Révélations [PV: Juliet]

Ce matin-là, Dennis n’alla pas déjeuner. Le cœur du petit Serpentard était en proie à une véritable interrogation sentimentale, une interrogation qui durait depuis déjà pas mal de temps. Voilà quatre ans que Dennis se sentait comblé d’une affection particulière. Au départ, cette affection avait été douce, presque superficielle, apparentée à une amitié complète. Avant, Dennis était trop jeune pour le comprendre, il s’en rendait bien compte. On ne peut comprendre l’amour qu’après qu’il nous ait possédé, c’était évident… Et l’amour préfère s’attaquer à des victimes plus âgées, visiblement… Dennis ne pouvait pas parler d’amour. En fait, il ne savait pas trop où il en était. En cours, ses résultats étaient moyens, peut-être un peu mitigés, mais pas trop mauvais tout de même. Mais il semblait épris d’un sentiment incontrôlable, qui semblait tout juste montrer la surface enfouie de son iceberg, un sentiment qui avait été jusque là clame, et qui ne se manifestait que maintenant. Nul psychologue ne pouvait dire le contraire, Dennis était attiré par quelqu’un… En dépit de sa gentillesse maladive, Dennis n’était pas très courageux, c’était d’ailleurs cette carence là qui l’avait sûrement conduit à Serpentard, aussi, faire étalage de ses sentiments à quelqu’un n’avait jamais été son fort. Pourtant, aujourd’hui, quelqu’un ne le laissait pas indifférent. Il y a quatre ans, il avait fait une rencontre des plus originales. Il s’était produit l’une des après-midi les plus étranges, une après-midi magique, qu’aujourd’hui, Dennis doutait d’avoir vécu, tant les évènements qui s’étaient enchaînés avaient été étranges et imprévus. Pourtant, il s’en souvenait encore comme si c’était hier, de cette expérience puissante et magique qu’il avait vécue avec une dénommée Juliet Knightley… Ce jour là, tout avait commencé… Dennis avait découvert une jeune fille sympathique, qui avait un caractère qui s’imbriquait parfaitement avec le sien… Ils avaient grandis ensemble, ils s’étaient familiarisés, ils étaient allés au bal à plusieurs reprises ensemble, Juliet était déjà venue chez lui… Mais aujourd’hui, Dennis voulait plus. Il ne voyait plus Juliet comme une simple amie, comme sa meilleure amie… Elle était bien plus pour lui. Voilà tout le problème. Il ne savait pas quel était ce sentiment nouveau, ce terrain si grand qu’il ne connaissait pas encore… Il avait peur de le nommer « amour », et il avait hâte de ne plus l’appeler « amitié », pourtant… Il se souvenait encore de la semaine de folie qu’il avait vécue avec Juliet, une semaine formidable… Lorsqu’elle était partie, il y avait eu un vide… Elle occupait bien une place importante dans son cœur. Il fallait absolument que Dennis mette au clair ce qu’il existait entre eux. Pure amitié ? Amitié vraiment prononcée ? Non, c’était beaucoup plus. Beaucoup plus. Alors, peut-être qu’il fallait se résigner à parler d’attirance passionnée… Sans aucune exagération. Ils étaient quand même en fin de troisième année, ils allaient rentrer en quatrième année, ça n’était pas rien ! Ils n’étaient plus des premières années pour qui l’amour était un idéal à imiter, pour faire grand, pour faire mûr… Ils avaient le temps, certes, mais maintenant, ils étaient suffisamment grand… C’était évident. Il était temps de mettre certaines choses au clair…

Dennis regarda sa montre. Il était tard, trop tard pour descendre prendre un petit déjeuner, s’il avait voulu changer d’avis au dernier moment. Il n’avait pas faim de toute manière. Il avait donné rendez-vous à Juliet dans les cachots la veille, rendez-vous qui avat lieu dans une dizaine de minutes. Hâtivement, le petit Serpentard enleva son pyjama, pour s’habiller correctement, mit ses chaussettes, ses chaussures, et se leva de son lit. Il traîna des pieds en dehors des dortoirs, traversa la salle commune, le visage endormi, et sortit de sa salle commune. Il traversa les couloirs pour arriver dans le lieu le moins agréable de Poudlard : les cachots. Il n’avait nullement envie de rester là, pouvant croiser Rogue et son habituelle mauvaise humeur à tout moment, mais il n’avait pas le choix, le prochain cours avait lieu dans les cachots, et s’il voulait ne pas y arriver en retard, il devait absolument rester dans les parages. Ainsi, il s’assit contre un mur, sortit de sa poche un paquet de Suçacides… et commença à en déguster quelques-uns, anxieux… Et il attendit que celle qui faisait l’objet de toutes ses attentions et de toutes ses questions se présente.

