Une première colle pour une peste de haut niveau !

Une retenue. Ah mon dieu ! Cela faisait une semaine maintenant que Rawane, la préfète-je-n’ai-pas-de-style-et-je-n’accpete-pas-les-commentaires-constructifs, lui avait donné une retenue. Ah, vous auriez dû voir la réaction de Mandy. Elle avait éclaté de rire et elle avait dit « Tu es préfète ! Toi ? Oula... Ils choisissent mal leurs représentants de maison... Enfin, je veux dire, tu n’as pas le style... » Elle avait marmonné de « Oula » jusqu’à la fin, pour pas que la chère miss devant elle la reprenne. Puis, elle était partie, se disant qu’une retenue, c’était une affaire de rien. Cependant, à bien y repenser, une colère commençait à grandir dans l’esprit de la jeune fille. Premièrement, elle n’avait pas voulu être méchante, c’était dans sa nature ! Elle aurait bien voulu que Rawane réagisse autrement, mais comme vous l’avez vu, enfin, entendu, enfin vous savez ce que je veux dire, la bleue et bronze c’était emportée et n’avait pas accepté ce commentaire que Mandy avait jugé constructif. Deuxièmement, une retenue ! C’est quoi la blague ? C’est comme ça qu’on se défend ? Oula, ils font pitiés... Troisièmement, elle avait un peu peur de la réaction de Rusard, et de la conséquence qu’elle allait avoir. Tout sauf la forêt interdite... Elle risquerait de se salir, et comme elle n’avait pas de linge sale, elle devrait le laver. Ah ! En plus, elle venait de se faire une manicure ! Elle avait déjà croisé ce concierge dans les couloirs, et croyez-moi, elle en avait fait des cauchemars. Il se parlait à lui-même, il était habillé comme un itinérant et il sentait vraiment mauvais. Pire que tout ça, c’était un cracmol fou.

Bref, les jours avaient passés, et Mandy avait écrit à sa mère pour lui faire envoyé des vêtements un peu moins propres, sous prétexte qu’elle avait à préparer une potion tachante. Elle n’aurait jamais eu le courage ni le culot d’aller avouer à sa mère qu’elle avait eu une retenue. Jamais sa mère lui aurait pardonné, elle la brillante élève studieuse. Mais ce n’était pas grave, Mandy lui pardonnait, et elle adorait Amanda, sa mère qu’elle prenait parfois comme une soeur. Sa mère lui avait renvoyé un paquet par la poste dans lequel il y avait un t-shirt noir et une paire de pantalon Capri noir aussi. Bref, elle avait l’air d’une voleuse en mission lorsqu’elle enfila son costume le soir de sa retenue. Elle espérait que Rusard ne se parle pas tout seul et qu’il ne lui hurle pas dessus. Par-dessus tout, elle espérait fortement, non indéniablement qu’il porte du linge propre qui sente bon.

Lorsque Mandy descendit dans la Grande Salle pour aller manger un casse-croûte, beaucoup d’élèves la regardèrent avec intérêt, se demandant pourquoi elle portait juste du noir, elle qui porte des vêtements de marque habituellement. Mandy sourit, étant joyeuse d’être enfin le centre de l’attention. Lorsqu’elle fut sure que tous les élèves présents dans la salle la regardait, elle sourit.

~ Ah, c’est ennuyant les retenues...

Sa remarque avait perturbés les élèves. Ils comprenaient maintenant que Mandy Brocklehurst avait une retenue, pour la première fois en trois ans. Elle marchant d’un pas hautain à la table des bleus et bronzes et évita pour le repas du soir le regard de la préfète-je-n’ai-pas-de-style-et-je-n’accpete-pas-les-commentaires-constructifs. Lorsqu’elle eut fini de manger son rôti de porc mariné aux canneberges, Mandy s’essuya poliment la bouche et regarda la table.

~ Bonsoir tout le monde, je dois aller rencontrer le monstre du Loch Ness... Voyant que les élèves riaient mais ne savait pas de qui elle parlait, Mandy repris. ... Rusard.

Là, les élèves éclatèrent de rire. Mandy elle-même, fière de son coup, ria aux éclats en quittant la Grande Salle pour la lisière de la Forêt Interdite. Elle y arriva et lu sur l’écriteau :
Retenue reportée dans le bureau de Mr. Rusard. Mandy relu plusieurs fois la pancarte et hurla de rage. -| Il va savoir ce que je pense de lui, je te le garanti... Espèce de grenouille baveuse dégoulinante ! |- Retournant dans le château, Mandy pris un léger détour pour se changer. Elle trouva enfin une tenue à sa hauteur et se redirigea vers le bureau du Monstre du Loch Ness... Cette retenue allait être totalement dépourvue d’amusement. Mandy arriva à l’étage demandé, celui du deuxième. Sur la porte de la salle, il était inscrit : Bureau d’Argus Rusard, Concierge. Mandy éclata de rire et cogna à la porte. -| Il aurait dû écrire « Bureau d’Argus Rusard, monstre du Loch Ness traumatisant les élèves. » Ah oui, avec la mention « Fou » en or massif. Ça aurait été bien... ! |-

Rusard était justement occupé à tenter de comprendre ce quel délire philosophique avait bien pu s'emparer de l'âme bergsonienne lorsqu'il avait écrit Les Deux sources de la morale et de la religion quand un coup pour le moins violent frappé à la porte vint le tirer de sa lecture.
Dans son panier à fond de velours rose (lacéré), Miss Teigne redressa les oreilles et adressa un coup d'oeil mi-interrogateur et mi-sadique au concierge : son instinct félin lui disait qu'un élève en mal de discipline n'allait pas tarder à avoir de graves problèmes. Elle s'en réjouissait d'avance et par principe : avec un peu de chance, Rusard la laisserait déchiqueter le bas de la robe du garnement (bien involontairement, cela va de soi).

