[ Brighton ] Et il n'en resta plus que deux [ PV ]

Emma soupira, un air triste sur le visage. Il était évident que si Nick ne parvenait pas à accepter que ce qui était arrivé à Marina n'était pas de sa faute, il n'irait jamais mieux. Pas vraiment, en tout cas. Il y aurait toujours le risque qu'il replonge, se balançant au-dessus de sa tête telle une épée de Damoclès. Plus que tout, la brune voulait aider son meilleur ami, mais elle était à court d'idées. « Pourquoi est-ce que tu dis ça ? Pourquoi est-ce que ça ne 'devrait pas être' ? » interrogea-t-elle en fronçant les sourcils, perplexe. La première partie, elle la comprenait. Il ne pouvait pas se pardonner. D'accord. Mais le reste...? Elle tournait la phrase dans sa tête, cherchant à y déceler un vrai sens. Elle allait avoir besoin qu'il se montre plus explicite, s'ils voulaient avancer. Elle ne s'attendait pas à ce qu'un miracle naisse de cette conversation, elle savait qu'il faudrait bien plus que quelques remontrances - même si elles venaient du cœur - pour aider Nick.

Lorsque Nicolas lui apprit que Linoah l'avait trompé, Emma tomba des nues. Elle pensait que tout allait bien entre eux ! C'était le cas à l'époque où elle était revenue à Poudlard, non ? Linoah était censée représenter la stabilité. Elle était censée être bien pour Nick. Peut-être était-ce là le souci. C'était une énorme responsabilité à faire reposer sur une seule et même personne, songea-t-elle amèrement. Peut-être que lorsque l'on était un peu brisé à l'intérieur, un peu abîmé, on ne pouvait pas fonctionner avec quelqu'un de bien. C'était trop leur demander que d'être à la fois le petit-ami et la bouée de secours. « Oh, Nick... » murmura-t-elle, émue, avant de se raviser brusquement. « Attends. Tu ne penses pas que ça aussi c'est de ta faute, hein ? » Elle connaissait trop bien sa façon de penser. Elle savait que s'il avait décidé de pardonner à Linoah, c'était sûrement par amour, mais aussi parce qu'il se sentait responsable de ce qu'elle avait fait. Et ça, c'était à nouveau un problème. « Tu n'es pas responsable de tous les malheurs du monde, Nick. C'est ton couple, vos histoires, et quand on est à deux et que ça ne marche pas, chacun a généralement sa part de responsabilité, c'est vrai. Mais tu ne peux pas te blâmer pour tout. » lui dit-elle fermement, fixant le blond de ses yeux clairs. Si elle avait été à sa place, elle aurait mis fin à la relation, elle en était convaincue. Elle avait arrêté de voir Jenson parce qu'elle avait réalisé qu'elle n'arrivait pas à lui faire confiance. Et l'ancien Serpentard n'avait même pas commis une trahison de cette ampleur-là. Son couple avec Charlie tenait le coup jusqu'à maintenant, mais tout cela la poussait à se poser une question fondamentale: jusqu'à quand ?

Se concentrant sur sa tâche, Emma se mit en tête de soigner les blessures de Nick, même si les cicatrices seraient bientôt de retour, même si ça n'était qu'une solution des plus temporaires. Au moins, elle avait l'impression de faire quelque chose pour l'aider. Et puis, ça le protégerait des irritations ou de potentielles infections jusqu'à la prochaine fois. La sonnette retentit alors, et sans lui laisser le temps de faire quoi que ce soit, le blond se leva, s'arrachant à ses soins pour aller ouvrir la porte. Elle soupira, cachant sa baguette magique derrière elle au cas où le livreur jetterait un œil à l'intérieur de l'appartement. « Je payerai l'italien, du coup. » commenta-t-elle distraitement, en misant sur le fait que les additions se vaudraient à peu près. Elle haussa les épaules devant les paroles de Nick. « Je suppose que ça ne peut pas faire de mal. » Elle sortit des baguettes chinoises des sacs et en tendit une paire au blond. Sentir l'odeur des nouilles lui faisait réaliser qu'elle avait drôlement faim. Peut-être qu'avec un dîner dans le ventre, elle serait plus à même de raisonner Nick ? L'espoir fait vivre, dit-on.

Nicolas haussa les épaules, un peu las. « Pour rien… c'était juste une manière de parler. » Pour rien ou pour tout, il ne savait pas. Finalement, peut-être que ça ne devrait pas être parce que lui ne devrait plus exister… mais il chassait cette idée de toute ses forces, son conscient travaillait à effacer tout ce qui était gênant lorsqu'il avait les idées claires. Quand ce n'était pas le cas… l'inconscient reprenait le dessus et alors revenait ce genre d'idée. Mais il était loin de pleinement assumer et de le dire à voix haute. Il ne savait même pas pourquoi il avait utilisé cette formule alambiquée alors qu'elle allait forcément mettre la puce à l'oreille de son amie…

Heureusement (façon de parler), le sujet dériva sur les causes de ces nouvelles marques et une des causes (pas la seule) était le fait que Linoah l'avait trompé et qu'il sentait la fin venir. Car, en fait, qu'elle le trompe ne l'avait pas vraiment gêné. Ou ne l'aurait pas gêné si ça n'avait pas eu de conséquences sur le long terme. Nicolas avait trop peu d'ego pour se comparer aux autres hommes. Il avait toujours eu l'air sûr de lui mais ce n'était que de la poudre aux yeux !

La faute à qui ? Voyons, quelle question ! « De qui d'autre sinon ? » Question rhétorique, Nicolas connaissait déjà les réponses d'Emma et il n'était pas forcément prêt à en discuter. En fait, il n'était prêt pour rien. Ni pour sa rupture à venir, ni pour l'annoncer, ni pour avouer qu'il avait recommencé à se scarifier. Il était loin d'être bête et il l'avait vu venir de loin, néanmoins, ça le mettait mal à l'aise et il espérait que le ton employé n'inciterait pas Emma à poursuivre sur cette voie.

D'ailleurs, Emma répondit presque aussitôt sur le mode « c'est la faute de personne parce que c'est la faute de tout le monde » qu'il avait déjà entendu une petite centaine de fois dans tous les contextes et qu'il n'avait jamais trouvé convaincant. Si ça n'arrivait toujours qu'à lui, il devait bien y avoir une raison, n'est-ce pas ? Marina était morte pour le protéger avant même qu'il ne soit en âge d'aller à Poudlard ! C'était peut-être ça le fond du problème : ce qu'il avait à résoudre était ancien et très profondément ancré en lui. Il préféra ne rien répondre à son amie, hausser les épaules et la laisser le soigner. Il la connaissait assez pour savoir que lui donner quelque chose de concret à faire et à gérer lui permettrait temporairement d'avoir l'illusion de maîtriser la situation. Et cela le soulagea, physiquement du moins, car ce n'est que quand la sonnette retentit qu'il se sentit vraiment mieux : ils allaient pouvoir passer à autre chose.

Il amena les plats asiatiques et pour le paiement lança avec un sourire : « Si tu veux ! » Et il se mit dans le canapé et commença à se servir à manger. « On se met un film ? » Ils n'allaient quand même pas continuer à se pourrir l'ambiance, hein ? De fait, en y mettant un peu du leur, ils arrivèrent à ne pas reparler des problèmes de Nick de toute la soirée… mais le jeune homme sentait que le malaise persistait et que ça reviendrait un jour sur le tapis.

Il ne savait juste pas que ce serait déjà trop tard et qu'il aurait déjà touché le fond quand ce moment arriverait.

{Terminé pour Nick}