Déjà presque la fin de l'année. Il y a des trucs, comme ça, dont on se rend compte et dont on ne peut pas s'empêcher de s'en étonner. L'approche imminente de la fin de la 3ème année à Poudlard en faisait partie, par exemple. 3 ans. Et pourtant Juliet en était toujours au même point : elle passait des après-midi avec Dennis à s'inventer des monstres à chaque recoin ou des histoires à dormir debout, elle guettait toujours son elfe de maison, elle écrivait toujours autant et n'acceptait toujours pas l'idée qu'on puisse la lire, elle... Non... Elle ne faisait plus de Quidditch. Ce devait être le changement de la troisième année. Ah... Et oui... Changement qui ne tombait pas du ciel mais qui en avait accompagné un autre : la nomination au poste de préfète.
A la fin de cette première année à ce statut, la petite ne s'y faisait toujours pas. Ce qui était logique, en fin de compte, puisqu'elle faisait tout son possible pour être considérée exactement comme les autres élèves (oui, bon, d'accord, tous les élèves n'étaient peut-être pas considérés comme des personnes étranges). Heureusement, son entourage s'y était fait, lui (par quel miracle ? Car la petite avait maintenant des petites crises de paranoïa à cause de cela), ce qui aidait la petite à faire comme si de rien n'était.
Et c'était pour cela qu'elle appréciait Dennis, aussi. Lui ne se formalisait de rien. Pas plus de son statut de préfète que de leur relation un peu bizarre. Ben oui, quand on y pense, c'est un peu bizarre de voir des jeunes de 13 ans se retrouver, non pas pour parler des derniers potins ni pour rigoler un bon coup, mais pour s'inventer un monde totalement à part comme pourrait le faire les petits de 5 ans... De grands enfants ? Oh, ce n'était pas si sûr, même s'il devait y avoir de cela aussi. Non, c'était juste... Une complicité. Même si ces derniers temps, Juliet trouvait son "complice" un peu moins enclin à faire leur petit jeu que d'habitude.
Mais bon, ce n'était que passager. Ou alors, lui aussi était en phase de mutation. Après tout, elle ne pouvait pas lui en vouloir car elle aussi avait un peu changé à cause de ce foutu statut de préfète. Elle ne pouvait plus faire exactement ce qu'elle voulait. Elle était sensée être un modèle. Bien sûr, on ne pouvait pas dire qu'elle s'y tenait vraiment, mais il y avait des fois où cet aspect-là tournait un peu à l'obsession dans sa tête.
Un matin, elle se dirigea vers les cachots pour rejoindre Dennis, comme prévu. C'était la seule chose qu'elle prévoyait, d'ailleurs, car la petite était plutôt du genre à laisser couler les événements comme ils venaient, c'est-à-dire suivre l'instinct et ne jamais rien prévoir. Mais comme ils n'étaient pas dans la même maison, ils fallait bien qu'ils s'organisent un peu, au désespoir de la petite.

Sans faire attention aux regards interloqués des Serpentard qui remontaient des cachots pour prendre leur petit déjeuner et à certaines remarques du genre "Pfff, les préfets, ça s'croit tout permis !" (quoique ce genre de remarque avait justement le don de rendre folle Juliet ~~Ok, elle l'est déjà~~ qui se désespérait de ne plus pouvoir passer incognito), la petite s'engouffra dans l'escalier un peu sombre et humide qui la mènerait au lieu de rendez-vous.
Elle arriva au bout et aperçut Dennis, assis par terre contre un mur, un air rêveur sur le visage et un Suçacide à la main. Elle sourit légèrement, réfléchissant à la manière dont elle pourrait signaler son arrivée. Elle ne pouvait pas le faire normalement, ça, c'était sûr... Ce serait considérer leur relation comme "normale", or, elle ne l'était pas.
Elle s'approcha lentement, s'accroupit pour s'asseoir contre le mur, comme lui, mais à une certaine distance, et se mit à glisser pour arriver jusqu'à ses côtés. Il était tellement plongé dans ses pensées qu'elle était sûre qu'il ne l'avait pas vue. Elle resta un instant, comme ça, adossée contre le mur. Cette situation lui rappelait quelque chose. Oui, lors de sa toute première année, elle s'était adossée contre le mur, comme ça, en écartant les bras, pour s'imprégner de toute la froideur des lieux. Un Serpentard s'était moqué d'elle et l'avait même attaquée, puis était arrivé Dennis...
Mmmh, bizarrement, cela ne semblait pas si loin que cela, alors que depuis s'était écoulé un certain temps. Juliet avait toujours eu du mal avec le temps. C'était une notion qui lui échappait totalement. Au bout de quelques minutes, elle regarda le sac de suçacides que Dennis tenait à la main, et piocha dedans. Elle rencontra la main du garçon qui voulait justement prendre un Suçacide, aussi.
Leurs regards se croisèrent, c'était la manière à Juliet de signaler sa présence et de dire bonjour (en y ajoutant un petit sourire, quand même).
Elle n'avait même pas besoin de parler (tout le monde sait que ce n'était pas son fort), elle savait que le garçon l'avait comprise.

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