Rendez-vous gâché [PV]

Nicolas ne savait pas bien pourquoi mais il avait un peu la tête qui tournait depuis le matin. Il n’arrivait pas, malgré tout, à se résoudre à aller à l’infirmerie parce qu’il avait un rendez-vous galant. Innocemment, il se trouvait comme excuse que s’il posait un lapin à sa petite amie, elle allait certainement beaucoup lui en vouloir. Faux prétexte s’il en est puisqu’il n’y avait que peu de doute (et quelque part dans un recoin de son cerveau – la partie la plus sensée – il en était conscient) qu’elle comprendrait qu’il ne pouvait pas l’emmener à Pré-au-lard dans cet état. De fait, quand il la rejoignit, il ne marchait pas vraiment droit, un peu comme s’il était ivre, sauf que ce n’était pas le problème, pas du tout même. Nick’ n’avait même jamais bu d’alcool, peut-être un peu de cidre dans le verre de sa sœur aux fêtes, mais il ne s’en souvenait même pas. Pour l’heure il aurait pu tout aussi bien oublié son prénom tellement il se sentait mal. Arrivé devant Emma, il tituba et posa les deux mains sur les épaules de sa chère et tendre pour réussir à rester droit.

« Salut chérie… je… ne… me sens pas très bien. » Ploc. « Ploc ? » Demanda-t-il suite à ce bruit qui le fit frémir. Bien sûr cette question grammaticalement incorrecte c’est là qu’on voit que je reprends le travail dans deux heures n’était pas destinée à Emma mais à lui-même. D’un œil anxieux, il baissa le regard vers ses chaussures avant de revenir vers son poignet. Son brassard était rouge de sang, ce qui signifiait aussi qu’il allait devoir s’en racheter un et bizarrement c’était la seule chose qu’il arrivait à penser clairement sur le moment, il lui fallut quelques secondes supplémentaires pour réaliser qu’il était aussi en train de tâcher le vêtement de la jeune préfète (et petite amie) mais le sol tanguait de plus en plus. Il essaya de se souvenir comment il avait pu rouvrir ses cicatrices mais rien ne venait, il ne voyait aucune raison à ça. Il est vrai qu’il ne se faisait jamais poser de points de sutures pour fermer ses plaies et qu’elles étaient donc fragiles, mais jusque là, il n’avait jamais eu de problèmes. Il y avait peut-être été trop fort quand il avait pété un câble au début de l’année, et puis, il aurait peut-être dû manger le matin avant de partir, parce que décidément, le sol tanguait dangereusement.

« Pardon pour ta chemise… ça te dis pas qu’on s’asseye ? » Il la prit dans ses bras pour se cacher le temps qu’un groupe d’élève passe derrière lui, il attendit quelques secondes de plus puis il lâcha Emma et se laissa tomber sur les fesses dans l’herbe. Il était pâle mais il ne semblait pas plus traumatisé que ça. Il enleva son brassard pour regarder mais c’était trop sale pour qu’il puisse y voir quoi que ce soit. Emma allait l’engueuler, ça ne faisait pas un pli. Avant ça cependant, elle allait flipper, alors, dans une tentative pour l’occuper et lui donner une occasion de gérer son stress, il lui demanda d’une voix aussi blanche que ses joues « Tu te souviens de la formule pour… faire apparaître un filet d’eau de la baguette… je… il faut nettoyer. » En réalité il se souvenait parfaitement de la formule mais dans tous les cas il valait mieux que ce soit elle qui s’en occupe. De sa main valide, il chercha dans ses poches ses bandages mais comme il le craignait il n’en avait pas sur lui. Il arrivait tellement rarement qu’il se coupe à Poudlard (et de fait, il ne s’était pas coupé depuis janvier !) qu’il n’avait pas ce genre de choses sur lui. Mais il ne voulait pas aller à l’infirmerie alors il faudrait qu’il se débrouille… le plus dur serait sûrement de persuader Emma…

