas vu Monsieur Jones par hasard ? » Axel me jeta un coup d’œil que je qualifierais avec le recul de « perplexe », néanmoins, il semblait à peu près disposé à me répondre. « Jones ? Non. Tu ne te souviens vraiment de rien ? » C'était mon tour d'avoir l'air de ne pas bien comprendre de quoi il me parlait. « Ne me dites pas que vous aussi vous avez quelque chose à me reprocher. Je commence à trouver un tantinet agaçant que tout le monde me houspille pour des choses qui me sont inconnues. » Axel mordilla le bout de son stylo, songeur, et je me souviens que j'avais failli partir tellement il m'ennuyait à rester silencieux. Au moment où je m'apprêtais à aller demander à Emma qui entrait dans la pièce, il reprit alors la parole. Du coup, je restais, en effet, c'était une règle de base de la politesse, et j'avais toujours eu cette qualité.

« Je vais venir le chercher avec toi. » Il ferma son livre de cours, ses feuilles, ses parchemins et son stylo bien avant que j'ai pu analyser cette phrase. Il suivit ma première idée et demanda à Emma qui nous indiqua bien aimablement que son petit ami se trouvait dans la bibliothèque.

Nous nous y rendîmes et trouvâmes aussitôt Nicolas. J'allais parler, lui demander pourquoi il m'avait effacé la mémoire, sauf que je n'avais pas eu le temps de bouger qu'Axel balança un coup de poing à Nicolas ! Mais qu'est-ce qui lui prenait ? Il allait le mettre en pièce. Je m'interposais dès qu'une ouverture se présenta, me mettant entre les deux jeunes hommes qui me dominaient d'une tête facile. Sauf qu'il en fallait plus pour me faire peur, j'avais vu ma mère mourir dans un incendie, j'étais vaccinée contre le danger.

« Mais enfin qu'est-ce qui vous prend à tous les deux ? » M'écriais-je au même moment. Aussi bien que je réagisse face à ce type de situation, on pouvait quand même sentir une petite pointe d'hystérie dans ma voix. « Rien. Rien. Je m'en vais. Salut les loosers. » Je n'eus pas le temps de le rattraper, Axel avait disparu. Je ne comprenais pas ce qui se passait. J'avais perdu un bout de mémoire, mais cela ne pouvait pas expliquer ces successions d’événements !!!!

« Nicolas ! Tout va bien ? » Je me penchais sur mon ami qui s'était littéralement fait mettre en pièces par Axel. Je ne savais pas mon principal ennemi si violent, même si, certes, ce n'était pas trop la question pour l'instant. « Ouai... j'vais être couvert de bleus et il m'a sûrement fêlé une côte, mais je survivrais. » Je l'aidais à relever la tête, cependant, il se tenait toujours à moi, incapable de vraiment se lever. « P... Pourquoi a-t-il fait ça ? » Nicolas eu une grimace qui devait être un sourire à l'origine. « Disons que j'aurais dû le rendre amnésique lui aussi. » Alors, mon ami murmura des paroles étranges qui enveloppèrent de lumière avant qu'il ne pose ses lèvres sur les miennes. Ensuite, il murmura de nouveau.

Depuis mes souvenirs me sont revenus, Nicolas a brisé son propre sortilège. Je me souviens de ce qu'il m'a dit ce jour là : « Tu n'es pas prête à te souvenir, je fais ça pour toi. » C'est à l'époque où je me souvins de tout ça que je découvris aussi que Nick avait un don, comme Emma et moi, et qu'il pouvait manipuler les gens pour peu qu'il y ait contact intime. Réflexion faite, c'était logique, je ne voyais pas pourquoi il m'aurait embrassé sinon, mais j'espère encore maintenant que mademoiselle Carter était au courant pour cette petite... particularité ?

Toute amnésie mise à part, je n'avais aucune raison de craindre d'entrer dans ma sixième année. Le hic c'est que l'univers avait toujours tendance à jouer avec mes nerfs, du coup, je me retrouvais assez rapidement dans une position difficile car avec Enry, ça n'allait pas très bien (même sans parler du fait qu'il soutenait mordicus que je l'avais trompé, il se montrait trop occupé pour se soucier de ma personne), et, pour atteindre le pompom, je me retrouverais sans magie. Elle avait tout bonnement disparue. Ma seule consolation c'est que c'était le cas partout ailleurs, je n'étais pas devenue cracmol du jour au lendemain, un certain soulagement quelque part.

Nicolas et Emma entraient en cinquième année, Elyna et moi en sixième donc, tandis qu'Axel lui entamait sa dernière et septième année dans les murs de Poudlard. L'équipe des serdaigle était toujours la même et presque au complet si on oubliait Enry.

En tout cas, j'avais un peu rayé les problèmes de la fin de l'année précédente de mon esprit et j'avais clairement renoncé à tout espoir que Nick me dise le contenu des souvenirs qu'il avait mis sous clef. J'aurais pu aller à Sainte Mangouste pour me faire examiner mais je crois que j'avais peur de ce qu'il avait fait dans ma tête, au moins autant que de ce que je risquais d'y trouver. En résultait que je boudais mon ami, passant par le même coup plus de temps avec Elyna qu'avec Emma. Je ne pouvais alors pas deviner qu'elle s'en irait à la fin de l'année.

