Une promenade presque solitaire...

Il était à peine sept heures du matin ce jour là. L'aube éclaircissait le ciel prudemment, et les rayons du soleil s'aventuraient un peu plus loin à chaque seconde. La rosée donnait l'illusion d'une nuit pluvieuse, l'herbe était fraiche et les créatures de la nature s'éveillaient ou s'endormaient dans leur tanières. Le silence semblait être le maître des lieux et le jour chassait l'obscurité de ces terres une nouvelle fois. C'était un samedi matin normal dans les jardins de Poudlard.

Aucun bruit n'émanait du Chateau. Elèves et professeurs profitaient de ce jour de repos avant de débuter une nouvelle semaine de travail. C'était une journée normale pour tous.

Oui, une journée normale. Exceptée pour une jeune fille de Pouffsouffle sortie précipitamment du Chateau et se dirigeant sans vraiment le savoir, vers le lac sombre et glacial de Poudlard, l'école de sorcellerie.
Sarah O'Donnell, 15 ans.

Ca n'était pas dans les habitudes de l'adolescente de sortir marcher de si bon matin. Sarah était emmitouflée dans son manteau noir, le col assez remonté pour cacher la moitié de son visage, elle avait enfillé un jean délavé et troué qu'elle portait depuis des années et un T-Shirt gris.

Elle marchait d'un pas rapide, la tête baissée. Si quelqu'un, à ce moment là, avait pu voir son visage, il n'y aurai vu qu'un regard vide, lointain... et terrifié. Des images défilaient dans son esprit, des sons, des sentiments... Elle sentait encore cette présence tellement oppressante, ce sentiment de désespoir, elle entendait encore cette respiration, elle voyait encore ces yeux...

Sarah O'Donnell arriva au bord du lac, et s'arreta machinalement. Le regard toujours perdu dans le vide. L'éclaboussure d'un étrange poisson sautant dans l'eau sombre la fit revenir à elle. Elle regarda autour d'elle, cherchant un indice qui aurait pu lui montrer comment elle était arrivée jusque là. Son regard se posa sur un vieil arbre au bord du lac. Un saul-pleureur, d'après ce qu'elle put en juger. Elle s'assit entre les racines de l'arbre et ramena ses jambes contre sa poitrine. Maintenant qu'elle n'était plus plongée dans ses pensées, elle commençait à sentir le froid la poignarder. Son regard se perdit une nouvelle fois dans le noir de l'eau du lac.

Cette nuit là, Sarah avait fait un cauchemart. Un cauchemart qu'elle avait souvent fait dans son enfance. Un cauchemart qui l'avait terrifié pendant des années. Un cauchemart qu'elle n'avait plus fait depuis 3 ans... Elle s'était réveillée en larme, la respiration halletante, tout son corps en sueur. La jeune fille ferma les yeux et son ventre se serra. Elle s'en souvenait tellement bien...

"- Tu dois y retourner une nouvelle fois Sarah... Il n'a pas encore obtenu tout ce qu'il voulait... "

* Cette maison... cette pièce... Cette créature...* Pensait l'adolescente. Elle frissonna. Sans savoir si c'était de froid ou de peur. Elle fronça les sourcils et laissa tomber sa tête en arrière, contre le tronc en pensant:

* Allez, reprends-toi! Ca n'est qu'un mauvais rêve! Reprends toi!!*

C'est à ce moment là qu'elle entendit un bruit. Tout près de l'arbre au pied duquel elle s'était installée. Elle serra les dents pour empêcher cette pensée qui était au bout de ses lèvres et ne demandait qu'à sortir: *Et si c'était Lui...?* Elle inspira profondément et regarda autour d'elle.

"Eh? Il y a quelqu'un?!"

C'est alors qu'elle vit quelqu'un, d'âge et de sexe indetéterminés l'observer.

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DONE 561

Il faisait froid, en ce moment. Généralement, ce n'était pas pour lui déplaire, mais la température baissait à un niveau qu'il ne connaissait que trop bien, près du pôle. Les degrès se noyaient en dessous des précisions météorologiques pour l'Angleterre, mais il n'était pas certain que tout le monde le ressentait en même temps que lui.