C'était une journée qui devait s'annoncer bonne pour la plus jeune préfète de Serdaigle et oui, apparemment ce n'était pas une farce ! Ou bien McGonagall avait plus d'humour qu'on ne le croyait ? nouvellement devenue blonde. Enfin, "devenue" n'était pas forcément le terme le plus adapté. Dire qu'elle s'était teint les cheveux aurait effectivement été plus exact. Et oui, Emma Carter arborait, depuis quelques semaines, une tignasse blonde qui ne lui était pas coutumière. Elle ne voyait pas vraiment en quoi elle aurait dû se justifier auprès des personnes qui l'interrogeaient concernant la raison de cette fantaisie capillaire. Elle ne leur devait rien. Et pour être tout à fait honnête, avait-elle réellement une raison précise ? Toute sa vie, elle avait toujours tout fait dans les règles, et s'était conduite en gentille petite fille bien sage. Eh bien elle s'était levée un beau matin, et elle avait eu envie de faire ce qu'elle voulait faire, ce dont elle avait vraiment envie, pour une fois. Si elle avait travaillé aussi dur pendant toutes ces années, c'était dans l'espoir de devenir une brillante sorcière, une brillante médicomage, quoi que ce soit qui puisse lui permettre de venir en aide à son père, le sauver. Et après toutes ces années, et devant l'aggravement brutal de la situation de celui-ci, elle réalisait petit à petit qu'elle avait eu tort, qu'elle ne contrôlait rien, et qu'elle ne contrôlerait probablement jamais rien. Alors elle commençait à se dire que tous ses efforts étaient peut-être inutiles, et que jouer les miss parfaites ne l'avait pas menée à grand-chose à part de sacrés maux de tête et beaucoup de pression. Enfin, Ophélia MacMillan était blonde, et même si Tobias n'avait pas l'air du même avis à une certaine époque, Emma avait toujours été tentée de faire le test, et avoir un petit aperçu de ce que ça faisait d'être une MacMillan. En deux mots, on gagnait l'immense joie de pouvoir raser les couloirs de Poudlard terrorisée par l'idée de croiser une certaine préfète de Serpentard au regard-qui-tue, quelle chance !

La blonde donc, avait rendez-vous avec son petit-ami, et c'était suffisant pour lui faire afficher un léger sourire qu'on ne voyait que trop peu souvent sur son visage. Si elle commençait à changer de mentalité, il n'empêchait qu'elle se faisait toujours énormément de souci pour Nick, même si le dernier incident en date remontait à quelques temps. Elle avait bien sûr eu vent de la légère altercation entre Elyna et le blond gare à toi Nick, Emma est partout ! , ainsi que du fait qu'il avait gracieusement retapissé le sol de la salle commune d'une couleur écarlate qui n'avait toujours pas disparu. Après Pétronille qui tombe d'un pouf volant et repeint la moquette par ses saignements de nez *kof kof*, Nicolas fait gicler le sang à son tour. La salle commune des Aigles, bienvenue dans la grande boucherie ! Mais en ce moment, les choses semblaient plutôt calmes, du moins voulait-elle le croire.

Cependant, en arrivant dans le parc, Emma sut tout de suite que quelqu'un chose n'allait pas, justement. Elle n'eut aucun mal à repérer Nick, sa démarche à la Jack Sparrow incertaine le rendant difficile à rater. "Regardez c'est mon petit copain ! Celui qui est ivre là ! *__*" Il s'appuya sur elle, visiblement incapable de rester debout par lui-même et elle conclut que décidément, ils n'iraient pas à Pré-au-Lard cet après-midi. « Nick ? Qu'est-ce qui t'arrive ? » interrogea-t-elle avec anxiété, scrutant le regard anormalement sérieux du Serdaigle. Mais avant qu'elle n'ait pu ajouter quoi que ce soit, un bruit tout sauf normal se fit entendre, un bruit qui eut le don de la rendre nauséeuse. Du moins, pas ce bruit uniquement, mais plutôt ce qu'il annonçait. Les yeux fixés sur la tache écarlate qui était en train de s'étendre sur le brassard de Nick, elle ne remarqua même pas que ses propres vêtements étaient eux aussi touchés. Elle blêmit, l'odeur du sang lui donnant envie de vomir.

Elle sentit Nick trembler et craignit qu'il ne s'effondre, resserrant sa prise sur lui tout en essayant de rassembler ses pensées. S'était-il encore coupé ? Récemment ? Profondément ? Visiblement, oui, autrement ils n'en seraient pas là. « Oui, on s'assoit, pour l'instant. » acquiesça-t-elle d'une voix un brin trop aigüe pour être normale. "Pour l'instant" car était évidemment qu'ils se rendraient à l'infirmerie dès qu'elle aurait un minimum repris le contrôle de la situation. Cette fois, il n'était pas question de simplement laisser les choses comme telles. Mais l'attitude presque détachée de Nick lui fit dire qu'il n'était pas forcément du même avis. Elle était angoissée comme jamais, les yeux toujours rivés sur le bras du jeune homme, ne pouvant se détacher de cette vision sanglante. « Il faut s-soigner ça. On devrait à l'infirmerie Nick, tu as dû c-couper au mauvais endroit, ou trop profondément cette fois, je ne sais pas... Je ne peux pas croire que tu n'aies rien senti. » dit-elle d'une voix tremblante, son regard devenant plus accusateur sur la fin. Néanmoins, elle hocha la tête, sortant sa baguette de sa poche. « - Aguamenti. » parvint-elle à dire d'une voix qu'elle tâchait de rendre plus assurée, dirigeant la baguette sur le bras du blond. « Tu dois aller à l'infirmerie. » réitéra-t-elle, tâchant de se concentrer sur les saignements pour l'instant. Le reste, elle verrait après.