Toute cette histoire me revint à l'esprit alors que j'étais attablée avec mes camarades. « Charisma ? Je peux te parler ? Juste toi ?» Je levais les yeux vers mon interlocuteur. Il s'agissait d'Axel. Je fronçais les sourcils mais me décidait à le suivre tout de même. Nicolas essaya de m'en empêcher mais je me dégageais de sa prise avec fermeté. Aussi désagréable que puisse être le septième année, je n'avais aucune raison de le fuir. Nous nous rendîmes dans un endroit tranquille, près des escaliers du grand hall.

« Bien, nous sommes seuls, que vouliez vous ? » Il me jaugea, un peu comme si c'était la première fois qu'il me regardait vraiment. Je n'étais pas sûre qu'il aimait ce qu'il voyait. « Le mec avec qui tu as trompé Enry, c'est moi. » Je penchais la tête un peu sur le côté, cherchant à trouver un signe de plaisanterie sur son visage. Non. Il semblait sérieux. Avait-il bu ? « Pouvez-vous précisé 'trompé' ? » Parce que j'espérais bien, amnésie ou pas, être encore vierge. Je n'avais pas encore eu l'occasion de le faire avec Enry, et tant qu'à faire j'aimerais en garder un souvenir.

« Embrassé. Deux fois. La première fois c'était toi, la deuxième c'était moi. Et ensuite tu as perdu la mémoire. » J'en déduisis que ce qui le contrariait était que j'avais perdu la mémoire. Il est vrai que si ce qu'il disait était exact (j'émettais encore quelques doutes), ce n'était pas très fair-play. Mais il fallait qu'il aille se plaindre à Nicolas... ah bah tiens, voilà qui expliquait beaucoup de choses !

Mon cerveau fumait presque tellement il travaillait pour assimiler cette donnée nouvelle, malheureusement, je ne sais pas ce que j'aurais pu finir par trouver puisque Axel se pencha sur moi et m'embrassa. « Pour que tu t'en souviennes. » Dit-il ensuite avec ce petit sourire narquois qui me donnait toujours envie de le gifler. Chose que je fis cette fois. Une première. Ma main était partie avant même que je ne puisse l'arrêter. Il n'apprécia pas et m'attrapa le poignet. Des images, comme des flashs, me revinrent, Nicolas au sol, bien abîmé... Une lueur de peur apparut dans mes yeux, il me lâcha dès qu'il l'aperçut.

« Même si ce que vous dites est vrai, vous n'avez aucun droit sur moi. Enry, Andrew, Nicolas, vous... Je n'en peux plus de vous tous ! Aucun de vous ne prend la peine de m'expliquer et vous me faites subir les conséquences en croyant que c'est ce qu'il y a de mieux ! Mais ce n'est pas vrai ! Je ne me souviens PAS ! Je ne veux pas me souvenir ! Je veux juste que vous me fichiez la paix ! TOUS ! » Les voix vrillèrent dans ma tête et je sombrais dans l'inconscience, entre temps, j'avais juste eu le temps de voir Nicolas au-dessus de moi et dire « Trop tard ».

Quelques heures plus tard, je me réveillais seule à l'infirmerie. Sans prendre le temps de réfléchir à un plan, je me dirigeais vers la salle commune des serdaigle. Mes amis (et mon ennemi, tant qu'à faire) étaient tous réunis devant le feu.

« Bravo Axel, vraiment. Faut vraiment être con pour agir comme tu l'as fait seulement pour une petite blessure d'ego. » C'était Nicolas.
« Nick, calme toi... on ne pouvait pas la laisser comme ça trop longtemps. Ton sort aurait fini par se briser en plus... » Là, c'était Emma.
« Vous m'aviez dit qu'il fallait lui effacer la mémoire, et j'avais donné mon accord, mais là ça fait presque six mois que ça dure. J'en ai ma claque d'attendre, et en parlant de claque, si vous étiez moins con, elle ne m'aurait pas giflé. » Axel, évidemment, aussi hargneux et vulgaire qu'à son ordinaire.
« Mais, ça va aller, hein ? Même si elle retrouve la mémoire je veux dire... » Elyna. Un vrai complot.
« Je suis loin d'en être sûr. Si encore il n'y avait que toi, Axel, mais tu sais parfaitement que ce n'est pas à cause de ça qu'il fallait lui effacer la mémoire. Elle ne doit pas se souvenir de la lettre. » Une lettre ? Mais de quoi parlaient-ils ? Je restais dans l'ombre, attentive à chaque mots qu'ils prononçaient.

« Quelle idée aussi que ce papier soit arrivé pile ce jour là ! » Emma détestait quand il y avait des imprévus, visiblement, c'était le cas dans tous les domaines, pas juste dans les études.
« C'est juste un malheureux hasard, et encore, ce n'est pas si mal tout compte fait que ce soit arrivé là, elle sait qu'elle a perdu la mémoire, mais elle croit que c'est à cause d'Axel, elle n'a pas cherché une autre explication. » Nicolas tentait de relativiser, seulement, le ton de sa voix n'allait pas avec le sens de son propos.
« Elle l'apprendra bien un jour pourtant, sa crise de tout à l'heure, c'est un signe, les voix sont en train de faire le forcing. » J'étais d'accord avec Elyna, essayer de cacher un secret à quelqu'un qui a un pouvoir de prémonition, c'est comme demander à un chien d'ignorer un os caché dans un grand parc. Peut-être passerait-il à côté pendant un moment, mais ensuite il le trouverait.
« Son copain veut rompre parce qu'elle l'a trompé, son père est mort et son tuteur veut se marier avec elle pour lui voler le bracelet magique de sa mère... comment veux-tu qu'on la laisse apprendre ça sans rien faire ? Elle a déjà de gros problèmes psychologiques, on ne peut pas en rajouter. » La conversation se poursuivit mais j'avais décroché. J'avais compris. Je ne me souvenais pas en revanche, et cette partie là, je l'ai oublié de manière définitive. Le fait était que pendant que j'étais à l'infirmerie, le jour du baiser avec Axel (le second), une lettre était arrivée, je l'avais lu, j'avais paniqué, et la minute d'après Nicolas avait manipulé mon esprit... je m'étais alors endormie.