Le concierge abandonna son livre sur son bureau, ayant inséré entre les pages 285 et 286 un marque-page qui n'était autre que la photo de Mme Pince en maillot de bain type 1920. Rusard nourrissait une passion secrète pour la bibliothécaire depuis des décennies et il ne s'endormait jamais sans avoir auparavant longuement contemplé la photo avec une nostalgie qui ne lui ressemblait guère (et qui rendait Miss Teigne très jalouse).
D'ailleurs, Rusard n'aurait certainement jamais entamé une lecture aussi fastidieuse que celle de Bergson s'il n'avait pas eu dans l'idée d'impressionner Pince par ses connaissances philosophiques : malheureusement, elle n'avait pas paru boulversé en l'entendant parler de religion statique... Un brin étonnée, peut-être mais certainement pas impressionnée.

Remettant à plus tard sa "culturation" bergsonienne, Rusard se dirigea vers la porte qu'il ouvrit d'un coup, la mine mauvaise. Il toisa d'un oeil assassin la fillette qui se trouvait devant lui avant d'aboyer avec une amabilité à toute épreuve :

- Vous n'êtes pas obligée de défoncer la porte, je ne suis pas sourd ! Estimez-vous heureuse que je ne rajoute pas cette tentative éhontée de dégradation du matériel de l'école à la longue liste de vos forfaits, jeune effrontée !

Ceci étant dit, il s'effaça pour laisser passer Mandy et lui ordonna d'entrer d'un signe tout à la fois sec et autoritaire de la tête (un coup à se coincer les cervicales !).
Il revint alors à son bureau et prit un bout de parchemin posé sur une pile de lettres. Il lui avait été envoyé quelques heures plus tôt par la préfète de Serdaigle et lui annonçait l'arrivée de Mandy, collée. Rusard, en relisant le mot, eut un hochement imperceptible de la tête : brave petite, cette préfète, avec un peu de chance, on pourrait faire quelque chose d'elle avant que sa raison ne soit pervertie par la société de ses camarades !

- Alors, grinça-t-il d'un ton rogue en relevant les yeux vers Mandy, on voulait faire la maligne ? Petite écervelée, va ! Vous les jeunes, vous n'avez plus aucune notion des limites...

Il ouvrit le premier tiroir de son bureau et en sortit une brosse-à-dents qui avait perdu la moitié de ses poils. La mine ravie, il la montra avec un sourire goguenard à Mandy :

- Voilà l'objet de votre punition.

Mandy n’eut même pas à attendre que le monstre du Loch Ness apparaisse : Il ouvrit la porte avec rage. Mandy recula d’un pas, effrayée et dégoûtée.

- Vous n'êtes pas obligée de défoncer la porte, je ne suis pas sourd ! Estimez-vous heureuse que je ne rajoute pas cette tentative éhontée de dégradation du matériel de l'école à la longue liste de vos forfaits, jeune effrontée !

-| Qu’il répète juste pour voir, sal crapaud visqueux... |- Mandy était traumatisée. Rusard portait... La même chose que d’habitude. Il était toujours aussi grincheux, il puait autant et c’était pratiquement sûr qu’il continuait de se parler tout seul. La Serdaigle entra rapidement, essayant de s’amincir pour ne pas toucher l’accoutrement – si on pouvait qualifier ses vêtements ainsi - de Rusard. Lorsqu’elle fut dans la pièce, elle s’accota sur le bureau du fou et attendit sa réplique.

- Alors, on voulait faire la maligne ? Petite écervelée, va ! Vous les jeunes, vous n'avez plus aucune notion des limites...

~ Non, en fait, je voulais aider Rawane, mais elle l’a mal pris. Bref, moi, au contraire de ce que vous pensez, j’ai des limites, et elles sont bien inscrites dans ma tête. Vieux crapaud... Marmonna t-elle pour elle-même.

Elle voulait bien entendu parler de Rusard, le monstre. Il était plus répugnant que la fois où elle l’avait vu déambuler dans les couloirs. Il était plus proche, et il sentait encore plus mauvais. Mandy sorti subtilement son rouge à lèvre et en mis un peu sur ses lèvres. C’est alors qu’elle s’aperçu que sur le bureau du concierge, il y avait un livre. Un signet en dépassait… Mandy s’approcha pour voir ce qu’il y avait d’écrit. Elle n'y distingua qu'une vieille photo, sans savoir à qui elle appartenait.

~ Je me demande qui c'est...

Mandy en avait bien sûr aucune idée. Elle retourna son regard sur Rusard.

~ Si vous voulez mon avis, ce qui est sûrement le cas, restez-vous même. Je ne sais pas qui est cette femme mais elle vous plaît, c'est certain. Alors je vous dis...

Mandy allait lui dire de se laver et de se coiffer, mais la perspective de se faire donner une double retenue ne l'intéressait pas. Elle se contenta d'ajouter :

~ D'aller la voir !

-| Ouf, c’était moins une !|- Puis, Rusard émit un grognement de satisfaction et lui tendis une… BROSSE À DENT ? Mandy le dévisagea et la pris d’une main dédaigneuse. Elle le regarda.

~ Je peux savoir ce que je vais faire avec ça ?