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Avant d’en venir à nos moutons, faisons un petit aparté au sujet des cheveux de Emma. Cela allait être fort court car en réalité Nicolas se fichait pas mal de la couleur de cheveux de sa petite amie, il était très loin d’avoir de préférences à ce sujet, il aimait les cheveux longs et il trouvait qu’ondulé c’était plus joli, mais la couleur, franchement, ça n’avait pas d’importance. D’ailleurs, au fond, même si Emma venait à se couper les cheveux, il trouverait ça triste, mais sans plus. Il ne sortait pas avec Emma que pour son joli minois, après tout des belles filles y’en avait plein Poudlard hein !

Cette parenthèse terminée, revenons en à notre bon Nicolas qui n’a pas meilleure mine que l’auteur qui se tenait à sa copine et préfète autant qu’il le pouvait sans qu’elle se mette à ployer son sous poids. Ce qui avait peu de chance d’arriver au demeurant, Nick était plutôt fin même si grand, et il ne faisait aucun doute que 1) Emma était plus sportive que lui 2) elle tenait assez correctement sur ses jambes pour qu’il tombe tout seul dommage, il se serait retrouvé dans une position inédite.

« Je… bah… aucune idée. » Il avait été tenté de dire qu’il avait merdé mais comme il ne savait pas comment, ça restait une supposition. Il y avait beaucoup de choses qui pouvait rouvrir une plaie qui n’a jamais été soignée, la liste était trop longue pour qu’il sache ce qui s’était passé exactement. En fait, comme il s’était réveillé dans cet état, sa théorie principale du moment était qu’il avait du faire un cauchemar et… les rouvrir lui-même ? Hum, non, peut-être pas à ce point, mais faire des mouvements brusques peut-être, ou se gratter sans y penser… ou un million d’autres choses, le fait est qu’il dormait à ce moment là donc il pouvait difficilement savoir ce qui allait se passer après.

« Je me suis pas coupé… » Se défendit-il d’une voix faible, son bras blessé posé sur son genoux tandis que l’autre s’agrippait au sol dans une prise qui lui permettait de se sentir un peu rassuré. Le sol était stable sous ses doigts, sa vision en revanche c’était une autre histoire. Il ne s’était pas coupé, griffé sur ses plaies, peut-être, mais coupé non. Il ne l’avait pas fait depuis janvier, depuis qu’Elyna s’était mêlé de ce qui ne la regardait pas et qu’il avait piqué une crise. Il n’y avait pas d’autres mots pour décrire ce qu’il avait ressenti à ce moment là, il avait presque fait un caprice, il n’en était pas fier mais ça ne le touchait pas non plus beaucoup. De toute façon, Elyna n’était pas capable de le comprendre. Emma en était plus capable, elle comprenait (lui semblait-il du moins) que c’était une maladie, pas quelque chose qu’il faisait exprès… sur le moment, se couper, c’était la seule chose qu’il pouvait faire, plus rien d’autre ne comptait que de le faire.

« J’ai pas mal… » Ajouta-t-il ensuite. Il avait la tête qui tournait, à la limite il se sentait un peu fiévreux, mais il n’avait pas mal, de toute façon, même quand il se coupait, il ne ressentait plus vraiment de douleur, le soulagement oui, mais mal, non, pas plus que si on lui faisait une piqûre du moins. Il y était habitué, et en un sens, il aimait ça.

« J’ai jamais mal… au bras. Ma… ma peau est trop abîmée… » Il aurait voulu la rassurer mais il avait l’impression que s’il essayait, ça allait être pire… « Je suis désolé. » S’excusa-t-il, pas parce qu’il saignait, ça il s’en fichait, mais parce que ça rendait Emma nerveuse et inquiète.