Oublier tout ça, comment avais-je pu ? Alors, je fis la pire erreur de ma vie... je pris la fuite, loin de Poudlard et loin des gens qui se souciaient bien trop de ma petite personne.

Avoir appris ce que contenait le pan de ma mémoire qui avait disparu m'avait donné un petit aperçu de l'enfer. Je n'étais pas encore damnée, j'étais seulement au purgatoire. Je souffrais, mais au moins étais-je seule. J'en voulais à mes amis, malgré leurs bonnes intentions, je ne voulais plus les voir, je ne voulais plus qu'ils essaient de me manipuler. La magie avait disparu. J'avais envoyé un hibou express à Dorémi pour qu'elle nous prenne quelques affaires et que nous puissions fuir dans l'heure de mon arrivée à Londres. J'avais frappé à la porte d'un foyer molu pour jeunes filles, je leur racontais l'histoire poignante d'une mère morte trop jeune, d'un père dévasté qui s'était éteint à petit feu et d'un tuteur qui avait voulu abuser de ma crédulité pour me voler les quelques bijoux de mon héritage. En gros, je leur fournissais une version épurée de la triste réalité de ma vie.

Dorémi se rendait invisible aux yeux des moldus. J'aurais pu lui ordonner d'aller ailleurs, chez quelqu'un d'autre, le temps que tout ça se tasse, mais elle était ma seule famille, je n'en eu pas le cœur.

Il faisait froid, nous étions déjà en novembre. Je regardais la neige tomber sur Londres. Sans magie, ils ne me retrouveraient pas de si tôt. C'était du moins ce que je pensais jusqu'à ce qu'au bout de deux semaines, le petit groupe de mes compagnons de maison (Axel inclus) déboulent dans le hall du foyer, réclamant de me voir. « Nous n'avons aucune Charisma Kostovak ici jeunes gens, je comprends votre angoisse face à la disparition de votre amie, mais elle n'est pas ici. » Je soupirais et je me montrais au regard de mes amis, vêtue d'une salopette qu'on m'avait prêté, un tee-shirt bleu ciel en dessous et un gilet trop large ouvert par dessus.

« Madame la directrice...
- Psychée ?
- Non, madame, Psychée est mon second prénom, je suis la fille qu'ils cherchent.
- Alors tu ne t'appelles pas Jones non plus ?
- Non, c'est le garçon blond, là, qui s'appellent Jones. Je ne pouvais pas vous donner mon vrai nom, au cas où mon tuteur me chercherait ici, mais ceux là... ils ne sont pas un danger. Puis-je les faire entrer dans ma chambre ? Cathy n'est pas encore arrivée, ils ne dérangeront personne.
- Hum... soit... Mais nous devrons parler après. »

J’acquiesçais en silence et désignai à mes amis le chemin de la chambre minuscule que je partageais avec une autre jeune. Nous nous tassâmes à l'intérieur. Dès la porte close, je les dardais d'un regard glacial.

« Carry... On a eu tellement peur pour toi...
- Eh ! Parle pour toi Elyna ! Moi je vous suis pour la parité fille-garçon, c'est tout.
- Axel, tais-toi.
- Et toi ne me donne pas d'ordre le blondinet ! » J'émis un soupir aigu et agacé. Si c'était pour ça qu'ils avaient fait tout ce chemin, ils feraient mieux de retourner à Poudlard. Ma vie était peut-être une sorte de purgatoire, mais il y avait des limites.

« Pardon Carry... Ecoute... je suis désolé que les souvenirs te soient revenus, je voulais que ça se passe autrement. » Je me mordis la lèvre inférieure, et je m'assis sur un bout de lit libre. « Vous vous trompez... Nicolas... je ne me souviens toujours pas. Je suis partie parce que je vous ai entendu parler le soir où je suis parti. Vous avez parlé de la lettre... alors je me suis enfuie. » Les quatre compères se regardèrent un moment sans savoir quoi dire. Ils pensaient tous que je me souvenais de tout depuis ma fuite. Comme leurs caractères respectifs le sous-entendaient, c'est Axel qui mit le premier les pieds dans le plat. « Tu veux qu'on t'explique les détails ? » Je fis signe que oui. Au point où j'en étais...

« Le premier soir, tu t'es disputé avec Enry, tu m'as bousculé, on s'est embrassé, le lendemain, tu m'as évité. Une lettre est arrivée pour toi alors que tu étais en train de discuter avec Nicolas, tu as commencé à paniquer... » Je l'interromps. « Jusque là, je me souviens à peu près, je parlais d'Enry, mais après je me souviens de Nicolas qui me parle, puis plus rien. » C'est au tour de Nicolas de prendre la parole : « Tu as lu la lettre et aussitôt tu t'es mise à avoir des hallucinations, je t'ai endormi avec mon pouvoir, effacé une première fois la mémoire, et après j'ai croisé Axel à qui j'ai expliqué ce qui s'était passé. Lui était venu te voir pour parler de la veille. Je l'ai laissé faire mais aussitôt je t'ai ré-effacé la mémoire pour que tu ne te souviennes de rien du tout. Le problème c'est que le lourdeaux ici présent n'a pas compris pourquoi je l'avais aussi effacé lui, donc il m'a fichu une raclée. » Axel reprit la parole et je remarquais à la crispation de ses mains qu'il s'empêchait de refrapper Nicolas pour lui faire comprendre qui était le lourdeaux. « Depuis le début, je dis que ce n'est pas une bonne idée de faire ça. J'étais pour qu'on lève le sortilège dès que tu aurais pu te reposer un peu, ils ne voulaient pas. Alors j'ai essayé de réveiller ta mémoire... la suite, tu la connais. » Je les avais entendu en parler, et j'étais partie. Oui, j'étais au point sur cette partie de l'histoire.

