[ Une soirée pour tout recommencer ] - PV

Le temps passait et les choses changeaient. Le changement était inévitable, y compris pour les choses qu’on pensait être immuables. Keira avait beau avoir grandi bien plus rapidement que bon nombre de ses petits camarades, elle avait encore bien des choses à apprendre. Et ça, elle le comprenait un peu plus chaque jour passant. Il lui suffisait de fermer les yeux, et de visualiser son passé pour voir tout ce qui avait été bousculé, là où elle avait pourtant été persuadée que ça serait pour toujours… L’amour pour sa mère qui était devenu colère et indifférence… Son amour pour Liam, son tout premier petit ami qui avait fini par s’éteindre, alors qu’elle ne pensait pas que c’était possible. Ses cheveux roux qu’elle avait teints à plusieurs reprises en blonds, alors qu’elle ne pensait pas changer de couleur un jour… Et finalement, Kaïn. Après avoir emménagé avec lui, leur histoire avait malgré tout pris fin. Rien n’était éternel. Et ça, elle ne devait jamais l’oublier.

La jeune femme était devant son miroir. Le dernier CD de Carnal Spark était sorti aujourd’hui même et elle comptait fêter l’évènement. Elle était donc de sortie ce soir là. Elle avait peiné à trouver des personnes partantes ~~que des vieux dans son entourage, rien ne va plus, il faut qu’elle rajeunisse un peu ses connaissances !~~. Heureusement, des amis mannequins étaient de sortie ce soir là, et bien que la rouquine ait commencé à décroché du milieu, elle avait toujours des contacts et quelques contrats. Elle avait donc appelé Mayuko qui lui avait di qu’elle sortait avec Katia, Justin et Andrea. Parfait, la sorcière avait donc décidé de se joindre au petit groupe. Elle connaissait Mayuko depuis qu’elle était gamine, tandis qu’elle avait travaillé avec Katia et Andrea sur plusieurs défilés. Justin était, quant à lui, un nouveau venu dans le monde (cruel) du showbiz et elle ne le connaissait pas encore, mais ce n’était pas ce qui allait la ralentir pour autant !

Keira s’était donc habillée pour l’occasion : les beaux jours revenant sur la capitale Anglaise, la sorcière rouvrait sa garde robe estivale. Il ne faisait pas très chaud non plus, aussi prévoya-t-elle une veste pour affronter la fraîcheur nocturne. Elle enfila une robe bleue électrique courte mais qui, étrangement, ne faisait pas vulgaire sur elle. Elle laissa ses longs cheveux roux libres, et se maquilla soigneusement. En quelques minutes, elle était prête : ses yeux étaient peints de violet, ses lèvres étaient d’un rouge sanguin et ses yeux bleus étincelaient de plaisir. L’idée de sortir affolait son cœur. Elle n’était plus vraiment sortie depuis très longtemps… Et ça lui avait manquait. Elle offrit un sourire radieux à son reflet et quitta sa salle de bain. Elyna devait dormir, aussi ne fit-elle pas de bruit en quittant l’appartement. Rapidement, elle monta à bord d’un taxi.

Quand elle arriva sur place, elle retrouva sans la moindre difficulté le groupe de mannequins qu’elle rejoignit en de longues enjambées. Bien que juchée sur dix centimètres de talons, elle marchait avec une facilité particulièrement étonnante. Elle les embrassa chacun leur tour, rayonnante, et finalement les cinq compagnons entrèrent dans la boîte. Keira laissa sac et manteau au vestiaire et, prenant la main de Katia fila rejoindre la piste de danse, qu’importe si elles étaient les seules à danser. Elles n’avaient pas peur du ridicule. Jamais. Une bonne heure s’écoula ainsi, quand finalement, tous se retrouvèrent éparpillaient. C’était ‘l’inconvénient’ des soirées londonienne, on trouvait forcément quelqu’un qui connaissait quelqu’un qui voulait nous présenter à quelqu’un… Keira s’en moquait cependant, elle n’était pas forcément très timide dans son genre, du coup elle allait sans hésitation voir les autres, y compris les sombres inconnus ~~même ceux qui distribuent des bonbons et proposent de venir dans leur voiture~~. Et là, d’ailleurs, elle avait remarqué une fille, qu’elle trouvait vraiment mignonne, et qui semblait ‘abordable’ (comprendre par là : pas totalement ivre, ni shootée, ni trop occupée à glisser sa langue dans la bouche d’une tierce personne), aussi la rouquine se décida-t-elle assez rapidement, et rejoignit-elle la jolie brunette :