Le filet d’eau nettoya la plaie suffisamment pour qu’il constate qu’effectivement c’était la cicatrice de janvier qui s’était ouverte, et le plus marrant c’était qu’elle saignait plus que la première fois. Il regarda l’étendu des dégâts et se fit son propre diagnostic mais il n’éleva pas la voix pour faire partager ses conclusions avec sa petite amie. Il ne le ferait pas si elle ne le demandait pas, parfois c’est mieux de ne pas savoir.

Pour ce qui était de l’infirmerie, il n’avait aucune envie d’y aller, mais il n’était pas certain de pouvoir se soigner tout seul, il était presque sûr d’avoir de la fièvre. En plus, Emma ne le lâcherait pas. C’est ça qui était bien avant qu’il devienne inconséquent à cause d’une fille, il pouvait gérer ses problèmes en solo, sans penser à quiconque.

« Si j’y vais… ils vont écrire à ma mère… ça va lui causer des soucis, elle risque de culpabiliser parce qu’elle n’a pas pu me payer une thérapie, ça va empirer les choses. » Pour son moral voulait-il dire, il était conscient que pour les cicatrices non, au contraire, sur le moment avoir de vrais soins serait peut-être bien, mais bon… Cela dit, il avait déjà perdu, il essayait juste de gagner du temps, pas préparé psychologiquement à se rendre à l’infirmerie et à affronter les adultes.

« Mais tu sais tout ça déjà je suppose… » Soupira-t-il, avant de lui tendre son bras valide et en éloignant l’autre (bien qu’au point où ils en étaient c’était une précaution plus très utile). « Câlin ? » Eh, il avait besoin de réconfort ! Il ne profitait pas de la situation ! Même pas vrai d’abord !

Dire que ça n'allait pas bien aurait été un euphémisme. En clair, c'est la fin des haricots ! Emma ne comprenait tout simplement pas pourquoi tous les malaises, hallucinations et giclements d'hémoglobine devaient tomber sur elle. En un sens elle était contente d'être là plutôt qu'un inconnu, d'être en mesure de porter secours à ses proches... Mais d'un autre côté, elle doutait vraiment d'être la personne adaptée pour gérer ce genre de situation. Surtout lorsqu'il y avait du sang. Elle se sentait nauséeuse alors qu'elle n'était même pas celle dont les (nombreuses) plaies venaient de s'ouvrir et même si elle se maudissait pour ça, très honnêtement elle n'y pouvait rien. L'odeur du sang la dégoûtait, même si elle ne pouvait en détourner le regard. « Ça ne peut pas être l'opération du Saint Esprit Nick, tu as forcément fait quelque chose. Les plaies ne s'ouvrent pas toutes seules, je doute qu'elles aient suffisamment de volonté pour faire ça. » marmonna-t-elle rapidement, à cause de la nervosité. Mais elle décida que s'énerver contre Nick maintenant n'avait pas la moindre utilité. C'était gaspiller sa salive, rien de plus. Et vu l'état du blond, il valait mieux qu'il économise ses forces. « Bref, on en parlera plus tard. » conclut-elle d'une voix blanche.

Il fallait qu'elle l'amène à l'infirmière. C'était la seule pensée cohérente qui lui traversait l'esprit. Elle n'était pas habilitée à soigner une telle blessure. Elle connaissait quelques sortilèges de soins basiques, bien sûr, dont un qui lui traversait l'esprit en particulier, mais elle n'en avait jamais utilisé aucun. Ils n'étaient pas au programme de quatrième année, elle les avait uniquement étudiés dans des livres, elle doutait d'être capable de produire des miracles maintenant, dans la situation dans laquelle elle se trouvait. Sa main tremblait déjà beaucoup trop. Un Aguamenti lancé un peu à côté, ça n'avait rien de bien terrible, mais un sortilège de soin raté, elle ne préférait pas imaginer ce que ça pourrait donner. Non, Madame Pomfresh, ou même Julien Montgomery, eux sauraient quoi faire, pas elle.

Nick lui dit qu'il n'avait pas mal et même si ça lui semblait inexplicable (comment pouvait-on saigner aussi abondamment et ne rien sentir du tout ?) elle le crut. Aussi étrange que ça puisse paraître, ça avait du sens, c'était dans la même continuité que ce qu'il se passait lorsqu'il se coupait. Visiblement le stade de la douleur était dépassé depuis bien longtemps. Lorsqu'il s'excusa elle sentit son cœur louper un battement. Elle ne pouvait pas croire qu'il puisse s'excuser auprès d'elle dans un tel moment. C'était lui qui saignait bon sang, pas elle ! Elle allait bien, elle était en état de choc, mais elle allait bien. Elle sourit faiblement, posant la main sur son bras indemne. « Tu n'as pas à t'excuser Nick, pourquoi es-tu désolé ? Ce n'est pas de ta faute, tu dis que tu ne t'es pas coupé et je te crois, d'accord ? Ça va s'arranger tu vas voir. » répondit-elle d'une voix un peu plus résolue, refusant qu'il se mette à s'inquiéter pour elle alors qu'il était le plus à plaindre dans cette histoire !

