<Mon univers>

Père,

Je vous écris aujourd'hui, alors que nous ne nous sommes pas parlés depuis mon départ de Russie. Et encore, peut-on dire que depuis la mort de mère nous avons parlé ? Je vais me permettre d'en douter. Ce n'est pas le sujet de ma lettre, je ne tiens pas à vous parler de ma vie, je ne tiens pas à vous raconter mon quotidien que ce soit à Poudlard ou auprès d'Andrew. Vous avez perdu ce droit lorsque vous m'avez vendu. J'espère que ces mots vous offusqueront, cela me vengerait de cette humiliation. Cela dit, je ne souffre plus tant que ça de votre abandon, Andrew n'est pas si mal, je n'irais pas jusqu'à dire que je l'aime bien, mais il me traite correctement et à Poudlard j'ai bien plus de liberté que je n'en avais autrefois chez nous. Il n'y a qu'une seule question que j'aimerais vous poser... pourquoi ?

Pourquoi m'avoir vendue à Andrew ? L'argent était-il si important que ça pour vous ? Plus important que maman et moi ? Ne croyez pas que cela me hante encore, je ne suis plus une petite fille, et je me moque pas mal de savoir ce qui ne va pas chez vous, seulement, cette histoire semble irrationnel. Il y a un avant l'incendie, et un après. La mort de mère suffit-elle à expliquer votre comportement étrange ? Ce n'est pas mon sentiment. Alors pourquoi ?

Et pourquoi êtes-vous en Angleterre alors qu'il était clairement stipulé dans le contrat que vous ne deviez jamais nous approcher ? Jamais me revoir ? Ce qui ne devrait pas vous manquer, puisque vous n'êtes pas un bon père et que cette décision vous l'avez prise en votre âme et conscience. Alors, que faites-vous là ? Cette question me turlupine, surtout que cela fait plusieurs semaines que vous êtes à Pré-au-lard, et même si vous n'avez pas cherché à me parler, vous ne semblez pas décidé non plus à retourner en Russie. S'il vous plaît, repartez. J'ai réussi à me guérir de ma souffrance, vous ne faites que la rendre encore pire qu'avant. Vous m'avez manqué au début... Et je ne sais pas pourquoi je vous dis une chose pareille parce que vous ne lirez jamais cette lettre, je ne compte pas l'envoyer. J'ai pensé le faire un moment, puis, j'ai changé d'avis. Je ne sais plus vraiment me mentir ; on m'a appris que c'était en parti la cause de mes problèmes d'insomnies. Mais passons. Cette lettre va finir dans mon journal, comme les premières, celles de quand j'étais enfant et que j'avais encore l'espoir que c'était une erreur... Ce qui ne veut pas dire que je vais abandonner mon « pourquoi », mais je vais aller vous poser la question en face, j'ai envie de vous regarder dans les yeux lorsque je vous demanderais des réponses. Vous me devez bien ça, nous sommes tellement loin maintenant, pas seulement parce que la Russie est à l'autre bout du continent, mais parce que nos cœurs n'ont plus aucun liens... Nous nous sommes perdus en chemin père. Vous ne me manquez pas. Mais je veux savoir. Alors je saurais.

Cher journal,

Je suis perdue. J'aimerais avoir quelqu'un à qui en parler, mais voilà, cela se révèle impossible pour tout un tas de raison. Eva-Rose et Dawn m'ont accompagnées dans mon expédition, ainsi que Nicolas... Ils m'ont servie de guide, toutefois, j'ai été complètement incapable de me confier à eux sur ce qui s'est passé une fois que j'ai quitté mon père. Ma rancune n'a pas diminué, pourtant... Enfin. En tout cas, je n'aurais pas pu parler à Dawn, je ne lui parlais presque jamais, en revanche, Eva-Rose est ma meilleure amie, et je suis assez proche de Nicolas – même s'il m'énerve parfois -. Je ne leur ai rien dit. Je ne suis pas encore prête. Il m'a fallut tant d'années pour me remettre de l'abandon, de la mort de maman. Jusque là, je ne m'étais jamais rendu compte que j'étais presque guérie, je pensais même ne pas l'être du tout, sauf que là, j'ai mal. Et avant non, c'était plus comme un parasite dans un coin de mon esprit.

