[THEME] T'es au courant de la dernière ? [Terminé]

Annagovia fronça les sourcils, visiblement en désaccord avec la vision des choses de Roman : elle était convaincue que, lors de sa toute première année à Poudlard, le Choixpeau avait qualifié les Gryffondor de "valeureux épris de justice". Ce qui était plutôt logique, quand on y réfléchissait : après tout, eux qui se targuaient d'être de véritables chevaliers dans l'âme devaient bien avoir cette préoccupation en tête. Certes, la justice était également une valeur défendue par Poufsouffle - et c'était, somme toute, heureux que plusieurs maisons puissent se retrouver sur ce point si important à la bonne marche d'une société - mais, lorsqu'on citait les qualités propres aux disciples d'Helga, il était plus question de loyauté, de tolérance, ou bien encore, de persévérance. Anna préféra toutefois, une fois n'est pas coutume, garder ses réflexions par devers elle plutôt que de se lancer dans une polémique qui ne pouvait qu'être vaine. Elle n'en était pas moins troublée : de mémoire de rouquine, c'était bien la première fois qu'elle se sentait si farouchement en opposition avec Roman Jones.

- Non mais je suis de ton côté, hein, marmonna-t-elle d'un ton gêné face à la fougue dont le jeune garçon faisait preuve, mais il y a tout de même des gens très comme il faut à Gryffondor laisse-moi juste réfléchir deux secondes que je t'en trouve un et puis, même si cette histoire entre les préfètes Maiden et Anabelle n'était pas très claire, c'est un peu exagéré de les accuser de tricherie, ne put-elle s'empêcher de souligner, car elle se refusait, malgré sa profonde déception, à tomber dans des griefs de mauvaise foi...

... Et elle se sentait désolée pour Roman qu'il pût s'y laisser aller. Un tel comportement n'était pas digne de lui : plus l'heure avançait et plus Annagovia était convaincue que quelque chose ne tournait pas rond chez son ami. Difficile à croire, pourtant ! Sa position de préfet, les excellents résultats obtenus à ses BUSE, les retrouvailles avec des camarades de maison perdus de vue pendant les vacances... Tout cela aurait dû contribuer à faire de Roman un garçon heureux, ce soir-là. Seule la hargne paraissait cependant l'animer. Anna, profondément perturbée par ce comportement, coula un oeil prudent en direction de Roman, hésitant visiblement à poser la question qui lui brûlait les lèvres... Réticences bien légitimes, quand on songeait que la jeune fille s'était presque fait tancer vertement quelques minutes auparavant, quand elle avait commis une erreur sur le nombre de postes libres dans l'équipe.

* De deux choses l'une : soit il est définitivement sous l'emprise d'un sortilège de confusion, soit il a appris une nouvelle qui l'a profondément abattu... Peut-être qu'Ophélia sort avec quelqu'un d'autre ? Peut-être qu'elle fréquente un Gryffondor ? * songea-t-elle, dans une tentative dérisoire pour rationaliser la mauvaise humeur du Poufsouffle.

Cette dernière supposition lui semblait cependant particulièrement difficile à mettre sur le tapis : les affaires amoureuses étaient incroyablement complexes, à ses yeux d'élève de treize ans. Elle n'avait aucune expérience en la matière (et n'était pas pressée d'en avoir, tant les choses lui paraissaient synonymes de lendemain qui déchantaient) ce qui rendait toujours particulièrement délicate toute allusion au sujet avec tact et sagesse. Ce fut sans doute la raison pour laquelle opta pour la solution de facilité. Enfin, plus ou moins de facilité. En tout cas, certainement plus facile que d'aborder de front les tourments sentimentaux du Poufsouffle !

- Roman... appela Annagovia d'une ton ferme, pour attirer l'attention de son ami.

Elle tira alors d'un geste vif sa baguette de sa poche et s'exclama, en la pointant sur lui :

- Finite Incantatem !

Parce qu'il fallait mieux en avoir le coeur net...

(612 mots et là, tu es bien ennuyé pour rebondir, hinhinhin !)