En fait, il était presque persuadé qu'il était le seul à avoir froid. Qu'il était le seul à avoir peur. Ils se rapprochaient tous du Printemps avec sérénité, mais lui restait coincé en hiver, enveloppé de glace et de peur. Il avait terriblement mal à l'avant-bras.

La douleur n'était pas récente, pourtant. Elle datait d'un certain jour de l'année, et Severus l'avait pratiquement boudé lorsqu'il avait voulu lui en parler. Qu'allait-il faire...? Il était seul, il était traître, il n'allait pas s'en sortir...

Oui, Igor Karkaroff avait terriblement froid en ce jour plutôt clément, et pourtant il se prit à vouloir sortir du château et marcher un peu dans le parc. Il lui était impossible de se vider l'esprit de toutes ses préoccupations, mais il pouvait au moins admirer le lac gelé et son grand bâteau sans se ronger les ongles - qu'il avait joli, d'ailleurs.

Il s'approcha du point d'eau en s'aidant de sa canne, tortillant son bouc, la mine indéchiffrable. Il s'arrêta à quelques mètres seulement et admira l'étendue limpide, ses pensées aussi froides que sa température interne, regardant sans le voir le grand vaisseau de Durmstrang. Oh, même ses élèves avaient beaucoup de mal à lui arracher un seul sourire... Qu'en était-il de Krum? Krum, il ne le voyait presque plus. Ami des Serpentard. Piège à crétines de ce château en ruines. Pitoyable... Il fallait qu'il gagne en vitesse ce Tournoi, que Potter meurre en route et qu'il reparte à Durmstrang. Fin de l'histoire.

"Eh? Il y a quelqu'un?!"

Igor détourna la tête, vers la petite pente douce qui menait directement au bord de l'eau. Adossée à un arbre, une jeune fille semblait paresser, ou du moins réfléchir. Elle aussi se tourna vers elle et ils se regardèrent ainsi un instant sans qu'Igor n'ait le réflexe de la rabrouer et de lui demander de baisser les yeux. Il s'imagina un instant la surprise qu'elle devait avoir en voyant le grand directeur de Durmstrang ici, ou même si elle aussi avait froid, en ce moment... Elle avait l'air pâle, un peu troublé... A quoi pensait-elle...?

- " Il y a quelqu'un, en effet, Miss." fit-il assez sèchement sans la lâcher du regard. "Comme vous le voyez, vous n'êtes pas la seule à vous promener ici."

Ses yeux glacés, constemment éteints se figèrent, puis il papillonna en observant le lac de nouveau. Une petite brise vint secouer sa lourde cape de fourrure, déposée sur ses épaules.

- " Il fait si froid..." murmura-t-il, le regard vague dans l'horizon.

Sarah ne s'était pas attendue à voir la sombre silhouette d'Igor Karkaroff, en effet. Elle ne put s'empêcher de dévisager le directeur de Durmstrang comme sa présence dans le parc de Poudlard était totalement anormale. Il était encore tôt ce matin là, et Sarah n'était pas totalement réveillée, ou du moins, pas encore revenue à la réalité! Quand elle se souvint de la présence de l'école Bulgare sur les domaines de Poudlard, elle sauta sur ses pieds et répondit d'une voix respectueuse et polie.

''Ah! Pardonnez-moi monsieur Karkaroff! C'est que je ne m'attendais pas à vous rencontrer ici! On y croise rarement des professeurs...''

Elle regardait Karkaroff dans les yeux tout en parlant, puis baissa les yeux devant cette impression, que tout le monde devait certainement connaître, d'avoir dit des choses à la fois complètement sottes et totalement dénuées d'intérêt.

Sarah n'était pas particulièrement à l'aise lorsqu'elle croisait Igor Karkaroff dans les longs couloirs de Poudlard. Elle n'était pas sans ignorer les sombres rumeurs qui circulaient à son propos, certaines plus vraissemblables que d'autres. On parlait d'un espion de Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom...on racontait qu'il avait autrefois été pensionnaire à la prison d'Azkaban pour avoir participé aux attaques du seigneur des tenèbres en tant que mangemort...On disait même qu'il était à Poudlard pour prendre la place de Dumbledore!