« Salut, ça va ? Je peux me joindre à toi ? »

C'était soir de repos pour la jeune Cherise. Il est vrai que quand on travaille dans un pub, on est plutôt en décalé par rapport à la majorité des gens. Tandis que tout le monde rentre de sa journée de boulot en s'affalant sur le canapé, notre jeune fille, elle, se rendait au Chaudron Baveur pour commencer sa "journée" de travail. Cela lui allait bien, cela dit, car la jeune fille avait toujours été du soir. Elle faisait partie de ces personnes qui détestaient se lever de bonne heure le matin, et qui trainaient volontiers le soir, quitte à oublier que la nuit est déjà bien avancée. Alors finalement, avoir un job où on est pas contraint de se lever le matin, que rêver de mieux ?
Malgré tout, la jeune fille ressentait qu'elle n'allait pas faire ça toute sa vie. Peut-être qu'au bout d'un moment elle en aurait marre d'avoir ce rythme décalé par rapport à la majorité des gens, et surtout de ces amis. Cela l'embêtait, car elle aurait bien voulu que ce soit l'inverse : que tout le monde se mette à son rythme et fasse la bamboula toute la nuit ! (et la grasse matinée le matin, ça va de paire bien sûr) Mais bon, le monde n'était pas fait ainsi, et apparemment la tendance était plutôt dans l'autre sens, du style "l'avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt". Et ben heureusement que ça n'est qu'un dicton, sinon l'avenir n'est pas prêt d'appartenir à Cherise !
Enfin toujours est-il que c'était jour de repos, et que ça n'était pas pour autant que Cherise allait déroger à la règle en se couchant de bonne heure avec une bonne tisane. Et ça tombait plutôt bien, parce que l'un de ses voisins avait organisé un apéro chez lui pour réunir tous les voisins de l'immeuble. Là aussi, la brunette était bien tombée car ses voisins étaient tous plutôt jeunes, et avec une tendance noctambule assez prononcée chez certains. Il arrivait même que Cherise rentre du boulot - donc assez tard - et qu'elle constate que son voisin de palier n'était toujours pas couché. Celui-ci l'entendait monter les escaliers et ouvrait alors sa porte pour lui proposer un verre, ce que notre jeune serveuse acceptait avec plaisir : pour une fois que ce n'était pas elle qui servait des verres, et qu'elle pouvait les boire ! Il y avait peut-être anguille sous roche, d'ailleurs, mais jusque-là, ledit voisin - qui était aussi celui qui organisait l'apéro ce soir-là - n'avait rien tenté de trop explicite.
Quand celui-ci avait invité Cherise à l'apéro et qu'il avait précisé que la soirée se terminerait certainement en boîte, l'italienne avait fait la moue. Mouais, elle n'était pas trop fan des boîtes de nuit. Enfin, surtout celles où il y a juste de la musique électro avec une grosse basse qui fait boum boum boum sans jamais varier le rythme. Le genre d'endroit où il y a aussi des gros lourds qui viennent se coller à toi pour danser, ou des pimbêches qui ont enfilé une robe qu'on aurait plutôt qualifier de tee-shirt à première vue, tellement c'était au ras des fesses. Mais devant les réticences de la jeune fille, le voisin s'était empressé de la rassurer en lui promettant que "si, si, celle-là elle est bien, ils passent de la musique éclectique". La jeune fille n'était pas forcément beaucoup plus convaincue parce que derrière le mot "éclectique" on met un peu ce qu'on veut, mais bon, elle accepta quand même avec plaisir, se disant que de toute façon, elle allait certainement être suffisamment imbibée d'alcool pour arriver à apprécier l'endroit, d'une façon ou d'une autre.
Le problème, quand on n'est pas une habituée des boîtes de nuit comme Cherise (celle-ci préférait plutôt les concerts, les festivals ou simplement des bars dansant avec une bonne musique latino, folk, accordéonesque ou toute autre joyeuseries ~~oui j'aime bien inventer des mots~~), c'est que fatalement, on n'a pas tellement de tenue adaptée à la circonstance....
Il faut dire que le style vestimentaire de Cherise, d'ordinaire, c'était plutôt ça, voire ça. Alors vous vous doutez que c'est pas avec ça qu'on vous laisse entrer en boîte. Les robes-ras-la-moule, autant vous dire que c'était pas son kiff. Voire même les robes tout court... Cherise avait fait des efforts depuis son adolescence. Si au tout début, elle avait eu une grosse tendance garçon manqué, elle avait petit à petit intégré des éléments plus féminins à son mode vestimentaire. Notamment en été, il fallait reconnaître que quand il fait 40° à l'ombre - ce qui est souvent le cas dans le village de ses grands-parents en Italie - porter une robe ne relève pas de la coquetterie mais plutôt de la survie. Sauf que là, c'était pas encore trop l'été, et Cherise se voyait pas trop sortir la robe estivale. Bref, nous n'allons pas épiloguer plus longtemps que cela sur cette question, mais c'était pour montrer à quel point le fait d'aller en boîte apportait tout son lot de questions pour notre jeune fille ! Et elle avait finalement réussi à résoudre son dilemme de "comment avoir une tenue assez classe pour rentrer en boîte sans sortir la robe d'été ?", et ça se traduisit de cette façon.