« Ecoutez... je vous suis reconnaissante de prendre soin de moi ainsi... et... je suis désolée que vous vous soyez inquiétés, tous, mais je ne vais pas rentrer à Poudlard. J'ai peur d'Andrew, Poudlard, sans la magie des professeurs, n'est plus un endroit aussi sûr qu'avant... Alors je vais rester ici. Par ailleurs, j'ai du travail, nous en reparlerons lorsque vous serez en vacances. » Tous sortirent, sauf Axel. Je restai immobile, sans rien dire, sans même oser le regarder. « La fuite n'est pas une solution. » Il me fit me lever et m'embrassa, encore. « Je te donne jusqu'à noël pour quitter Enry correctement et revenir à Poudlard. Je compte sur toi. »

Hein? Mais qu'est-ce que j'avais pu faire au ciel pour en arriver là ! C'était pire que l'enfer là !

Ma vie au foyer était simple. Je me levais tôt, je travaillais pour mériter mon logement et ma pitance, je dormais, et le lendemain, je recommençais. Aussi répétitif que ce genre de vie puisse être, cela me reposait de l'effervescence perpétuelle de Poudlard, et plus généralement de ma vie. J'avais besoin de me reposer. C'est ce que je me disais... du repos, voilà ce qu'il me fallait. Néanmoins, ce n'était pas si facile de laisser mon esprit voguer librement au fil de l'abrutissement de journées toujours semblables. Je pensais aux autres. A Nicolas, Emma, Elyna, et à Axel aussi bien sûr. Je me demandais ce que je ressentais pour ce dernier. Je ne le détestais plus, l'aimais-je pour autant ? Nous étions très différents et je le sentais (croyais?) incapable de tolérer la complexité de mon existence. J'étais un problème depuis l'enfance. Ma vie entière reposait sur un mensonge. Maintenant que mon père était mort, les pièces du puzzle se remettaient d'elles-même en place. Papa ne m'avait pas vendu parce qu'il le voulait, il l'avait fait parce qu'il n'avait pas le choix. Comme j'avais été bête... Une partie de moi lui en voulait toujours. J'aurais tellement aimé qu'il me parle, qu'on lutte ensemble... Et puis, finalement, je me disais que je n'étais sûrement pas mieux que lui.

J'étais partie pour fuir ma peur après tout. Alors comment pouvais-je juger mon père ? A sa façon, il avait essayé de me protéger. Mais ma rancœur était trop ancienne pour disparaître. En plus, c'est facile d'en vouloir aux morts, ils ne sont pas là pour se défendre.

Alors je réfléchissais tout en accomplissant des actes machinaux que j'aurais pu faire les yeux fermés. J'en vins à la conclusion que j'avais embrassé Axel, mais qu'un baiser, ce n'était pas grand chose. A bien y regarder, j'avais embrassé pas mal de monde malgré mon jeune âge, et pour la plupart des cas, cela ne signifiait rien. Pour m'assurer que je prenais la bonne décision, je me dis qu'il fallait que je fasse un test, mais mon foyer était pour jeune fille... or je ne suis pas attirée par les filles. Donc cela ne servait à rien d'essayer avec une de mes camarades d'infortune. Ce qu'il me fallait c'était un beau gosse pas trop difficile à convaincre de se laisser embrasser. Après réflexion, je laissais tomber la seconde partie, c'était déjà compliqué de trouver des beaux garçons lorsqu'on est dans un foyer social, alors si en plus il devait se laisser convaincre facilement, nous n'en finirions jamais.

Un week-end, alors que j'étais de sortie pour me détendre un peu les jambes (servir à la soupe populaire, cela n'avait rien de très dégourdissant pour les muscles aussi gratifiant cela soit-il), je croisais Benson. Il ne me supportait pas, mais il était plutôt mignon. C'est un ami de Nicolas, un serpentard, le genre à ne pas supporter les gens qui sont différents, donc les gens comme moi. Mais il savait que j'étais une sorcière, il connaissait mon nom, et comme l'hygiène à Poudlard était plutôt bonne, je pouvais aussi être sûre qu'il n'avait pas de maladie. On met trop souvent de côté l'aspect hygiénique d'un baiser, mais il y a des maladies qui s'attrapent par la salive !

