"J'ai un rendez-vous !!!"

Le fauteuil était là, devant lui, à lui tendre ses petits accoudoirs d'un air désespéré. De toute évidence, lui aussi se sentait abandonné et avait besoin que quelqu'un pose son petit derrière sur ses coussins.
Neville ne pouvait pas le laisser ainsi en plein désarroi. Obéissant à l'ordre muet du fauteuil rouge, il se laissait tomber dessus, faisant couiner les ressorts.

Il étendit les jambes devant lui et croisa les bras sur le ventre. Puis, il lança un coup d'oeil en coin à Parvati. Elle avait l'air un tantinet déprimé. En tout cas, bien moin dynamique que de coutume. D'ailleurs, où était Lavande ? Il était pourtant de notoriété publique que les deux filles ne pouvaient rien faire l'une sans l'autre.

- Tu vas bien ? demanda-t-il avec un soupçon d'inquiétude dans la voix, tu as l'air soucieuse.

Ses amis ? Lesquels ? Neville n'avait jamais considéré Ron, Harry et Hermione comme ses amis. En fait, si. Lui les voyait comme des amis mais il doutait fort que les trois gryffondors aient seulement envie d'une amitié avec la créature stupide qu'il était. Son amitié ne leurs était d'aucune utilité. S'ils étaient gentils avec lui - et Neville les en remerciait -c'était sans doute parce qu'ils avaient un peu pitié. Cette pensée était déprimante.
Il secoua lentement la tête pour la chasser et répondit avec un petit sourire tristounet :

- Non, j'étais en train de lire... Et de toute façon, je n'ai pas vraiment d'amis.

Mal à l'aise, il se mit à triturer nerveusement le bouton du col de sa chemise d'uniforme.

Parvati se dirigea elle aussi vers un fauteuil rouge, elle s'assit et comptempla la salle commune, elle était vide de chez vide. Parvati commença à s'ennuyer, mais si elle irait dehors, ça serait pareil, alors à quoi ça servait ?

<< Oui, oui, pourquoi cette question ?! >>

Elle se força à sourire (ce fût plutôt réussi), elle se leva et marcha dans toute la pièce, que pouvait-elle faire ? Elle avait finit des devoirs, ses livres elle les lisait le soir, ses amis ... elle en avait pas.

<< Comment ça ?! Hermione, Ron et Harry ne sont pas tes amis ? Au moins tu en as trois, moi j'en ai une qui m'a abandonnée pour un garçon ! >>

Elle essaya de retenir sa colère, elle en avait marre. Pourquoi le Choipeaux l'avait répartie dans cette maison, elle aurait pus aller à Serpentard, avec son caractère. Et puis maintenant, elle s'en fichait, au début elle craignait d'être à Serpentard, maintenant elle aurait bien voulu ...

Il était difficile d'évoquer la question d'une possible amitié avec Ron devant l'intéressé aussi Neville éluda-t-il avec sagesse la première partie de la réponse de la fillette, se contentant d'un haussement d'épaules qui signifiait "Je n'en sais trop rien".
D'ailleurs, Neville, on l'aura compris, n'aimait pas parler de lui. Il partait du principe fondateur que sa vie était inintéressante au possible mais qu'écouter les autres parler d'eux était, par contre, passionnant. D'abord parce que ça les soulageait, ensuite parce que ça permettait de mieux les connaître, enfin parce qu'il avait alors le sentiment d'être, pour quelques minutes, leur ami.

Le jeune Neville Londubat avait, notons-le, onze ans. L'amour n'était pour lui qu'une notion fort abstraite qui s'appliquait aux adultes avant tout. L'idée que des personnes de son âge puissent se retrouver prises dans les méandres de la passion était des plus cocasses.
Durant toute sa primaire, il avait examiné d'un oeil critique et sceptique, ces "fiançailles" entre filles et garçons de son âge, fiançailles qui se concluaient, non pas par l'échande des dots mais par l'échange de billes, ce qui, quand on y pense, peut aussi apparaître comme une dot.