La plaie nettoyée, Emma laissa Nicolas évaluer l'étendue des dégâts, observant son bras de loin. Elle n'était pas une spécialiste, mais n'importe qui aurait pu dire que ce qu'elle voyait n'annonçait rien de bon. Bien sûr, elle n'avait pas de bandages sur elle sacrebleu, pour une fois qu'elle n'amenait pas sa trousse de secours ! et elle n'était pas en mesure d'en faire apparaître de nulle part. Elle écouta l'argument du blond concernant sa mère, mais cela ne suffit pas à la faire changer d'avis. Elle soupira. « Il n'y a pas d'autre option là, je ne peux pas te soigner et tu ne peux pas te vider de ton sang ici. Je peux me servir d'un bout de tissus comme bandage le temps d'arriver à l'infirmerie, je peux aussi nettoyer la plaie, mais je ne peux rien faire d'autre. » Elle songea à la mère du garçon, à ce qu'elle ressentirait en recevant une telle lettre de Poudlard. « J'enverrai une lettre à ta mère, pour lui parler de ce qui s'est passé, et pour discuter de la thérapie justement. Je pense vraiment pouvoir t'aider, j'en ai parlé à ma mère. » ajouta-t-elle à peu près calmée à présent. L'odeur de sang était moins forte, alors ça allait mieux. Il n'y avait plus qu'à forcer la tête de mule à aller à l'infirmerie à présent. Cependant elle ne put s'empêcher de sourire à la proposition du blond. Quel crétin ! « Quand on sera arrivé à l'infirmerie, peut-être, mais pas avant. » déclara-t-elle d'un ton qui n'admettait aucune réplique. Et qu'il n'aille pas lui dire qu'il se serait peut-être vidé de tout son sang le temps d'arriver là-bas, elle ne l'autorisait pas non plus à mourir !

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Nick avait envie de hocher la tête en signe de dénégation passive mais il craignait fortement que s’il bougeait trop la tête, elle ne lui tourne encore plus, aussi s’abstint-il de tout gestes brusques et prit-il la parole d’une voix toujours aussi blanche. Ce n’était pas vraiment qu’elle fut faible, elle était parfaitement audible, c’était seulement qu’elle semblait lui coûter des efforts, venir aussi de très loin… impression au demeurant assez étrange.

« Je sais ça, ce que j’ignore c’est ce que j’ai fait… je me suis réveillé malade, j’ai du… me griffer ou je ne sais quoi dans mon sommeil. Je fais des cauchemars assez violents parfois. » Contrairement à ses plaies, ce n’était un secret pour personne à serdaigle que Nick avait le sommeil agité. En effet, ses camarades de dortoirs se plaignaient fréquemment le matin du fait qu’il ait crié dans son sommeil ou se soit tout simplement retourné toute la nuit, parfois il tombait même du lit, bref, il faisait des cauchemars, pas toujours les mêmes, mais ils étaient souvent violents et sanglants… quand il ne revivait pas la mort de Marina, qui était ces deux éléments réunis.

« Merci… je peux te jurer que je n’ai rien fait consciemment pour en arriver là… mais je me fais du soucis pour toi, je sais que… ça te stresse. » Il n’était pas sûr que ce dernier mot soit celui qui fut bien adapté, mais il n’en voyait pas d’autres pour l’instant. Ce qu’il essayait de dire c’était qu’il ne voulait pas l’inquiéter, et il aurait aimé aussi pouvoir promettre que tout irait bien comme elle le faisait, mais Nick ne faisait jamais de promesse qu’il n’était pas sûr de pouvoir tenir, et il savait qu’avec lui les choses avaient plus de chances d’aller de plus en plus mal que de s’améliorer.