« Bonjour monsieur Benson. » Je connaissais parfaitement son prénom, mais je n'appelle pas grand monde ainsi, j'aime bien donner du monsieur ou du mademoiselle, ça permet de laisser les autres à distances. Vous me direz que là, ce n'était pas le but, mais bon... « Kostovak ? Attends, qu'est-ce que tu fous là ? Nick t'a cherché partout. » Sa voix était hostile et un peu surprise, rien de très étonnant. « Je peux vous rassurer sur ce dernier point, il m'a trouvée. » Je ne répondais jamais à l'hostilité par l'hostilité. Les gens qui me trouvent bizarre/associable/folle/rayez la mention inutile ont tendance à avoir des réactions épidermiques qui peuvent mal tourner. Je ne cherchais jamais les problèmes, ils venaient toujours à moi tout seul, je peux le jurer sur tout ce qu'il y a de plus sacré. De ce fait, je ne relevais jamais ni le dégoût, ni la colère, ni la méfiance que je pouvais inspirer. Je faisais comme si de rien n'était, ça me faisait peut-être passer pour encore plus à côté de la plaque, c'est vrai, mais en même temps, à quoi bon se battre contre des moulins à vent ?

« Et donc, tu viens me parler pour... ? » Que d'agressivité. Il n'était pas très coopératif. « Voilà quelques temps que je n'avais pas croisé de visage familier, c'est tout. Mais c'est sûr que voir quelqu'un qui me déteste un peu moins que vous aurait été préférable, encore que, à certains égards, j'aime encore mieux qu'on me déteste. Vous ne pouvez pas savoir comme ceux qui m'aiment peuvent être lourds par moment. » Ils vous effaçaient la mémoire par exemple. Alek allait répondre quelque chose, mais je l'en empêchais via un petit flacon de parfum magique que je venais de déboucher. Il n'était pas assez coopératif pour que je le séduise, et en même temps, je n'en avais pas envie, je voulais juste vérifier quelque chose. Comme il était sous l'effet de ma potion (qui lui faisait voir en lieu et place de ma personne une autre fille et permettrait qu'ensuite il ne sache plus trop si toute cette conversation était réelle ou non, pratique hein?), je me penchais sur lui et l'embrassais. J'y mis les formes, mais rien ne se passa. De mon côté je veux dire, lui, il en voyait une autre à ma place, donc ça ne comptait pas. Je le laissais à son rêve, ramassant toute preuve de mon acte (au pire, si jamais il finissait par comprendre, il me haïrait encore plus, ça ne changerait pas grand chose), et m'éloignais, pensive.

J'étais une scientifique dans l'âme, j'aimais soupeser, calculer, vérifier... en bref, la logique des choses et des actes, voilà ce qui importait pour moi plus que tout le reste. A l'origine, je ne trouvais pas Axel laid, mais il m'énervait, et lui, il ne m'aimait pas du tout, ce qui n'arrangeait rien. Il y a quelques mois de ça, ma relation avec mon camarade de maison était à peu près équivalente à ma relation avec Alek (on remarquera que leurs prénoms se ressemblent, même si cela n'a rien à voir). Pourtant, je venais d'embrasser Alek et ça ne m'avait rien fait du tout, aucune réaction émotionnelle ou physique. Rien du tout. Ce n'était pas la faute d'Alek, à cause de la potion, il jouait le jeu du baiser échangé, il n'y était pas mauvais d'ailleurs, objectivement.

En toute logique, je devais l'admettre. Axel était différent des autres garçons pour moi, je ne savais pas comment c'était arrivé, mais c'était un fait, lorsqu'on s'embrassait, je ressentais des émotions... quelque chose se passait... Il avait raison, il fallait que je rompe avec Enry en bonne et due forme. Et peut-être qu'il faudrait que lui et moi on parle... Quand les preuves sont là, il n'y a plus d'échappatoire possible.

Il fallait que je retourne à Poudlard. J'avais peur, mais je n'avais pas le choix. Fuir... ce n'était jamais une solution. Je voulais aussi retrouver mes amis, il y en avait à qui je devais parler. Alors, un soir, dans la salle commune de Serdaigle, je posais mon sac bruyamment sur le sol.

« Je suis rentrée. » Emma se leva la première « Carry ! » et vint vers moi avec rapidité pour me serrer contre elle. Ce n'était pas juste moi, elle était une vrai boule de nerf à cause de la disparition de la magie, ce qui expliquait sa réaction. J'étais revenue la veille des vacances de Noël, ce n'était pas vraiment fait exprès – expliquais-je autant à mes camarades qu'aux professeurs -, ce n'était qu'avec les sermons et les contes sur cette fête que j'avais réalisé qu'il fallait que je revienne. J'y pensais avant, depuis qu'ils étaient venus au foyer pour me chercher, mais je n'avais pas trouvé le courage avant.

L'agitation que provoqua mon retour m'empêcha de parler seule à seule avec qui que ce soit. Axel, un peu en retrait à chaque fois que je me mêlais à mon groupe d'amis, m'observait. Je savais ce qu'il attendait, sauf que ce n'était pas vraiment ma priorité. J'étais revenue à Poudlard, très bien, c'était un lieu qui m'était vraiment cher, mais il ne fallait pas oublier que Andrew était à mes trousses. Mon père était mort maintenant, plus rien ne me protégeait de lui. Il m'avait fallu quelques temps à comprendre pourquoi il voulait m'épouser. Notre différence d'âge n'était pas si importante que ça, ce qui choquait c'était mon âge actuel plutôt, donc ce n'était pas ce qui m'avait fait remettre en question les plans de mon tuteur... c'était plutôt que je n'avais pas l'impression de lui plaire. J'avais déjà vu les femmes qu'il fréquentait (rarement cependant, lorsque c'était possible, il m'éloignait lors de ses rendez-vous). Elles étaient souvent blondes, tout en jambes, très féminines et – entre nous – d'assez mauvais genre. Je n'étais rien de tout ça. J'avais un style plutôt infantile si on devait établir une comparaison, j'étais brune (châtain les meilleurs jours) et j'étais bien plus petite que ces femmes là – alors que je n'étais pas si petite! -. Cela aurait pu être mon nom qui l'attirait, Andrew n'était pas un sang-pur et cela le complexait, toutefois, cela ne me semblait pas suffisant non plus. Dans ce cas, il aurait mieux valu qu'il tente sa chance avec ma grande cousine Dawn qui n'était pas plus son style que moi mais qui avait quelques années de plus... Tout ça, ça ne collait pas. Et quelques jours avant mon retour à Poudlard, j'avais compris, ce fut une révélation : c'était le bracelet qu'il voulait.