L'apéro se déroulait donc à merveille chez son voisin de palier, qui avait eu un léger regard d'étonnement en voyant débouler Cherise dans une tenue un peu classe. Cela produisit peut-être un déclic chez lui d'ailleurs car dès lors il se montra un peu plus explicite lors de la soirée. Dans tous les cas, Cherise était tellement contente de pouvoir nouer des liens avec ses voisins, et de profiter de sa soirée sans avoir à travailler, qu'elle ne fit pas trop attention aux tentatives d'approche de l'hôte de la soirée, et qu'elle passa finalement beaucoup plus de temps à discuter dans tous les sens qu'à s'enquiller des verres, comme elle l'avait prévu initialement. Ce qui fait que quand tout ce petit monde se dirigea vers la boîte, la jeune fille se rendit compte qu'elle n'était finalement pas si ivre que cela, et que la boîte avait vraiment intérêt à passer de la musique "éclectique" sinon ça n'allait pas le faire !
A peine fut-elle rentrée dans la boîte que tous ses voisins se jetèrent sur la piste de danse. Bon, ok, pour l'instant, la musique était pas trop mal. La jeune fille se joint au groupe et commença à danser en fermant les yeux pour pas voir les pimbêches aux robes trop courtes *paf*. Aaaaah, qu'est-ce que ça faisait du bien de se laisser porter par la musique ! Cela faisait bien longtemps qu'elle n'avait pas pu profiter d'une soirée comme ça ! Cela méritait bien d'arroser ça, tiens.
Elle se dirigea vers le bar pour commander un verre - vu qu'elle dépensait quasiment rien en shopping, elle pouvait bien s'offrir ça ! C'est à ce moment-là qu'une grande fille rousse l'aborda.

"Salut ! Oui, bien sûr, pas de problème." répondit-elle spontanément. Mais à peine eut-elle fini de dire ça qu'en regardant la jeune fille de plus près, son air lui semblait familier... Mmmh, elle connaissait cette fille-là, mais d'où ?

Et là, il y eut un tilt. Elle revit subitement l'affiche qu'elle avait vue en se baladant sur le Chemin de Traverse le jour-même. Une affiche qui titrait "Nouvel album de Carnal Spark". Carnal Spark, mais oui, c'était ça ! Cherise se rappelait avoir bloqué sur l'affiche le jour-même, car cette affiche lui remémorait toute cette période de ses jeunes années à Poudlard où elle était fan du groupe, allant à tous leurs concerts ou presque. Elle s'était même retrouvée dans une sorte de fête semi-privée organisée par le groupe, durant laquelle du haut de ses 12 ans, elle avait demandé toute excitée un autographe à... Keira, la jeune fille qui se trouvait à présent devant elle. Waoh, il s'en était passé des choses entre temps ! Cherise avait un peu perdu de vue le groupe dès qu'elle était partie à Taliesin, et encore plus les années d'après où elle avait pas mal vagabondé, et c'était vraiment pas dit que Keira se rappelle de sa bouille de gamine - ou du moins fasse le lien avec la tête qu'elle avait maintenant, à 21 ans.

"Oh mais attend ! On se connaît non ? Enfin, moi je te connais du moins ! Tu n'es pas Keira, du groupe Carnal Spark ?" s'exclama-t-elle, retrouvant subitement toute l'excitation qu'elle avait pu ressentir quand elle était plus jeune.