Mais ce matin là, elle se demandait simplement ce que faisait cet homme près du lac, un air aussi inquiet sur le visage. Alors qu'il se tournait une nouvelle fois vers le lac, comme si la jeune fille n'existait pas, Sarah fit de même et contempla la sombre étendue d'eau, le regard lointain.

Lorsqu'elle entendit le directeur de l'école bulgare parler du froid de cette matinée, Sarah répondit instinctivement, sans vraiment s'en rendre compte, le regard perdu dans l'eau noire du lac.

''Oui...c'est une matinée bien froide...Mais personne n'a l'air de s'en rendre compte...''

Se rendant compte qu'elle avait répondue à une phrase qui non seulement ne lui était pas destinée mais qui en plus n'attendait pas de réponse, elle bafouilla d'un air géné :

''Hum, pardon je ne me suis pas présentée! Sarah Willemine O'Donnell, de Pouffsouffle! Enchantée...''

Elle attendit la réponse de Karkaroff, s'attendant à une réponse agressive et froide...

Igor plissa les yeux lorsque la ligne d'horizon enflammée s'éleva au dessus du lac en éclatant de lumière. Il poussa un grand soupir, vraiment indécis sur ce qu'il faisait là, sur ce qu'il allait faire après, sur ce qu'il allait devenir... Non, ne plus penser à ça, ne plus penser à ça.

Il se tourna vers la jeune fille qui continuait de lui parler malgré sa réputation sale et dégoulinante, et lui avança un sourire courtois mais un peu crispé. Le sourire y était, c'était exact, mais ses petits yeux gris et glacés restaient désespérément froids et figés. On aurait dit qu'il jaugeait Sarah avant de daigner lui répondre...

- " C'est en effet la prrrrremièrrrre fois que je me prrrrromène ici." plaça-t-il d'un ton mielleux pour éclairer Sarah sur sa présence ici. "Mais je voulais prrrrrofiter de cette belle jourrrrrnée avant de fairrrre les prrrréparrrratifs avec mon champion sur le prrrrochaine tâche."

Il hocha la tête, très fier de son cher Krum, qui, il en était certain, faisait battre d'admiration le petit coeur de cette Poufsouffle. Son champion - et il insistait sur le SON - faisait se pâmer toutes les donzelle de ce château, il le savait bien... Et puis c'était aussi une manière de voir si cette jeune fille, qui avait l'air pourtant intelligente, ne supportait pas le fameux blaireau, Diggory.

Igor se figea. Sarah venait de dire quelque chose d'incroyable, quelque chose d'incroyablement... Touchant...?! "Personne ne semble s'en rendre compte"... Elle aussi, elle le sentait...? Igor détourna la tête pour ne pas paraître trop ému, malgré sa bouche serré et ses yeux fuyants. Il respira profondément l'air frais de ce jour chatoyant, s'apprêtant à répondre à ce nouvel espoir de rédemption. Après tout, si elle aussi, une élève anonyme de ce château presque anonyme, sentait le courant glacé qui lui labourait le dos, peut-être que...

- " C'est bien vrrrrai, Miss... O'Donnel." acquiesça-t-il, hochant la tête quand Sarah se présenta - il n'avait même pas envie de la rabrouer. "On dirrrrrait que nous sommes les seuls à avoir frrrrroid..."

Igor eut un petit rire rauque, bien nordique, et il tapa le bout de ses chaussures de sa canne, comme pour en chasser une neige inexistante.

- " Je suppose que vous n'avez pas courrrs? Il est un peu tôt... Oh, et puis c'est vrrrrai que vous, élèves de Poudlard, ne trrrrravaillez pas le dimanche..." - il fut un peu moqueur - "A Durrrmstrrrang, si. J'ai toujourrrrrs pensé que Dumbledorrre était un peu trrrrrop coulant avec vous, vous ne trouvez pas?"

Il se tourna vers lui, armé d'un nouveau sourire mais cette fois-ci bien engageant. Igor s'était peut-être montré un peu rude avec Dumbledore et ses habitudes scolaires au château, mais il donnait ainsi la possibilité à Sarah de lui répondre, de défendre ses arguments. On verrait bien ce qu'elle dirait...

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