Mon bracelet magique me vient de ma mère et reste figé à mon poignet. Je ne peux pas l'enlever, pas le briser non plus, et si je meurs avant de l'avoir transmis, il disparaît avec moi. Ce bracelet n'a aucune importance par lui-même, ce n'est qu'un bracelet qui indique l'humeur de son porteur. Si c'est plus fiable que les gadgets moldus, en revanche cela n'a aucun intérêt réel. Mais la pierre qui est fixée sur le bracelet est précieuse car elle est l'un des ingrédients de la pierre philosophale. Un parmi d'autres, mais c'est l'un des seuls à être connu (d'ingrédient) et comme la pierre philosophale a disparu avec son créateur, mon bracelet est la première étape y menant. Il y en a d'autres des pierres comme celles-ci, elles sont rares et se transmettent souvent de parent à enfant. On ne peut donner le bracelet qu'à quelqu'un qu'on aime à pouvoir en mourir... Andrew voulait me forcer à l'aimer, il le faisait depuis que j'étais enfant, et il s'impatientait. Il voulait mon bracelet. Uniquement ça.

La quête de la richesse et de l'immortalité me semblant aussi futile que ridicule, si j'avais pu, je le lui aurais donné. C'était un souvenir de ma mère, j'y tenais, mais aucun bijoux ne valait tout les ennuis qu'il m'avait causé (d'autant que j'avais bien d'autres bijoux de ma mère, moins précieux, moins magiques, mais des souvenirs quand même!). Comme je ne pouvais pas le lui donner quoi que j'en pense, il fallait que je me défende. Les professeurs étaient d'accord. Mes amis aussi. C'était rare que tout le monde soit en harmonie avec moi !

Le soir de Noël, j'étais encore soucieuse ; Un peu contrariée aussi car à force de m'occuper de mon problème avec Andrew je n'avais pu parler ni à Nicolas, ni à Axel. Emma et Elyna étaient assez prenantes dans leur genre, le côté préfète probablement. Je n'avais pas eu le temps de chercher un cavalier. Je m'étais fait belle avec mes copines quand même, j'aimais les chiffons (mais ne le dites pas trop fort, je n'en étais pas fière).

Je descendais les marches de la salle commune et là je vis Axel qui attendait les mains dans les poches de son pantalon. Il n'était pas en jean, c'était rare. Je passais devant lui sans m'arrêter, il avait forcément invité quelqu'un avant que je ne revienne et je n'avais pas envie de voir ça. Je ne m'étais pas le bal sur le compte d'un quelconque romantisme, j'y avais été très souvent avec Damon ou d'autres amis, donc je n'étais pas jalouse... enfin, presque pas. Comme ce n'était jamais simple avec lui, il m'attrapa le bras. « Eh ! Tu vas où ? » Je me retournais, mon visage était plutôt inexpressif à la base, mais là, il trahissait une certaine perplexité. « Au bal, pourquoi ? » Que vouliez-vous que je réponde d'autre ? Cette situation n'avait rien de normal pour moi. « Et tu y vas sans ton cavalier ? » J'étais réputée pour être intelligente, mais ce soir là, j'avais l'impression d'avoir du porridge dans la tête. Je ne comprenais rien ! Et bien sûr, lui, ça le faisait beaucoup rire (à claquer je vous dis!). « Je n'ai pas de cavalier. » Il me tira vers lui, une très mauvaise habitude qu'il avait prise cette année et qu'il devrait commencer à songer. Ce n'était pas très honnête d'user de son avantage physique (il était bien plus fort que moi – il n'y avait pas de mal -). « C'est moi ton cavalier imbécile. Tu as plaqué Enry, non ? » Clic, clac, ça y est, enfin, j'avais saisi la situation ! « En effet, mais comme nous n'avons pas eu le temps de... » Il soupira. « Tu penses trop. » Et il m'embrassa.

Quelque part... c'était mon conte de noël à moi.

Jusqu'à la fin de l'année, tout se déroula à peu près bien. On récupéra même la magie. Trop tard pour que Emma reste parmi nous, elle décida de quitter Poudlard à la fin de l'année et d'en faire de même avec Nicolas au passage. Moi, pendant ce temps, je montais un plan pour que mon tuteur me laisse définitivement tranquille. A ce moment là, j'ignorais que les choses finiraient aussi mal... Si seulement Emma n'était pas partie... peut-être que tout aurait été différent.

Au début de l'été mes amies les plus proches (Tosca, Eva-Rose et Elyna), mes meilleurs « potes » (Damon et Nicolas), mon petit ami (Axel) et ma cousine (Dawn) nous étions réunis pour décider de ce que nous allions faire. J'avais quitté ma maison et je vivais chez les uns ou chez les autres (c'était variable, mais je ne m'étais pas encore décidée à aller chez Axel). Andrew me courait après, il devenait violent. Lors de notre dernière altercation, il m'avait frappée, en présence de Dawn qui avait revendiqué à la fois ma majorité mais aussi le fait que je n'avais jamais eu besoin de tuteur puisque j'avais de la famille vivant encore. Tout le monde était furieux après ça. Bizarrement, ça m'avait laissé indifférente. Je m'étais seulement sentie plus résolue à m'en aller. Le contrat magique était encore chez Andrew, il fallait le voler, nous réfléchissions comment faire, parce que nous avions peur que de guerre lasse, Andrew ne finisse par faire plus que me donner une forte gifle.