Je l'ai rencontré, je me suis postée devant lui, je l'ai regardé dans les yeux, et je lui ai demandé pourquoi il se trouvait ici, à seulement un kilomètre de moi, alors qu'il lui était strictement interdit de m'approcher. Il a renoncé à ses droits parentaux, il y a maintenant plusieurs années. Et il m'a répondu. Je pense que je ne m'y attendais pas, je ne m'étais pas préparé à ça, quelque part j'étais sûre qu'il allait m'envoyer prête, et je ne m'étais pas projeté dans une situation où il me parlerait.

Je l'ai écouté. Il s'est excusé un million de fois, il m'a dit qu'il regrettait, mais qu'il n'avait pas le choix à l'époque, il m'a dit combien il était heureux de me voir en bonne santé face à lui, de pouvoir me voir si grande et combien je ressemblais à ma mère... Il m'a dit tout ça, et moi j'ai éclaté en sanglot parce que je ne pouvais rien faire d'autre que ça : pleurer et hurler tout ce que j'ai contenu pendant ces années. Quand je me suis enfin calmée, il m'a expliqué que Andrew me voulait, moi, et personne d'autre, qu'il l'avait menacé, non seulement de faire couler les entreprises, mais aussi de me tuer. S'il ne pouvait pas m'avoir, personne ne m'aurait. C'est cohérent avec le caractère de mon tuteur tel que je l'ai toujours connu. Cela l'est aussi parce que d'après mon père, Andrew désire m'épouser lorsque je serais prête. Il m'a éduqué en ce sens. Du coup, je me demande pourquoi moi ? Je suis d'une vieille famille de sang pur, mais c'est le cas d'autres filles, et puis, il est anglais, et il a été me chercher en Russie. Mon père n'a pas su me donner plus d'explication, il ignore les tenants et les aboutissants des projets de Andrew, s'il est venu, c'est parce que après toutes ces années, il voulait vérifier que j'allais bien. Malheureusement, bien que touchée par cette attention, le mal est fait, je ne peux plus lui accorder ma confiance. Cela dit, ma méfiance envers mon tuteur a augmenté aussi, finalement, tout n'est pas perdu.

J'ai fini par partir, laissant mon père derrière moi, mais pas mon passé. Il est revenu à toute allure vers moi, m'a frappé de plein fouet, et j'ignore comment lutter. Je n'arrive pas à dormir car les paroles de celui qui m'a donné la vie reviennent sans cesse dans mon esprit. La voix essaie de me raisonner, elle tente de me calmer, en vain, rien ne peut atténuer ma peine. Si j'ai endurer tout ça, c'est parce que mon père n'a pas été assez fort pour me garder, parce que Andrew est encore plus dangereux et psychopathe que ce que j'imaginais... parce que tout le monde me manipule... et je ne le supporte plus.

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Cher journal,
Je ne saurais te dire combien je suis troublée et, peut-être, un peu honteuse aussi. A dire vrai, je ne sais même pas par quel bout commencer mon histoire. Je pensais filer le parfait amour avec Enry – et dans l'absolu, je le pense toujours -, mais si je continue à glisser sur cette pente dangereuse, je risque la chute ! Sévère avec ça, parce que je saurais, j'aurais pleinement conscience, que tout est de ma faute. Le pire, c'est qu'il m'énerve toujours autant !!!! Qui ça, « il » ? Mais Axel Griffins évidemment ! Car c'est lui le cœur du problème. Je ne sais pas si le terme de flirt est approprié, je préfère penser que non, sauf qu'on pourrait peut-être le croire si on nous avait vu folâtrer cet après-midi avec lui. Cela avait commencé parfaitement innocemment. Monsieur Griffins se baladait, sa route a croisé la mienne pendant que je bronzais. Il a fait très chaud aujourd'hui, bien plus que ce que l'on pouvait attendre pour un début de printemps, et je ne suis jamais très efficace lorsque j'ai chaud. Je suis une fille des pays froids, j'ai grandi dans un coin de la Russie où lorsqu'il neige, nous nous trouvons parfois bloqué pendant des jours, et où cela ne nous dérange pas outre mesure. Je portais de splendides manteaux lorsque j'étais enfant, toute de blanc vêtu et si bien couverte qu'on ne me voyait que les yeux et le bout du nez, ma mère me sortait dans le village tout proche de notre maison. J'aime le soleil, assez pour apprécier de rester sous ses feux sans m'inquiéter d'un cancer de la peau, mais je préfère le froid. Il suffit de se couvrir pour lutter contre le froid, et puis, on a le chauffage aussi... mais lorsqu'il fait chaud, c'est bien plus dur de lutter, la décence voulant que nous portions un minimum de vêtements.