TOUT COMPTE
RENTREE

Annagovia semblait vouloir faire dire à Roman ce qu'il n'avait pas dit, et ça l'agaçait un peu. Il n'avait pas dit que tous les Gryffondor étaient pourris jusqu'à la moelle, car pour lui, le plus grand fautifs des Gryffondor, n'était pas un élève de cette maison, à vrai dire. A vrai dire, eux encore pouvaient se féliciter de n'avoir pas été injustes et déloyaux. A vrai dire, Roman avait été déçu par une seule et unique personne, celle qui était jusqu'ici, son professeur préféré.

« Ah non mais eux ils ont pas triché, on les a juste bien aidé. Et qu'on me parle pas de parano, l'histoire d'Anabelle prouve assez de choses, merci bien ! »

Si aujourd'hui Roman était assez "pro-Serpentard" et "contre-Gryffondor" c'est parce qu'il avait encore vu Marie avec son imbécile de copain et que son histoire passagère avec Fredericke Maiden – sa collègue préfète, you-hou - celle qui était sous la protection de la directrice – ne parvenait pas à sortir de sa tête. La jeune fille lui avait en effet donné son premier baiser, il y'avait de celà quelques années, son tout premier et savoir ça rendait Roman complètement fou. Ça l'agaçait au plus haut point de s'être laissé piégé dans les mailles de son ancienne amie, et il se sentait complètement nul. Si seulement c'était Marie qui lui avait donné son premier baiser, il aurait été content, au moins ! Mais non, là, il avait fallut que ce soit la chouchou de la directrice, qui avait fait virer Anabelle de son poste de préfète !

Il avait envie de crier à Annagovia qu'il regrettait comme la pire chose de sa vie d'avoir embrassé Maiden, mais la jeune fille était trop jeune pour comprendre tout ça. Et manifestement, vu la tête qu'elle faisait, elle ne comprennait pas non plus pourquoi Roman semblait si peu décidé à pardonner aux Gryffondor. Elle était bien trop jeune pour tout comprendre, c'était clair !

C'est alors qu'Annagovia sortit sa baguette, et jeta sans attendre un sortilège à Roman. Sans comprendre ce qui lui arrivait et sur le coup de la surprise, de peur qu'Annagovia ne le menace une nouvelle fois de le faire parler en lui jetant un sortilège plus douloureux Roman on t'explique, le Finite, ça fait pas mal, le jeune homme se lança dans des avoeux, alors qu'au final le sort en question ne lui avait fait aucun autre effet qu'un petit picotement dans la joue droite.

« J'ai embrassé une Gryffondor, une préfète de Gryffondor, même, voilà ! Et je suis fou amoureux d'une Serpentard ! Oui, une Serpentard ! Et même qu'elle est pas méchante, que c'est la plus belle fille qui existe sur terre et que je me fiche de ce que penseront les autres ! »

Et comme tout bon petit copain de Serpentard qui se respecte, Roman se devait de détester les Gryffondor, question de principe. Ça vous parait pas logique, ça, à vous ?

Et sans qu'Annagovia comprenne ce qui se passait, Roman se leva, et fila directement dans le dortoir des garçons, manifestement pas prêt à supporter le regard qu'allait lui lancer Annagovia. D'un savoir qu'il avait embrassé une préfète de Gryffondor avait de quoi la dégouter de Roman pendant un moment, mais alors si en plus il était amoureux d'une Serpentard, il était clair qu'elle ne lui pardonnerait jamais cette trahison et que leur amitié était terminé. Roman était hélas bien trop fatigué, sous tension et énervé par sa soirée pour se justifier devant son amie, alors la meilleure défense, encore, c'était la fuite.

[Terminé pour Roman]