« Ouai, ouai t’inquiète, on y va, j’suis chaud là… » Ironie, ironie, en tout cas, il enleva sa chemise et la déchira, de toute façon elle était foutue, le sang ça part très mal. C’était très mal fait comme découpage car contrairement à ce qu’on essaie de vous faire croire dans les films, le tissu c’est solide, mais Nick avait une baguette avec lui et un sort de découpage c’était du gâteau. Par contre, ce n’était pas droit, en même temps sa main tremblait. « Je m’occupe du bandage, tu finiras juste de serrer le nœud, il faudrait presque faire un garrot mais j’ai peur que l’infirmerie soit trop loin pour ce genre de méthode. » Il avait l’habitude du sang, il agissait méthodiquement, sans même réfléchir, pour lui tous ces gestes (en dehors de celui où il déchirait sa chemise) faisaient parti de son quotidien, c’était un peu triste mais bon…

Torse nu, il se banda le bras et serra avec le dents avant de le tendre à Emma pour qu’elle fignolle. Ça allait diminuer l’hémorragie, ce serait un peu moins dégoûtant, pour elle, lui à part l’anémie, il s’en moquait. Et c’est là qu’il se rendit compte qu’il allait aller à l’infirmerie uniquement pour elle et qu’il se demanda depuis combien de temps elle passait avant sa maladie. A méditer.

« Franchement, ça m’embête que tu sois obligée d’entrer en pourparler avec ta mère pour moi. Mais à priori je suis dans la merde, et ma mère va être tellement en panique que je n’ai plus vraiment le choix… » Il s’était résigné depuis longtemps à ce qu’on le pousse chez un psy’ de toute façon, maintenant, il ne croyait pas à sa guérison, ce qui serait toujours un handicap.

« Roh, je sais que j’ai déjà été plus sexy mais tu pourrais avoir pitié d’un pauvre malade. » Se relevant tout en parlant il fit signe à Emma de s’approcher. « De toute façon, je ne pourrais pas marcher tout seul... Et je suis trop fatigué pour profiter d’un rapprochement aussi stratégique. C’est ça de ne pas avoir de bol, non ? » Mieux valait plaisanter, sinon bonjour l’ambiance !

Emma observait toujours Nick d'un air concerné, comme redoutant qu'il ne s'évanouisse à tout instant. Et ça, c'était sans compter les regards curieux qui commençaient petit à petit à se poser sur eux. Pas de doute, il valait mieux qu'ils ne s'attardent pas excessivement dans le parc, mais comment faire lorsque le blond semblait être si mal en point ? En temps normal elle lui aurait bien donné un coup –léger hein, on a une force de moucheron ou n'en a pas– pour s'être encore une fois mis dans une situation pareille, mais là elle avait juste peur d'empirer les choses. Quand il lui dit qu'il s'était réveillé malade, elle lui jeta néanmoins un regard excédé. « Tu te sens mal depuis ce matin ?! Et tu as pensé qu'attendre l'hémorragie était préférable ? Tu aurais dû me le dire plus tôt ! Non, tu aurais dû aller à l'infirmerie directement, si ça n'allait pas, Nick ! » lui lança-t-elle d'une voix un peu plus aigüe que la normale mais qu'elle tâchait de garder basse, pour ne pas être entendue par les passants. Elle n'arrivait pas à croire qu'il puisse être aussi inconscient ! Enfin, si elle devait être honnête, non, ça ne la surprenait pas non plus tant que ça, mais quand même !

Se mordillant la lèvre avec nervosité, elle lui adressa malgré tout un faible sourire, murmurant doucement un « Je vais bien, je vais bien » d'un air distrait. Et puis là très franchement, elle avait dépassé le stade du stress. En fait, elle en était tellement loin qu'elle avait l'impression de ne plus rien ressentir du tout. Comme si elle observait tout ça depuis le corps d'une autre, comme si elle était étrangère à ce qui se passait alors que c'était à elle de réagir là ! Elle finit malgré tout par reprendre possession de ses moyens et suggéra l'idée d'un bandage. Par contre il n'était pas question qu'elle se promène en soutif, alors ce fut Nick qui retira sa chemise de son propre chef. Elle acquiesça d'un hochement suite aux directives du garçon, le laissant découper le tissus avec plus ou moins de dextérité. « Ok approche, je vais serrer. » Elle ne précisa pas que ça "risquait de faire un peu mal", puisque très franchement ce serait énoncer l'évidence et que de toute façon, le blond disait ne rien sentir. Ses mains tremblaient un peu, et elle n'était vraiment pas habituée à ce genre d'exercice mais elle s'en sortit à peu près, tâchant de resserrer le bandage de fortune le mieux possible.