La décence, voilà tout mon problème. J'en ai beaucoup, mais je ne crois pas que mes règles soient celles communes au reste du monde. Que dire, enfin, puisque je ne sais pas me justifier à moi-même ? Car la décence est tout le problème. Je me suis déshabillée, devant monsieur Griffins (car me déshabiller, c'est quelque chose que je fais souvent, tous les jours pour me laver, de fait). Nous n'avons rien fait que l'on puisse me reprocher, évidemment, je n'ai pas trompé Enry avec monsieur Griffins, il ne manquerait plus que ça ! Mais au petit jeu de se chercher, il m'a trouvé, j'ai répondu à sa provocation. Je n'y voyais pas de mal au début parce que je l'avais moi-même admiré dans une tenue plus que limitée... ce n'était que justice de lui rendre la pareille, qui plus est, il ne fait pas partie de mes fan, donc j'avais la sensation d'avoir quelque chose à prouver. Il me reproche beaucoup mon originalité (ou le fait que je sois bizarre pour être plus près de la vérité), donc j'avais envie qu'il m'admire, par blessure d'orgueil. J'ai l'habitude qu'on se moque de moi, voire qu'on se méfie de ma personne, mais comme lui il m'énerve tout autant et qu'à mon avis côté originalité, nous jouons dans la même cour à défaut de dans le même style, je trouvait vexant qu'il ne m'accorde que du mépris. Et bizarrement, il semblerait que les conversations tournant autour du physique et des sous-attendu qu'accompagnent notre conversation... me rendent moins antipathique. Bref, je voulais me prouver que je peux plaire à n'importe qui, mais j'ai peut-être pousser l'expérience jusqu'à ses retranchements.

Ce qui me chagrine, au fond, ce n'est pas tant l'aboutissement de cette aventure, que le fait que cela risque de déplaire à Enry. Je n'y ai pas vraiment pensé sur le moment, c'est uniquement quand je me suis retrouvée collée, en sous-vêtement, à Axel, que je me suis dit qu'il y avait comme un petit problème. Du coup, je suis bien sûr sortie de l'eau et je suis rentrée, mais le mal est fait, si Enry l'apprend, je vais avoir droit à une scène de jalousie. Ce qui est idiot. Être jaloux d'Axel Griffins n'a aucun sens ! Il y a encore peu c'était la personne qui m'insupportait le plus dans toute l'école. Mais voilà, je connais mon petit ami, il est toujours extrêmement jaloux, pour rien la plupart du temps, alors pour quelque chose, cela promet de mauvaises surprises, j'en suis certaine. J'ai donc pris la décision de ne pas lui en parler, puisqu'il ne s'est rien passé, et que personne ne nous a vu. On m'a bien vu trempée dans le dortoir, mais j'ai ensuite été à la douche, et je me suis contentée de dire à mes camarades que j'étais tombé dans le lac. J'ai seulement oublié de préciser que j'y avais été volontairement, et accompagnée. Un détail. Un détail que je vais faire de mon mieux pour que tout le monde l'oublie. Je suis très douée pour faire comme si tout allait bien, donc je n'ai qu'à continuer et à faire comme je fais toujours. Je pense ne même pas en parler à Elyna, sa réaction à cette histoire serait vraiment drôle pourtant, mais je vais éviter. Je sens que cela ne lui plaira pas, et qu'elle n'approuvera pas ce que j'ai fais (elle peut être si prude parfois!!!!). Je vais garder ça pour moi, c'est le plus simple.

Et puis, la fin de l'année approche. J'ai hâte d'être en vacances d'été pour voir Enry ! Et il vaut mieux que je me concentre là-dessus. Je compte sortir beaucoup pendant les prochaines vacances, je ne tiens vraiment pas à rester sous le même toit qu'Andrew avec tout ce que j'ai appris en janvier. Je dois réfléchir à une solution à ce sujet, c'est tout de même bien plus important qu'une petite baignade avec un camarade de classe, non ? Nous sommes innocents. Voilà.