Une fillette du nom de Rosemary lui avait un jour demandé avec une candeur toute naturelle si'il voulait bien devenir son "amoureux". Neville avait répondu "non", parfaitement interloqué. Il avait alors mené une grande réflexion (du niveau d'un enfant de 9 ans, en fait), sur l'amour et ses conséquences. la conclusion en était encore plus que sybilline, même pour lui. D'ailleurs, il s'était rapidement tourné vers autre chose, l'apprentissage en urgence de sa leçon de géographie en était, à l'époque, une.

Il lança un coup d'oeil rapide à Ron et sourit :

- Salut Ron, toi non plus tu n'es pas dehors ?
Question purement rhétorique qui n'attendait même pas de réponse aussi poursuivit-il avec un naturel désarmant :

- Parvati se sent un peu seule, à part ça, rien de nouveau. Tu sais Parvati, ce n'est pas parce que Lavande est avec quelqu'un d'autre que tu ne restes pas sa meilleure amie. Si elle est tellement obnubilée avec... euh... ça en ce moment, c'est parce que c'est tout nouveau pour elle, c'est tout.

Toute la simplette logique Nevilienne était dans ces quelques mots, il n'y avait rien à y rajouter.

Parvati vu Ron arriver, il les salua, enfin on pourrait dire les resalua, oui, ce matin Ron, Lavande, Ginny, Parvati, Neville avait déjeuner ensemble. Neville lui parla d'elle.

<< Salut ! >>

Elle regarda le jeune Neville, qui était entrain de lui expliquer quelque chose ...

<< Merci de me remonter le moral, à moins que tu n'essaye que j'arrête de me plaindre. >>

La jeune Griffondor sourit et regarda par la fenêtre, il faisait toujours aussi beau, les oiseaux volaient, les élèves parlaient, jouaient, révisaient ect... Le ciel était bleu, les nuages était partient, les arbres était vert, l'herbe verte ... Dehors ça ne devait pas être calme. À l'inverse des salles communes qui devait être toutes vides, ou presque ... En tout cas, celle des Griffondor était presque vide.

Neville haussa un sourcil déconcerté en entendant la réponse de Parvati. la rembarrer ? Quelle drôle d'idée ! La délicatesse des Londubat ne le permettrait jamais ! D'ailleurs, lorsque quelqu'un l'ennuyait, ce qui était plus que rare étant donné qu'il considérait qu'on lui faisait une fleur en acceptant de lui parlait, lorsque quelqu'un l'ennuyait, dond, disais-je, le jeune garçon s'endormait. Il n'avait absolument aucun pouvoir sur ses paupières, fait inquiétant puisqu'aux dernières nouvelles, elles faisaient partie intégrante de son corps.

Oh bon sang ! Et si son corps s'était converti au bergsonisme sans l'avoir prévenu ? Une honte, un scandale, une calamité... Quoique non en fait. Neville ignorait tout - le bienheureux ! - de Bergson et de ses périgrinations philosophiques (non ne sommes que durée, mes chers petits, retenez bien cela ! Tout le reste n'est qu'illusion, la stabilité n'existe pas... Et d'ailleurs, même le morceau de sucre expérimente la durée, n'est-ce pas fabuleux ?).

Avec la franchise qui le caractérisait, Neville, levant deux grands yeux candidement écarquillés vers Parvati répondit avec sympathie :

- Non, je suis très sincère, je t'assure.

Cette question étant réglée, et puisque ses connaissances sentimentales étaient limitées, le petit Londubat se tourna vers Ron et proposa d'une voix timide :

- Je ne suis pas très doué mais je veux bien essayer de jouer... Enfin, si tu m'acceptes.

"Tolérance, tolérance !" aurait hurlé Forster. Nous l'en remercions chaleureusement. Toutefois, Forster n'était pas aimé de tous et d'ailleurs, son nom était aussi inconnu à l'encéphale de Neville que celui de Bergson ou de la bataille de Crécy (qui lui aurait pourtant permis de développer son chauvinisme latent puisque la victoire fut anglaise), preuve irréfutable que le leçon d'histoire sur la guerre de Cent ans, leçon rondement menée par les soins de Mrs Weaver, vieille institutrice détestée de ses élèves, n'avait pas porté ses fruits. La pauvre Weaver s'en arracherait certainement les cheveux si elle le savait, elle qui considérait la culture historique comme la base nécessaire au bon développement de l'être.