« Je crois qu'il n'y a pas d'autres solutions que l'attaque frontale. » Nicolas avait envi d'en découdre. Il fallait bien qu'il passe sa colère sur quelqu'un puisqu'il n'avait pas osé le faire contre son ex petite amie. Son teint était pâle, et ses poings serrés. Il n'en pouvait plus de rester là, à ne rien faire. Ma joue avait dégonflé depuis que j'étais partie avec perte et fracas de chez Andrew, cela n'y changeait pas grand chose pour lui. J'étais assise sur les genoux d'Axel qui me tenait dans ses bras sans vraiment participer à la conversation. Je n'étais pas certaine, pour tout dire, qu'il aime beaucoup mes amis. Je ne le suis toujours pas, pour tout dire. « Donc tu proposes quoi petit génie, on entre et on casse tout ? T'as pensé aux filles ? » J'ai eu l'impression qu'il incluait Damon dans le lot des filles, faut dire que Damon et la bagarre... mais j'en avais autant pour Eva-Rose.

« Il vaut mieux y aller en petit comité. » Dis-je pour faire un compromis. Axel, Nicolas, Dawn et moi allions voler le parchemin pendant que le reste de la bande préparerait le contre-sort. C'était un super plan... jusqu'à ce qu'il foire.

Nous étions entrés dans la maison par la fenêtre de la chambre de Dorémi sans bruit, Dawn et Axel, les adultes, avaient la baguette à la main. Nicolas et moi faisions sans, déjà qu'on avait failli me laisser de côté sous prétexte que j'étais une fille trop jeune ! Cette blague ! Moi ? Une future auror ! J'étais si fière, si sûre de moi. « Charisma ! » Andrew était entré brusquement alors que nous venions de mettre la main sur le contrat. Une alarme magique. Il avait pointé sa baguette magique sur moi, Nicolas s'était jeté en travers su sortilège et fut projeté contre la bibliothèque qui lui tomba en partie dessus. « Nicolas !!!!! » j'étais tout prêt, je m'approchais. « oh non... Merlin... Nicolas... » Durant ces quelques secondes de flottement, Dawn et Axel avaient maîtrisé (facilement) mon tuteur. « A... Axel... Ni... Nicolas... Il... Il... » Axel hésita un instant, mit un coup de poing dans le ventre d'Andrew pour se défouler et s'approcha de moi. « Calme-toi, respire, si tu paniques, ça ne va pas aider Jones, ok ? » je fis un signe de la tête pour dire que je comprenais mais mon cœur battait encore très fort dans ma poitrine alors que celui de Nicolas sous ma main ralentissait...

… « Adieu. » dans le froid de l'hôpital, je laissais Nicolas dans son coma dont il n'était pas sorti depuis ce soir là. Axel m'attendait dehors. Je me penchais sur mon ami et l'embrassais tendrement sur les lèvres. « Je vais aller la chercher Nick... Je te le promets, je te ramènerais Emma, et tu te réveilleras. » Une larme roula sur ma joue. Il m'avait sauvé avec l'énergie du désespoir... cela ne m'avait pas rendu heureuse... bien au contraire.

« Allons-y. » Dis-je à Axel. Cela me prendrait le temps qu'il faudrait mais je convaincrais Emma de revenir.

« Alors ça c'est la cerise sur le gâteau ! Emma Carter vous n'êtes qu'une affreuse, abominable et horrible petite égoïste ! Je vous intime l'ordre de revenir en Angleterre immédiatement ! » Je n'y allais pas par quatre chemins mais en même temps, j'avais eu un mal fou à voir Emma. Déjà, il avait fallu attendre les vacances de la Toussaint car je n'avais pas pu louper les cours (déjà que j'avais séché tout un trimestre l'an passé...). Et puis, je ne pouvais pas y aller seule, l'Amérique, mine de rien, c'est loin, et Axel avait sa musique, son groupe, même si Nicolas était toujours dans le coma, cela ne signifiait pas qu'il fallait pour autant que j'empêche mon copain de lancer sa carrière. Honnêtement, pour moi, ce qu'il jouait cela ressemblait surtout à du bruit, mais j'étais suffisamment amoureuse de lui pour me taire à ce sujet. Il s'en doutait, il me connaissait assez pour savoir que mes goûts et les siens ne collaient pas, cela dit, la musique, dans notre couple, c'est comme la politique dans d'autres, on évite d'en parler et tout va bien.

Bref, j'avais mis deux mois avant de réellement pouvoir la rejoindre, et là, elle me disait qu'elle ne voulait pas rentrer. « Je n'ai pas d'ORDRE à recevoir de TOI ! » le ton montait entre nous, Axel avait l'air de redouter qu'on ne se tape dessus. J'étais un petit peu folle (ok, beaucoup parfois), je pouvais avoir des crises hallucinatoires violentes, toutefois, là, il s'était fait du soucis pour rien, parce que j'étais simplement très en colère. La peur déclenchait mes crises, pas la colère. « Ah oui ? Parce que Salem c'est le rêve bien sûr ? Réveillez-vous Emma ! Vous ne faites que fuir vos problèmes ! » Emma devint encore plus pâle qu'elle n'était. « C'est bien ce que je dis ! Qui a pris la fuite l'an dernier en donnant du soucis à tout le monde ? » je retins un hoquet et me tournais vers Axel qui haussa les épaules. Il m'avait accompagné parce que j'étais mineure chez les moldus, le reste, ce n'était pas son problème (enfin, il m'avait accompagné parce que j'étais mineure... ça... c'était la version officielle, mais on y reviendra).