Je vais donc en revenir à des choses nettement plus importantes, comme Andrew. Maintenant que je sais qu'il veut m'épouser d'ici quelques années, je ne sais plus comment réagir par rapport à lui. S'il y a bien une chose dont je suis certaine, c'est que je ne l'aime pas, je n'irais pas jusqu'à dire que je le déteste, il est responsable de mon malheur, mais au fond, pas plus que tous les autres, en revanche il est strictement hors de question que je l'épouse. J'aime Enry et pourtant, je ne veux pas l'épouser, alors imaginez ce que je pense de cette histoire avec mon tuteur ! Il me sert de parent depuis tellement longtemps que si je n'avais pas revu mon père biologique dernièrement, j'aurais pu oublier ses traits. C'est Andrew mon père par substitut. Il signait jusqu'à peu les papiers qui me permettaient d'aller à l'école, et il me loge. Je me sens mal à l'aise par rapport à tout ceci. Heureusement, j'ai bien plus de vie sociale qu'autrefois, sortir ne sera sûrement pas un problème.

Cher journal,
J'ai maintenant 17 ans depuis presque deux mois, mais je commence sur les chapeaux de roues. Non seulement la culpabilité de cet instant avec Axel n'a pas complètement disparu – en grande partie parce que je n'ai pas encore revu Enry – mais en plus j'ai désormais l'âge de me marier et le regard de Andrew me le fait sentir. Je l'évite autant que faire se peut. Je ne sais pas quoi penser de lui. Lorsque je tourne les pages de ce carnet, je me rends compte que je ne l'ai jamais vraiment su. Plus jeune j'ai rêvé qu'il se marie (pas avec moi donc) pour avoir une sorte de famille recomposée, voire même des frères et des sœurs, cela m'aurait vraiment plu. Je suis fille unique, maman était de santé fragile et elle ne voulait pas avoir d'autres enfants de peur de ne pas y survivre ou de faire un enfant malade. Elle savait que j'avais hérité de ses problèmes de voix... même si, tout bien pesé, je tiens surtout de mon père car j'ai une santé de fer. Si on excepte ces affreuses migraines qui m'assaillent de temps en temps, je ne suis jamais malade, je n'attrape ne serait-ce qu'un rhume !

Mais ne nous éparpillons pas. Je disais donc, Andrew est beaucoup moins au travail que ce qu'il m'a donné l'habitude lors des étés précédents. Il gravite autour de moi, c'est désagréable, mais je reste enfermée dans ma chambre le plus possible et essaie de le voir uniquement aux repas. J’espérais pouvoir sortir beaucoup mais tous les jours voilà qui n'est pas possible. Andrew ne m'en donne pas l'autorisation et puis, de toute façon, je ne vais pas sortir dehors toute seule. Cela ne fait que trois jours, aucun de mes amis ne peut prétendre me manquer, pas plus que les autres ne peuvent se dire que j'ai disparu de leur écran radar depuis trop longtemps.

Dorémi se demande pourquoi je boude comme ça, même si elle est mon elfe à moi, je ne me vois pas le lui dire. Comme j'étais mineure jusqu'à encore récemment, elle voit un peu Andrew comme le maître de maison, à défaut d'être son maître à elle, et puis, elle reste ici tant que je suis à Poudlard, je ne veux pas lui compliquer les mois à venir. Je finirais par retourner à Poudlard, pas elle. Une chose me travaille. Est-ce que je pourrais partir de chez Andrew l'an prochain ? L'esclavage étant illégal dans la plupart des pays civilisés (tous, d'ailleurs, sinon ils ne seraient pas civilisés, non?), il ne peut plus me garder sous prétexte que je suis mineure, mais j'ai un problème, deux en fait, mais qui se résument ainsi : je n'ai pas d'argent. Et je devrais payer ma formation pour devenir auror, et si je m'en vais d'ici, il me faudra un studio. Hum... Voilà qui me semble, tout de même, un peu compliqué. Maman m'a sûrement légué quelque chose, mais c'est en Russie, et je suis en Angleterre. Je suis ici depuis trop longtemps pour m'imaginer retourner là-bas autrement que pour des voyages d'agrément. Puisque je ne vais sûrement pas sortir avant encore une semaine, je vais réfléchir à tout ça, si je pouvais trouver des réponses avant la rentrée, ce serait parfait !