Il faut dire que comme Keira était un peu plus âgée que Cherise, on la reconnaissait tout de même assez facilement, la différence d'âge était moins flagrante que pour Cherise qui avait été fan du groupe principalement à 12-13 ans, tandis que Keira en avait plutôt 16 à ce moment-là.
En tout cas, elle était assez impressionnée par le charisme qui se dégageait de la rouquine. On voyait bien que celle-ci n'avait plus 16 ans et qu'elle s'était bien affirmée, ce qui dégageait quelque chose d'assez impressionnant, et de très attrayant.

Cela pouvait peut-être semblait bizarre, mais Keira n’avait jamais été très observatrice. Pour une fille qui vivait (beaucoup) pour la mode et qui était célèbre, rien que parce qu’elle était née, cela semblait assez paradoxal. Elle aurait dû se méfier, être attentive à des détails, ce genre de chose. Mais pas du tout. Ceci expliquait (un petit peu) aussi comment elle avait bien pu en arriver à se trouver des petits copains particulièrement louches comme Shiro (le frère de Mayuko ici présente, soit dit en passant) ou Louis. Aussi, n’avait-elle pas du tout fait le rapprochement entre la jolie brune qu’elle venait d’aborder et l’école (ou une séance d’autographe). Néanmoins, elle fut rapidement reprise et elle observa la jeune fille d’un nouvel œil, tâchant de se remémorer une possible conversation avec elle… Keira étant ~~trop~~ bavarde n’était, certes, pas aidée pour se rappeler une discussion remontant à plusieurs années… Alors que sa nouvelle copine du soir trouvait son prénom, la rouquine, elle demeurait incapable de connaître celui de la brunette :

« Eu, ben oui c’est bien moi… »

Un large sourire illumina le regard (et plus généralement le visage) de la sorcière qui s’enquit, de sa voix suraigüe qu’elle avait dès lors qu’elle parlait trop vite et avec plus d’excitation que ne devait l’admettre un organisme normalement composé :

« Oooooh, tu aimes ma musique ? »

Bon, ok peut-être qu’en fait elle était une anti CS et qu’elle la connaissait pour ça (trop triste) mais elle ne semblait pas pleine de haine, donc Keira avait bon espoir ~~de signer quelques autographes~~ de s’être trouvée, en elle, une alliée pour la soirée. Souriante, la rouquine s’enquit :

« Tu t’appelles comment ? »

Elle se commanda à boire, puisque Cherise n’était pas à sec, elle allait suivre le mouvement que diable !!!!! Et on boit tout ça en deux temps trois mouvement si on est des femmes, des vraies ! Aller, youhou ! La rouquine n’avait pas choisi Cherise par hasard, quand elle s’était approchée d’elle. Déjà, elle avait repéré les personnes qui, physiquement, l’inspiraient. Keira n’était pas forcément très difficile une fois saoule, mais là elle ne l’était pas, aussi ses critères de sélections étaient-ils sans conteste plus élevés en cet instant qu’ils ne le seraient à la fin de la soirée. Après, elle cherchait, dans la sélection qu’elle classait comme ‘séduisant et inspirant confiance’ ceux qui n’avaient pas l’air trop HS (déjà à cette heure si peu avancée c’était la honte d’être déjà ivre mort, et puis bon, ce n’est pas très rigolo de se faire vomir dessus…). Et enfin, il y avait l’entourage : vérifier que la personne n’était pas avec des gens louches. Et comme en plus, la rouquine avait une nette préférence pour les femmes à l’heure actuelle, et bien Cherise avait rempli tous les critères et c’était ainsi que la jeune femme s’était retrouvée avec la sorcière brune.

Et alors qu’elle entendait une chanson qu’elle adorait, plutôt rock, d’ailleurs, la rouquine s’exclama, l’air survoltée tout à coup :

« OH MON DIEU !!! J’adore cette chanson ! Tu viens danser ??? »

Il suffisait d’un oui et elles terminaient leur verre cul sec (on ne danse pas avec un verre : trop encombrant, et on ne laisse jamais, jamais, JAMAIS son verre sans surveillance : règle numéro un de la midinette en soirée. Et oui, même Keira la folle irresponsable suit cette règle de base, c’est dire si elle est nécessaire à al survie du sexe féminin ! Seule possibilité restante, donc : finir le verre avant de courir sur la piste pour se déhancher (pas forcément bien mais en soit qu’importe, tant qu’on s’amuse !) en rythme (tant qu’à faire). La rouquine n’attendait donc qu’un mot (même un signe de tête à la rigueur, pouvait lui suffire) pour s’enflammer d’avantage encore et se jeter dans la fosse aux lions : même pas peur !

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