« Vous n'êtes pas obligé d'imiter mes bêtises vous savez. » répondis-je froidement mais les larmes aux yeux. « Nicolas est en train de mourir, cela fait déjà plus de trois mois qu'il est dans le coma. Je lui ai promis que je vous ramènerais près de lui, je tiendrais ma promesse... » J'avais le pouvoir de prémonition, rien à voir avec un legilimens autrement dit, mais avec des potions on faisait des merveilles. J'attrapai Emma et l'embrassai, lui redonnant les pensées de Nicolas que j'avais « volé » à l'hôpital. J'avais imité à dessein le pouvoir de mon ami pour l'utilisation de cette potion, il fallait quelque chose d'intime, je ne connaissais rien de mieux qu'un baiser. Axel détourna les yeux, il était prévenu (sauf pour la partie avec Nicolas, ce qu'il ignore ne peut pas lui faire de mal), mais je suppose que cela devait quand même être étrange. Un léger moment de flottement passa entre Emma et moi tandis qu'elle assimilait les sentiments de Nicolas. C'était son tour de pleurer...

« Je rentre avec toi demain. » Je soupirai, mais de soulagement. « Nous viendrons vous chercher à sept heures. » Et je m'en allais, attrapant Axel au passage. Il fallait laisser l'intimité de son chagrin à Emma.

Lorsque je disais que je ne pensais pas qu'Axel m'ait accompagné aux États-Unis uniquement parce que je ne pouvais pas y aller seule, j'avais mes raisons. Avant d'aller voir Emma, nous avions été déposer nos affaires à l'hôtel. J'en payais la moitié mais j'avais laissé Axel réserver. La blague, c'est qu'il n'avait pris qu'une seule chambre. Avec un seul lit. Je lui avais demandé s'il y avait une erreur dans la réservation, il m'avait ri au nez. Même si nous sortions ensemble, par instant j'avais encore ce désir de lui mettre une claque... mais je n'avais pas le temps de protester, il fallait que nous allions voir Emma.

A notre retour, je me laissais tomber dans le canapé. La tentation de lui dire d'y dormir la nuit venue était forte, mais il se vexerait. Ma relation avec Enry s'était terminée avec fracas, très vite, et bien avant que nous ayons l'occasion de dormir ensemble ailleurs que dans la salle commune de Serdaigle. Intimité zéro, sécurité maximale. J'étais, de ce fait, un peu perturbée. Ce n'était pas l'idée qui me dérangeait, je n'avais ni pudeur, ni peur, j'étais seulement du genre à aimer être préparée à tout. Et là, j'avais tellement pensé à Nicolas et Emma que le reste avait été complètement occulté.

« Je vais prendre une douche. » Dis-je au bout d'un moment. L'eau m'aidait toujours à réfléchir. « Je peux venir ? » Le ton taquin m'agaça encore plus que la proposition. « Sûrement pas, non. » Et je claquais la porte en fermant la porte. Il riait cet imbécile.

Si la chambre ne payait pas de mine, la salle de bain eut immédiatement mes faveurs. Elle était entièrement carrelée avec des fresques de diverses teintes de bleu. La baignoire au fond de la pièce était relativement grande, assez pour être confortable du moins, et il y avait quelques produits sur le rebord. Je les inspectais un instant. Puisque Axel voulait jouer, j'allais jouer. Choisissant un parfum à base de pêche, j'en versais dans l'eau qui coulait et me glissais dans la baignoire. Je reprenais la maîtrise des événements, enfin !

Une fois bien propre et parfumée, je sortis de l'eau et m'enroulais dans une serviette éponge blanche. J'attachais mes cheveux en chignons eau encore légèrement humide et je sortis de la pièce comme si de rien n'était. Axel leva les yeux de la partition qu'il était en train d'étudier et resta un moment surpris avant de se reprendre. Le contraire aurait été étonnant, ce n'était pas pour rien qu'on se disputait autant avant. « Joli. » Dit-il avec un petit sourire amusé. « Et encore, vous n'avez rien vu. » rétorquai-je la mine amusée. Il se leva et m'attrapa dans ses bras, m'embrassant furtivement. « C'est une invitation ? » En fait, c'était une bonne question car mon plan n'allait pas si loin. Mais les quelques jours de vacances que Poudlard accordait aux élèves terminés, nous serions séparés pour deux mois de nouveau. Je l'embrassais à mon tour, laissant tout tomber, y compris ma serviette. C'était plus drôle comme ça, non ?

Quelques heures plus tard, je me blottis dans ses bras en soupirant. « Tu es un drôle de phénomène. » me murmura avec tendresse Axel. Je levais le nez vers lui, j'avais la flemme de parler mais cela l'invita à poursuivre. « Tu as un double jeu, d'un côté tu joues les saintes nitouches, de l'autre tu peux être très... enflammée. » Je haussais les épaules. « Il ne faut pas se fier aux apparences. » Je baillais un peu et fermais les yeux, les dernières paroles que j'entendis furent « C'est mignon... » Bah, s'il le disait.