Emma avait repris le dialogue avec sa mère. Pas parce qu'elle en avait vraiment envie, au contraire elle s'en passait plutôt bien jusqu'à maintenant –même si pour être tout à fait honnête, la situation la dérangeait et lui faisait vraiment faisait de la peine, cela dit elle s'en accommodait– mais elle savait que celle-ci serait en mesure d'aider Nick. Sa mère avait des relations, elle connaissait énormément de monde, et la colère qu'Emma ressentait à son égard ne l'aveuglait pas pour autant: elle pouvait aider. « Ne t'inquiètes pas pour ça, je gère ce côté là du problème. Son aide va vraiment nous être utile je pense. » assura-t-elle avec conviction. Et tant pis si pour ça elle devait faire quelques compromis, ça en valait bien la peine.

Même si son visage était toujours blême, un léger sourire vînt l'éclairer lorsque Nick se mit à plaisanter. S'il avait encore la force de plaisanter, c'était qu'ils allaient réussir à s'en sortir. Elle se leva à son tour, se rapprochant de lui pour le soutenir. « Oui, c'est certainement ça le plus gros inconvénient de toute cette histoire. Et pas le fait que tu te vides de ton sang, bien sûr ! Allez, appuie-toi sur moi, on y va. » C'était assez galère de se déplacer comme ça, mais ça devrait être suffisant pour arriver jusqu'à l'infirmerie sans que Nick ne s'écroule en chemin. De toute façon elle ne comptait pas le lâcher, elle le tenait suffisamment fermement pour être sûre de pouvoir le rattraper tant bien que mal en cas de souci. Maintenant, le gros du périple pouvait commencer.

Comment dire ? Nick comprenait la logique des propos de sa petite amie, en revanche il ne savait qu’y répondre. Comme d’habitude, il avait pris la mauvaise décision alors que la partie la plus sage de son être lui soufflait qu’il devait aller à l’infirmerie. Il n’avait plus six ans et il aurait du être capable de faire les choses correctement, mais si on y réfléchissait bien, il en était plus capable dans sa petite enfance qu’à l’heure actuelle. Nicolas était dépressif à tendance suicidaire et plus généralement autodestructrice. Si deux possibilités s’ouvraient à lui et s’il était seul à décider, il prendrait forcément celle qui lui ferait le plus mal.

« Je pensais que ça passerait tout seul… » Ou pas. Il ne se souvenait pas avoir pensé quoi que ce soit. Il s’était levé, avait pris sa douche pour essayé de se réveiller, avait vaguement remarqué le sang puis l’avait sciemment oublié pour s’habiller et rejoindre ensuite Emma en sautant le passage où il fallait manger parce que ça l’aurait obligé à parler avec les autres et qu’il ne s’en sentait pas capable. Quelque part, il avait fait comme d’habitude, semblant que ça allait bien en priant pour que ça devienne vrai. Sauf qu’il savait depuis des années que ce n’était pas le cas…

« C’est clair que t’as trop l’air d’aller bien. » Rétorqua Nick pince-sans-rire. Bon, allez, de toute façon peu importait, ce qui était fait était fait et il n’aurait jamais été à l’infirmerie tout seul. Quand il était avec Emma, comme il voulait lui faire plaisir et la rassurer, il se montrait plus raisonnable. Il avait conscience que s’il n’avait pas eu rendez-vous avec elle aujourd’hui, il serait resté sous la douche pour laver la coupure jusqu’à l’anémie totale. Enfin, maintenant il allait devoir se faire soigner, ou essayer, puisque encore une fois il n’y croyait pas. Sauf que ça mêlait la mère d’Emma à l’histoire… trop bien. La mère de sa copine devait trop le prendre pour un looser ! Non que ça le perturbe beaucoup, un drogué accepte le fait d’être drogué même s’il s’en cache, sinon il n’est plus dans l’addiction.

« Ouai et puis de mon côté voyons le bon côté des choses, tu vas pouvoir rencontrer cet été la grande Anastasia Jones, ma mère. Parce qu’elle le voudra sûrement si ta mère nous aide, enfin au moins te voir toi. J’ai honte par avance. » Il grimaça mais ce n’était pas une grimace de douleur, de toute façon même s’il se sentait fatigué et nauséeux, il n’avait mal nulle part. Emma n’avait sûrement pas l’habitude des gens comme sa mère, on pouvait dire qu’à côté même Roman n’avait pas l’air si excité que ça, c’est dire… Mais bon, elle était amie avec Charisma donc elle devait pouvoir s’habituer à tout !

