Le couple que formait Bérénice et Faris ne rencontrait pas de soucis particuliers. Ils se voyaient régulièrement (plus qu'à une époque du moins), et ne se disputaient pour ainsi dire jamais. La jeune fille supportant très mal toute forme de nervosité, ce climat apaisant lui convenait parfaitement. Ne pas trop se faire de soucis pour sa vie de couple lui avait permis d'avoir son diplôme d'apprentissage sans difficulté. Depuis peu, elle travaillait dans un salon de coiffure et d'esthétique pour sorcier en plein cœur de Londres. Elle avait des horaires réguliers là-bas et pour ce qui était du bar où elle se produisait toujours avec ses amis moldus, elle n'y allait que lorsqu'elle n'avait rien de prévu avec Faris. Malgré les apparences, elle avait bien retenu les leçons de ses précédents échecs amoureux. De fait, elle ne déduisait pas que parce que Faris était un pro-abstinence, il ne la trouvait pas jolie (cela étant, Faris avait le mérite d'être logique sur ce point alors que Tyler ne l'avait jamais été puisqu'il avait eu des filles avant elle, puis, finalement, il l'avait eu elle, ou elle l'avait eu, bref, passons). Elle ne réglait pas non plus sa vie sur celle de son petit-ami comme lorsqu'elle était avec Erwan, bien qu'elle fasse des efforts pour le voir dans l'agencement de son emploi du temps, mais elle le faisait parce qu'elle avait envie d'être avec lui, pas parce qu'il le lui demandait. Quelque part, on pouvait donc dire qu'elle avait mûri, et elle ne regrettait pas son choix initial.
Niveau regret en revanche, elle ne voyait plus Tyler du tout, et ça la rendait triste. Au début, elle avait voulu lui laisser le temps de digérer, et puis, après... les mois étaient devenus une année, puis deux, et elle n'avait pas le courage d'aller toquer à sa porte. Elle se disait qu'elle allait devoir y remédier un jour ou l'autre parce qu'elle n'avait pas assez d'amis pour se priver d'un seul, cependant, elle n'était pas encore prête (elle sentait Tyler encore assez rancunier pour lui faire une ou deux réflexions même après autant de temps).
Ce soir-là, Faris devait venir dans son studio 1) pour le découvrir vu qu'elle venait de s'y installer, 2) pour regarder un film. Il arriva alors qu'elle sortait tout juste du travail, elle se dépêcha d'enlever sa boucle d'oreille (elle était en pleine préparation, n'oublions pas combien elle est coquette) et de courir à la porte
« J'arriiiiive ! » Elle ouvrit, tout sourire. Comme d'habitude cependant, elle regardait derrière l'épaule de son petit ami plutôt que vers les yeux de celui-ci. Le léger autisme de BB était un pli à prendre, et elle était parfaitement capable avec un peu d'effort de le regarder dans les yeux, seulement le mot effort résumait tout : elle ne pouvait pas le faire en permanence. Elle déposa néanmoins un baiser furtif et chaleureux sur ses lèvres et se poussa pour le laisser entrer dans son humble demeure. Elle était réellement humble car elle ne gagnait pas énormément d'argent, cependant, elle lui plaisait bien. Sa guitare traînait dans un coin, quelques chouchous et barrettes s'étaient perdus sur la table du salon, une boite de chocolat et un soda light sur celle de la cuisine.
« Tadaaaaam ! J'ai fini de TOUT installer la semaine dernière. C'est pas mal hein ? Bon, ça manque peut-être encore un peu de décoration mais je suis assez contente des meubles que j'ai achetés. » Elle prit la main de Faris pour l'entraîner un peu plus au milieu de la pièce à vivre. Elle réalisa ensuite qu'elle n'avait pas fini de se préparer !!!!
« Je reviens, tu n'as qu'à t'installer ! » Elle se dirigea vers la seule autre pièce : la salle de bain. Elle enleva son autre boucle d'oreille, se passa un coup de peigne et se remit un peu de parfum. Comme elle revenait du travail, elle était en jean et en petit pull moulant. De la part de Bérénice c'était à la fois sage et très « normal » comme tenue, cependant, elle ne pouvait pas vraiment mettre de mini-jupes au travail, et de décolletés non plus. Certes, elle ne servait que des femmes, mais il y avait une sorte de code vestimentaire. Enfin, peu importait, de toute façon elle n'était même pas sûre que Faris soit très fan de ses vêtements de prédilection. Ma foi, la Bérénice sexy et provocante n'était pas vraiment l'image qu'il préférait d'elle pour ce qu'elle en savait (mais il la connaissait au-delà de celle qu'elle était sur scène). En outre, cela ne provoquait que des propositions de la part des autres hommes. Ce dernier point n'était pas forcément une évidence pour Faris car BB se gardait bien de lui en parler. Il n'était pas pot de colle ou moralisateur comme l'était Tyler, mais on ne fait jamais à autrui ce qu'on ne veut pas subir soi-même : si des filles s'approchaient trop près de Faris, elle lui faisait assez confiance pour ne pas vouloir en entendre parler. Elle n'était pas vraiment jalouse de caractère, elle manquait juste de confiance en elle.
« Voilà ! J'ai prévu de la pizza quatre saisons pour ce soir. » Pizza aux légumes donc car Bérénice ne mangeait quasiment plus de viande. Elle mit le four à chauffer, invita Faris à s'asseoir sur le canapé et prit une pile de dvd avant de le rejoindre pour se lover contre lui. Ce qu'elle aimait dans l'idée même d'avoir un vrai chez elle, c'était qu'ils allaient pouvoir se voir ailleurs que dans des lieux publics ou chez Faris (qui était aussi chez Faith).
« J'ai ça comme films, tu veux voir lequel ? » Elle lui mit la pile sur les genoux et nicha sa tête dans son cou. Elle se fichait pas mal du film (comme c'étaient ses dvd, elle les avait déjà tous vus), mais elle était bien contente de retrouver son petit ami pour la soirée. Elle hésitait même à lui proposer de rester dormir (en insistant sur le second verbe) pour qu'ils soient ensemble plus longtemps, mais elle craignait un refus de sa part et ça l'embêtait. Pourtant, elle savait se tenir
au bout de deux ans ça aurait pu poser problème sinon, mais elle ignorait les interprétations qu'il pourrait en faire et ne savait pas comment formuler cette demande. C'était dans ces moments là qu'elle regrettait ses histoires avec Erwan et Tyler. Innocemment, elle s'imaginait que si elle n'avait pas été avec eux (et aussi loin), elle n'aurait pas à craindre qu'on lui prête de mauvaises intentions. Bien qu'elle n'y voit rien de mauvais en vérité, mais elle respectait le choix de Faris, d'autant plus peut-être qu'elle savait ce qu'il en pensait depuis bien avant qu'ils soient ensemble. Elle ne disait pas que ça ne la dérangeait jamais parce que ce serait mentir, mais si il pouvait faire avec son autisme, elle pouvait bien faire avec l'abstinence. N'empêche, elle aurait bien aimé qu'il reste dormir quand même et elle ne trouvait pas les mots pour le lui demander. La communication : le véritable nerf de sa guerre contre elle-même... mais elle avait encore du temps, la soirée ne faisait que commencer.