Au moment même où Annagovia avait lancé son sortilège, plusieurs solutions s'étaient instantanément présentées à son imagination fertile. Roman pouvait sortir d'une torpeur liée à un enchantement, demander "Où suis-je ?" dans la plus stricte tradition, avant de raconter à Annagovia comment il avait été pris en traître par une bande de Serpentard armés jusqu'au dents entre deux wagons du Poudlard-Express, et d'échafauder un plan pour se venger. Il pouvait également lui lancer un coup d'oeil surpris, voire légèrement blessé, en lui demandant ce qui lui prenait et "Baisse ta baguette avant de crever un oeil à quelqu'un, s'il te plaît !", à moins qu'il ne préfère, galvanisé par sa nouvelle charge de préfet, lui coller une retenue pour avoir fait usage de la magie en-dehors des salles de cours. Elle aurait alors eu beau jeu de rétorquer que, "Sauf ton respect, Roman, le règlement est un brin lacunaire sur ce point, parce qu'il ne fait allusion qu'aux, je cite "couloirs". De là à en déduire que les salles communes font partie des couloirs, il y a un sacré pas à franchir...". Il aurait aussi très bien pu se mettre en colère, et tirer sa propre baguette pour lui lancer un mauvais sort dont elle se souviendrait. Oui, Annagovia avait envisagé bon nombre de dénouements possibles, mais aucun d'entre eux ne s'approchait un tant soit peu seulement de l'explosion qui survint.
Tétanisée sur son fauteuil, Annagovia avait machinalement serré sa baguette, en un mouvement de pure défense, lorsque Roman s'était tourné vers elle. Pourtant, à bien y réfléchir, elle aurait nettement préféré qu'il lui envoie un sort dans la figure, plutôt que de se laisser aller à l'épanchement agressif qui s'ensuivit.

* Co... Co... Comment ? Une préfète de Gryffondor ? Une préf... Attends... Une Serpentard ?! * ne put-elle que répéter stupidement en son for intérieur, sans parvenir pour autant à assimiler ces deux informations, tant elles lui paraissaient saugrenues.

Roman Jones ? Le Poufsouffle par excellence ? Roman Jones, qui se méfiait tant des Lions, embrasser une préfète de Gryffondor ? Et quelles étaient les chances pour que ladite préfète fût Fredericke, contre laquelle ils avaient tant tempêté de conserve, l'année passée ? Pire ! Roman, amoureux d'une Serpentard ? Lui qui, dès son arrivée à Poudlard, n'avait eu de cesse que de la mettre en garde contre les viles vipères ? Roman, alors que l'adorable Ophélia était dans les parages, tomber sous le charme d'une petite gourgandine de Serpentard ? Anna ne pouvait tout bonnement pas l'admettre. Si elle avait été plus au fait des choses du coeur, peut-être se serait-elle montrée moins prompte dans son jugement et plus à même de tendre une oreille conciliante aux explications de son ami, mais, du haut de ses treize ans, elle était incapable de comprendre les tenants et les aboutissants de ces révélations. Tout ce qu'elle savait, c'était qu'une partie de son petit univers bien organisé venait de s'effondrer : que Roman ait pu succomber aux avances (car, dans l'esprit d'Annagovia, il était évident que la fille en question était une sacrée séductrice qui avait fait de la gringue au Poufsouffle) d'une Serpentard lui laissait un étrange sentiment de vide au creux de la poitrine, exactement comme si un fossé infranchissable s'était subitement dressé entre Roman et elle.

- Mais... articula-t-elle, visiblement abasourdie, en adressant un coup d'oeil égaré au jeune garçon.

Elle n'eut toutefois pas le temps d'en dire plus, car, avant même qu'elle n'ait pu trouver les mots pour exprimer l'ampleur de son incrédulité, Roman s'était levé et s'était précipité, en une forme de fuite éperdue, vers son dortoir. Anna esquissa un mouvement, comme si elle était tentée de le suivre, mais ne put se résoudre à se précipiter à sa suite : les quelques élèves encore présents dans la salle commune, la mauvaise impression que ferait son entrée dans le dortoir des garçons alors que quasiment tous les sixième années s'y trouvaient... Non, mieux valait-il ne rien faire. D'ailleurs, que pouvait-elle dire ? Elle n'était pas en droit de demander des explications, et, pour ce qu'elle en savait, elle n'était pas certaine d'avoir très envie d'en entendre. Elle se sentait profondément abattue et avait la désagréable impression qu'elle venait de vieillir d'un coup. Toute l'excitation qu'elle avait éprouvée, à l'idée de retrouver Poudlard, s'était évanouie d'un coup. La rouquine se renfonça dans son fauteuil, l'air sombre, et fixa d'un oeil morne le manteau de la cheminée, sans prêter attention aux discussions de ceux qui l'entouraient. Cette rentrée avait un coup bien plus amer qu'elle ne l'avait prévu.

[FIN ANNA]