Prenant appui sur Emma ils firent quelques pas avant qu’il ne réponde parce que l’effort lui coupa le souffle au départ. « Tu ne peux pas comprendre le sens des priorités d’un mec de mon âge, c’est tout. » Faisant un effort de plus (il n’était plus à un prêt), il tenta de se redresser pour être un peu moins pesant sur Emma. Même s’il ne l’admettrait pas, il avait déjà été dans des états bien pire, il pouvait s’accrocher s’il restait maître de lui-même comme il en avait l’habitude. « D’ailleurs crois bien que même à l’agonie je n’oublierais pas que tu m’as dit que j’aurais un câlin une fois à l’infirmerie. » Comment ça elle avait dit peut-être ? Il n’avait rien entendu lui !

Emma ne pouvait pas compter sur Nick pour prendre soin de lui, absolument pas. Alors autant dire que dans sa tâche d'essayer d'améliorer sa condition, elle n'était pas du tout aidée. Depuis qu'il l'avait mise au courant, la préfète s'était mise en quête de tous les moyens envisageables pour le soigner, mais elle s'était très vite aperçue que si le blond ne protestait pas, ce n'était pas pour autant qu'il allait participer aux recherches. En fait, elle avait parfois même l'impression qu'il faisait uniquement ça pour elle, pour lui faire plaisir, ce qui était choquant parce que ça montrait à quel point il ne se préoccupait pas de sa propre santé. Mais tant qu'il acceptait de voir des spécialistes, elle n'allait pas se plaindre. Par contre s'il jouait les inconscients et se laissait agoniser sans le moindre scrupule, là ça n'allait plus du tout. Elle ne pouvait pas le surveiller constamment... C'était impossible. « A l'avenir, ne pense pas, va à l'infirmerie directement... » marmonna-t-elle, un peu irritée de le voir toujours aussi détaché. Et le connaissant, ce genre de scénario était tout à fait susceptible de se reproduire.

Nick se mit ensuite à faire dans l'ironie et c'est une Emma toujours un peu pâle qui le jaugea du regard, retrouvant peu à peu sa contenance. « Disons que pour quelqu'un dont le petit ami est en train de se vider de tout son sang sur la pelouse de Poudlard, oui, je vais plutôt bien. » répondit-elle les lèvres pincées. C'est vrai quoi, comment voulait-il qu'elle pète la forme dans ces conditions ?! Elle n'avait pas rendu son petit-déjeuner et ne s'était pas non plus évanouie devant l'abondance du sang, de son point de vue c'était déjà pas mal ! C'était en soi une petite victoire sur sa hantise du sang, ça. « Et sans vouloir te vexer, j'ai quand même meilleure mine que toi ! » nota-t-elle, tâchant de se détendre un petit peu. Un peu seulement parce qu'il était encore loin d'être tiré d'affaire !

Emma s'était déjà rendue chez les Jones par le passé, notamment l'été dernier pour travailler en prévision de la rentrée (ou faire comme si dans le cas de Nick !). Pourtant, elle n'avait jamais vraiment eu l'occasion de rencontrer la mère du jeune homme. Elle ne savait même pas comment l'imaginer. Et le fait que Nick s'entête à dire qu'elle lui faisait honte n'aidait nullement à se faire une réelle opinion. Ressemblait-elle au blond ? Ou plutôt à Roman ? Ils étaient après tout les seuls Jones qu'elle connaissait... La Bleue et Bronze leva finalement les yeux au ciel, soupirant. « En tout cas, elle ne peut certainement pas être pire que ma mère. Ou bien d'une manière différente alors, parce que la mienne est championne du monde dans sa catégorie... » soupira-t-elle. Oui vous savez, la catégorie froide, insensible et sans cœur. Le genre qui n'a rien à fouetter de sa fille unique ou même de son mari mourant. Une perle rare !

Les deux jeunes gens se mirent ensuite en route vers l'infirmerie, plutôt lentement cela dit parce que Nick n'était pas tout à fait en état de courir le marathon dans l'immédiat. Elle sourit au commentaire du blondinet. Ça devait être ça oui. « Tâchons déjà d'atteindre l'infirmerie veux-tu ? » répondit-elle d'un air malicieux. Et non, elle n'avait jamais fait de promesse de la sorte mais bon après tout, si ça pouvait l'encourager à ne pas s'effondrer avant d'avoir atteint le repère de Madame Pomfresh, elle pouvait bien faire ce sacrifice ! Enfin, sacrifice, tout est relatif ! Elle aimait juste l'embêter, même si en l'occurrence, les circonstances ne s'y prêtaient pas vraiment.